Suspension de Jeune Afrique au Burkina Faso, arrestation de Stanis Bujakera en RDC… Le directeur de publication de JA était l’invité d’Africa Radio.
« Au Burkina Faso, le capitaine Traoré veut créer une zone de non information, où seule la propagande est autorisée. D’un point de vue moral, éthique, d’État de droit et même de logique, c’est évidemment aberrant », a notamment déclaré Marwane Ben Yahmed lors de cet entretien.
Le directeur de la publication de JA est également revenu sur la situation de Stanis Bujakera, correspondant de Jeune Afrique en RDC détenu depuis le 11 septembre pour des délits de presse.
Pour en savoir plus : https://www.jeuneafrique.com/
« Au Burkina Faso, le capitaine Traoré veut créer une zone de non information, où seule la propagande est autorisée. D’un point de vue moral, éthique, d’État de droit et même de logique, c’est évidemment aberrant », a notamment déclaré Marwane Ben Yahmed lors de cet entretien.
Le directeur de la publication de JA est également revenu sur la situation de Stanis Bujakera, correspondant de Jeune Afrique en RDC détenu depuis le 11 septembre pour des délits de presse.
Pour en savoir plus : https://www.jeuneafrique.com/
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NewsTranscription
00:00 Bonjour Marwan Benyamed, vous êtes directeur de publication du magazine Jeune Afrique.
00:04 Je voudrais aborder avec vous la suspension, jusqu'à nouvel ordre,
00:07 de tous les supports de Jeune Afrique au Burkina Faso,
00:09 qui a été décrété en début de semaine par les autorités de transition au Burkina Bé,
00:14 à la suite d'une publication de votre site faisant état de tension au sein de l'armée burkina bée.
00:20 Quelle est votre réaction face à cette suspension ?
00:22 Nous sommes évidemment d'une part pas surpris parce qu'il y avait une ligne directrice depuis l'arrivée de cette junte au pouvoir
00:33 qui a déjà suspendu avant nous RFI, France 24, LCI,
00:39 qui a expulsé des correspondants internationaux,
00:43 qui a menacé des journalistes locaux burkinabés, y compris d'ailleurs notre correspondant localement.
00:52 Il y a eu aussi, donc là, bon, on parle de médias internationaux, mais il y a aussi la radio locale,
01:00 Radio Omega, qui est la radio la plus écoutée du pays, qui a été également suspendue.
01:05 Donc vous dire qu'on n'est surpris, pas vraiment,
01:09 qu'on s'indigne et qu'on a du mal à comprendre ce type de censure qui date d'un métrage à l'époque des parties uniques dans les années 60 et 70,
01:20 à l'heure d'Internet, la propagation de l'information et du besoin qu'ont les burkinabés d'être éclairés.
01:27 Donc voilà, c'est une manière pour le capitaine Traoré de créer une sorte de zone de non-information
01:35 où seule la propagande est autorisée, mais c'est évidemment d'un point de vue moral, éthique, d'état de droit,
01:44 et puis même en fait de logique, c'est totalement aberrant.
01:48 C'est évident qu'il y a une tentation, je dirais, liberticide un peu dans ces pays qui ont subi des putschs
01:58 ou les nouvelles autorités qui n'ont pas l'air d'être particulièrement sereines, parce que vous avez parlé de la raison de la suspension,
02:07 c'est deux articles d'ailleurs qui font état de tension au sein de l'armée, de grogne dans les casernes,
02:14 avec des divergences d'opinion par rapport au capitaine Traoré.
02:19 On nous a expliqué que c'était des articles mensongers, et puis il se révèle que cette nuit à Ouagail,
02:25 il y avait des rassemblements à l'appel des partisans de la Junte qui affirmaient que des soldats voulaient renverser le pouvoir du capitaine Traoré,
02:34 et donc qui appelaient à le soutenir, donc c'est que visiblement nos articles n'étaient pas si mensongers que ça.
02:39 Donc oui, ça fait un peu inquiétant et on s'attend peut-être à d'autres mesures au Mali, au Burkina, au Niger certainement.
02:49 Bon déjà, Genafrique a pris une position ferme de condamnation de ces pouches-là depuis longtemps,
02:57 le Niger étant le plus récent dans la zone, et pour des raisons encore moins "valables" s'il peut y en avoir qu'au Mali et au Burkina,
03:07 qui est dans des situations plus compliquées.
03:09 Donc oui, hélas, plus rien ne nous étonne dans ces cas-là.
03:15 Il y a un durcissement qui est très net en ce moment, il y a d'autres pays qui sont concernés,
03:20 la RDC à l'approche de l'élection présidentielle aussi, peut-être qu'on en reparlera.
03:24 On verra.
03:25 Il y a un cas un petit peu à part qui est le Gabon, il y a aussi eu un coup d'État, mais il n'y a pas ces mesures-là,
03:31 il n'y a pas de, comment dirais-je, d'atteinte à la liberté d'informer, à la liberté de s'exprimer, en tout cas pour l'instant.
