Hamas/Israël : jusq'où ira l'armée israélienne ? • FRANCE 24

  • l’année dernière
Une nouvelle édition du débat consacrée à la guerre entre Israël et le Hamas.
L'armée israélienne a annoncé ce matin avoir repris le contrôle de la frontière avec la bande de Gaza. Elle a également a mobilisé les réservistes et a l'intention d'imposer un siège total à Gaza. Benyamin Netanyahou le Premier ministre israélien prépare l’opinion à une guerre longue qui pourrait être dévastatrice.
Transcript
00:00 Générique
00:02 ...
00:09 -Bienvenue dans "Le débat consacré à la guerre
00:11 entre Israël et le Hamas".
00:13 4 jours après l'attaque du Hamas en Israël,
00:16 l'armée israélienne a annoncé avoir repris le contrôle
00:19 de la frontière avec la bande de Gaza.
00:21 Elle a mobilisé les réservistes
00:23 et a l'intention d'imposer un siège total à Gaza.
00:26 Benyamin Netanyahou prépare l'opinion à une guerre longue
00:29 qui va être dévastatrice.
00:31 Le bilan de l'attaque du Hamas en Israël s'élève à 1 000 morts.
00:34 La riposte israélienne a fait 830 morts.
00:38 Israël assure avoir trouvé 1 500 corps de combattants du Hamas,
00:42 côté israélien.
00:44 A Gaza, sachez qu'il y a plus de 180 000 déplacés.
00:48 On va revenir sur la réponse d'Israël.
00:50 Jusqu'où ira-t-elle ?
00:52 La guerre sera-t-elle longue ? Que se passe-t-il à Gaza ?
00:55 On va en parler avec mes invités.
00:57 Carine Emile Bittard, bonsoir.
00:59 Professeure de relations internationales
01:01 à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth.
01:04 Vous êtes enseignant à l'ENS de Lyon et chercheur à l'IRIS.
01:07 Bienvenue dans le débat et à Paris.
01:09 En face de vous, Michel Duclos, bonsoir.
01:12 Diplomate, conseiller spécial à l'Institut Montaigne.
01:15 Vos livres sur la guerre en Ukraine,
01:17 "Guerre en Ukraine et une nouvelle ordre du monde",
01:20 "22 regards internationaux après l'agression russe".
01:23 On n'en parle plus, mais elle continue.
01:26 Vous avez aussi ce petit livre, "La longue nuit syrienne".
01:29 Michel Duclos, vous parlez de la Syrie.
01:31 Merci d'être avec nous.
01:33 Michael Shurkin est avec nous. Bonsoir.
01:35 Vous êtes en général à Washington.
01:38 Bienvenue à Paris dans le débat.
01:40 Directeur programme international "14 North Strategies".
01:43 Vous êtes également directeur de recherche
01:46 à l'Atlantic Council.
01:47 On va tout de suite, avant de faire un bilan en images,
01:50 voir notre envoyé spécial,
01:52 qui se trouve pas loin d'Achkélone, Claire Duhamel.
01:55 Claire, bonsoir.
01:56 Quelle est la situation sur le terrain ?
01:59 ...
02:01 -Bonsoir. Je me trouve à proximité de Yad Morderei,
02:05 dans un endroit où les routes ont été bloquées.
02:07 Un petit peu plus loin, par là,
02:09 nous sommes à quelques kilomètres de la bande de Gaza.
02:13 On a entendu une bonne partie de la journée
02:15 les bruits sourds des frappes israéliennes
02:18 sur l'enclave palestinienne.
02:20 Le bilan, à l'heure actuelle,
02:22 le côté palestinien s'élève à 830 personnes tuées,
02:25 850 blessées.
02:26 En parallèle, le Hamas avait prévenu
02:28 qu'il tirerait des salves de roquettes de nouveau
02:31 sur le territoire israélien.
02:33 A 17h, elle a visé notamment la ville d'Achkélone.
02:36 C'est assez rare que le Hamas prévienne d'une localité.
02:39 C'était à peu près quelques heures avant.
02:42 Le Hamas avait demandé aux Israéliens
02:44 de fuir leurs habitations,
02:46 ce qui est une forme de stratégie de communication.
02:49 Ils utilisent la même méthode que les Israéliens,
02:52 qui demandent à certains palestiniens
02:54 de fuir leurs habitations lorsqu'ils entendent
02:57 bombarder cette zone.
02:58 Les habitants d'Achkélone ne l'ont pas fait en grande majorité
03:02 car on est plus en sécurité chez soi,
03:04 où il y a des abris antimissiles en Israël
03:06 plutôt que dans les rues ou dans les voitures.
03:09 Au moment de 17h, quand les alertes ont résonné
03:12 à plusieurs reprises avec des intervalles très rapprochés,
03:15 les gens se sont dirigés vers leurs abris antimissiles.
03:19 Et puis, dans le reste du pays,
03:21 dans le nord exactement,
03:22 une quinzaine de roquettes ont été tirées sur Israël
03:25 depuis le Liban.
03:26 L'armée israélienne a riposté en tirant au moins
03:29 sur trois positions du Hezbollah,
03:31 qui ont été détruites suite à ces frappes.
03:34 -Merci, Claire. Vous restez avec nous
03:36 autant que possible lors de ce débat.
03:39 On va faire un point en image avant d'en discuter.
03:42 -Des explosions sans discontinuer.
03:48 Un ciel qui s'embrase au rythme des frappes israéliennes.
03:51 La nuit a été d'une violence extrême
03:56 pour les habitants de la bande de Gaza.
03:58 Au lever du jour,
04:01 l'armée israélienne continue de bombarder
04:04 minutieusement
04:06 des immeubles qui sont liés au Hamas,
04:09 d'après Israël.
04:11 200 bâtiments visés,
04:13 ils s'écroulent un à un comme des châteaux de cartes.
04:16 Vus du ciel,
04:18 ce sont des quartiers entiers qui sont ravagés.
04:22 -On a été prévenus qu'il fallait évacuer l'immeuble là,
04:28 qui héberge des entreprises.
04:31 Les gens ont commencé à courir dans les rues
04:33 et environ 10 à 15 minutes plus tard,
04:36 alors que les gens ont évacué,
04:37 c'est un autre immeuble qui a été frappé,
04:40 15 m plus loin.
04:43 -Selon ce témoin, il y aurait 10 morts dans cet immeuble,
04:46 dont 3 journalistes palestiniens.
04:48 Beaucoup de blessés aussi
04:52 arrivent à l'hôpital de Gaza,
04:54 parmi lesquels des enfants.
04:56 Le Hamas a prévenu qu'il y aurait des représailles
05:01 parmi les otages israéliens qu'il détient.
05:03 -Nous déclarons que chaque frappe sur les habitants tués chez eux,
05:09 sans avertissement préalable,
05:12 sera malheureusement suivie de l'exécution
05:15 d'un des otages civils que nous détenons.
05:18 Et nous en diffuserons le son et les images.
05:23 -Depuis hier, la bande de Gaza est isolée,
05:28 plus que jamais, pas d'électricité, pas d'eau, pas de gaz non plus,
05:32 sur décision du gouvernement israélien.
