Forum des Entrepreneurs - Transformer la France, est-ce possible ?

  • l’année dernière
Transition énergétique, révolution du travail, IA, réindustrialisation… Les défis qui nous attendent sont nombreux. Face à cette multiplicité de transformations, comment faire accepter le changement ? Quelle implication cela nécessite-t-il de la part des politiques ? Des entreprises ? Du citoyen ?
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00:00 [Musique]
00:08 Nous allons reprendre le fil de nos débats au cours de cette journée au Stade Vélodrome.
00:18 "Transformer la France, est-ce possible ?" Voilà le sujet.
00:23 On commencera par poser la question de savoir si on a vraiment besoin de la transformer d'ailleurs.
00:27 Sujet dont nous allons débattre avec Mathilde Lemoyne, chef économiste du groupe Edmond de Rothschild qui va venir me rejoindre.
00:33 Bonjour Mathilde. Avec Haïm Corsia, le grand rabbin de France, avec Christian Delarbre, l'archevêque d'Aix en Provence,
00:42 et avec Jean-Christophe Tortora, le président de la tribune.
00:46 Asseyez-vous et nous allons commencer à débattre.
00:56 Voilà. Jean-Christophe, je te remercie d'être là parce que je me disais qu'il fallait quand même un petit peu de créateur de richesse.
01:03 De vrai, de chef d'entreprise. Allez-y, allez-y, ça marche, ça marche.
01:11 Je suis vexé, enfin pour madame d'abord, parce que ça veut dire que la pensée économique n'est pas créatrice de richesse
01:18 et que l'espérance et la foi n'est pas non plus créatrice de richesse humaine.
01:21 Nous sommes tous à notre façon créateurs de richesse humaine.
01:26 Oui, mais il faut quand même qu'à un moment, il y en ait un qui crée les richesses matérielles et physiques, non ?
01:31 Oui, c'est vrai, mais il peut le faire que s'il est fondé sur une idée et sur une espérance.
01:36 Le travail, ce n'est pas uniquement une production, c'est aussi une aspiration à transformer le monde par l'action.
01:42 C'est la bénédiction que vous faites à la messe.
01:44 En gros, si je puis me permettre, monseigneur, vous dites que vous bénissez sur le vin le produit de la terre et le travail des hommes.
01:52 Donc en fait, c'est la rencontre entre une aspiration et une capacité à faire.
01:56 C'est la même chose avec la pensée.
01:58 Pour moi, la pensée économique, c'est aussi créateur de richesse, en tout cas de confiance.
02:03 J'adorais cette réponse. Monseigneur, vous voulez...
02:09 Bien sûr, on entend les mêmes choses.
02:12 J'ai bien fait de poser la question.
02:15 Il y a une participation pour un chrétien, il y a une participation à la création.
02:20 C'est-à-dire la création, le travail humain est légitime lorsqu'il participe à la création.
02:25 Donc ça lui donne un certain nombre quand même de critères.
02:29 Est-ce que c'est un travail qui participe à la création ?
02:33 Alors chacun, on va entendre cela d'un point de vue chrétien, théologique.
02:38 Aujourd'hui, tout est lié du pape François sur l'écologie, par exemple.
02:42 Dans quelle mesure notre production de richesse est une vraie richesse ?
02:46 Ou est-ce qu'elle est une appropriation ? Est-ce qu'elle est une captation ?
02:51 Donc il y a une question de fond qui est liée à ce qu'est le travail humain,
02:55 à ce que l'on considère le travail humain comme une participation à la création,
02:59 comme un déploiement, comme une réalité qu'on fait grandir,
03:03 et pas comme une appropriation.
03:06 Mathilde, j'adore ce sujet. C'est une autre table ronde, mais j'adore ce sujet.
03:11 Peut-être pour rebondir sur ce qui vient d'être dit,
03:15 effectivement l'économie peut permettre de hiérarchiser les instruments et les objectifs.
03:21 En fait, malheureusement, la microéconomie c'est assez utile
03:25 dans la perspective de créer des richesses,
03:29 parce qu'elle explique que tout n'est pas possible en même temps.
03:33 C'est une des problématiques à laquelle on est confronté aujourd'hui.
03:37 On ne peut pas en même temps garantir le pouvoir d'achat,
03:40 faire la transition énergétique, assurer la souveraineté européenne,
03:44 permettre le développement des entreprises. Ce n'est pas possible.
03:48 Ensuite, bien sûr, c'est aux politiques de choisir,
03:52 mais cette "production intellectuelle" est utile pour mieux hiérarchiser les ambitions politiques.
04:02 - Jean-Christophe, tu reprends cette idée ?
04:05 On va aller vraiment sur la transformation, je vous rassure.
04:09 Cette idée d'Aïm Korsia, qui va me faire réfléchir toute la journée,
04:14 peut-être même davantage, on ne peut produire qu'une fois qu'on a réfléchi à ce pour quoi on produisait.
04:20 - J'ai trouvé ta question qui nous permet de nous réveiller déjà en début d'après-midi.
04:26 - Important !
04:28 - Nous sommes à l'UPE avec plein de chefs d'entreprise,
04:31 je pensais que si il n'y avait que des chefs d'entreprise dans la société, on s'ennuierait.
04:36 Je suis entrepreneur depuis l'âge de 20 ans, on a besoin aussi de fonctionnaires de grande qualité,
04:43 on a besoin d'infirmiers, d'hôpitaux, de femmes et d'hommes qui sont investis sur les questions de religion.
04:51 Je défends l'entreprenariat, mais laisser penser qu'une société uniquement avec des chefs d'entreprise,
04:56 je pense qu'on s'ennuierait.
04:58 - Il n'y a pas les créateurs d'un côté et les profiteurs de l'autre.
05:02 Je voulais quand même en bon élève de philo interroger le sujet au départ,
05:08 transformer la France est-ce possible ?
05:10 Oui mais d'abord, faut-il transformer la France ?
05:14 - Stéphane, peut-être que tu ne le sais pas,
05:17 mais nous la Tribune, on a fait pendant un an une tournée en France
05:21 sur le thème "transformons la France au cœur des régions".
05:24 On a démarré ce tour de France il y a un an, en se disant avec la rédaction,
05:28 finalement on voit ces blocages, on voit quelquefois ces incompréhensions
05:34 entre la verticalité, entre Paris et les régions.
05:37 Alors je vais profiter puisque le président Renaud Mauselier n'est pas là,
05:41 mais moi je pense que pour transformer la France,
05:44 il faut être dans la proximité et dans la décentralisation.
05:48 Et je trouve que Marseille ici symbolise bien justement une métropole qui arrive à se réinventer,
05:53 mais un des éléments sur lesquels moi je me bats en tant que chef d'entreprise
05:57 et patron d'un journal, c'est que tant qu'on sera trop dans un modèle français
06:03 très jacobin, ces blocages existeront.
06:06 Et on le voit bien, c'est que quand on interroge les Français,
06:09 là où ils ont un rapport de confiance avec les politiques,
06:12 ce sont les maires, ce sont donc les femmes et les hommes qui sont en proximité,
06:16 ce sont les présidents de régions, et dès qu'on s'éloigne,
06:21 et donc voilà, moi ce que je voulais dire pour démarrer,
06:24 c'est que pour transformer la France, il faut être en capacité à ce que le président de la République,
06:28 dont on a dit qu'il était très jupitérien,
06:31 redescende du siècle pour être plus en proximité avec les concitoyens.
06:37 Monsieur le Rabbi.
06:39 D'abord il y a une chose, aucun système humain, aucun,
06:42 ne peut vivre s'il ne se transforme pas. Aucun.
06:46 Vous voyez la même personne, mais ses cellules ont changé.
