#C.I.A.

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00:00 Pourquoi la CIA commet des crimes toutes les décennies ?
00:04 Ben c'est pas vraiment une question journalistique, en tout cas c'est pas comme ça que je voudrais la présenter.
00:08 Je voudrais la présenter comme une question de société, comme une question politique.
00:11 Vous savez après tout Machiavel, la fin justifie les moyens.
00:14 En quoi la guerre froide devait justifier toutes les exactions que la CIA a commises.
00:18 Mais surtout en réalité, comment la CIA permet à toujours se mettre du bon côté de l'histoire
00:23 en ayant un contrôle sur les médias ?
00:24 Par exemple l'opération Mockingbird qui a révélé, qui est déclassifiée, qui est officielle,
00:29 qui devrait être enseignée dans tous les livres d'histoire et qui démontre qu'il y a 40 ans déjà,
00:34 la CIA avait infiltré des salles de rédaction, avait coopté les médias pour se mettre du bon côté de l'histoire.
00:41 Et que la CIA d'ailleurs avait renforcé ce fameux terme de "complotiste".
00:46 "Complotist conspiracy theory" qui existait avant certes,
00:49 mais il est devenu à la mode après l'assassinat de Kennedy pour essayer de discréditer toute personne
00:54 qui aurait osé envisager que la CIA ait pu prendre part à l'assassinat de ce si gênant Kennedy.
01:00 Je rappelle qu'aujourd'hui Robert Kennedy, son neveu, affirme très officiellement
01:04 que selon lui le suspect numéro un dans l'assassinat de Kennedy est la CIA.
01:08 Et bien ce terme "théorie du complot", "conspiracy theory", est aussi apparu, est devenu à la mode,
01:14 il existait avant encore une fois, mais est devenu à la mode à cette période.
01:17 Donc pourquoi on n'enseigne pas dans les livres d'histoire,
01:19 face à toutes ces officines plus ou moins controversées, plus ou moins sulfureuses,
01:23 qui vous parlent de stigmatiser les complotistes et qui pratiquent donc ce que le philosophe français Alexi Hoppe
01:29 a appelé la "complot foutaise", le complot sophisme,
01:32 à savoir traiter quelqu'un de complotiste quand on n'a pas d'argument.
01:34 Et puis, rappelons toutes ces théories du complot encore une fois qui se sont avérées être authentiques.
01:39 Dernièrement, je rappelle que vous avez encore une minorité de gens
01:42 qui pensent que les Russes ont fait péter leur propre gazoduc dans l'affaire Nord Stream.
01:46 Donc comment la CIA fait pour être toujours du bon côté de l'histoire ?
01:48 Elle infiltre les salles de rédaction, on le sait depuis l'opération Mockingbird,
01:52 et il n'y a pas de raison de penser que depuis cette opération, les choses aient changé.
01:57 Bien au contraire.
01:58 On l'a vu dans la promotion de la guerre en Irak, qui d'ailleurs avait été promue par les mêmes personnes.
02:03 À l'époque de la guerre en Irak, vous aviez une officine très sale qui s'appelait Campus Watch,
02:07 qui avait été créée par un certain Daniel Pipes,
02:10 et qui stigmatisait tout universitaire qui était contre la guerre en Irak en 2003.
02:14 Aussi simple que ça.
02:15 Campus Watch, C-Watch, ça vous rappellera peut-être quelque chose.
02:19 C'est normal, c'est la même procédure, le terrorisme intellectuel à chaque fois.
02:23 Alors la CIA maintenant, est-ce que la fin peut justifier les moyens ?
02:26 Toutes les décennies, vous avez eu des exactions de la CIA. Toutes.
02:30 Il n'y a pas eu une décennie sans que vous ayez des exactions de la CIA.
02:33 Soit elles étaient révélées par Seymour Hersh, soit elles étaient révélées par d'autres personnes,
02:38 comme les Pentagon Papers par exemple, soit elles étaient révélées par Julian Assange, par Snowden, que sais-je.