05:35 Et les chars de l'armée
05:36 continuent de se positionner aux abords de l'enclave palestinienne.
05:41 -Emile Bittar, vous avez une impression de déjà-vu ?
05:44 -On a une impression de déjà-vu,
05:46 mais cette fois-ci, on assiste à une extension
05:49 du domaine de la barbarie.
05:51 Ce n'est pas le premier conflit de ce type,
05:53 mais on n'a jamais eu un tel nombre de victimes israéliennes
05:57 en si peu de temps.
05:58 En 48 heures, il y a eu autant de morts israéliens
06:01 que dans les 19 dernières années.
06:03 On est dans une nouvelle phase qui s'ouvre.
06:05 Le plus effarant, c'est qu'il ne semble y avoir
06:08 que des victimes adultes dans la pièce.
06:11 On avait vu ça dans la longue nuit syrienne
06:13 sur laquelle a écrit Michel Duclos.
06:16 La communauté internationale est absente.
06:18 -Elle a condamné le Hamas, sa communauté internationale ?
06:22 -Absolument, mais au-delà de ses déclarations habituelles,
06:25 il y a une responsabilité accablante
06:28 de cette communauté internationale,
06:30 des pays occidentaux qui ont laissé faire
06:33 cette situation pendant des décennies.
06:35 On en arrive à un cercle terriblement vicieux.
06:38 C'est une tragédie incommensurable
06:40 et personne ne prend les rênes pour lancer une nouvelle initiative.
06:44 -La communauté internationale est responsable
06:47 de ce qui se passe ?
06:48 -Absolument. Ca fait 50 ans que la même situation perdure,
06:51 les mêmes causes entraînent les mêmes effets.
06:54 -Et le Hamas ?
06:55 -Le Hamas est bien évidemment responsable
06:58 d'une barbarie sans nom,
06:59 mais l'histoire du Proche-Orient n'a pas commencé le 7 novembre 2023.
07:03 -136 000 réservistes en Israël ont été rappelés
07:07 en 48 heures.
07:08 Ils vont être envoyés un peu partout, à votre avis ?
07:11 Est-ce qu'effectivement, même à la frontière sud du Liban,
07:14 un certain nombre sont envoyés ?
07:16 L'armée israélienne pourrait faire la guerre ?
07:19 -C'est une grande question.
07:20 Ca, c'est vraiment le coup de choc.
07:23 Ca va vraiment nous faire perdre le cas.
07:25 Il y a une faute de possibilité que la guerre se déclencherait
07:28 à la frontière libanaise et qu'il y ait des conflits
07:32 de la violence dans la Cisjordanie.
07:34 C'est possible qu'il y ait une trompette parfaite.
07:37 Je ne sais pas si ça se dit en français.
07:39 -Une trompette parfaite ? -C'est-à-dire qu'il y a
07:42 une trompette. Tout ce qui peut aller mal
07:44 va se passer, va aller mal à la fois,
07:47 sur toutes les trois frontières.
07:49 Il y a une faute de possibilité que ça va se dérouler.
07:52 -Ca veut dire trois fronts, donc Gaza, Cisjordanie, Liban.
07:56 -C'est possible.
07:57 C'est pour ça qu'on a appelé tous les réservistes,
08:00 parce qu'il faut le main-d'oeuvre.
08:02 Il faut mobiliser toutes les forces armées au cas où ce serait le cas.
08:06 J'espère que ce n'est pas le cas.
08:08 -C'est ce que vous dites.
08:10 C'est pas encore sûr que ce soit le cas.
08:12 Ca fait très peur.
08:13 D'avoir trois fronts, ça serait effectivement assez,
08:17 Michel Duclos, une guerre sur trois fronts.
08:20 Pour le diplomate que vous êtes...
08:23 -C'est ce que je crains, parce que...
08:26 D'abord, le nombre de pertes subies par les Israéliens
08:31 est tel qu'ils sont obligés de taper très fort, bien sûr.
08:34 A leur place, tout le monde ferait la même chose.
08:37 En plus, ils ont cette doctrine de la dissuasion
08:40 qui les contraint à aller très loin.
08:42 Au début...
08:44 -La doctrine de la dissuasion qui les contraint à aller très loin.
08:47 -C'est-à-dire rétablir un rapport de force avec l'adversaire
08:51 tel que ça dissuade l'adversaire d'attaquer.
08:53 On voit bien que cette stratégie de dissuasion a échoué.
08:57 Maintenant, il faut rétablir le rapport de force
09:00 pour qu'on n'ait pas l'effet dispésif.
09:02 Je pense que le Hezbollah, au début, a tiré quelques coups,
09:06 mais au fond, on faisait un peu de la figuration.
09:09 C'était une action de solidarité.
09:11 Mais plus ça dure,
09:13 et plus il y aura de pertes du côté palestinien,
09:18 plus ce sera difficile aux autres acteurs
09:21 de ne pas intervenir de plus en plus fortement.
09:24 -Vous avez l'impression qu'il y a déjà eu une forme d'escalade
09:27 du côté du Hezbollah ?
09:29 Qu'il y a eu des tirs ?
09:30 -Le Hezbollah préfère que le Hamas soit en première ligne.
09:33 Quelques signaux ont été envoyés à Israël,
09:35 mais on n'est pas sortis des règles d'engagement traditionnel.
09:39 S'il devait y avoir un bain de sang à Gaza
09:41 dans les jours ou les semaines qui viennent,
09:44 et s'il y a un feu vert iranien,
09:46 là, il y a un vrai risque que la région entière s'embrasse.
09:49 -Parce que Gaza, justement, on a vu...
09:51 Il y a un blocus, un état de siège,
09:53 il y a eu des tirs, on a vu le niveau de destruction.
09:56 Et là, s'il y a effectivement une offensive terrestre,
09:59 ça risque d'être sanglant.
10:01 Ca va quoi ? Ca peut devenir un vrai combat de rue ?
10:04 -Oui, ça va être sanglant,
10:06 et donc l'opinion des pays arabes va forcément se mobiliser
10:09 en faveur des Palestiniens.
10:11 Et ce sera difficile, au Hezbollah et à d'autres,
10:14 de ne pas intervenir plus fortement.
10:18 Et puis, il y a un autre point,
10:20 c'est que dans les cas précédents,
10:22 qu'on a tous vécu d'une manière ou d'une autre,
10:25 il y avait quand même des forces de rappel.
10:27 Il y avait à un moment donné des gendarmes,
10:30 l'Amérique et la Russie, notamment,
10:32 mais éventuellement d'autres, peut-être l'Egypte.
10:35 Là, ce mécanisme-là fonctionne de moins en moins.
10:40 -Pourquoi l'Egypte ne s'implique pas plus ?
10:43 -Elle va sans doute le faire, mais pour l'instant,
10:46 l'Iran a intérêt quand même à entretenir le brasier.
10:50 Et la Russie, d'abord, a tellement, je crois, de poids dans la région,
10:54 et pour l'instant, aussi, elle a intérêt à ce que les Etats-Unis
10:58 soient occupés ailleurs qu'en Ukraine.