06:50 Il y a un axiome célèbre qui veut que Christophe Colomb ait traversé l'Atlantique
06:56 avec la Pinta, la Nina, la Santa Maria,
06:59 mais il a fait des réparations, il a changé des planches,
07:02 au retour il a changé encore d'autres planches,
07:04 bref au bout de trois traversées, c'était plus une seule planche du bateau original,
07:07 et pourtant c'était toujours la Pinta, mais plus la Pinta.
07:10 La réalité c'est qu'aucun système humain ne peut vivre sans se transformer.
07:15 J'ose parler encore de vos cathédrales,
07:18 quand j'étais rabbin de Reims, ma cathédrale à Reims,
07:21 je ne l'ai jamais vue sans un échafaudage.
07:23 Il y a toujours une transformation.
07:25 Une entreprise c'est la même chose, la France c'est la même chose.
07:28 Nous avons les valeurs qui sont celles de toujours,
07:31 on chante encore les louanges de Jeanne d'Arc,
07:34 on pense à Louis XI, on pense à Louis XIV,
07:37 on pense à toute notre histoire, à Vercingétorix et à Clovis si vous voulez,
07:41 mais c'est une France adaptée, avec ses valeurs,
07:45 mais adaptée au monde d'aujourd'hui.
07:47 Sans transformation, il n'y a pas d'adaptation et c'est impensable.
07:50 L'idée c'est plutôt comment faire que cette transformation
07:53 nous permette d'avoir un temps d'avance sur le monde,
07:56 pour anticiper et ne pas subir le monde.
07:59 Mathilde ?
08:01 Oui, évidemment la France a besoin d'être transformée,
08:04 notamment parce qu'elle est en train de s'appauvrir relativement au reste du monde.
08:08 Cette notion dynamique est indispensable
08:12 et explique pourquoi il faut transformer la France.
08:15 Elle est en train de s'appauvrir, ce sont les termes réels dont on ne parle pas assez,
08:20 en termes de richesse par habitant,
08:23 et c'est même spectaculaire vis-à-vis de l'Allemagne, vis-à-vis de l'Amérique,
08:26 mais elle est en train de s'appauvrir justement parce qu'elle ne s'est pas transformée ?
08:29 Oui, c'est mon point de vue.
08:32 Après la vraie difficulté, et c'est pour ça que c'est une table ronde,
08:35 et que ce n'est pas simplement une somme d'intervention,
08:38 c'est qu'il faut se mettre d'accord sur quelles sont les priorités de transformation.
08:43 Et c'est là où il y a des débats, des enjeux politiques
08:46 qui ne sont pas forcément les mêmes que les enjeux économiques.
08:49 Et si on regarde du point de vue strictement de la croissance, aucun autre critère,
08:55 les deux fondamentaux qui expliquent ce besoin de transformation,
09:01 c'est un manque cruel d'investissement,
09:04 pas forcément en flux mais en stock, parce qu'on a subi un certain nombre de crises
09:09 qui fait qu'on est très en retard en matière d'investissement,
09:12 et après ça a des conséquences sur les frustrations, les bas salaires, les inégalités,
09:18 et donc vraiment c'est déterminant.
09:21 Et le deuxième élément fondamental qui occupe le débat public,
09:26 mais sur lequel il y a très peu d'avancée, c'est évidemment l'éducation et la formation.
09:30 Ça fait des années, des dizaines d'années qu'on constate les inégalités d'accès,
09:36 les inégalités originelles, le manque de formation,
09:39 et pour autant ça avance très très lentement.
09:42 - Un bouquin très spectaculaire que je conseille à chacun d'ailleurs de lire encore aujourd'hui,
09:47 "La machine à trier" de Pierre Cahuc,
09:49 qui le premier nous parlait de l'ensemble de ces, c'était quoi,
09:55 disait-il, à peu près 100 000 gamins sur une cohorte de 600 000 chaque année,
10:00 qui sortaient totalement du système, qui n'étaient plus rien.
10:05 - Deux éléments quand même assez factuels, c'est que c'est pas le premier,
10:08 parce que heureusement que la Commission européenne et les Etats ont pris en charge ce sujet,
10:12 et on en créé, entre guillemets, une dénomination statistique
10:16 qui a fait que l'Europe a poussé les Etats membres à s'occuper de ce sujet.
10:19 - Mais c'était il y a 15 ans ça ?
10:20 - Et c'est pas 100 000, c'est 180 000, c'est-à-dire une place d'âge,
10:23 et c'est un des sujets, puisque aujourd'hui la France est encore un pays
10:27 où les jeunes qui sortent du système scolaire sans rien
10:30 représentent 16% d'une classe d'âge, contre environ 8% en Allemagne.
10:35 Donc, encore une fois, la transformation c'est aussi, bien sûr, pour pas prendre du retard,
10:42 mais là, ça peut poser des questions philosophiques et d'objectifs,
10:45 pas prendre du retard par rapport à quoi ?
10:47 Est-ce que c'est un enrichissement absolu ?
10:50 - Là, en l'occurrence, c'est pas prendre du retard par rapport à sa jeunesse
10:53 et par rapport à ses gamins qui se paraissent.
10:56 - Voilà, mais c'est pour ça que je pense qu'une des difficultés de transformation,
11:00 c'est qu'il n'y a pas de consensus sur deux ou trois priorités.
11:04 - Oui. Monseigneur.
11:06 - Quand j'ai vu qu'il y avait "transformer la France comme thème",
11:10 je me suis bien posé des questions sur ce que je pouvais raconter à ce propos.
11:14 C'est une expression qui m'apparaît assez étrangère, en fait.
11:17 D'abord parce qu'elle peut être abstraite. Qu'est-ce que vous entendez par la France ?
11:21 Est-ce que c'est un organisme politique ? Est-ce que c'est une puissance économique ?
11:25 Pour moi, c'est un collectif. C'est une nation, c'est un peuple, c'est des gens.
11:29 Ensuite, transformer, c'est beaucoup de...
11:34 Enfin, pour un... Peut-être aussi un aspect religieux, il y a une dimension d'hubris,
11:38 de dire on a la main sur les choses, d'orgueil, si vous voulez,
11:41 de dire on a la main sur les choses, hein, vous inquiétez pas,
11:44 nous allons transformer les choses, on va les maîtriser.
11:47 La France, elle se transforme toute seule. Elle se transforme.
11:51 Les gens, ils vivent des transformations, il y a des réalités qu'on ne maîtrise pas.
11:55 Qui va dire qu'ils maîtrisent ces choses-là ?
11:57 Et effectivement, la question, c'est comment collectivement on appréhende ces transformations,
12:02 ces changements. Le pape François dit que c'est pas un monde de changements,
12:05 c'est un changement de monde. Donc il y a des réalités extraordinairement profondes.
12:10 Est-ce que les cadres de pensée habituels, justement économiques, politiques, philosophiques,
12:15 qui sont utiles, suffisent à appréhender la profonde transformation qui est à l'œuvre en réalité ?
12:23 Et sur quoi on va fonder nos... Alors je vous pose plus de questions,
12:26 mais bon, répondre à des questions par des questions, c'est...
12:29 - Ça permet de réfléchir, ça permet de réfléchir, mon seigneur.
12:32 - Mais vous voyez, cette question sur la transformation, est-ce que d'abord, elle a lieu,
12:36 il y a une réalité, le pays se transforme, les gens vivent des transformations,
12:41 certaines de ces transformations les inquiètent, d'autres de ces transformations font partie de leur vie,
12:47 mais qui dit qu'ils maîtrisent cela ? Vous voyez ?
12:52 - Parce que après, je retournerai vers toi, Jean-Christophe.
12:56 - C'est vrai que le pays se transforme naturellement, je vous l'ai dit,
12:58 il n'y a pas un organisme qui ne peut pas se transformer, c'est obligatoire.
