Immobilier neuf : pourquoi les ventes ne vont pas se redresser l’an prochain

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00:00 (Générique)
00:09 - Avec nous pour parler du marché du neuf, le délégué général de la Fédération des promoteurs immobiliers, Didier Bélier-Gagnère.
00:15 Merci d'être avec nous. La Fédération des promoteurs immobiliers, c'est 17 chambres régionales, 700 entreprises adhérentes.
00:23 C'est aujourd'hui la première force syndicale pour les promoteurs immobiliers. On est ravi que vous soyez avec nous.
00:30 Nous avons une tradition dans le grand rendez-vous de l'immobilier. La première question est toujours posée par notre ami Guillaume.
00:36 - Oui. Alors bonjour. Bon, c'est une question, on va dire qui fâche, pour commencer. Mais c'est normal. Il faut bien décrire l'actualité.
00:45 - On va commencer par ce qui fâche. Voilà. - Il faut décrire l'actualité et la situation. Le logement neuf va mal, voire très mal.
00:52 Alors on va sûrement atteindre un des plus bas niveaux historiques en construction, en vente sur la promotion immobilière cette année.
01:00 Alors pour nos éditeurs, quelles sont vos prévisions pour l'année ? Qu'est-ce qu'on peut dire ? Comment on termine l'année ?
01:06 - Exercice qui fâche, je ne sais pas. Mais en tout cas exercice vérité. La promotion immobilière, ce sont les logements collectifs.
01:14 On a aussi à côté les maisons individuelles. Mais la situation est similaire. Mais sur le logement collectif, nos estimations, c'est qu'on devrait atterrir vers 80 000, 90 000 logements vendus cette année.
01:28 Je vais vous donner un point de comparaison. C'est que dans les années avant Covid et même en 2021, le niveau de vente se situait autour de 160 000.
01:40 Donc là on sera à 80, 90 000, donc pratiquement deux fois moins. Est-ce qu'on a touché le fond ? Je ne sais pas.
01:48 Mais en tout cas, ce qui est aussi inquiétant, c'est qu'on est rentré dans une logique vraiment de crise systémique.
01:54 C'est-à-dire que la crise alimente la crise. Je vais prendre une comparaison. Quand ce que vous avez en magasin, vous ne le vendez pas, vous ne reconstituez pas vos stocks.
02:03 Là, c'est exactement la même chose. Les promoteurs ont de très grandes difficultés pour vendre. Donc il y a beaucoup d'opérations qui auraient dû être lancées, qui ne sont pas lancées.
02:12 Soit elles sont gelées. C'est le scénario optimiste. Soit elles sont carrément abandonnées. Donc ces opérations qui auraient dû être lancées, les travaux auraient dû être engagés, ne se feront pas.
02:23 Donc on va avoir ensuite une pénurie dans les années 2025-2026, puisque l'immobilier, c'est sur le temps long et une opération avant qu'elle sorte de terre, ça prend 2-3 ans.
02:34 Donc en 2025-2026, on aura également une pénurie. Donc cette année, c'est plutôt problème de vente. Et dans quelques années, ce sera un problème d'offre.
02:44 D'ailleurs, Olivier Salron, dans un communiqué, puisqu'on vient de passer un événement important qui s'appelle le salon de l'immobilier, d'entreprise, mais qui touche aussi le logement, le CIMI,
02:58 la Fédération française du bâtiment a annoncé, mardi, que la fédération entrait en récession avec -0,3%. C'est un marqueur extrêmement important.
03:10 Et les prévisions sur 2024 sont, on peut le dire, catastrophiques.
03:15 Absolument. Olivier Salron nous avait donné cette information un petit peu en avant-première.
03:22 Olivier Salron est le président de la fédération du bâtiment.
03:28 On estime, et nos chiffres rejoignent ceux de la fédération du bâtiment, on devrait perdre sur les deux prochaines années environ 300 000 emplois.
03:37 150 000 emplois directs sur l'immobilier, et puis 150 000 emplois chez les architectes, les notaires, etc.
03:45 On s'est amusé à faire une cartographie, justement, pour tous ceux qui nous écoutent sur le logement neuf.
03:52 Toutes les régions ne sont pas égales. On a certaines régions, comme par exemple l'arc atlantique, les littoraux, qui se défendent plutôt bien, qui maintiennent un niveau.
04:04 Quelles sont les régions, on peut dire que beaucoup de régions aujourd'hui sont touchées, mais quelles sont les régions qui sont particulièrement soumises à cette crise du nef aujourd'hui ?
04:16 Est-ce que c'est surtout par exemple les grandes métropoles ?