03:39 Ce qui m'inquiète plus, en fait, au-delà de nous, parce que nous, on est un média panafricain, on couvre beaucoup de ris,
03:45 ce qui m'inquiète, c'est pour les journalistes burkinabés eux-mêmes, qui n'ont pas d'autre solution que de se taire,
03:51 qui ont peur, qui ont peur pour leur famille, qui ont peur pour leur emploi.
03:56 – Je voudrais également aborder avec vous l'arrestation du correspondant de Jeune Afrique,
04:01 Stanis Boujakéra Atiamala, qui est intervenu il y a quasiment trois semaines maintenant.
04:06 Quelles nouvelles vous avez de votre correspondant aujourd'hui ?
04:10 – Là aussi c'est inquiétant, Stanis a été arrêté le 11 septembre à l'aéroport de Kinshasa,
04:18 il se rendait à Lubumbashi sans explication, incarcéré, dans l'impossibilité de joindre qui que ce soit,
04:26 ni nous, ni un avocat, pendant 48 heures.
04:30 Après, il nous a expliqué qu'il était accusé de répandre de faux bruits.
04:36 Je ne sais pas ce que ça veut dire, ce n'est même pas de la diffamation,
04:40 c'est une propagation de faux bruits, donc c'est pas un nouveau motif.
04:44 Il a été polé par nous, par ses employeurs, Reuters, Actualité.cd,
04:50 qui est l'antidélectoral sur place, RDC, par les États-Unis,
04:56 par la nationalité américaine, par RSA, Reportération Frontière, enfin bref, tout le monde.
05:01 Rien n'y fait, d'une part, on a demandé sa libération provisoire,
05:08 qu'il soit au moins remis en liberté le temps qu'il y ait un procès pour qu'il puisse s'expliquer,
05:12 mais il n'y a pas de raison de le maintenir incarcéré trois semaines pour une simple histoire de nier le fond d'un article,
05:19 dont je rappelle qu'il n'est pas l'auteur, cet article n'est pas signé, donc on ne sait même pas pourquoi ça tombe sur lui.
05:24 Sur une affaire qui est très sensible en RDC, je veux bien comprendre, c'est l'assassinat de...
05:29 - Sherubin Ankendi. - Sherubin Ankendi,
05:31 où on l'accuse de propager des faux bruits, de diffuser de fausses informations,
05:35 bon, si maintenant on met les journalistes,
05:37 dès qu'on n'est pas d'accord avec le contenu de leur article, c'est ingérable.
05:43 On n'a rien contre le fait qu'il y ait une justice qui s'occupe du dossier,
05:46 qui le convoque et qui réponde aux questions, et puis qu'après il y ait un jugement.
05:50 Mais bon, là, il ne faut quand même pas exagérer, cette demande a été rejetée.
05:55 - Il y a une mobilisation sur les réseaux sociaux, notamment avec le hashtag #FreeStanis,
05:59 où il y a plusieurs personnalités du monde des médias, mais pas seulement, qui demandent sa libération.
06:03 Il y a également une pétition qui est en ligne pour vous, pour Jeune Afrique,
06:06 la mobilisation continue pour obtenir sa libération.
06:09 - Évidemment, évidemment, on a reçu beaucoup de témoignages.
06:13 Pour ceux qui ne connaissent pas Stani, c'est quelqu'un de très connu localement,
06:18 de très apprécié, qui est réputé pour sa rigueur.
06:21 Donc, en RDC, déjà, la profession s'est mobilisée à l'extérieur, dans toute l'Afrique.
06:28 On a, nous, lancé des témoignages vidéo qu'on publie sur Twitter, au Facebook,
06:33 de personnalités qui viennent le défendre et exigent sa libération.
06:38 Beaucoup de personnes sont intervenues, y compris dans l'univers politique.
06:41 La madame afrique-américaine a rencontré Patrick Mouyaya, qui est le ministre de la communication,
06:48 et a demandé sa libération, etc.
06:49 Bon, pour l'instant, ça n'a pas l'air d'avoir d'effet sur les autorités,
06:54 en tout cas, je veux dire, sur la justice, si on peut appeler ça comme ça, congolaise.
07:00 Mais il faut évidemment continuer cette mobilisation.
07:04 Et, en tout cas, nous, on continuera et tout le monde sera là jusqu'à ce qu'il soit libéré.
07:09 Encore une fois, on n'a rien contre le fait d'intenter un procès contre quelqu'un,
07:15 même si ça me paraît un peu bizarre, sur le simple fait de dire que les informations sont fausses.
07:21 Encore une fois, on ne nous a rien démontré, on n'a pas étayé le fait qu'elles étaient fausses,
07:25 on ne nous a pas expliqué quelle était la soi-disante vérité, on a juste dit que c'est faux, donc prison.
07:30 Et évidemment qu'il faut continuer cette pression et cette mobilisation.
07:34 Bon, il se trouve qu'on est à quelques semaines, mois de la présidentielle,
07:38 que donc j'imagine que la situation est sensible sur le plan politique.
07:44 En tout cas, ce n'est pas une raison pour mettre des journalistes en prison.
07:48 Merci beaucoup Marouane Beniamet d'avoir pris le temps de répondre à notre question.
07:51 Je rappelle que vous êtes directeur de publication du magazine Jeune Afrique.
07:54 Merci à vous.