11:00 -On attend un discours de Joe Biden.
11:02 Vous êtes d'accord avec ce qui vient d'être dit ?
11:05 -Absolument. Ce qui me frappe,
11:07 c'est que les mêmes logiques qui ont montré
11:10 qu'elles étaient inutiles et contre-productives
11:12 sont encore à l'oeuvre des décennies après.
11:15 On dit aujourd'hui vouloir éradiquer le Hamas.
11:17 Au 1er jour de la guerre de 2006, on disait vouloir éradiquer
11:21 le Hezbollah. Et quand bien même on parviendrait
11:24 à les éradiquer, qu'est-ce qui va émerger à leur place ?
11:26 En 82, Israël a envahi le Liban pour venir à bout du Fatah.
11:29 Ca a donné naissance au Hezbollah un mouvement
11:32 beaucoup plus redoutable pour Israël que ne l'était le Fatah.
11:35 Tant que les questions de fond ne sont pas résolues,
11:38 la question de la colonisation, la question de l'occupation,
11:42 la question de l'eau, de Jérusalem,
11:44 nous sommes dans un cercle infernal
11:46 et il n'y a véritablement pas de gendarmes,
11:49 comme cela a été dit, et c'est cela qu'on peut reprocher
11:53 aux Etats-Unis et à l'Union européenne.
11:55 - On va revenir sur Michael Shorkin.
11:58 - Sauf qu'à un certain niveau, il y a peut-être
12:00 cette question de gendarmerie, c'est-à-dire que les Etats-Unis
12:03 sont en train d'essayer de signaler à l'Iran
12:06 d'essayer de garder la calme avec Hezbollah.
12:10 C'est pour ça qu'on a envoyé le porte-avions.
12:12 - Le porte-avions, racontez.
12:14 Quand on voit que les Etats-Unis font en sorte
12:17 que le porte-avions en Géraldeport soit en Méditerranée,
12:20 à quoi ça sert ?
12:21 C'est justement pour calmer l'Iran ?
12:23 - C'est pour signaler aux Iraniens qu'on est là,
12:25 qu'on est là, on a le pouvoir, on peut agir si on veut agir.
12:30 Et ce n'est pas pour intervenir dans ce qui se passe au Gaza.
12:34 Je suis 100 % convaincu qu'il y aurait
12:37 une opération terrestre, il y aurait cette invasion terrestre,
12:41 c'est sûr, mais les Etats-Unis s'intéressent plutôt
12:46 à empêcher cette escalade avec l'Iran et avec Hezbollah.
12:51 Donc il y a une question de signaler aux Iraniens,
12:56 parce que ce sont les Iraniens qui contrôlent.
12:59 Si quelqu'un contrôle Hezbollah, c'est l'Iran.
13:02 Et c'est pour ça. Donc peut-être à ce niveau...
13:05 - Et ça pourrait être efficace, cette action des Etats-Unis ?
13:09 - Pour aller dans le même sens, sur le plan purement diplomatique,
13:13 ou comme on dit maintenant, du signalement politique,
13:16 les Israéliens et les Américains ont évité de trop mettre en cause l'Iran.
13:20 Ne pas sans doute les pousser au crime.
13:24 - On a bien vu dans les discours,
13:26 Antony Blinken a dit qu'il n'avait pas de preuve d'une application iranienne.
13:29 - Il y a sans doute une action avec un élément de force
13:32 et un élément de rassurance pour essayer de dissuader les Iraniens
13:36 de jeter de l'huile sur le feu.
13:38 - Pour éviter un embrasement beaucoup plus vaste.
13:41 C'est ça que vous redoutez ?
13:42 - Exactement. On le redoute, parce que la grande leçon
13:45 de ces dernières semaines, c'est que dans un monde
13:48 où il y a une interdépendance stupéfiante,
13:51 plus personne ne peut être en sécurité
13:53 si ses voisins n'ont pas un minimum de dignité.
13:55 Yehud Barak disait qu'Israël était une ville dans la jungle.
13:59 Aujourd'hui, on s'aperçoit qu'Israël ne peut plus rester barricadé
14:02 et penser faire des rêves parties, alors qu'à 200 mètres,
14:05 2 millions de personnes vivent dans une prison à ciel ouvert.
14:08 Martin Luther King, un fervent partisan de l'Etat d'Israël,
14:12 disait que tant qu'il y a une injustice,
14:14 l'ordre et la justice ne vont pas prévaloir ailleurs.
14:17 - Mais ça ne pouvait pas justifier ce qui s'est passé.
14:20 - Absolument.
14:21 - Tous ces massacres de jeunes qui dansaient dans ces rêves parties.
14:25 - Absolument, mais ça montre l'interdépendance.
14:27 Pour que ces jeunes puissent continuer de danser
14:30 dans des rêves parties, il faut que ceux qui vivent
14:33 à quelques centaines de mètres puissent vivre dans la dignité.
14:36 - À un certain niveau, ça n'a rien à voir avec l'occupation.
14:40 Quand il s'agit de Hamas, je ne parle pas de Fatah,
14:42 mais quand je parle de Hamas, Hamas ne s'intéresse pas à la paix.
14:46 Hamas ne s'intéresse pas à une solution des États.
14:49 Il ne s'intéresse pas à ça.
14:50 En regard des documents de Hamas et du discours de Hamas,
14:54 c'est un mouvement qui est farouchement antisémite,
14:57 qui cherche à éradiquer la présence juive
15:01 dans les terres musulmanes.
15:03 Et il ne s'intéresse pas. Donc, il y a cette question-là.
15:07 Donc, je ne parle pas de négociations avec Fatah.
15:10 Je suis tout à fait en faveur de ça.
15:12 Mais quand il s'agit de Hamas, il y a un problème différent.
15:16 C'est pour ça qu'il y a aussi cet enclavement.
15:18 Ce n'est pas du tout une prison, c'est l'inverse.
15:21 C'est une exagération.
15:22 Mais tout cela, c'est une réponse au problème de la sécurité
15:26 qui est posé par Hamas, parce que dès le début,
15:29 quand Israël a retiré les troupes de la zone de Gaza,
15:33 Hamas a envoyé des kamikazes,
15:36 on a envoyé des missiles, il y a toujours des problèmes.
15:39 C'est pour ça qu'on a fait des murs,
15:40 c'est pour ça qu'on a fait toutes les précautions du secrétaire.
15:43 Et c'est d'autres choses. Et ça, c'est un problème.
15:46 - Le conflit avec Hamas, ça distrait aussi les gens,
15:51 y compris les Israéliens, des problèmes avec les Palestiniens,
15:54 avec FATA, avec l'autorité palestinienne,
15:57 qui est une victime.
15:59 Encore une fois, je vois que les Palestiniens,
16:01 le peuple palestinien est victime des mouvements
16:04 qui sont tous des otages de Hamas.
16:07 Donc, c'est pas...