04:18 Alors, moi je dirais plutôt d'abord qu'on a un effet retard entre certaines régions.
04:23 On avait constaté que ça allait plutôt bien en Normandie et en Côte d'Azur il y a quelques mois.
04:28 Et en fait, les mauvais chiffres sont aussi arrivés sur ces territoires.
04:32 Mais en tout état de cause, oui, très clairement, ce sont beaucoup les métropoles qui sont touchées au premier chef.
04:38 Est-ce que c'est un signe avant-coureur où il y a vraiment des difficultés spécifiques ?
04:43 Mais c'est vrai que dans les Hauts-de-France, par exemple, c'est une région ou un territoire particulièrement touché.
04:47 Les ventes sont encore plus basses qu'ailleurs.
04:50 On va parler des prix.
04:51 Mais peut-être pas des prix avant, parce qu'on parle de chiffres qui baissent, de ventes qui baissent.
04:55 Mais on a envie de comprendre qu'est-ce qui fait que ça baisse ? Quels sont les facteurs blocages de ce marché, tout simplement ?
05:02 Et est-ce qu'ils peuvent se débloquer à moyen terme ?
05:07 Il y a deux paramètres qui se répondent.
05:14 Le premier, c'est la hausse des taux, très clairement.
05:16 On a eu une hausse des taux hyper rapide qui a augmenté de 4% sur 18 mois.
05:21 Une hausse de taux de 4%, ça fait une perte d'achat, de pouvoir d'achat immobilier de 25%.
05:28 C'est-à-dire que vous ne pouvez plus acheter que 64%.
05:34 C'est un peu la même chose qui s'est passé dans le logement ancien.
05:36 Absolument.
05:37 Mais encore, parce que la crise est plus profonde dans le neuf.
05:40 La crise est plus profonde dans le neuf, mais après on a des contraintes supplémentaires.
05:47 Vous savez qu'il y a un Haut Conseil de Stabilité Financière,
05:51 qui est une instance qui est là pour vérifier l'endettement des ménages notamment,
05:56 et qui fixe des critères, un taux d'effort de 35% et des durées d'emprunt qui ne peuvent pas dépasser 25 ans,
06:03 qui viennent bloquer encore plus le système.
06:06 Puisque effectivement, avec une hausse des taux, vos mensualités sont plus élevées.
06:10 Et donc votre taux d'effort, qui est en fait le rapport entre la mensualité et vos revenus,
06:14 dépasse les 35% et vous ne pouvez plus emprunter.
06:19 Donc vous ne pouvez plus emprunter, forcément les ventes en pâtissent directement.
06:23 D'accord, mais donc pourquoi ça touche plus le neuf que l'ancien ?
06:28 Non, je crois que la problématique est la même dans l'ancien que dans le neuf.
06:32 On voit aussi une chute tout aussi importante dans le neuf.
06:35 Quels sont les facteurs qui ont bloqué le marché du neuf ?
06:37 Il y a le pouvoir d'achat, la possibilité des emprunts, il y a le problème des investisseurs aussi.
06:41 Oui, mais est-ce que par exemple, les autorisations d'urbanisme,
06:45 les permis de construire, le rôle des élus locaux ?
06:48 Les gens ont besoin d'avoir cette cartographie en fin d'année.
06:51 Pour cartographier les choses, il va falloir distinguer en fait l'offre et la demande.
06:57 L'offre, c'est ce qu'on met sur le marché. La demande, c'est ce que les gens veulent acheter ou peuvent acheter.
07:02 On avait, et c'est vrai, un problème qui est beaucoup plus ancien, un problème d'offre.
07:09 Et on a vu une rupture à partir des années 2020, des élections municipales de 2020,
07:14 où les nouveaux maires, ils ont été élus sur ces programmes-là, ont délivré beaucoup moins de permis de construire.
07:19 Donc on a eu une baisse.
07:21 Donc on a moins de proposition de logements, d'immeubles, de programmes annoncés.
07:25 On tournait, je vous donne un ordre de grandeur, en gros, 19 000 logements étaient autorisés par mois
07:31 avant les élections municipales de 2020. On a chuté à 17 000.
07:35 Donc sur une année, ça fait 24 000 logements en moins qui se font.
07:39 C'est conséquent, c'est important. Ça, c'était notre problème.
07:43 Donc on se battait beaucoup sur ce sujet-là avant la crise de l'Ukraine et 2022.
07:48 Et puis depuis 2022, deuxième couche, on a une crise de la demande.
07:53 C'est-à-dire que les potentiels acheteurs ne peuvent plus acheter.