13:03 En revanche, il y a des transformations qu'on peut organiser, inciter.
13:08 On est dans un stade de foot, si votre défense ne marche pas,
13:12 vous changez la défense, vous transformez la défense et vous améliorez la défense.
13:15 Si l'attaque, elle est en panne, vous prenez un attaquant qui sait ce que c'est attaquer,
13:20 qui se place sur les ballons, et vous organisez la transformation de l'équipe.
13:24 La même chose sur la formation, vous avez tellement raison.
13:26 Pourquoi on ne valorise pas tout ce qui est apprentissage ?
13:32 Pourquoi les entreprises prônent l'apprentissage, mais elles le prônent pour les autres, pas pour elles ?
13:36 - Vous êtes sévère, peut-être un million de contrats d'apprentissage vont être passés cette année par les entreprises.
13:40 - Je suis d'accord, mais les taux entre l'apprentissage dans des pays comme l'Allemagne ou d'autres pays,
13:46 et nous, sont quand même scandaleusement... - Inférieurs.
13:51 - Inférieurs, mais on est à 30%. - Mais la dérivée seconde, dirait Mathilde, est positive.
13:54 - Oui, mais la réalité, c'est que, arrêtez de m'embrouiller avec des grandes statistiques,
13:58 moi ce que je vous dis, c'est que j'avais mon enfant, mon fils, quand j'ai dit qu'il allait faire un CAP,
14:05 dans mon environnement, c'était un drame. Comment il ne fait pas Sciences Po, l'ENA, Polytechnique ? C'est un drame.
14:11 Moi j'étais très fier qu'il fasse un CAP. D'ailleurs, en fait, il faisait l'école boule et l'ébénisterie,
14:16 et pour énerver les gens, je leur disais qu'il faisait un CAP menuiserie.
14:19 Mais je voyais bien le regard des gens. Comment le pauvre, son fils, fait de la menuiserie ?
14:24 Mais lui, il aimait le bois, donc c'est formidable. Il faut qu'on revalorise ça vraiment, dans l'esprit, et la transformation.
14:29 Voilà pourquoi je vous disais tout à l'heure, les idées sont importantes.
14:33 Si vous revalorisez le rapport qu'on a au travail manuel, c'est-à-dire à la réalisation de quelque chose,
14:39 alors on revalorise aussi, de facto, la capacité à rendre l'apprentissage accessible pour les familles.
14:45 - Mathilde, on revient là-dessus dans un instant, parce que je sais que c'est ta passion.
14:49 - Non, mais c'est pas ça. C'est extrêmement important, parce que vous avez mis le doigt sur un des blocages de la transformation,
14:56 qui est l'élitisme français. Et on le voit bien, notamment parce que tu renvoyais cette statistique très juste d'un million d'apprentis,
15:05 mais 62% des apprentis ont BAC+2. Donc, en fait, on n'arrive pas, en France, à embarquer les catégories moins qualifiées
15:18 ou qui ont moins d'appétence ou qui ont plus de difficultés à avoir accès à la formation.
15:24 Et le problème, c'est qu'après, on ne peut plus discuter.
15:27 - Je veux bien le procédé rhétorique et dire "ne m'embrouillez pas avec vos statistiques".
15:31 Moi, je crois en la statistique. La statistique, c'est une part de vérité. Sans statistique, alors, on ne peut plus rien dire dans le champ économique.
15:37 - Non, non, non, non, non, non, non. Reprenons son exemple, pardon. Vous avez donc une statistique importante.
15:42 Mais est-ce qu'ils sont heureux de rentrer là-dedans ? Quand elle vous dit "BAC+2", ça veut dire que ce sont des gens qui sont à l'esco-BAC.
15:47 Parce que, je vais vous dire comment ça se passe, on leur dit "enfin, vous n'allez quand même pas orienter votre enfant en fin de 3e ? Enfin, pas vous !".
15:54 "Bah si, pourquoi pas ?" Non. Alors, donc, il fait quand même le BAC.
15:57 Ça le gave profondément d'aller à l'école. Et à un moment, il va BAC+1, BAC+2.
16:01 Et puis, à un moment, il se dit "Allez, je fais de l'apprentissage". Mais il n'en est pas heureux.
16:04 Ce que je vous dis, c'est que les statistiques peuvent donner une somme de personnes qui font quelque chose.
16:08 Mais elles ne vous mesurent pas leur bonheur à faire ça, à vivre ça.
16:11 Non, je me permets juste une correction. Ce que voulait dire Mathilde, c'est que le problème de BAC+2, c'est qu'on se sert de l'apprentissage pour des gens qui, de toute façon, seraient rentrés dans l'entreprise, qui n'en avaient pas besoin.
16:20 C'est ça le problème de ces statistiques. Mais tu ne peux pas nier quand même qu'il se passe quelque chose, même au niveau des CAP que décrivait M. Korshia.
16:30 Non, non, non. Quand on regarde les statistiques, ne serait-ce que depuis 10 ans, je ne fais pas depuis 20 ans, parce qu'on ne va pas remonter.
16:37 Mais en fait, le taux de chômage des pas qualifiés ou des CAP reste entre 50 et 30 % au bout de trois ans de sortie du système.
16:50 Et on n'arrive pas en France à lever ce blocage-là. Et donc, il me semble que c'est une dimension d'autant plus importante.
16:58 Et les chefs d'entreprise le vivent tous les jours, ce problème de compétence, ce problème de trouver des salariés motivés.
17:04 C'est que du point de vue macroéconomique, ça se rejoint avec ces problématiques quotidiennes des chefs d'entreprise.
17:11 C'est qu'on ne peut pas avoir une société où il y a une cohésion sociale, où il y a une croissance qui permet la redistribution,
17:18 s'il n'y a pas un niveau moyen « suffisant ». Et donc, c'est ce qui permet la diffusion des innovations.
17:27 Et donc, le fait qu'il y ait une toute petite partie de la population qui soit très innovante, c'est très bien, mais ça ne fait pas une société.
17:34 Et surtout, ça ne fait pas la macro. En fait, on croit que l'économie, c'est cette petite catégorie de population, et c'est faux.
17:40 Jean-Christophe, deux choses qui sont liées à cette histoire de décentralisation. Il se trouve que la formation, c'est une compétence des régions.
17:50 Ça ne marche pas. Et on avait ce matin une table ronde très impressionnante où la représentante de Total Energy et la patronne d'une entreprise de transport,
18:01 entreprise de taille intermédiaire formidable, disaient toutes les deux la même chose. Les régions, aujourd'hui, sont des institutions bloquantes,
18:09 notamment en ce qui concerne la transition énergétique. Total a, aujourd'hui, elle nous l'a dit, 1,5 gigawatt de puissance de projet qu'ils ne peuvent pas déployer
18:17 parce que, mais votre éolienne, elle sera mieux chez le voisin, mais votre ferme solaire, elle sera mieux chez le voisin, mais votre usine de méthanisation,
18:25 elle sera mieux chez le voisin. La décentralisation, c'est une incantation. Dans la réalité, je me demande si ça n'est pas un pouvoir bloquant, en fait.
18:35 Écoutez, Stéphane, je ne vais pas me mettre à être le porte-parole du président de la région. Renaud Muselier n'est pas là. Mais moi, je ne crois pas que,
18:45 depuis un ministère, on puisse décider de tout. Et je pense que les Français nous le disent très régulièrement. Moi, je pense que la proximité, c'est une vertu.
18:54 Je trouve que, globalement, quand même, on est un peu dur avec les Français en disant qu'ils sont incapables de se transformer.
