Les autoroutes appartiennent-elles au passé ? La question qui fâche avec Pierre Chasseray

  • l’année dernière
A69 entre Toulouse et Castres, projet BIPdans le val d'Oise pour relier l'A1 et l'A15... Les projets de construction ou d'extension d'axes routiers se succèdent et suscitent la colère d'activistes écologiques un peu partout sur le territoire. On en discute avec un représentant des automobilistes !

Retrouvez la question qui fâche de Marie Misset sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-question-qui-fache

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00:00 Les autoroutes appartiennent-elles au passé ? Pour répondre à cette question, nous sommes
00:06 avec Pierre Chasseret, délégué général et porte-parole de l'association 40 millions
00:11 d'automobilistes.
00:12 Bonjour Pierre Chasseret.
00:13 Bonjour.
00:14 Alors, il y a une centaine de projets routiers actuellement soutenus par le gouvernement
00:17 pour un coût d'au moins 13 milliards d'argent public.
00:20 C'est le collectif La Déroute des routes qui dit ça.
00:23 Ils rassemblent 55 collectifs en lutte contre des projets routiers qui sont contestés un
00:28 peu partout en France, dont 7 autoroutes.
00:30 Alors Pierre Chasseret, pour commencer, est-ce que les infrastructures existantes ne sont
00:34 pas largement suffisantes pour les automobilistes français ?
00:37 Bon, elles sont pas mal déjà.
00:38 Quand on regarde le maillage territorial, la France c'est quoi ? C'est un million
00:42 de kilomètres de voirie sur lesquels on va tous se croiser.
00:45 C'est le plus grand réseau social de France finalement.
00:47 Et les autoroutes, le maillage est plutôt correct.
00:51 La difficulté c'est qu'on est dans un pays qui grandit en termes démographiques,
00:55 en termes de bassins de population, qui a besoin de mobilité et qui a besoin aussi
00:59 de quelque chose de nouveau.
01:00 C'est pour ça que la notion écologique a monté.
01:04 Et donc il faut la prendre en considération.
01:06 Est-ce qu'on veut des véhicules qui traversent nos villes et nos villages ? Ou est-ce qu'on
01:08 préfère les voir contourner à vitesse constante et donc à émissions polluantes
01:11 constantes ? Je pense que le match est fait.
01:13 Il est évident qu'il faut les faire rouler sur une autoroute.
01:16 Le match commence à peine.
01:17 On vous rappelle les règles.
01:18 Vous venez de pénétrer dans l'arène pour affronter Maya Mazorette dont la mission
01:22 est d'entrer en contradiction avec vous pour un débat dans les règles de l'art.
01:25 C'est donc l'heure de se poser la vraie question.
01:28 Pierre Chasseret.
01:29 Les autoroutes appartiennent-elles au passé ?
01:36 Oui, déjà elles appartiennent au passé parce que ça fait un bail qu'elles ont été
01:40 construites.
01:41 Maintenant on les entretient et elles nous coûtent extrêmement cher d'ailleurs en
01:43 termes de péage, en termes de ce que j'appelle la fiscalité des automobilistes.
01:47 Parce que dans le coup des péages, on montre toujours les méchants concessionnaires.
01:50 On oublie qu'il y a 40% du prix du péage qui part à l'état.
01:53 Donc non, étreif de plaisanterie.
01:55 Elles appartiennent à la réalité aujourd'hui, à la mobilité d'aujourd'hui.
01:58 C'est une évidence.
01:59 On en a besoin pour circuler, pour partir en vacances, pour gagner du temps et aussi,
02:04 je le répète, pour faire en sorte qu'on n'ait pas à traverser des petits villages,
02:09 des petites villes qui sont vraiment plus que touchées par cela.
02:14 En termes de sécurité, en termes de paisibilité.
02:16 Moi, les voitures, je préfère les voir à vitesse constante sur une autoroute que les
02:19 voir en train de traverser mon village.
02:21 Il n'y a pas photo.
02:22 On a besoin de centaines de nouveaux projets d'autoroutes et de routes ?
02:25 Non, on a besoin de projets qui sont reconnus d'utilité publique.