02:43 Mais il ne s'est pas passé, depuis que la CIA existe, une décennie, sans qu'elle ait commis des exactions et des crimes.
02:50 Alors pourquoi ?
02:50 Bah c'est structurel, on va essayer d'être structuraliste, je suis structuraliste,
02:54 j'essaie de critiquer les structures plutôt que les gens, même si c'est dur.
02:57 Et quand on est structuraliste, on essaie d'analyser le fonctionnement d'une organisation comme celle-là.
03:00 La CIA fonctionne dans la clandestinité. On doit bien comprendre cela.
03:04 Il y a d'autres fonctions, mais certaines sont plus légitimes que d'autres.
03:08 Une est de gérer les guerres secrètes.
03:10 Une autre est de disséminer la propagande, d'influencer les esprits des gens.
03:17 Et c'est une grande fonction de la CIA.
03:20 C'est-à-dire que vous aviez comme slogan, pour le SDEC et ensuite la DGSE,
03:24 "Partout où nécessité fait loi".
03:26 Ça signifie que vous allez commettre des choses illégales, hein.
03:28 "Nécessité fait loi", ça veut dire "J'ai fait quelque chose qui est hors la loi, mais c'était nécessaire".
03:33 Bah la CIA aurait très bien pu avoir ce slogan.
03:36 D'ailleurs, de toute façon, le SDEC et la DGSE...
03:38 Alors le SDEC, c'était marrant parce que c'était le Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage.
03:43 On se documente, ce sont les autres qui espionnent.
03:45 L'ancienne espion d'ailleurs, pardon, officier de renseignement Alain Chouet,
03:49 a très bien expliqué ça dans son excellent livre, petit ouvrage que je vous recommande, "Sagesse de l'espion".
03:53 Ce sont les autres qui espionnent, nous on se documente.
03:56 Mais bon, enlevons tout cet aspect diplomatique et tout cet aspect propagande ou "élément de logage",
04:00 comme on doit le dire aujourd'hui, et essayons d'être plus pragmatiques.
04:03 La CIA opère dans la clandestinité, ses agents à l'étranger opèrent en dehors des lois.
04:08 Bah donc, ce sont des criminels.
04:09 En tout cas, ils peuvent agir de façon criminelle.
04:11 Et ils y sont même très fortement encouragés.
04:13 Alors à partir de là, vous avez la nécessité aussi, nécessité fait loi,
04:16 de vous rapprocher des organisations criminelles.
04:18 Pour infiltrer un pays, c'est très bien de vous rapprocher des organisations criminelles.
04:22 L'OSS, l'Office of Strategic Service, a utilisé le Quiluciano et la mafia italo-américaine
04:27 pour débarquer en Sicile dans l'opération Husky.
04:29 C'est une des raisons pour lesquelles le général Patton,
04:32 qui était pourtant un excellent général par ailleurs, a progressé aussi vite en Sicile.
04:35 Ensuite, vous avez bien sûr l'OSS qui a placé des mafieux à la tête de l'AMGOT,
04:41 ou dans des points clés des centres névralgiques de l'AMGOT,
04:44 l'American Governance Occupied Territories,
04:46 et vous avez même eu des mafieux qui sont devenus maires.
04:49 Je pense à des noms comme Calogero Vizzini ou bien Vito Genovese.
04:53 Et ça, évidemment, c'est très intéressant, parce que quand vous voulez infiltrer un pays,
04:57 passer par son crime organisé, c'est une excellente façon de le faire.
05:00 Du coup, certains pays sont obligés de contrôler leur crime organisé.
05:03 Ça a été le cas de la Russie, encore aujourd'hui.
05:05 Vladimir Poutine contrôle l'essentiel en sous-main du crime organisé russe
05:09 pour éviter toute infiltration.
05:10 Mais le Parti communiste chinois contrôle aussi l'essentiel des triades
05:14 pour éviter toute infiltration.
05:15 C'est bien pour ça que quand vous avez des révolutions colorées à Hong Kong,
05:19 eh bien la CIA ne peut pas passer par les triades,
05:22 elle passe par des ONG,
05:24 et par contre, les triades, elles, vont réprimer massivement ces révolutions colorées,
05:28 parce que ces triades sont contrôlées en sous-main par les services chinois.