19:01 Ici, aujourd'hui, on a des centaines d'entrepreneurs qui, quand on dit « Transformons la France », par exemple sur les enjeux de climat ou de décarbonation,
19:10 il y a ceux, les ayatollahs du vert, qui crient, qui gueulent, qui pourraient dire « On va fermer les usines amériniennes d'Airbus hélicoptères »,
19:20 et puis il y a celles et ceux qui, dans leur entreprise, mettent en œuvre des programmes de décarbonisation, développent des nouveaux métiers.
19:27 Et donc, je trouve que ce procès que l'on fait, d'une manière générale, en disant « Les Français ne se transforment pas », ce n'est pas vrai.
19:35 La question qui se pose dans notre débat, c'est « Se transformer, mais pourquoi faire ? » Parce qu'en vérité, les Français, ils ont envie de savoir pourquoi.
19:43 Et on parlait ce matin de la nécessité d'avoir un récit national. Mais aujourd'hui, il y a au moins, je perçois, deux sujets. La question du climat.
19:53 Moi, je pense qu'aujourd'hui, on a beaucoup de chefs d'entreprise qui sont matures, ici, dans cette Assemblée. Et donc, je pense que ça, c'est un vrai récit de dire, finalement,
20:00 « On va créer de la valeur, mais en plus, on va préserver notre planète ». Et donc, moi, je pense que là-dessus, les régions, ça vous déplaira, Stéphane, et les métropoles.
20:11 – Je pose des questions.
20:13 – Heureusement qu'on a des collectivités locales et des élus locaux. On est dans un pays où on aime bien critiquer notre classe politique.
20:20 Mais enfin, on aime bien avoir des petits maires et des petits élus qui, objectivement, franchement, pour ce qu'ils font en termes d'engagement d'investissement et ce qu'ils gagnent,
20:29 quand on voit la critique qu'on leur affiche tous les jours, moi, je pense qu'on a besoin de l'échelon des collectivités locales.
20:35 Bien heureusement. Sinon, peut-être qu'un jour, on réveillera de nouveau une nouvelle révolution française. Et je pense que si on n'a aujourd'hui pas encore implosé le pays,
20:47 c'est qu'heureusement, on a ces élus de proximité qui sont, à mon avis, les piliers de la République.
20:52 – Monseigneur ?
20:54 – Moi, je suis tout à fait d'accord avec cela. J'irais même plus loin. C'est-à-dire qu'une société, c'est fait par une infinie variété de liens très très forts.
21:02 Alors, ce sont les corps intermédiaires, ce sont les dimensions... Enfin, sans les corps intermédiaires, sans les associatifs, sans le travail bénévole de millions de gens,
21:10 la société, juste, elle explose. Elle n'existe pas. Juste, elle n'existe pas. Donc, il y a une dimension très importante.
21:16 Alors, bien sûr, chaque ordre a sa légitimité, l'ordre politique, l'ordre économique et autres. Mais il y a vraiment à avoir une vision globale de ces divers ordres,
21:26 à ne pas les dresser les uns contre les autres. Et il est très important que la puissance publique veille sur les corps intermédiaires, veille sur la relation auprès du terrain.
21:35 Sans ça, vous avez un patchwork qui ne tient pas. Vous n'avez pas une société, vous n'avez pas un tissu social.
21:40 Le tissu social, il tient à la fois au travail, à l'engagement, à la culture d'une quantité incroyable de personnes. Les religions font leur part.
21:50 Enfin, on a tout un ensemble de bénévoles, de gens qui participent au tissu social. Et c'est une réalité complexe, certes, mais c'est fondateur.
22:00 La société se transforme. De toute façon, la France se transforme. Ce qui fait que cette transformation ne jette pas des gens en dehors du bateau,
22:10 ne crée pas des violences, ne déchire pas le tissu social. Cela tient à la grande densité des corps intermédiaires et des différentes étapes.
22:19 La subsidiarité, on dit.
22:21 Non, mais, Monseigneur, je ne sais pas s'il est déchiré, le tissu social, mais il n'est pas en bon état, en tout cas.
22:25 Oui, oui, parce que je pense qu'il faut quand même interroger là-dessus, et les pouvoirs politiques, et les pouvoirs économiques, les pouvoirs sociaux.
22:32 Et les institutions morales, religieuses.
22:35 Sur la manière dont les corps intermédiaires sont traités, sur la manière dont on facilite ou pas, dont on soutient ou pas les corps intermédiaires.
22:44 Enfin, ce que j'appelle un corps intermédiaire, c'est une grande variété d'institutions de divers niveaux. J'estime qu'une église fait partie des corps intermédiaires. Voilà.
22:52 C'est pour ça que je vous pose la question.
22:55 C'est une question plus large, d'ailleurs. Je vais évidemment vous donner la parole.
22:59 Sur les lieux de pouvoir qu'on peut représenter, d'ailleurs, Jean-Christophe, nous, Média, responsables politiques, institutions, responsables régionaux, chambres de commerce, institutions morales, grandes entreprises.
23:13 Est-ce que ces lieux de pouvoir, aujourd'hui, jouent leur rôle dans les aspirations à la transformation ?
23:19 Voilà. C'est peut-être exactement l'axe que je voulais reprendre par rapport à ce que disait Monseigneur Delarme.
23:26 Oui, c'est vital de renforcer ces strates intermédiaires dans la société parce que sinon, on ne peut pas diriger tout d'en haut, vous l'avez dit.
23:36 Et pardon de vous le dire, c'est exactement ce que dit le beau-père de Moïse dans la Bible. C'est dans l'Exode, chapitre 18, à partir du verset 13.
23:45 Moïse gère le peuple du matin au soir. Il est écrasé. Il veut tout gérer lui-même parce qu'il se dit « chacun est important, donc il faut que je m'occupe d'eux ».
23:53 Et son beau-père lui dit « écoute, tu ne pourras pas marcher comme ça. Il te faut des chefs de 1000, des chefs de 100, des chefs de 50, des chefs de 10.
24:01 Chacun gère à son niveau et toi, tu gères ce qui monte à toi ». C'est d'une actualité incroyable.
24:06 Les premiers effets de seuil de l'histoire de...
24:08 Oui, exactement. Mais le problème, c'est que si on survalorise les strates intermédiaires, elles produisent mécaniquement des méthodes qui vont protéger leur place au détriment de l'avancée ou de la transformation globale.
24:29 Et on a aussi cet exemple dans la Bible. Moïse envoie des explorateurs pour voir la Terre sainte. Ils vont. Ils disent « effectivement, le lait et le miel coulent ».
24:38 Ils ramènent des fruits de compétition. Je ne vous dis pas la taille des fruits. Ils reviennent et disent « oui, mais on ne pourra pas y aller. Il faut qu'on reste dans le désert ».
24:44 Pourquoi ? Dans le désert, ils sont les chefs. Ils ne savent pas ce qu'on deviendra dans le nouveau monde.
24:48 Donc en fait, dans un nouveau monde, c'est-à-dire un monde qui apparaît, le monde des nouvelles technologies, le monde de la décarbonation qui est essentiel, le monde du respect de l'environnement,
24:57 que vont devenir des entreprises qui produisent telle ou telle chose ? Et donc, en fait, il y a toujours une tendance, monseigneur, j'en prends ma part,
25:04 les institutions religieuses aussi doivent en prendre leur part, dans le fait qu'il y a une tentation de faire que rien ne bouge pour protéger ce qu'on a,
25:14 sans comprendre que si on avance ensemble, on peut faire ce qui est l'essentiel.
25:18 Moi, je viens de l'armée de l'air, et dans l'armée de l'air, il y avait la devise de Guillemert qui est « faire face ».
25:22 Et je pense qu'on se transforme pour faire face à ce qui va advenir.
25:26 Mathilde, ces lieux de pouvoir, tu les juges un petit peu comme M. le Grand-Rabbin, avec pas mal de sévérité.