02:29 À partir du moment où il est reconnu d'utilité publique, je pense qu'objectivement, moi,
02:34 je n'ai pas envie de venir contester là-dessus ce que fait une commission qui plus est, est
02:40 rarement favorable aux projets dédiés aux automobilistes.
02:42 La seule chose qui m'inquiète, ça va être le coût pour l'usager.
02:46 Parce que les derniers travaux routiers, je pense notamment à un tunnel sur la A86 pour
02:51 ceux qui habitent Paris, ça coûte les yeux de la tête.
02:54 Et encore parce que j'ai décidé d'être poli aujourd'hui.
02:55 Donc, il va falloir faire très attention, je pense, au coût.
02:58 Il ne faudrait pas qu'un bon projet de sécurité routière, un bon projet environnemental, un
03:03 bon projet de contournement de nos villes et de nos villages deviennent un mauvais projet
03:06 parce qu'il est réservé à une élite qui peut se payer cette route.
03:09 Alors, c'est parti.
03:11 Maya Mazorette n'est pas d'accord avec vous.
03:13 C'est sa mission.
03:14 Exactement, je suis la voix de vos détracteurs aujourd'hui et j'ai noté plein de choses
03:17 dans ce que vous venez de dire, dont cette chose-là, l'utilité publique.
03:21 En fait, l'utilité publique, elle est en train de changer.
03:23 En ce moment, on est le 9 octobre, il fait 26 degrés à Paris.
03:26 Ce n'est pas un peu schizophrène de nous vendre la voiture face au réchauffement climatique ?
03:29 Non, parce que le problème, c'est que vous ne m'avez pas écouté.
03:31 Si, si, si, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention.
03:34 Je vais le redire.
03:35 Je préfère, même en termes d'émissions polluantes, je préfère des véhicules à
03:40 une allure lissée, sur une voie dédiée, en dehors de nos villes, plutôt que des véhicules
03:47 qui ralentissent et qui accélèrent et qui troublent la paisibilité des villes et des
03:50 villages.
03:51 Je ne vois pas l'intérêt en termes écologiques d'aller multiplier les émissions polluantes
03:55 puisqu'une voiture, c'est comme ça, ça pollue.
03:57 Alors peut-être que dans un siècle, on aura trouvé la solution.
03:59 On a déjà bien avancé, mais on est loin de la fin.
04:02 Le véhicule propre d'aujourd'hui, c'est le véhicule sale de demain.
04:04 Donc, je pense qu'il faut maintenant regarder ce qu'il y a.
04:08 Certains diront de mieux et d'autres de moins pire.
04:11 Moi, évidemment, avec mon prisme, je vais vous dire que c'est mieux.
04:14 C'est mieux d'avoir des véhicules à flux constant, à vitesse constante, sur une autoroute
04:18 que des véhicules qui…
04:19 À condition de partir du principe qu'il faille absolument se déplacer sur des longues
04:22 distances tout le temps.
04:23 Ça aussi, c'est une utopie qui est très passéiste finalement.
04:25 De se déplacer, c'est passéiste ?
04:27 Oui, de se déplacer sur des longues distances, en bagnole spécifiquement, ça me semble
04:31 assez passéiste.
04:32 C'est un peu le rêve de la voiture qui nous vend la liberté alors qu'on pourrait faire
04:36 les mêmes déplacements avec des transports en commun.
04:38 Je suis embêté pour vous.
04:39 Tout à l'heure, par exemple, vous avez parlé de réseau social en parlant de voiture alors
04:42 qu'on est tout seul dans sa voiture, alors qu'on pourrait être dans les transports
04:45 communs avec d'autres gens et refaire du lien social justement.
04:47 Oui, enfin bon, les transports en commun, ça va être un peu limité quand vous partez
04:51 en week-end.
04:52 La voiture, excusez-moi, mais comme réseau social, c'est limité.
04:53 Avec qui on parle en voiture exactement ?
04:55 Alors, on recommence.
04:56 C'est la route que j'ai qualifiée de réseau social.
04:58 Le mot "social", il veut dire quelque chose quand même.