05:31 Les triades, d'abord, elles pensent à faire leurs affaires,
05:34 et ensuite, quelques fois, elles ont montré une certaine indépendance.
05:38 Je parlais de l'affaire de Tiananmen.
05:41 À l'époque, il faut savoir que plusieurs triades ont participé
05:45 à des opérations d'exfiltration de dissidents vers l'Occident
05:50 en liaison avec la CIA ou les services occidentaux,
05:55 et il y aurait à peu près 400 leaders de l'opposition
05:57 qui sont retrouvés en Occident grâce aux triades.
06:00 En France, on a eu ça, bien entendu, aussi.
06:02 Charles Pasquoie, il était de notoriété publique qu'avec Achille Peretti,
06:07 maire de Neuilly, il avait une main de fer sur le milieu.
06:10 Et pour parler de main de fer, d'ailleurs, on aurait pu parler de Gaston Defer,
06:13 qui lui représentait le contrôle du milieu, mais plutôt du Parti socialiste.
06:16 Et ça, on l'a en Italie aussi, où vous avez un contrôle politique du milieu,
06:21 parfois via l'OTAN, parfois via la CIA, et parfois via d'autres réseaux
06:25 comme la légendaire et désastreuse Loge P2, fondée par Licio Gelli, notamment,
06:30 lequel Licio Gelli a été caricaturé dans Le Parrain, Le Parrain 3,
06:34 où vous avez ce personnage qui s'appelle, je crois, d'ailleurs, Licio.
06:37 En référence donc à Licio Gelli, certains ont dit à Giulio Andreotti.
06:41 Giulio Andreotti, c'est très intéressant parce qu'il avait plein de surnoms,
06:45 le Pape noir Belzebuth, la première lettre de l'alphabet, etc.
06:47 Le divin Jules, il dit "ivo".
06:49 Et d'ailleurs, il y a un très bon film qui parle de lui,
06:51 mais sans jamais citer la CIA, étrangement.
06:53 Eh bien, il dit "ivo" quand sa carrière s'est effondrée,
06:55 et Daniel Ganser en parle très bien, quand il parle de Gladio,
06:58 les réseaux secrets de la CIA, les réseaux "stay behind".
07:01 Donc, qu'est-ce que c'est qu'un réseau "stay behind",
07:02 c'est un réseau de résistance au cas où un pays deviendrait,
07:05 en l'occurrence, communiste.
07:06 Pendant la guerre froide, vous aviez des réseaux de "stay behind"
07:09 en Turquie, en Grèce, en Italie, et même en France.
07:12 Et ces réseaux de "stay behind"...
07:14 Alors, vous avez un film qui en parle très bien,
07:15 c'est "Mort d'un pourri" avec Alain Delon et Klaus Kinski.
07:18 Et ces réseaux devaient rester dans les pays qui deviendraient communistes
07:22 à la faveur d'élections.
07:23 Eh oui, Bologne, la Rouge, on ne l'appelait pas Rouge à cause des briques.
07:26 Et ces réseaux de "stay behind" avaient d'anciens fascistes,
07:29 comme notamment Delle Lechiaie, qui était vraiment un personnage abominable,
07:33 et puis d'autres réseaux.
07:35 Et Daniel Ganser en a très bien parlé.
07:36 Eh bien Giulio Andreotti a décidé de tout balancer,
07:39 parce qu'il était vraiment chrétien, il était vraiment catholique.
07:41 Et à partir de 1991, il a décidé de balancer ses réseaux,
07:44 et la CIA l'a abattue.
07:45 Alors quand la CIA vous abat, il faut se rappeler,
07:48 c'est pas physiquement autant que possible.
07:50 Si elle peut vous abattre autrement, par caractère assassination,
07:52 c'est beaucoup plus efficace.
07:54 Donc, bah typiquement, vous allez voir des dossiers qui vont ressortir sur vous.