16:10 J'entends ce que vous voulez dire,
16:12 mais quand il s'agit de Hamas,
16:14 c'est pas simplement que si on est plus gentil
16:17 avec les Palestiniens,
16:19 si on est mieux avec l'autorité palestinienne,
16:22 ça va aller. Non.
16:23 Parce que Hamas n'aime pas l'autorité palestinienne,
16:27 n'aime pas Oslo, n'aime pas l'Egypte,
16:29 n'aime pas tous les pays...
16:30 - Il affiche un leadership, en fait.
16:31 C'est ça, le Hamas.
16:33 Parce qu'aujourd'hui, le FATA,
16:34 qu'est-ce qui représente Michel Duclos,
16:37 l'autorité palestinienne ?
16:38 Emmanuel Macron a appelé Mahmoud Abbas aujourd'hui,
16:41 mais qu'est-ce que ça vaut ?
16:43 - L'autorité palestinienne a virtuellement disparu,
16:47 et le Hamas était en perte de vitesse
16:50 en termes de popularité, par exemple.
16:52 Et c'est ça qui...
16:55 Je dois dire que quand on voit ces centaines d'enfants
16:58 dont la tête a été tranchée,
16:59 c'est tellement abominable qu'on n'est plus dans la politique.
17:02 Il y a quelque chose d'incompréhensible,
17:04 de monstrueux, d'incroyable, d'une certaine façon.
17:08 Mais par ailleurs,
17:09 quels que soient les défauts du renseignement technique,
17:12 moi, je suis un peu étonné que les Israéliens
17:15 n'aient pas fait l'analyse politique simple.
17:17 C'est que le Hamas était en perte de vitesse,
17:20 on voyait sa popularité baisser.
17:23 Ils couraient le risque d'être de plus en plus marginalisés
17:27 du fait de la dynamique des accords d'Abraham,
17:30 donc du rapprochement saoudo-israélien
17:34 qui devenait possible.
17:36 Donc c'est clair qu'ils allaient faire quelque chose.
17:38 Alors, quant en plus, à cause de ces ministres d'extrême droite
17:43 totalement idéologiques d'Israël,
17:46 Sahal était employé plutôt,
17:49 assurait la paix des colons en Cisjordanie
17:52 que de garder la frontière.
17:54 Il était clair qu'ils considéraient ça
17:58 comme une fenêtre d'opportunité.
17:59 Encore une fois, ça ne justifie pas
18:01 ce comportement épouvantable de barbarie,
18:05 mais qu'il n'y ait pas eu cette anticipation
18:08 purement politique de la part des autorités israéliennes,
18:12 pour moi, ça reste quand même un mystère.
18:15 Le fait qu'ils étaient totalement surpris.
18:17 Absolument, c'est une faillite sans précédent.
18:19 La presse, à Arez, par exemple,
18:21 accuse le gouvernement Netanyahou,
18:24 en tout cas le met en accusation Netanyahou
18:26 avec son gouvernement d'extrême droite,
18:28 finalement, d'avoir...
18:29 Même d'être à l'origine, quasiment,
18:31 mais en tout cas d'avoir participé à cette agression,
18:35 à cette intervention.
18:36 L'information n'est pas véritablement vérifiée.
18:38 On nous dit que les Égyptiens auraient prévenu
18:42 M. Netanyahou que quelque chose d'immense
18:43 était en train de se préparer,
18:45 mais ça n'a pas encore été confirmé.
18:47 Mais sur le fond, moi, autant je rejoins
18:48 ce qu'a dit M. Cherkin sur l'idéologie du Hamas,
18:51 autant il faut quand même rappeler
18:52 que ceux qui sont au pouvoir aujourd'hui en Israël,
18:55 Elie Barnavi, l'ancien ambassadeur d'Israël en France,
18:57 les a qualifiés de version juive du Hamas.
19:00 Et la charte du Likoud non plus ne reconnaît pas
19:02 le peuple palestinien ni la nécessité
19:05 de créer un État palestinien.
19:06 Donc, nous sommes en présence d'une montée aux extrêmes.
19:09 La responsabilité du Hamas est accablante,
19:11 mais ça n'occulte pas la responsabilité
19:14 de ceux qui ont autorisé pendant des décennies
19:16 le viol quotidien du droit international.
19:18 Et toutes les organisations des droits de l'homme
19:20 confirment que c'est bien une prison à ciel ouvert.
19:22 Et des officiels israéliens,
19:24 y compris des anciens premiers ministres,
19:25 ont également qualifié Gaza de prison à ciel ouvert.
19:28 - Michael Cherkin, peux-tu réagir ?
19:30 - C'est une exagération.
19:32 Ça ne fait pas une bonne impression,
19:33 le fait que, bon, il y a des gens qui disent
19:35 qu'on est en dehors de la loi internationale,
19:37 mais c'est un bâton avec lequel on frappe Israël
19:41 depuis le début.
19:43 Il y a toujours cette recherche
19:44 pour la délégitimité de l'État israélien.
19:48 Mais ce qui est vrai, c'est absolument vrai,
19:50 c'est qu'il y a une montée aux extrêmes,
19:52 ça, c'est clair.
19:53 Et aussi, ça, c'est clair qu'il y a une faillite,
19:57 c'est pas le mot, mais il y a...
20:00 Les Israéliens ont démontré une incapacité
20:02 de vraiment réfléchir au niveau stratégique.
20:04 Ils ont préféré gérer la crise au lieu d'essayer de résoudre
20:08 la crise, essayer de trouver...
20:10 Même avec les questions, avec les opérations terrestres
20:14 qu'on a vues dans les derniers 20 ans à Gaza,
20:17 on ne voulait pas aller jusqu'au bout.
20:19 Donc ça aussi, c'est une hésitation,
20:20 parce qu'on n'avait pas la détermination,
20:22 on n'avait pas la désidée, c'est clair.
20:23 - Aller jusqu'au bout dans quel...
20:25 - Dans le sens de vraiment démontrer,
20:26 de vraiment détruire Hamas.
20:28 C'est-à-dire, on a...
20:29 On a été allés, mais on n'a pas fait.
20:31 On a été allés, on n'a pas fait,
20:32 on n'avait pas la détermination
20:33 et on ne voyait pas les choses avec une clarté.
20:36 Et on n'a pas pu remettre...
20:37 - Et pour quoi, votre avis ?
20:38 - Pour plusieurs raisons.
20:39 D'abord, il y a un problème,
20:41 il y a un complète manque de confiance
20:43 avec les autorités palestiniennes et Hamas.
20:45 C'est-à-dire que, oui, les autorités palestiniennes,
20:48 elles ont signé Oslo,
20:49 elles ont dit qu'on acceptait avoir deux États,
20:52 mais aussi, elles ont fait des choses
20:54 qui démontrent que non, c'est pas du tout vrai,
20:56 qu'elles ne s'intéressent pas du tout.
20:57 Elles ne s'intéressent pas,
20:58 que c'est plutôt comme un cheval de trois.
21:02 Donc, elles ne veulent pas, elles ne s'intéressent pas
21:04 parce qu'elles tiennent toujours à cette idée de retour des réfugiés
21:09 et elles ne cherchent que à démanteler l'État israélien.