25:34 Alors, je trouve que finalement, les lieux de pouvoir font ce qu'ils ont à faire.
25:41 Si tu demandes par exemple à l'Education nationale, ils ont l'impression de faire ce qu'il faut.
25:48 Si tu demandes à l'hôpital, ils ont l'impression de faire ce qu'il faut.
25:53 Si tu prends individuellement...
25:55 Je ne mettrais pas l'hôpital comme un lieu de pouvoir. J'ai l'impression qu'ils subissent les décisions...
25:59 Justement, on peut se poser la question. On peut se poser la question.
26:03 C'est d'abord, c'est quoi le lieu de pouvoir ? C'est à quel niveau ?
26:06 Et moi, je considère, alors j'ai peut-être un biais macroéconomique qui est trop important...
26:11 Mais tu es là pour ça, Mathilde, vas-y, assume-le.
26:13 On ne peut pas organiser des lieux de pouvoir, ou en tout cas, on ne peut pas dire qu'ils font le job ou pas,
26:21 si on n'a pas défini encore une fois, auparavant, un objectif.
26:25 En macroéconomie, on a un objectif de politique économique et des instruments au service de cet objectif de politique économique.
26:33 Ensuite, que les lieux de pouvoir débattent, fassent en sorte que l'application de cette stratégie soit la plus organisée
26:43 ou génère le plus de cohésion sociale possible, évidemment.
26:46 Mais c'est pour reprendre la discussion précédente, c'est que, par exemple, en Europe,
26:51 on a décidé que l'objectif de politique économique était la transition énergétique.
26:58 Et ça rejoint ce que vous avez dit sur les régions et les confrontations entre les points de vue.
27:04 Donc si c'est le seul objectif, ça veut dire qu'on n'a plus d'objectifs de croissance,
27:09 contrairement aux objectifs de politique économique aux Etats-Unis et en Asie, par exemple.
27:15 Donc on ne va pas pouvoir juger des lieux de pouvoir sans avoir pris en compte cette continuation.
27:23 On ne peut pas faire les deux en même temps ?
27:24 Si, mais ce n'est pas ce qu'on a choisi.
27:25 Mais l'un n'empêche pas l'autre.
27:27 L'Union Européenne a choisi que toutes les politiques économiques aujourd'hui qui étaient mises en oeuvre
27:32 seraient au service de la transition énergétique.
27:34 Oui, mais regarde Mathilde, l'Union Européenne, c'est les chiffres que tu donnais hier dans une tribune publiée par les Echos.
27:40 723 milliards d'euros de... alors le plan a un nom invraisemblable, de résilience ou je ne sais pas quoi,
27:47 enfin bref, de dette commune.
27:48 Voilà, on est très fiers d'ailleurs, on a levé de la dette commune ensemble, nous Européens, alléluia.
27:53 Deux ans après, 175 milliards d'euros seulement sont décaissés, comme s'il n'y avait pas d'urgence.
27:58 Ça, c'est un lieu de pouvoir qui n'est intéressé que par ses propres normes et son propre fonctionnement,
28:04 pas par le résultat de ce qu'il doit produire.
28:06 Exactement, et qu'est-ce qui se passe ?
28:07 Pourquoi les pays n'en bénéficient pas ?
28:11 C'est parce qu'on s'est rendu compte qu'au niveau des collectivités locales, il y avait un manque de compétences
28:16 et qu'il n'y avait pas de plan d'accompagnement prévu, parce que ce que fait la Commission européenne est tellement compliqué
28:21 qu'il aurait fallu prévoir un accompagnement.
28:24 Et le seul pays qui arrive à faire décaisser ces montants prévus, c'est l'Espagne,
28:29 parce que l'Espagne est habituée et a mis en place toute une stratégie au niveau des collectivités locales
28:34 pour pouvoir bénéficier de ces subventions.
28:36 Mais ce que je veux dire, c'est que les lieux de pouvoir dans l'absolu,
28:39 ça me paraît en tout cas pour moi impossible de savoir s'ils font ce qu'ils font ou pas,
28:45 puisqu'on ne peut le juger qu'en fonction de l'objectif qu'on leur a assigné.
28:51 Alors peut-être pas dans vos domaines, mais...
28:54 Jean-Christophe ?
28:55 Non, moi je peux vous raconter une expérience très courte, Stéphane.
28:57 Mais on a le temps, Jean-Christophe, tout va bien.
28:59 Sur la question justement, pouvoir immédiat.
29:02 Nous on prend la décision, je le dis d'autant plus que je suis à Marseille,
29:06 on prend la décision avec Grodolfsadé en juillet de lancer un quotidien le dimanche.
29:12 La première décision que je prends, c'est de dire, on va pas lancer un quotidien du dimanche.
29:17 Il n'y a pas eu de lancement d'un quotidien en France depuis plus de 10 ans.
29:21 Et je vois bien, comme vous Stéphane, qu'on parle beaucoup de la défiance entre les politiques et les citoyens,
29:27 mais nous les médias, on a un enjeu aussi de recréer de la confiance.
29:31 Première décision, je dis, ben écoutez, on va faire un tour de France.
29:34 Tous les dimanches matin, on va aller dans un café de France,
29:37 et on va aller à la portée des Français pour échanger sur leur rapport entre l'actualité et l'information,
29:43 les écouter sur ce qu'ils aimeraient dans un quotidien du dimanche.
29:47 Et vous voyez, les premiers, on va dire, obstacles, ça a été certains de mes journalistes,
29:52 qui m'ont dit, mais quand même, tu es sûr, on risque de se faire engueuler,
29:56 on devrait faire peut-être plutôt un petit échantillon de 10-15 personnes.
30:01 Un tchat !
30:03 Et là, je me dis, mais si c'est ça la conception d'être un média,
30:08 c'est-à-dire un média qui représente un pouvoir éloigné,
30:11 et qui se protège de la proximité avec nos lecteurs.
30:14 Donc nous, on a fait ce tour de France, avec le soutien de notre actionnaire,
30:19 et on est allé en Bretagne, on est allé à Marseille, ici même, on était au café de l'OM,
30:23 et on a beaucoup échangé, on s'est fait engueuler,
30:26 donc je reviens encore sur ce sujet Stéphane, mais nous les médias, on a besoin de refaire de la proximité,
30:32 c'est pour cette raison que même si nous on est un média national,
30:35 on a fait le choix il y a quelques années de nous installer dans un bureau,
30:38 ici, près de la Canbière, rue de Paradis,
30:42 et donc, si on revient sur ces sujets de pouvoir, il faut savoir aussi redescendre,
30:47 se mettre à la portée, et aussi accepter de se faire engueuler.
30:51 Et vous voyez que quelques fois, certains de mes journalistes n'auraient pas eu cette démarche,
30:56 parce qu'avec cette crainte de se faire engueuler, mais des fois il faut se faire engueuler pour avancer.
31:01 Alors, ça m'amène justement à ce sur quoi je voulais aussi vous entendre,
31:05 c'est cette... alors je crois que c'est Jérôme Fourquet d'ailleurs qui...
31:08 alors je sais pas s'il est l'inventeur du mot, mais en tout cas il l'a popularisé,
31:13 ce mot de décivilisation, cette capacité, mon seigneur, peut-être...
31:17 enfin, justement, cette impossibilité, visiblement, de plus en plus,
31:22 à se parler quand on est de points de vue opposés.
31:25 Et un pays qui est en train de se rigidifier les certitudes des uns contre les certitudes des autres.
31:33 Est-ce que vous le constatez ? Est-ce que ça vous préoccupe ?
31:36 Et moi je suis persuadé que c'est en tout cas un frein profond à la transformation.
31:40 Je... il y a une chose peut-être impréalable, c'est que c'est toujours un peu gênant de dire "avant c'était formidable".
31:49 Hein, voilà.