07:58 Et ça, ça vous permet d'avoir un déni plausible.
08:01 "Plausible deniability".
08:02 Si une agence de renseignement a bien fait son travail,
08:05 et Dieu sait que la CIA sait bien faire son travail,
08:07 eh bien, vous devez être quasiment incapable
08:10 de connecter sa culpabilité au dossier.
08:13 Donc, Giulio Andreotti s'est retrouvé condamné de partout,
08:15 avec tout un tas de dossiers qui sont apparus dans les mains de juges
08:18 qui voulaient faire carrière,
08:19 mais lui-même a déclaré que c'était, selon lui,
08:21 une basse vengeance de la CIA, il l'a dit.
08:23 Vous avez l'affaire Clearstream, bien sûr,
08:25 qui très certainement était une opération de la CIA
08:27 contre Dominique de Villepin, pour le punir,
08:29 c'est ce qu'avait utilisé Condolizza Rice à l'époque, le terme "punir",
08:32 pour le punir de s'être opposé à la guerre en Irak de 2003,
08:38 dont on sait qu'elle était infiniment lucrative.
08:40 Bon, pas pour le contribuable américain,
08:42 mais ça, c'est une autre histoire.
08:43 Donc, la CIA, bien sûr, doit s'entourer et se rapprocher du crime organisé.
08:47 On sait, avec l'opération Barry Seal, notamment,
08:49 les liens que la CIA avait avec les trafiquants de drogue.
08:52 On a eu l'affaire Iran-Contras, aussi,
08:55 qui a été un énorme scandale de la CIA, j'insiste,
08:58 depuis qu'elle existe, la CIA commet des exactions toutes les décennies.
09:01 Et ce qui est très marrant, c'est que, systématiquement,
09:04 toutes les décennies, elle redevient du bon côté de l'histoire,
09:06 dit "oui, certes, elle a commis des exactions en 1950, en 1960,
09:09 en 1970, en 1980, en 1990, en 2000, en 2010,
09:13 mais maintenant, c'est bon, dans les années 2001,
09:15 la CIA ne commettra pas d'exaction."
09:18 Alors, les exactions des années 50,
09:20 ben, on a le renversement de Mossadegh, typiquement,
09:23 mais pas seulement, on a d'autres opérations en Amérique du Sud, etc.
09:28 Mais le renversement de Mossadegh, bon, ben, c'est une exaction.
09:30 Années 50, années 60, ben, on a eu l'opération Midnight Climax,
09:34 dans laquelle, officielle, tout ce que je vous raconte est officiel et déclassifié,
09:37 l'opération Midnight Climax, dans laquelle la CIA a simplement drogué des gens au LSD à leur insu.
09:42 Ça faisait partie du programme plus grand qui a duré des années 60 aux années 70,
09:46 20 ans, en fait, je crois même que c'est 50 à 70, 20 ans,
09:49 l'opération MK Ultra, MK pour "Mind Control" avec un K,
09:53 dans laquelle on a pratiqué la coercition,
09:56 fait de droguer des gens aussi abusivement,
09:58 et en fait, on a dénié les droits humains les plus élémentaires à des prisonniers,
10:02 tout était illégal dans l'opération MK Ultra,
10:04 ben, pourtant, elle a eu lieu,
10:06 et il y a eu très peu, voire aucune inculpation.
10:08 Bon, ben, ça, c'était les exactions des années 60, 70.
10:10 On aurait pu parler du programme Phoenix aussi,
10:12 programme Phoenix d'assassinat de masse au Vietnam.
10:16 Bon, ça, c'est des exactions des années 60.
10:18 On aurait pu parler de l'opération Condor,
10:20 ça, c'est des exactions des années 70,
10:22 dans lesquelles, d'ailleurs, la CIA a récupéré d'anciens tortionnaires de l'Algérie
10:26 pour créer la fameuse École des Amériques,
10:28 qui a contribué à former des tortionnaires en Argentine et au Chili.
10:31 Le soutien à Pinochet,
10:33 et le renversement de Salvador Allende,
10:35 en passant par le syndicat des camionneurs.