21:13 Et aussi, il y a toujours des problèmes avec Jérusalem,
21:17 à Aqsa, le fait qu'on fait toujours les...
21:19 On fait...
21:21 Le côté palestinien dit toujours les choses pour...
21:24 Pour...
21:28 - Faciliter.
21:29 - Pour voir la situation même plus sévère
21:30 en disant des choses qui sont toutes bêtes,
21:33 comme si on voulait s'attaquer à la mosquée,
21:36 qui n'est pas du tout vraie.
21:37 Et aussi, on a eu toujours des propos de Mahmoud Abbas
21:42 qui sont antisémites,
21:45 qui démontrent un manque de compréhension,
21:47 qui démontrent un manque de volonté
21:52 de vraiment vivre en paix avec du respect.
21:55 Et avec ce manque de confiance,
21:58 il y a le problème que le droit israélien,
22:00 le droit israélien dit qu'il n'y a pas de partenaire de paix.
22:03 - Il n'y a pas de... Pardon?
22:05 - Il n'y a pas de partenaire de paix.
22:06 On peut les accuser de mauvaise foi, qui est vraie,
22:09 mais c'est vrai que si on veut négocier avec des gens
22:12 qui ont de bonne foi, qui veulent vraiment trouver une solution,
22:15 ni l'un ni les deux côtés sont...
22:18 des bons acteurs.
22:21 Et quand Netanyahou dit qu'il n'y a pas un bon partenaire de paix,
22:27 bien qu'il s'en sert pour ses propres agendas politiques,
22:32 mais il n'a pas peur.
22:34 - Oui. Michel Duclos voulait peut-être rebondir.
22:37 Il y a eu le problème, ce n'est pas le bon partenaire de paix.
22:40 Il y a des hésitations, c'est ce qu'a l'air de dire Michael Shurkin,
22:43 qui a finalement un peu poussé la situation à...
22:48 - Si vous voulez, les Israéliens sont victimes de leur propre succès.
22:53 Et ils légitimisent ou ils rationalisent
22:56 le fait qu'ils ont estimé ne pas avoir besoin
22:59 de faire plus de concessions,
23:01 puisqu'ils paraissaient avoir tout sous contrôle.
23:04 Et là, c'est clair qu'il y a un moment où ça...
23:09 - Ils avaient trop confiance, justement.
23:11 Il y a eu une affaire du Brexit.
23:13 - Sur Gaza, j'ai expliqué pourquoi c'était un peu étonnant
23:17 qu'ils n'aient pas anticipé.
23:18 Mais il y a quand même probablement des éléments.
23:19 Par exemple, ils avaient développé une politique
23:23 de limitation de l'embargo total.
23:26 Et ils avaient offert des contrats de travail
23:28 à plusieurs milliers de Gazaouis.
23:31 Donc, ils pouvaient penser que le Hamas avait un intérêt
23:36 à empocher ça et à conserver une certaine stabilité.
23:40 D'ailleurs, au cours des derniers mois,
23:41 on avait vu que le Hamas visait plutôt une déstabilisation
23:45 de la Cisjordanie que des attaques sur la limite avec Israël.
23:52 Et donc, au fond, là, il y avait quand même des raisons
23:56 qui pouvaient laisser penser.
23:57 Mais encore une fois, rétrospectivement,
23:59 c'était un aveuglement.
24:00 Mais en même temps, c'est toujours plus facile aussi
24:01 de dire les choses... - Après.
24:03 - Après. - Après coup.
24:04 - Mais il y avait des éléments qui pouvaient peut-être
24:07 les persuader qu'après tout, la situation était sous contrôle.
24:11 En plus, cette fois, dans le système technique,
24:17 dans l'appareillage électronique, etc.
24:21 Donc, voilà peut-être quelques facteurs
24:23 qui pouvaient expliquer l'espèce d'aveuglement
24:25 dans lequel ils y sont enfermés.
24:27 - Pierre-Emile Buitard. - Moi, c'est précisément
24:29 pour ça que je pense que les grandes puissances
24:30 ont une responsabilité importante,
24:33 parce qu'ils ont justement laissé accréditer l'idée
24:35 que ce conflit était gérable,
24:36 que c'était un conflit de basse intensité,
24:38 qu'on pouvait résoudre la question palestinienne
24:40 en faisant un méga deal économique entre Israël
24:43 et les monarchies pétrolières du Golfe,
24:44 qui allaient donner un peu d'argent pour apaiser les masses.
24:48 Mais on se rend compte de la centralité,
24:51 de l'universalité, de la persistance
24:52 de la question palestinienne,
24:54 qui continue de résonner du Maroc jusqu'à l'Indonésie
24:56 pour de bonnes ou de mauvaises raisons,
24:58 parce que M. Cherkin a raison de dire
24:59 qu'aussi bien M. Abbas que le Hamas
25:02 ont un fonds antisémite véritablement présent,
25:05 mais cela n'empêche que pour lutter
25:08 contre ces idéologies de haine,
25:09 on ne peut que commencer par des critères
25:12 qui soient les mêmes pour tous, le droit international.
25:15 Nous nous battons pour l'Ukraine,
25:18 nous ne pouvons pas accepter que,
25:19 parce qu'ils ne sont pas blonds avec les yeux bleus,
25:21 les Palestiniens soient laissés dans l'indifférence,
25:23 alors qu'eux aussi sont agressés et occupés
25:25 depuis des décennies.
25:26 Il y a en Israël, en tout cas, une logique d'union nationale.
25:30 Benyamin Netanyahou aimerait bien mettre en place
25:32 un gouvernement d'union nationale.
25:34 On va écouter Yair Lapid,
25:36 qui a été interviewé par Marc Perelman sur France 24.
25:41 Ce qui arrivera à la fin,
25:45 c'est qu'il n'y aura plus de Hamas à Gaza.
25:47 Ce que nous faisons à l'heure actuelle,
25:50 c'est d'éliminer toutes les capacités terroristes
25:53 dont dispose le Hamas.
25:56 De mon point de vue,
25:58 il faudrait que l'autorité palestinienne
26:00 reprenne le contrôle de Gaza, comme elle l'a fait auparavant,
26:02 mais ça, c'est encore incertain.
26:04 Il reste encore de nombreux inconnus.
26:06 Mais à l'heure actuelle, ce que nous sommes déterminés à faire,
26:09 c'est de veiller à ce qu'il n'y ait plus de Hamas,
26:12 ni de capacités du Hamas à Gaza,
26:13 pour ne plus faire de nous de nouvelles victimes.
26:16 Trop, c'est trop.
26:17 Ce qui s'est passé ne se reproduira plus.
26:22 Michael Shorkin, donc là, ça veut dire,
26:23 clairement, c'est ce que disait Michel Duclos,
26:25 donc réétablir cette dissuasion, ça peut aller très loin, du coup.
26:30 C'est vrai, très loin.
26:32 Ils vont chercher le fer.