31:50 Donc déjà dire "avant il y avait une civilisation", "avant on avait..."
31:55 L'histoire est quand même beaucoup plus critique avec toutes les époques que nous avons traversées dans notre propre pays ou ailleurs.
32:04 Donc ce qui est vrai c'est que nous sommes devant un... dans la transformation sociale qui est la nôtre,
32:10 enfin c'est aussi ce que j'observe dans les communautés chrétiennes, les gens que je croise,
32:15 il y a une articulation à trouver entre ce qui fait le fond commun de notre coexistence sociale,
32:21 sur quoi nous nous entendons,
32:23 quelles sont les réalités profondes qui constituent le cadre du tissu social,
32:29 qui quelque part c'est une transcendance à la société, c'est pas immanent, quelque chose qui vient d'ailleurs.
32:35 Donc c'est pas si simple, cette transcendance c'est ce qui vient d'ailleurs.
32:40 Alors c'est les Lumières, c'est le catholicisme, c'est Fouquet justement qui dit ça, c'était les deux cadres.
32:45 La République des Lumières d'un côté, le cadre catholique de l'autre, donnait le cadre transcendant qui faisait...
32:52 Bon, c'est pas le cas aujourd'hui mais ça manque à une société.
32:56 Quel est le cadre ?
32:57 Et puis il y a un pluralisme réel, on le disait tout à l'heure, nous on est pluriel, il y a une identité, une altérité.
33:04 Comment on articule dans une société à la fois ce cadre commun, quel est le cadre qui nous réunit ?
33:11 Bon voilà, assez facilement on va dire qu'il y a la liberté de conscience, il y a l'état de droit, il y a un certain nombre de choses comme cela.
33:18 Et puis dans ce cadre-là, que tous doivent respecter, quelle forme de pluralisme est possible dans la société ?
33:27 Parce que c'est aussi une réalité.
33:29 C'est fourqué aussi, c'est-à-dire que la société n'est pas homogène.
33:36 - Gérard ?
33:38 - Oui, c'est très juste, avec deux petits bémols qui me paraissent importants.
33:43 Le premier c'est que je crois que le monde virtuel est rentré dans le monde réel.
33:48 Et que le monde virtuel produit un enfermement idéologique.
33:52 Les algorithmes vous obligent, vous amènent la même pensée que la vôtre.
33:55 Donc vous pensez quelque chose et on vous remet, surtout Netflix, vous regardez Netflix, on vous remet le même type de film que vous aimez.
34:03 Donc vous ne pouvez pas voir autre chose parce qu'on vous propose automatiquement.
34:06 Vous aimez John Wick, ça tire dans tous les sens, vous voyez John Wick 1, 2, 3, 4, et puis après on vous met, je ne sais pas moi, un autre truc, ça tire dans tous les sens, pareil, même chose.
34:15 Donc la pensée qui est proposée, c'est la même, elle est enfermante.
34:18 Donc en fait je me rends compte maintenant que les personnes reproduisent dans la vie réelle la même chose.
34:26 Elle, elle ne pense pas comme moi, je ne parle pas avec elle.
34:28 Lui de manière illégalité, il ne pense pas comme moi, je ne parle pas avec lui.
34:31 Lui je ne sais pas, mais enfin il est machin.
34:33 Lui je ne sais pas, donc en fait je ne parle qu'avec le même que moi.
34:35 - Tout à fait. - Et ça devient stérilisant.
34:37 - Tout à fait. - Donc en fait on est dans une reproduction des algorithmes et des nouvelles technologies.
34:44 - Nous devenons des algorithmes humains d'une certaine manière.
34:46 - On le reproduit, or faire société, c'est par nature aller chercher quelqu'un qui est différent.
34:54 Et comme le disait le poète, chaque fois que je rencontre quelqu'un de différent de moi, c'est une part de moi qui revient à moi.
35:01 Au fond, dans l'altérité, je retrouve une part de moi.
35:04 Mais comme on n'arrive plus à faire ça, donc on s'appauvrit au fur et à mesure.
35:07 Et je ne dis pas c'était mieux avant, je dis qu'avant il n'y avait pas les réseaux sociaux.
35:11 Et que dans les cafés d'antan, on allait se bagarrer joueusement, on discutait ensemble, ça se bagarrait ou pas, mais au moins on s'entendait.
35:18 Là on n'entend même plus un autre point de vue.
35:20 - Ça c'est la première chose. - La deuxième chose, c'est dans ce que vous appelez, Fouquet appelle l'archipélisation.
35:26 C'est-à-dire que chacun se voit comme une île.
35:29 On n'a plus besoin d'aller voir quelqu'un qui va me faire sortir de ma vie.
35:36 Ce dont on parlait avec Monseigneur tout à l'heure, en fait qu'est-ce que c'est un débat ?
35:41 C'est accepter avant toute chose qu'une part de ma vérité meurt, pour laisser la place à la vérité de l'autre.
35:47 Alors moi je vais plus loin.
35:49 Même nous-mêmes, nous-mêmes, on n'arrive pas à produire cette cohérence.
35:52 Nous disons des choses, dans la foi c'est la même chose, on prône des valeurs et on ne les pratique pas.
35:58 Dans l'entreprise, dans le monde de l'entreprise, on peut dire on va être moins polluant,
36:04 mais si les autres doivent être moins polluants, moi je suis obligé, je fais ce que je peux.
36:07 Et donc, le management, on va prendre des cours de management et on ne va pas les appliquer.
36:12 Pourquoi ? Parce que je ne peux pas.
36:14 Donc en fait, la cohérence entre la pensée et l'action, c'est aussi une façon d'être regardé par les autres,
36:20 et peut-être pire, regardé par soi-même.
36:23 Mathilde ?
36:25 C'est vrai que Fouquet insiste beaucoup sur les inégalités économiques.
36:30 Le sentiment d'être exclu d'une forme de croissance et de développement.
36:36 C'est vrai que c'est difficile de rapprocher ça du débat que vous venez d'avoir,
36:43 parce qu'il n'y a jamais eu autant de gens formés en France.
36:48 C'est-à-dire, le paradoxe, c'est que la massification de l'enseignement supérieur est une réalité.
36:54 On a 80% d'une classe d'âge, alors après on peut dire que le niveau est plus faible, etc.
36:59 Je ne conteste pas ça.
37:01 Mais ce paradoxe...
37:03 Le taux de réussite au bac, c'est 91% !
37:06 Après, c'est une fois qu'on a sorti ceux qui sont sortis du SEMS,
37:10 parce qu'ils n'ont rien, c'est pour ça.
37:12 Si on prend la totalité de la classe d'âge, c'est un peu moins.
37:15 C'est vrai.
37:17 Et ce que dit Fouquet, c'est vraiment le sentiment d'avoir été abandonné,
37:25 parce que la promesse que cette massification de l'enseignement supérieur n'a pas été tenue,
37:34 c'est-à-dire qu'elle aurait dû permettre à un certain nombre de catégories sociales
37:38 d'accéder au même job stable, et ça n'a pas été le cas.
37:44 En tout cas, quand on regarde les statistiques, ça n'a pas été le cas.
37:47 Donc, il y a aussi cette idée qu'il y a eu de nouvelles inégalités
37:52 qui ont été créées par cette massification,
37:55 et que cet espèce d'idéal social-démocrate n'a pas donné les résultats escomptés.
38:01 Et donc, il y a un sentiment d'abandon.
38:04 Parallèlement à ça, il y a évidemment la crise du logement.
38:06 Mais tu le partages ?
38:08 En tout cas, on voit les chiffres.
38:10 Macron économiste, tu partages ?