10:36 Lequel syndicat des camionneurs était un modèle de fonctionnement mafieux,
10:40 puisqu'on avait déjà les liens de la CIA avec les Teamsters,
10:43 qui était donc le syndicat des camionneurs qui a financé les casinos de Las Vegas.
10:47 Et oui, tout ça est pareil déclassifié, documenté.
10:50 Puis on a l'assassinat, bien sûr, de Jimmy Hoffa,
10:52 qui n'est toujours pas officiellement résolu aujourd'hui,
10:54 et qui est attribué à la mafia.
10:55 Mais on sait que la CIA avait des liens avec la mafia,
10:58 notamment dans l'opération de la baie des cochons,
11:00 pas seulement avec le Quiluciano, l'OSS du temps de l'OSS,
11:03 et le débarquement en Sicile.
11:05 Eh bien l'opération de la baie des cochons, la mafia,
11:07 est aussi supposée avoir pris part à l'assassinat de Kennedy.
11:10 Ça commence à faire beaucoup, là, tout de même.
11:12 Encore une fois, des choses déclassifiées.
11:14 Alors ça, c'est les années 70.
11:15 Années 80, on a Iran-Contras, et puis l'affaire Barry Seal.
11:18 Années 90-2000, on a les programmes de torture
11:21 et les Extraordinary Renditions,
11:23 qui ont été signalés notamment sous Dick Cheney,
11:25 les prisons secrètes de la CIA,
11:27 et puis donc maintenant, on a les frappes de drones
11:29 qui ont été révélées par Julian Assange.
11:31 Donc ça commence à faire beaucoup.
11:33 Mais encore une fois, pourquoi ?
11:34 Bah c'est structurel.
11:35 Je vais pas exonérer la CIA et les agences de renseignement
11:37 qui font la même chose, que ce soit le SVR côté russe,
11:40 ou les services chinois, que sais-je.
11:41 C'est structurel.
11:42 Partout où nécessité fait loi,
11:44 ça signifie que vous allez vous affranchir de la loi.
11:46 Ça signifie que vous allez devoir être proche du crime organisé,
11:49 parce que pour infiltrer un pays,
11:50 il sera très pratique, dans la clandestinité,
11:53 d'être proche de son crime organisé.
11:54 Du coup, ça signifie aussi que les États
11:57 qui veulent se prémunir d'une ingérence étrangère
11:59 doivent contrôler leur crime organisé.
12:01 Ça vous paraît complètement cynique, ça l'est,
12:04 mais c'est malheureusement machiavèle dans ces œuvres,
12:06 à savoir, si vous ne contrôlez pas votre crime organisé,
12:09 comme du temps de Defer et de Pascua,
12:11 eh bien c'est l'étranger qui va l'utiliser
12:13 comme point d'infiltration.
12:14 Et c'est pour ça que le Parti communiste chinois
12:16 a un contrôle Defer sur les triades,
12:18 et c'est pour ça que Poutine et les services russes
12:21 tiennent d'une main de fer la mafia russe également,
12:24 autant que possible.
12:25 Bien sûr, les oligarques ont été renversés par le MI6,
12:28 on a eu certains cas d'oligarques qui sont morts
12:30 dans des circonstances très troubles à Londres,
12:32 et aussi bien sûr aux États-Unis.
12:34 Mais d'une façon générale,
12:35 l'aspect structurel du fonctionnement
12:37 des services de renseignement,
12:38 le fait qu'ils sont naturellement clandestins,
12:41 le fait que leurs opérations sont criminelles,
12:44 sont illégales, nécessite leur pénétration du milieu.
12:48 Et on l'a vu dans le cas de Giulio Andreotti,
12:51 on l'a vu aussi dans le cas de Berlusconi,
12:52 qui là aussi du jour au lendemain,
12:53 s'est vu reprocher tout un tas de choses
12:55 qu'on lui pardonnait quand il était pro-américain,
12:57 quand il était pour l'invasion en Irak par exemple,
13:00 pas de problème, ses dossiers ne sortaient pas.