26:34 J'ai l'impression que j'ai, d'après tous mes contacts israéliens,
26:36 tout ce que je vois dans les médias israéliens,
26:38 c'est qu'on a déterminé, cette fois-ci,
26:40 on va aller jusqu'au bout.
26:42 Je ne sais pas ce que c'est, "jusqu'au bout".
26:43 Mais qu'est-ce que ça veut dire, "jusqu'au bout", justement ?
26:44 Vous disiez qu'il y a eu des hésitations avant.
26:46 On va faire une grande invasion terrestre.
26:49 Il y aura des combats, ça va être sanglant.
26:51 Et on va essayer de détruire.
26:54 Mais il y a cette détermination de le faire,
26:56 qui n'était pas là avant.
26:58 Ce n'était pas avant. Maintenant, c'est ça.
27:00 Et c'est pour ça que je crois que vous avez eu tout à fait raison
27:02 quand vous avez parlé d'abord,
27:06 quand vous avez parlé du fait que nous sommes dans une autre phase.
27:09 Ça, c'est différent.
27:10 Il y a d'abord la barbarie du côté palestinien,
27:13 mais il y a aussi cette détermination d'aller jusqu'au bout,
27:16 qui va être destructive.
27:18 Ça va être vraiment terrible, ce qui va se passer.
27:21 Donc là, le prix sera beaucoup plus élevé encore que toutes les guerres.
27:24 - Oui, c'est sûr. - Le prix humain, je veux dire.
27:27 Oui, c'est sûr. C'est sûr.
27:29 - Michel Duclos ? - Il n'y a aucun doute.
27:31 Je crois qu'il n'y a aucun doute.
27:32 Ça risque de s'élever en dizaines de milliers de victimes, cette fois-ci.
27:36 Et si on souhaite vraiment éradiquer le Hamas,
27:39 je ne vois pas ce qui va émerger à la place du Hamas.
27:41 Ce n'est pas un centriste à la François Bayrou
27:43 qui va émerger de ce champ de ruines.
27:44 - Alors, il parle de l'autorité palestinienne.
27:46 Vous avez vu, Yair Lapid,
27:47 donc ça pourrait la faire revivre un peu,
27:51 cette autorité palestinienne.
27:53 - Ou lui porter le coup de grâce,
27:55 parce qu'ils se sont perçus comme incompétents, corrompus.
27:57 Ils se sont perçus comme ayant justement laissé la scène à d'autres.
28:02 Le Hamas et à travers lui l'Iran
28:04 s'efforcent de confisquer, de kidnapper
28:06 cette question palestinienne, de l'islamiser.
28:08 Et donc, un vieux leader comme M. Abbas,
28:11 dont le mandat a expiré en 2008,
28:13 on ne peut pas espérer grand-chose de lui.
28:15 - Sur l'autorité palestinienne, Michel Duclos.
28:18 Parce qu'il est vrai qu'il n'y a pas eu d'élection depuis 15 ans.
28:21 C'est ça, Markoud Abbas, donc, décrédibilisé.
28:24 C'est ça, mais c'est lui qui parle encore avec Emmanuel Macron.
28:26 Là, effectivement, Yair Lapid parle de l'autorité palestinienne.
28:30 - Oui, mais est-ce que ça prouve qu'effectivement,
28:32 il n'y a pas d'autre recours ?
28:35 Mais est-ce que vous croyez que nos dirigeants
28:38 croient vraiment à ce qu'ils disent ?
28:41 Je ne sais pas.
28:42 - Parce que, paraît-il, moi, je ne connais pas,
28:44 je n'ai pas participé récemment à des réunions
28:47 avec les Palestiniens,
28:49 mais ce qui, paraît-il, est très frappant,
28:52 c'est que...
28:54 - Markoud Abbas ?
28:58 - Markoud Abbas est en pleine forme.
29:00 Il est à la fois très vieux,
29:02 mais il ne donne absolument aucun signe
29:06 de vouloir assurer une relève quelconque, si vous voulez.
29:09 Et donc, il est dans une forme d'enfermement mental
29:14 qui fait que, comme je crois, on l'a dit déjà tout à l'heure,
29:17 ni d'un côté ni de l'autre,
29:20 il n'y a d'interlocuteur pour une négociation quelconque.
29:25 Et là, effectivement, on revient à la communauté internationale,
29:29 mais le drame, c'est que, plus que jamais,
29:33 le P5, la Chine, la Russie, les Etats-Unis...
29:37 - Les Etats-Unis, on attend une allocution de Joe Biden.
29:40 Eux, ils soutiennent Israël, clairement.
29:42 - Oui, bien sûr, ils vont soutenir...
29:44 Mais nous aussi, on soutient Israël sans hésitation.
29:48 Dans ce genre de situation,
29:50 il est évident qu'il faut soutenir Israël.
29:52 Mais ce que je veux dire, c'est qu'actuellement,
29:55 il n'y a pas d'interlocuteur sur place
29:57 pour envisager une discussion, une négociation,
30:01 et qu'il n'y a pas non plus, à l'échelon international,
30:04 de mécanisme, de volonté de forcer un processus de règlement.
30:09 - Michael Shurkin, dans quelle mesure les Américains
30:12 aident militairement Israël ?
30:13 On parlait des mouvements du porte-avions,
30:16 mais il y a aussi une aide en munitions, c'est ça ?
30:18 - C'est une question de munitions, de soutien matériel.
30:22 Et la porte-avions n'est pas là pour Israël,
30:25 c'est là pour, à mon avis, Iran.
30:27 - Vous disiez que c'était pour dissuader.
30:29 - Mais il y a toujours l'aide en renseignements
30:32 et l'aide matérielle.
30:34 On a l'image de la guerre de Kippur,
30:36 où il y a eu tout un convoi
30:39 des avions négroporteurs américains
30:42 avec des pièces détachées,
30:44 qui étaient là pour que les armées israéliennes
30:46 puissent continuer à fonctionner.
30:48 Peut-être on va faire la même chose,
30:51 c'est-à-dire les missiles, les ammunitions, les ébouts, etc.
30:54 C'est un peu moins clair,
30:56 parce que c'est pas évident que les Israéliens
30:59 ont besoin de ce genre d'aide.
31:02 Pas pour l'instant et pas pour un conflit avec le Gaza.
31:05 Mais au cas où le conflit devient plus grand avec l'Israël,
31:12 ça va changer les données.
31:13 - Ça voudrait dire quoi ?
31:15 - Que l'échelle du conflit va être beaucoup plus grande
31:17 et le besoin matériel va être énorme.
31:20 En Ukraine, l'échelle de soutien qu'il faut
31:23 pour mener la guerre moderne,
31:25 c'est presque comme la Première Guerre mondiale.
31:28 On a besoin de quantités énormes.
31:30 - Avec quelles conséquences sur l'approvisionnement de l'Ukraine ?
31:34 - Tout dépend des munitions.
31:36 - Est-ce que c'est les mêmes types d'armes ?
31:38 - Je ne sais pas, mais ça se débatte.
31:41 Je ne sais pas si c'est clair qu'il y a des conséquences,
31:44 parce que les ressources américaines sont assez grandes.