38:12 C'est-à-dire que quand on regarde les chiffres de l'accès des étudiants à l'université,
38:20 qui sont à l'université et qui viennent de milieux défavorisés,
38:24 c'est vrai qu'ils ont des emplois qui sont moins stables
38:27 et qui ne correspondent pas aux études qu'ils ont faits.
38:31 Un sur trois, quand on compare avec les pays européens,
38:34 c'est en France qu'il y a le plus d'écarts entre le job et les études qu'ils ont faits
38:41 pour les étudiants de milieux défavorisés.
38:45 Donc, effectivement, il y a une promesse qui n'a pas été tenue.
38:48 Et parallèlement à ça, il y a aussi le problème du logement
38:52 qui génère des frustrations et des tensions sociales extrêmement importantes.
38:58 Donc, bien sûr qu'il faut parler, mais il faut quand même avoir en tête,
39:03 dans ce qu'on dit et dans l'explication qu'on peut donner,
39:06 qu'il n'y a jamais eu autant de jeunes qui sont passés par l'université qu'aujourd'hui.
39:13 Bon, une fois qu'on a dit tout ça, dans les minutes qui nous restent
39:20 pour essayer de sortir par le haut et avec un message d'espoir,
39:24 à la limite, je me tourne vers l'entrepreneur, c'est-à-dire,
39:27 Jean-Christophe, l'une de tes missions, justement, c'est de continuer à porter ce message
39:34 d'avenir, de transformation, de progrès, de paix, de réunion,
39:40 enfin bon bref, l'ensemble de ce que porte un journal comme le tien aujourd'hui.
39:47 Non, il y a des sujets sur lesquels nous, on écrit beaucoup
39:51 et qui, à mon avis, sont des signaux positifs pour l'avenir.
39:55 Par exemple, Stéphane, aujourd'hui, quel est le sujet ?
39:58 Si on interroge les entrepreneurs ici de l'UPR, on va leur dire,
40:01 c'est quoi qui pollue le plus en France ?
40:04 Qui pollue au sens pollué ? Oui. Au sens premier ? Oui.
40:07 Je n'en sais rien. Ce sont les importations.
40:10 Et je dis ça parce qu'on a beaucoup de débats, par exemple, autour de l'écologie.
40:15 Mais cet enjeu aujourd'hui de relocaliser dans les territoires,
40:18 qui est vraiment l'objet du livre de Jérôme Fourquet,
40:21 si aujourd'hui, on relocalise, c'est la meilleure façon,
40:26 en réimplantant des usines, bien sûr des usines propres,
40:29 et ici, il y a beaucoup de chefs d'entreprise qui, vraiment,
40:32 ils s'y créent dans les bougerons des usines.
40:35 Ce n'est plus l'usine d'Émile Zola.
40:38 Et donc, je trouve qu'aujourd'hui, transformer la France
40:41 par revenir dans les territoires, recréer de la production,
40:45 et ça, c'est une nouvelle ère qui s'ouvre depuis l'ère post-Covid,
40:49 ça, je trouve que c'est un élément positif.
40:51 On retrouve, et vous le savez, vous en parlez beaucoup sur Bismarck, Stéphane,
40:55 sur cette capacité aujourd'hui d'avoir des entrepreneurs,
40:57 qui recréent des entreprises,
40:59 mais pas que dans les grandes métropoles comme Marseille,
41:02 dans des petits départements comme le Vaucluse,
41:04 dans des endroits beaucoup plus ruraux,
41:06 et ça, je pense que ce sentiment de décivilisation que vous évoquez,
41:11 si on redonne du travail, puisque ça a été évoqué ce matin par le président Sarkozy,
41:15 et si on redonne du travail dans tous les territoires...
41:17 - Et du travail qui a du sens, le travail industriel et du travail qui a du sens.
41:20 - Et peut-être un petit sujet, parce que vous m'aviez interrogé,
41:22 et je voulais un petit peu qu'on arrête de parler du sujet de la productivité,
41:26 parce qu'on en a parlé quand on a préparé cette émission,
41:29 vous avez dit oui, maintenant, il y a moins de productivité en France.
41:33 - C'est une autre statistique, je suis désolé, c'est pas un artifice.
41:37 - Alors moi, sur cette statistique, la seule chose que je peux dire,
41:39 c'est que moi je sors d'une expérience, on a sorti un journal en 80 jours,
41:44 moi j'ai pu compter sur la mobilisation des collaborateurs,
41:48 des plus jeunes jusqu'aux plus anciens,
41:50 ils ont tout donné à 150%.
41:53 Et je le dis, et je m'inclus, c'est que s'il y a un problème de productivité,
41:58 c'est qu'il y a un problème de mauvais patron.
42:01 Et je crois que moi, en tous les cas, j'ai choisi d'être entrepreneur
42:04 pour assumer ma responsabilité.
42:06 Si je constate qu'il y a un problème de productivité dans mon entreprise,
42:09 ça veut dire qu'à un moment, et c'est vrai que moi-même en tant qu'entrepreneur,
42:12 on n'est pas toujours au top tous les jours.
42:14 Moi j'ai eu des moments difficiles, des moments plus heureux,
42:17 on vit tout ça, nous les patrons, mais à un moment donné,
42:20 je pense qu'on ne peut pas faire porter la responsabilité du manque de productivité
42:24 sur "cette génération travaille moins", "elle est moins motivée".
42:28 Non, à nous, c'est à nous d'embarquer nos collaborateurs,
42:31 être beaucoup plus productifs.
42:32 Je suis ravi d'ailleurs que le patron du Medef, ici ce matin,
42:36 ait eu exactement le même discours,
42:39 et ait appelé à une forme de révolution managériale,
42:42 et tous les chefs d'entreprise, j'en fais partie,
42:45 doivent s'interroger aujourd'hui sur la façon dont ils regardent le travail.
42:49 Plutôt que de se dire "mais bon Dieu, plus personne veut bosser dans ce pays",
42:54 on va dire ça comme ça, mais se dire "mais est-ce que je fais ce qu'il faut
42:58 pour donner envie de travailler, et tu es la démonstration,
43:00 et ce que tu as réalisé avec cette rapidité à faire un journal,
43:04 démontre que c'est possible".
43:06 Mathilde, la productivité c'est toi.
43:08 Oui, mais je vais plutôt répondre à ta question.
43:10 Recule de 3% depuis 2019.
43:12 La productivité, c'est le même sujet,
43:14 c'est-à-dire que la notion macroéconomique de productivité,
43:17 pas forcément celle qu'on utilise dans le débat public.
43:21 Pour un macroéconomiste, la productivité c'est la prospérité.
43:24 Il n'y a pas de prospérité sans productivité,
43:27 et on sait très bien quels sont les ressorts de cette productivité,
43:30 c'est l'investissement et la formation.
43:33 Et puis la diffusion de l'innovation, après on met tout ce qu'on veut autour.
43:38 Donc tu demandais un message d'espoir,
43:41 bien évidemment on peut se transformer,
43:44 encore une fois je pense qu'il faut qu'il y ait un consensus,
43:47 et il pourrait y avoir un consensus de chefs d'entreprise
43:50 sur quelques objectifs de transformation.
43:54 Et ensuite, je pense que les lieux de pouvoir pourraient accompagner.
43:59 Et notamment, on sait bien que les mutations digitales sont extrêmement coûteuses,
44:03 d'ailleurs la preuve pendant le Covid,
44:05 l'État a subventionné les entreprises pour qu'elles se mettent aux normes
44:10 du point de vue digital et donc puissent continuer à vendre.
44:13 On sait que les PME n'ont pas les moyens de financer la digitalisation
44:18 et l'intelligence artificielle.
44:20 Donc si on se met d'accord sur, par exemple, un objectif massif d'investissement
44:26 par des crédits d'impôt comme le font les Américains,
44:28 c'est tout à fait possible, les Américains sont revenus dans la course grâce à ça.