13:02 Quand il est devenu contre l'opération en Libye,
13:05 du jour au lendemain, tous les dossiers sont sortis.
13:07 Et ça, encore une fois, c'est le déni plausible.
13:10 Alors voilà, la CIA, un sujet de société vraiment.
13:12 Parce qu'après tout, le KGB faisait pas mieux,
13:14 et le SVR aujourd'hui ne fait pas mieux,
13:16 même si le SVR est beaucoup moins puissant que le KGB.
13:18 Le KGB était de loin le meilleur service de renseignement
13:21 au monde à l'époque.
13:22 Et parlez déjà de ces méthodes de subversion dans les campus,
13:25 de démoralisation,
13:27 des méthodes vraiment pour faire en sorte que l'ennemi,
13:29 après 20 ans, n'ait plus envie de se battre
13:32 et qu'il puisse même gober toutes les conneries
13:34 qu'on pourrait lui faire gober.
13:36 Ça, le KGB était extrêmement fort là-dedans.
13:38 Alors oui, en face, la CIA s'est dit "attendez,
13:40 le KGB, qui est issu du NKVD,
13:42 qui est issu de la Tchéka,
13:44 la Tchéka, c'était des barges,
13:46 mais des méga barges,
13:47 ils vous...
13:48 J'ose même pas le dire, ils vous dépossaient.
13:51 C'était médiéval.
13:52 On pourrait rigoler en mode,
13:54 vraiment, Pulp Fiction,
13:55 "je vais te la jouer à la flamme bien moyenâgeuse",
13:59 comme dit Marcellus Wallace dans Pulp Fiction,
14:01 mais eux, ils faisaient ça pour de vrai.
14:02 Le NKVD, la Tchéka de Trotsky,
14:04 c'était des vrais dingues.
14:07 Ils vous faisaient disparaître, ils vous torturaient.
14:09 Et d'ailleurs, ce qu'avait dit Khrouchev
14:10 quand il y a eu un coup d'État contre lui,
14:12 par Brezhnev,
14:13 Khrouchev avait dit "mais,
14:14 vous imaginez,
14:15 avant, du temps de Staline..."
14:17 Khrouchev avait été critiqué par Brezhnev,
14:18 il avait dit, on lui avait lu
14:19 une longue liste d'accusations, etc.
14:22 Il avait dit "stop,
14:23 aujourd'hui, vous me jetez de la merde dessus,
14:25 mais imaginez si vous aviez fait ça du temps de Staline,
14:27 même pas une flaque d'eau
14:30 ne se serait trouvée là où vous étiez."
14:32 C'est-à-dire que Khrouchev savait très bien
14:34 comment ça se passait.
14:34 Même pas une flaque d'eau,
14:35 c'est même pas une tâche humide.
14:37 Je crois que le terme qu'il a utilisé,
14:38 c'est une tâche humide.
14:39 Là où vous vous trouvez,
14:40 même pas une tâche humide n'aurait subsisté
14:43 si le NKVD, la Tchéka, le KGB,
14:45 ensuite, s'étaient occupés de vous.
14:47 Donc oui, c'est ça le problème.
14:49 Mais on pourrait conclure avec cette
14:51 magnifique, légendaire
14:53 citation de Martin Luther King,
14:55 qui, lui, a été persécuté
14:56 davantage par le FBI que la CIA.
14:58 Bien, l'obscurité ne peut pas chasser l'obscurité.
15:01 La haine ne peut pas chasser la haine.
15:03 Et certes, ce n'est pas parce que
15:04 la Tchéka et le KGB étaient abominables
15:07 qu'on peut justifier les atrocités de la CIA.
15:09 En société, on doit se poser cette question
15:12 de jusqu'où les services ont le droit d'aller
15:14 et pourquoi donc la CIA peut, d'une part,
15:17 commettre des crimes toutes les décennies
15:19 et d'autre part, en toute impunité,
15:22 se retrouver chaque décennie
15:23 du bon côté des médias.
15:25 Sous-titrage Société Radio-Canada
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