31:47 On a toujours de quoi donner à tout le monde.
31:50 - Livrer à l'Ukraine et livrer à Israël.
31:55 - Certaines choses qu'on donne à l'Ukraine,
31:57 les Israéliens n'en ont pas besoin.
32:00 Je ne crois pas qu'ils en ont besoin d'eau boue.
32:02 Il y a aussi des stocks américains d'eau boue
32:05 qui sont en Israël.
32:06 On peut simplement les laisser...
32:08 Ce genre de choses.
32:10 - L'aide américaine à Israël s'élève à 4 milliards de dollars par an.
32:14 Depuis la création de l'État d'Israël,
32:16 on a dépassé les 125 milliards de dollars.
32:18 Ce qui est frappant, c'est l'impuissance de la puissance.
32:21 Pour reprendre l'expression de Bertrand Badi,
32:24 on a dépensé une fortune sur le fameux Iron Dome,
32:26 avec les résultats que l'on voit.
32:28 Les services de renseignement ont été aux abonnés absents.
32:31 - Le don de ça, il fonctionne quand même assez bien.
32:35 - Il fonctionne, mais il y a quand même pas mal...
32:38 Il suffit que quelques...
32:40 - Pas parfait.
32:41 - Voilà. Et les dégâts sont quand même au rendez-vous.
32:44 Ce qu'on voit en Israël, c'est ce qu'on a vu à l'échelle mondiale.
32:48 La guerre contre le terrorisme, quand elle est mal pensée,
32:51 produit plus de victimes que le terrorisme lui-même.
32:54 Après le 11 septembre,
32:55 les Etats-Unis ont déclaré une guerre globale
32:58 contre le terrorisme, qui a coûté, selon Joseph Stiglitz,
33:01 prix Nobel d'économie, au moins 11 000 milliards de dollars.
33:04 On a aujourd'hui infiniment plus de foyers terroristes
33:07 qu'en 2001. - Est-ce que vous comparez
33:09 le Hamas à l'Organisation de l'Etat islamique ?
33:12 C'est ce que font les Etats-Unis ? - Non.
33:14 Le Hamas est un mouvement qui a recours
33:16 à des pratiques terroristes, mais qui s'inscrit
33:19 dans un contexte islamo-nationaliste,
33:21 dont l'objectif principal est local.
33:23 Le Hamas est capable de mener des actions
33:26 d'une barbarie inouïe, on l'a vu cette semaine,
33:28 mais son objectif n'est pas, à mon avis,
33:31 de frapper New York ou Paris.
33:33 - Pourquoi est-ce qu'il le compare
33:35 à l'Organisation de l'Etat islamique ?
33:37 - Il le fait pour faire une équivalence morale.
33:39 Tout le monde déclare que l'Etat islamique est mal,
33:42 c'est le mal, donc on veut établir l'idée
33:45 que Hamas est mal, donc c'est le mal absolu.
33:47 C'est ça, donc c'est une question de rhétorique.
33:50 C'est pour ça qu'il le fait. Il ne veut pas faire...
33:53 Il ne veut pas dire que, de point de vue organisé,
33:56 organisationnel ou idéologique,
33:58 c'est pas du tout la même chose.
34:00 Et avec l'Al Qaïda, la seule chose qu'on a ensemble,
34:03 c'est l'antisémitisme, qui se trouve au coeur de l'Al Qaïda.
34:06 - En quoi l'organisation est très différente, finalement ?
34:09 Je vais vous faire agir aussi, Michel Duclos,
34:12 entre l'Organisation de l'Etat islamique et le Hamas.
34:15 - Hamas gouverne, Hamas a une administration,
34:18 Hamas fait des choses.
34:19 L'Etat islamique a fait des choses comme ça en Syrie,
34:23 mais c'est différent, c'est une idéologie différente,
34:27 et c'est moins pour bâtir.
34:30 C'est un projet politique.
34:33 Je crois qu'il a tout à fait raison
34:35 de dire que Hamas a un projet qui est local,
34:38 qui est dans la zone palestinienne.
34:40 - Donc il se rapproche plus du Hezbollah, ça serait ça ?
34:43 - Oui, sauf que les objectifs de Hezbollah, c'est compliqué.
34:49 - Il y a des points communs.
34:51 - C'est un mouvement sunnite.
34:52 Au début de la révolution syrienne,
34:54 les relations avec l'Iran s'étaient tendues.
34:57 Aujourd'hui, elles sont de nouveau solides.
34:59 Il y a un front qui s'est constitué,
35:01 l'axe de la résistance,
35:03 composé du Hamas, du Hezbollah, du djihad islamique.
35:06 Si l'Iran leur lâche la bride, ça peut devenir dangereux.
35:09 Vous avez raison, c'est pour cela que monsieur Blinken
35:12 évite de pointer directement du doigt l'Iran.
35:15 - Michel Duclos.
35:16 - Ce qui me semble, si vous voulez,
35:18 et je suis moins compétent que nos autres invités,
35:22 il me semble que ces mouvements,
35:25 comme toute chose dans ce monde, évoluent.
35:28 Et qu'au fond,
35:30 Daesh s'est à un moment donné territorialisé
35:35 et a créé quand même un semi-État, un pseudo-État.
35:39 Et le Hamas, c'est presque l'évolution inverse.
35:42 Ils avaient un État croupion à Gaza.
35:45 Et d'ailleurs, peut-être que c'est ça,
35:48 l'erreur de fond des dirigeants israéliens.
35:51 Ils ont cru que finalement,
35:53 ils allaient finir par s'embourgeoiser
35:55 dans leur État croupion.
35:56 Or, ils font l'évolution inverse.
35:58 Ils se radicalisent dans l'horreur, si je puis dire.
36:02 Et donc, le terrorisme, au départ,
36:04 c'était pour eux un instrument parmi d'autres.
36:07 Là, ça donne l'impression que ça devient une fin en soi,
36:10 puisqu'on ne voit pas l'objectif politique qu'ils poursuivent.
36:14 -Et encore une fois, aller jusqu'à détruire le Hamas,
36:17 ça veut dire détruire les têtes pensantes, j'imagine,
36:20 qui sont à Gaza.
36:21 -C'est ça qui est un peu étonnant.
36:24 Il y a une impression de déjà-vu.
36:26 A chaque épisode, c'est ce que disent les Israéliens.
36:31 A chaque épisode, on peut couper toutes les têtes qu'on veut,
36:36 des chefs, il y a toujours de nouveaux dirigeants qui se présentent.
36:40 Et puis, aller chercher un par un les gens du Hamas
36:45 dans les rues surpeuplées de Gaza,
36:50 dans les ruines, dans les caves,
36:52 ça paraît quand même extrêmement difficile.
36:55 -Un mot sur le Liban, puisque vous êtes Libanais,
36:58 Karim-Emile Bittar.
36:59 Comment se comporte la classe politique ?
37:02 Le Premier ministre libanais a parlé à Emmanuel Macron.
37:05 Aujourd'hui, est-ce qu'on a peur au Liban
37:08 qu'il y ait un embrasement du conflit ?