44:32 Donc crédits d'impôt pour les entreprises,
44:34 les chefs d'entreprise sont mieux placés que l'État
44:36 pour savoir comment investir et où investir.
44:38 Et ensuite, en revanche, il peut y avoir des aides particulières pour les PME
44:42 pour justement accélérer cette transformation digitale
44:45 et l'accompagner du point de vue de la formation.
44:48 C'est vrai que ce qui me frappe, c'est que vous vous souvenez,
44:51 pendant la mondialisation, toute cette phase de mondialisation,
44:53 on avait vu, on avait essayé de tirer les leçons du fait
44:58 qu'elle avait exclu un certain nombre de salariés
45:01 qui n'avaient plus les compétences du marché du travail.
45:04 C'était les mines, ça fait quand même quelques années,
45:07 et pour autant on n'arrive toujours pas à mettre en place des dispositifs.
45:10 On sait que l'intelligence artificielle va obliger certains salariés
45:14 à faire évoluer leurs compétences.
45:16 Les régions peuvent accompagner.
45:18 Et donc moi, je pense qu'on a les lieux de pouvoir,
45:22 on a les institutions pour accompagner ces transformations.
45:24 Mais encore une fois, il faut qu'il y ait des priorités,
45:28 sinon on n'y arrivera jamais. C'est mon point de vue.
45:31 Monseigneur, mot de conclusion.
45:34 Il nous reste cinq minutes pour vous partager la parole
45:38 en conclusion de cette table ronde passionnante. Je vous en remercie.
45:41 Oui, bien. D'abord, je pense que nous sommes dans une société
45:44 qui peut avoir confiance en elle, parce qu'il y a aussi cela.
45:47 C'est une société que beaucoup nous envient,
45:50 c'est une société qui a de nombreuses richesses intellectuelles,
45:53 culturelles, spirituelles, sociales.
45:57 Donc c'est un point très important.
45:59 Je ne sais pas, il y a beaucoup de statistiques là-dessus
46:01 où on dit que les Français sont optimistes pour eux-mêmes,
46:04 mais spécimistes pour le collectif.
46:06 Donc quand on regarde les pays les plus pessimistes,
46:08 on arrive au-dessus de l'Afghanistan.
46:10 Donc il y a une réalité peu objective aussi à cela,
46:15 alors que dans l'objectivité, on n'est pas un pays sans ressources.
46:19 On est un pays qui a de nombreuses ressources de toutes sortes,
46:23 et des ressources qui le rendent apte à affronter
46:26 les transformations du monde qui vient.
46:29 Et je pense que c'est aussi cela, ce message d'espérance.
46:32 Les personnes qui constituent la nation sont des personnes de ressources,
46:36 sont des gens sur qui la société peut faire fond.
46:40 Alors bien sûr, il y a toutes sortes de difficultés et autres,
46:43 mais nous ne sommes pas démunis par rapport à cela.
46:46 Les fondations sont là.
46:47 Oui, les fondations.
46:48 Les fondations sont là.
46:49 Les fondations sont là.
46:50 On n'est quand même pas... observer le monde quand même.
46:53 On est d'accord.
46:54 Regarder le monde.
46:55 Dites-vous, tiens, où est-ce que je vais aller vivre ?
46:57 Très bonne question à se poser.
46:59 Où est-ce que je vais aller vivre ?
47:00 Absolument.
47:01 Bon.
47:02 Finalement, non, ça va.
47:03 C'est bien.
47:04 C'est bien.
47:05 Ça va bien.
47:06 Ça va.
47:07 Je continue.
47:08 Je continue.
47:09 Donc, j'y apporte ma pierre.
47:10 Donc, il y a quelque chose à construire.
47:11 Voilà.
47:12 De fait, les jeunes ont grandi en niveau d'études.
47:14 Alors, voilà.
47:15 On parlait de la productivité.
47:17 J'ai appris la semaine dernière que, oui, la productivité a baissé
47:20 en même temps que le chômage.
47:21 C'est-à-dire qu'en réalité, cette baisse de productivité
47:23 est un trompe-l'œil.
47:24 Absolument.
47:25 C'est que ce sont de nouveaux emplois.
47:26 C'est des gens qui ont trouvé du travail.
47:27 Évidemment, c'est des emplois moins productifs puisqu'ils sont arrivés en second rang.
47:31 On est revenus à l'emploi, mais sur des emplois moins productifs.
47:34 Donc, finalement, cette statistique, elle a un aspect tout à fait positif.
47:38 Je suis tout à fait d'accord.
47:41 Un dernier mot.
47:43 Enfin, un dernier mot.
47:44 On a deux minutes.
47:45 Ça peut être quelques phrases.
47:47 En fait, toute la question qui a été posée la dernière, c'est le sens.
47:53 C'est vrai que je pense qu'un dirigeant, sa vocation, c'est de donner du sens au travail.
47:58 Comment ? Dans un organisme collectif qui est une entreprise.
48:02 Chacun et chacune a sa place vitale.
48:05 Moi, je viens de l'armée de l'air où on savait que pour qu'il y ait un pilote en l'air,
48:08 il y avait 40 personnes au sol pour qu'il y ait un pilote en l'air.
48:11 Et chacun est indispensable.
48:13 Et chacun, chacune.
48:14 Les médecins, les infirmières, ceux qui nourrissent, les cuistots, tout.
48:18 Les mécanos, tout.
48:20 Mais je rajouterai à ce que Mathilde Le Moyne disait tout à l'heure, un troisième élément.
48:26 Elle a dit qu'on sait comment ça marche.
48:28 C'est le développement, la formation et l'investissement.
48:32 Et le salaire.
48:34 Le salaire.
48:36 C'est que oui, il faut qu'il y ait un véritable enjeu du partage.
48:41 Parce qu'on peut donner du sens, mais si les gens, comme l'aurait dit Rétif de la Bretonne,
48:47 le travail produit des inégalités justes.
48:52 C'est-à-dire que si les gens font ces efforts dont vous avez parlé,
48:56 et qu'à la fin, vous leur tapez dans les dents en disant "salut, super, merci, bravo, on a fait un journal".
49:00 Et je pense que faire un journal, c'est un challenge incroyable.
49:04 Réussir à faire naître, à devenir quelque chose, c'est merveilleux.
49:07 Mais à la fin, il faut que ces efforts, ils en, j'allais dire, consomment les fruits.
49:12 Au sens que c'est pas uniquement on a produit quelque chose pour produire,
49:15 on a aussi produit pour que la valeur travail qui est la nôtre ait donné quelque chose pour nous.
49:21 Et on le voit avec, parce que vous pouvez dire, le sens, c'est pas vrai, il y a que deux...
49:26 Je dis rien, il reste 50 secondes, donc je ne dis pas grand chose, je vous laisse terminer.
49:29 Mais vous pouvez dire que c'est vrai que les gens, c'est pas vrai qu'ils veulent pas travailler.
49:32 La réalité, c'est que le Covid a montré qu'il y a beaucoup de personnes qui ont fait d'autres choix de vie
49:38 et qui préfèrent le cadre de vie, la sérénité.
49:40 Et il faut aussi trouver comment remotiver les gens.
49:43 Et je pense qu'il faut rajouter un troisième pilier à ce que vous avez proposé.
49:48 Oui à la formation, oui à l'investissement, mais oui au partage de richesses et au fond au partage d'espérance.
49:55 Voilà ce en quoi je crois moi.
49:56 Magnifique. Je sais pas si on a répondu aux questions sur la transformation,
50:00 mais en tout cas on a énormément d'éléments pour réfléchir.
50:03 Merci pour vos applaudissements et merci d'avoir participé à cette table ronde.
50:08 C'est Aurélie qui va venir prendre ma place pour terminer cet après-midi passionnante.

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