L'Orchestre Philharmonique de Radio France interprète la Symphonie n° 6 en si mineur op. 54 de Chostakovitch sous la direction de Santtu-Matias Rouvali. Extrait du concert donné le 29 septembre 2023 à l'Auditorium de la Maison de la Radio et de la Musique à Paris.
En 1938, Chostakovitch annonça son intention de composer une symphonie avec solistes et chœur à la mémoire de Lénine. Plus tard, il déclara que la Sixième Symphonie reflétait « les sentiments du printemps, de la joie et de la jeunesse ». On imagine la déconvenue du public à la création d’une œuvre purement instrumentale, en trois volets seulement, commençant de surcroît par un mouvement lent. « Un tronc sans tête », ironisa un critique. Il fallut du temps pour qu’on reconnaisse son originalité et sa puissance expressive. Car Chostakovitch ménage une progression implacable, les tempos devenant de plus en plus rapides au fil de la partition. Comme dans ses Symphonies n°5, 7, 8, 10 et 13, le mouvement le plus long est placé en première position. Mais il occupe ici plus de la moitié de l’œuvre ! Le projet dramatique motive une forme qui récuse les symétries et proportions habituelles. Les thèmes, jamais entendus deux fois à l’identique, sont variés, développés, colorés par une orchestration toujours changeante qui réserve aux bois de nombreux solos.
Si les dimensions et le tempo du morceau expliquent la perplexité des premiers auditeurs, d’autres éléments pouvaient désarçonner : le Largo ne comporte pas de ces gigantesques et inexorables crescendos qui conduisent à une déflagration effrayante – signature de Chostakovitch. La musique est d’autant plus douloureuse qu’aucune explosion ne libère de la sensation d’oppression. À plusieurs reprises, la matière sonore se raréfie, tel le présage d’une extinction définitive. Toutefois, la tension à peine perceptible des lignes maintient la densité expressive.
Après cette lamentation funèbre qui rappelle le Largo de la Cinquième Symphonie (1937), l’Allegro introduit un contraste saisissant. Mais sa vitalité et sa clarté se doublent d’accents mordants (timbres acides, lignes acérées, harmonies grinçantes, basses grondantes), la violence atteignant son apogée au centre du mouvement. Le Presto renforce l’impression laissée par l’Allegro. Les premières pages, une tonique chevauchée scherzando, mènent à un épisode âpre et martelé, qui se dissout dans une succession de solos instrumentaux.
Une deuxième progression mène au point culminant : l’orchestre, déchaîné, amplifie la trivialité de la musique de cirque et des fanfares militaires. Ces sonorités plus clinquantes que flamboyantes, fréquentes chez Chostakovitch, s’avèrent toujours ambiguës : allégeance à un régime politique avide de démonstrations de force ? Subversion de l’esthétique prônée par les soviétiques ? De toute évidence, on perçoit là une ironie cinglante, surtout si l’on songe au dessein d’origine et au commentaire du compositeur : une symphonie qui célébrerait Lénine, ou qui évoquerait «
En 1938, Chostakovitch annonça son intention de composer une symphonie avec solistes et chœur à la mémoire de Lénine. Plus tard, il déclara que la Sixième Symphonie reflétait « les sentiments du printemps, de la joie et de la jeunesse ». On imagine la déconvenue du public à la création d’une œuvre purement instrumentale, en trois volets seulement, commençant de surcroît par un mouvement lent. « Un tronc sans tête », ironisa un critique. Il fallut du temps pour qu’on reconnaisse son originalité et sa puissance expressive. Car Chostakovitch ménage une progression implacable, les tempos devenant de plus en plus rapides au fil de la partition. Comme dans ses Symphonies n°5, 7, 8, 10 et 13, le mouvement le plus long est placé en première position. Mais il occupe ici plus de la moitié de l’œuvre ! Le projet dramatique motive une forme qui récuse les symétries et proportions habituelles. Les thèmes, jamais entendus deux fois à l’identique, sont variés, développés, colorés par une orchestration toujours changeante qui réserve aux bois de nombreux solos.
Si les dimensions et le tempo du morceau expliquent la perplexité des premiers auditeurs, d’autres éléments pouvaient désarçonner : le Largo ne comporte pas de ces gigantesques et inexorables crescendos qui conduisent à une déflagration effrayante – signature de Chostakovitch. La musique est d’autant plus douloureuse qu’aucune explosion ne libère de la sensation d’oppression. À plusieurs reprises, la matière sonore se raréfie, tel le présage d’une extinction définitive. Toutefois, la tension à peine perceptible des lignes maintient la densité expressive.
Après cette lamentation funèbre qui rappelle le Largo de la Cinquième Symphonie (1937), l’Allegro introduit un contraste saisissant. Mais sa vitalité et sa clarté se doublent d’accents mordants (timbres acides, lignes acérées, harmonies grinçantes, basses grondantes), la violence atteignant son apogée au centre du mouvement. Le Presto renforce l’impression laissée par l’Allegro. Les premières pages, une tonique chevauchée scherzando, mènent à un épisode âpre et martelé, qui se dissout dans une succession de solos instrumentaux.
Une deuxième progression mène au point culminant : l’orchestre, déchaîné, amplifie la trivialité de la musique de cirque et des fanfares militaires. Ces sonorités plus clinquantes que flamboyantes, fréquentes chez Chostakovitch, s’avèrent toujours ambiguës : allégeance à un régime politique avide de démonstrations de force ? Subversion de l’esthétique prônée par les soviétiques ? De toute évidence, on perçoit là une ironie cinglante, surtout si l’on songe au dessein d’origine et au commentaire du compositeur : une symphonie qui célébrerait Lénine, ou qui évoquerait «
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