37:09 On sait que la situation libanaise est quand même très compliquée,
37:13 économiquement, politiquement.
37:15 -La classe politique est absente, incompétente,
37:18 aucune diplomatie libanaise,
37:20 mais la population libanaise est extrêmement angoissée,
37:23 car le Liban ne pourrait pas supporter une nouvelle guerre.
37:27 Ce serait le coup de grâce pour un pays
37:29 qui traverse déjà une crise politique et économique sans précédent.
37:33 Et même, je crois que le Hezbollah le réalise,
37:35 car en 2006, le Hezbollah avait pu compter
37:38 sur une solidarité des autres communautés libanaises,
37:41 avait été accueilli dans d'autres régions.
37:43 Cette fois-ci, le Hezbollah s'est fait tellement d'animosité
37:47 au sein même du Liban que ce sera beaucoup plus difficile
37:50 si c'est le Hezbollah qui prend l'initiative
37:53 d'ouvrir un deuxième front.
37:54 -Vous pensez que là, il pourrait hésiter
37:57 parce que l'opinion est contre,
37:59 parce que les forces économiques sont contre,
38:01 parce qu'il y a quand même une déliquescence de l'État au Liban.
38:05 -Le Hezbollah s'était forcé jusqu'à aujourd'hui
38:08 de faire cette séparation.
38:09 Ce n'est pas officiellement eux qui ont tiré les roquettes,
38:13 mais un groupe proche du djihad islamique.
38:15 Cela dit, s'il y a une décision iranienne,
38:18 le Hezbollah ne pourra que suivre.
38:20 -Jusqu'ici, on partait tous du présupposé
38:23 que l'Iran n'utiliserait la cartouche du Hezbollah
38:27 que si vraiment, en cas de situation extrême,
38:31 c'est-à-dire si l'Iran elle-même était menacée par Israël.
38:35 On pensait que tant qu'on n'en serait pas
38:38 dans ce type de scénario,
38:40 le Hezbollah ferait de la figuration,
38:43 on verrait quelques roquettes,
38:45 mais il n'irait pas jusqu'au bout.
38:47 Là, aujourd'hui, justement, la situation atteint
38:50 un tel degré de violence, d'escalade,
38:53 qu'on peut se poser la question
38:55 si ce schéma habituel va continuer à s'appliquer.
38:58 -Vous n'êtes pas...
39:00 -C'est pour ça que la diplomatie internationale doit s'activer.
39:04 Si on doit éradiquer le Hamas,
39:05 il y a une telle densité de la population,
39:08 même si vous voulez éliminer tous les chefs du Hamas,
39:11 il y a 2,2 millions de personnes, dont 50 % d'enfants à Gaza.
39:14 Si vous arrivez à 10 000, 20 000, 30 000 victimes,
39:17 vous allez avoir des sentiments de frustration,
39:20 de haine, d'humiliation,
39:21 qui vont ressurgir partout dans le monde, y compris en Europe.
39:25 C'est pour ça que je suis surpris de voir
39:27 les dirigeants occidentaux aussi timorés
39:30 et répéter les platitudes habituelles.
39:32 -Vous voudriez qu'ils fassent quoi, pour être clair ?
39:35 -Le temps est venu de convoquer une vaste conférence internationale,
39:39 de montrer envers Israël une certaine sévérité,
39:42 de demander à Israël de respecter le droit international.
39:45 Si ce n'est pas le moment, après ce qu'on a vu,
39:48 ça fait 50 ans qu'on nous dit qu'on laisse courir la situation.
39:51 -C'est nécessaire pour régler le problème
39:54 avec le reste de la Palestine, avec le reste des Palestiniens,
39:57 pour détruire Hamas, pour faire face au Hamas,
40:00 pour essayer de rétablir cette situation qui est vraiment critique.
40:03 La communauté internationale ne peut rien faire
40:06 sauf communiquer qu'on n'a pas de patience.
40:09 C'est pour ça que ça sent trop et trop,
40:11 comme Lapide a dit, il faut faire quelque chose.
40:14 C'est-à-dire que je sais qu'on peut pleurer...
40:16 On sait ce qui va venir, ça va être terrible,
40:19 mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas agir,
40:21 parce qu'il faut agir, il faut détruire Hamas,
40:24 il faut rétablir la situation.
40:26 On ne peut pas laisser en place.
40:28 -Après, il y a la question des civils,
40:30 c'est toujours pareil, on pense aux civils.
40:32 -Les autres communautés palestiniennes,
40:35 c'est d'autres choses.
40:36 Mais quand il s'agit de Hamas, il faut l'éliminer.
40:39 Mais ça, c'est un problème,
40:41 parce qu'il n'y a pas une bonne façon de le faire
40:43 qui ne va pas faire du mal.
40:45 -Et comme disait Karim El-Bittar, 2 millions de personnes à Gaza,
40:48 il n'y a pas d'abri, ça veut dire que la population civile
40:52 va être extrêmement dure.
40:53 Rien qu'avec le blocus, l'état de siège,
40:56 ça va être beaucoup de souffrance ?
40:58 -Oui. Il faudra être sur place
41:01 pour mesurer ce que pensent les Palestiniens
41:04 en Cisjordanie.
41:06 Effectivement, le Hamas avait pris davantage de prestige
41:10 à cause du discrédit de l'autorité palestinienne.
41:13 Est-ce que c'est encore vrai aujourd'hui ?
41:15 C'est ça qu'il faudrait pouvoir voir de plus près.
41:18 De même, du côté israélien,
41:21 il y a une colère gigantesque contre le Hamas,
41:25 comme on peut le comprendre.
41:26 Il y a aussi une très grande colère contre le gouvernement de Netanyahou.
41:31 Donc, dans l'océan de désastre et de malheur
41:37 qu'on vient d'évoquer,
41:39 peut-être que l'espoir, c'est que les mentalités
41:43 finissent par évoluer de part et d'autre.
41:46 -C'est-à-dire ?
41:48 -Je vous l'ai dit, pour l'instant,
41:50 il n'y a pas d'interlocuteur pour la paix.
41:53 Je crois qu'effectivement, la communauté internationale,
41:56 en tous les cas, la France et l'Europe,
41:58 doivent à la fois condamner avec la dernière énergie le Hamas,
42:03 se solidariser totalement avec Israël
42:06 et en même temps faire valoir les droits des Palestiniens,
42:10 comme on dit dans le langage diplomatique,
42:13 parce que si ces droits ne finissent pas
42:16 par être connus un jour,
42:17 il y aura tout le temps l'escalade de la violence.
42:22 -Merci beaucoup, Karim-Emile Bittar.
42:24 Michael Churkin, merci à vous.
42:26 Michel Duclos, voilà ce qu'on pouvait dire
42:28 dans ce débat au 4e jour, après l'attaque du Hamas en Israël.
42:32 Voilà ce qu'on pouvait dire sur cette guerre
42:35 entre Hamas et Israël.
42:36 Vous pouvez retrouver l'émission sur les réseaux sociaux
42:40 ou en podcast. Je vous dis à demain.
42:42 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
42:44 ...

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