05:01 On est dans une épidémie de la solitude et vous, vous nous disiez de nous mettre dans
05:03 une petite voiture individuelle en 2023.
05:06 Vous n'êtes pas complètement irresponsable de dire ça.
05:08 Je ne vais pas lancer un grand débat, mais alors, s'il y a un endroit où on est le
05:11 plus seul, c'est une question extrêmement philosophique, mais l'endroit où on est
05:14 le plus seul, c'est sans aucun doute dans les transports en commun.
05:16 Et puis là, en plus, justement, vous nous avez parlé de passer à côté des petites
05:21 villes.
05:22 Est-ce que le but d'une autoroute, enfin en tout cas d'un mode de déplacement un
05:25 peu plus stable pour l'environnement, ce ne serait pas justement de faire en sorte
05:28 que ça rentre dans les villes, que ça rende service aux locaux plutôt que de vous aider,
05:32 vous, à venir de très loin et à venir vous garer à côté de la maison de la radio
05:35 à Paris ?
05:36 - Oui, c'est ça qu'on va faire.
05:37 - Ah, c'est vous qui décidez qu'on refait les questions, en fait ?
05:40 - Oui, c'est moi.
05:41 - J'adore.
05:42 - Alors, je vais vous dire.
05:43 Moi, ce genre de question qui remet en question l'utilité du déplacement en voiture, c'est
05:47 le genre de question que j'adore.
05:48 Parce que je me demande, on a connu un moment où on n'avait pas le droit de circuler
05:53 en voiture.
05:54 Ça s'appelait le confinement.
05:55 Moi, ça ne m'a pas plu.
05:56 - Vous ne pouvez pas limiter le confinement à la voiture, c'est injuste.
05:59 - Mais bien sûr que si.
06:00 Parce que la France n'est pas Paris.
06:02 Paris n'est pas l'île de France et les cœurs de ville ne sont pas la France.
06:05 Vous êtes face à une réalité.
06:07 La réalité, c'est que les Français, à 80%, utilisent leur voiture chaque jour pour
06:12 un besoin essentiel.
06:13 - Et pas pour prendre l'autoroute.
06:14 Là, aujourd'hui, on parle des autoroutes.
06:15 On n'est pas en train de parler de la voiture.
06:16 - Bien sûr.
06:17 Aujourd'hui, vous avez cette absolue nécessité.
06:22 Soit on l'entend et on se dit comment on améliore.
06:25 Et ça, c'est une vision positive de l'avenir.
06:27 Soit on part du principe que la voiture, ça pollue et qu'il faut l'interdire.
06:31 C'est une vision de la décroissance.
06:33 - Est-ce qu'on peut juste en revenir à l'autoroute précisément ? Qu'est-ce que l'autoroute
06:38 nous apporte aujourd'hui qui n'appartienne pas au monde du passé ?
06:40 - Elle va vous apporter au contraire l'avenir.
06:43 C'est qu'elle va vous permettre de gagner du temps.
06:44 Le temps, c'est précieux.
06:45 Le deuxième point, c'est qu'elle va vous apporter…
06:47 - Du temps pour faire quoi ? Juste pour partir en vacances ? Pour que les Parisiens puissent
06:51 aller à Marseille le week-end ?
06:52 - Non, bien sûr que non.
06:53 Elle va vous apporter aussi, au-delà de ce temps, de la sécurité.
06:58 Si l'autoroute était moins chère, si elle n'était plus réservée à une élite,
07:06 on aurait énormément d'accidents.
07:09 Le réseau le plus sûr de France est le réseau autoroutier.
07:12 Moi, ce qui me débecte, je vais être très franc, ce qui me rend dingue, c'est quand
07:16 je vois des gens qui ne peuvent plus se payer le tarif de l'autoroute et qui sont contraints
07:21 à des déplacements qui sont plus dangereux.
07:23 C'est bien beau de rigoler.
07:24 Vous voyez, dans quelques minutes, je vais faire une émission sur vieillir et conduire.
07:26 Et puis, je me rends compte que ceux qui sont les plus touchés par les accidents sont les
07:32 18-25.
07:33 Et les 18-25, ils n'ont pas un rond pour prendre l'autoroute.
07:35 Ils se retrouvent sur le réseau secondaire.
07:36 - Vous n'allez pas, alors, ne pas du tout répondre à nos questions sur l'autoroute ?
07:38 - Mais si, je réponds.
07:39 Je réponds à toutes les questions que vous voulez.
07:40 Moi, ça ne me pose aucun problème.
07:41 - L'autoroute, c'est le passé ou pas, alors ?
07:42 - Ben non, je vous ai répondu.
07:43 C'est l'avenir.
07:44 Je ne peux pas faire mieux.
07:45 - Je vous reformule la question qui fâche Pierre Chasserey.
07:47 Est-ce qu'il ne faut pas abandonner les nouveaux projets de routes qui fleurissent partout ?
07:51 Vous l'avez dit vous-même, le maillage territorial du territoire est déjà très bon en France.
07:57 - Bien sûr qu'il est très bon.
07:58 Mais quand on a un projet d'utilité publique, on va au bout.
08:00 Il faut arrêter que pour des raisons idéologiques, j'ai envie de dire, ce ne sont plus des raisons
08:05 écologistes, là.
08:07 C'est presque du fanatisme écolo.
08:09 Parce qu'en fait, on se trompe.
08:10 On confond la décroissance avec l'amélioration.
08:13 Il y a deux visions de l'écologie.
08:14 Soit vous avez une vision qui, à mon avis, est extrêmement passéiste et négative qui
08:18 consiste à se dire qu'il faut se passer des choses dont on n'a pas besoin, nous.
08:22 C'est très égoïste.
08:23 Alors évidemment, vous avez un microcosme de gens qui n'ont pas de voiture qui va vous
08:26 dire qu'une autoroute, ça ne sert à rien.
08:27 Et on les retrouve, ça et là, ils sont 40 au bord d'une autoroute pour empêcher que
08:30 ça se construise.
08:31 Et puis vous avez des gens qui regardent ça en se disant « bon, comment on fait pour
08:34 améliorer ? ». En fait, le problème n'est pas la route.
08:36 Le problème, c'est la voiture qui roule dessus qu'on doit améliorer.
08:39 Ce n'est pas la route.
08:40 La route, elle sera toujours nécessaire.
08:41 L'autoroute sera toujours nécessaire.
08:43 Ce qu'il faut améliorer demain, au demain politique, c'est comment faire pour que
08:47 les véhicules soient de plus en plus propres.
08:49 Et si on pouvait appliquer les mêmes améliorations dans l'histoire des améliorations de la
08:55 pollution à tous les secteurs de l'industrie que ce qu'on a fait sur l'automobile, je
08:59 pense qu'on resterait encore…
09:00 Vous êtes écolo en fait ? Parce que quand même, avec la bétonisation des terres agricoles,
09:03 avec le fait de couper des centaines d'arbres, c'est un peu compliqué de vous en rendre
09:05 compte.
09:06 Moi, je suis né, il y avait peut-être 40, 45 millions de Français.
09:09 On parle de la France périphérique qui s'enlait terriblement.
09:11 Les autoroutes, c'est moche.
09:12 Non mais vous savez, il y a des tas de choses qui ne sont pas belles.
09:15 Heureusement, on ne les interdit pas.
09:16 On n'est pas obligé d'en rajouter par contre.
09:18 Je reviens dessus.
09:19 Non, c'est important.
09:20 Je vous laisse faire cette dernière phrase, Pierre Chasserey.
09:23 Moi, je me rappelle quand j'étais petit, il y avait 50 millions de Français.
09:25 Aujourd'hui, on est 67, 68 millions.
09:27 On ne peut pas penser l'augmentation démographique sans avoir des conséquences, notamment sur
09:31 l'augmentation du réseau.
09:32 On ne peut pas parler de démographie sans parler du futur et donc sans parler d'environnement.
09:35 Je vous laisse le mot de la fin.
09:36 Merci Pierre Chasserey.
09:37 Je vous rappelle que vous représentez la voix de 40 millions d'automobilistes.
09:41 Une association nationale pour défendre la voiture et ses occupants.
09:45 Et reconnue d'intérêt général.

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