07:58 Et on revient sur cette question des taux.
08:00 - Sur ce que vous disiez, c'est un point très important, parce que les Français ont été frappés plein fouet par cela.
08:07 400 points de base à minima d'augmentation sur les taux d'intérêt sur une période extrêmement courte.
08:12 C'est d'une violence inouïe. - Absolument.
08:14 - Et effectivement, la pièce que les Français avaient gagnée grâce à la baisse des taux, ils l'ont perdue.
08:20 - Qu'est-ce qui peut se passer maintenant sur 2024, clairement ?
08:24 Donc vous êtes asséché. Est-ce qu'il y a des signaux positifs qui peuvent, pour les acheteurs,
08:30 c'est ça qui nous intéresse, et vous, les constructeurs derrière, ça dépend comment on prend le truc,
08:35 qu'est-ce qui peut débloquer ce marché là à court terme sur 2024 ?
08:38 - Pour compléter, dit David Liganière, ce que dit Guillaume, c'est le plateau qui a atteint l'inflation sur fin octobre-novembre
08:45 et la BCE qui a annoncé une stabilisation de l'augmentation de ces taux.
08:50 Est-ce que ça, c'est des petits signaux qui nous disent peut-être que ça va repartir ?
08:53 - Ça est d'une, et de deux, vous, par rapport au prix, l'inflation des matières premières,
09:00 et comment vous allez réagir par rapport au programme que vous sortez ?
09:05 Est-ce que vous pensez que vous allez augmenter vos prix ? Est-ce que vous pensez que vous allez les baisser ?
09:09 Grosso modo, l'offre et la demande, comment ça va se passer en 2024 ?
09:12 - Ça fait beaucoup de casse-fois. - Ça fait beaucoup.
09:14 - Donc je vais essayer de... - On a une deuxième partie quand même.
09:18 - Une deuxième partie, c'est autre chose.
09:20 - Alors, les signaux positifs. - Les signaux positifs.
09:23 - Il y a des signaux positifs. Moi, j'en vois trois.
09:26 Premier signal, et vous l'avez parfaitement résumé, on va avoir une stabilité des taux d'intérêt.
09:32 Peut-être qu'à la fin 2024, ils vont commencer à baisser,
09:35 mais surtout, on va commencer à voir réapparaître une reconstitution du pouvoir d'achat de nos ménages.
09:43 La hausse des salaires, ça, je me réfère aux propos, justement, de la sous-gouverneure de la Banque de France
09:49 qui nous disait que pour 2024 et 2025, les salaires vont augmenter plus vite que l'inflation,
09:55 donc il va y avoir une reconstitution du pouvoir d'achat des ménages.
09:59 Donc ça, c'est déjà un premier point positif. Ils vont regagner du pouvoir d'achat.
10:03 Deuxième élément, je pense que les banques, en tout état de cause, leur métier, c'est de prêter.
10:08 Donc elles vont à nouveau prêter beaucoup plus massivement que ce qu'elles n'ont pu faire au cours de l'année 2023.
10:16 Et le troisième paramètre, je l'ai oublié, mais il va revenir.
10:21 - C'est vous, comment vous allez réagir ?
10:23 - Nous, comment on va réagir ?
10:24 - Ma deuxième question, c'est celle-là. Vous, comment vous allez réagir ?
10:26 - Oui, tout à fait.
10:27 - Vous êtes asséché, est-ce que vous allez revoir, comment vous allez sortir vos programmes ?
10:29 A quel prix ? Est-ce que vous allez continuer à augmenter vos prix ?
10:31 Au contraire, vous allez essayer de les baisser ?
10:33 - Alors...
10:35 - Pour relancer la machine.
10:36 - Pour relancer la machine. Une réponse là aussi en deux temps.
10:39 Premier élément, il faut bien que nos auditeurs comprennent que dans le neuf, c'est pas du tout comme dans l'ancien.
10:45 Dans l'ancien, le prix, c'est vraiment le jeu de l'offre et de la demande.
10:49 Si vous n'avez plus de demande, le vendeur, à un moment donné, il baisse ses prix.
10:54 Dans le neuf, le prix, c'est un prix totalement technique.
10:58 Donc avec des coûts de construction qui ne vont pas baisser.
11:01 Donc il faut travailler sur d'autres sujets.
11:03 Et c'est ce que l'on fait actuellement.
11:06 Et on a fait, moi j'ai fait un gros travail avec mes équipes,
11:09 de regarder un petit peu tout ce qui gêne dans la réglementation et qui pourrait permettre de faire baisser les prix.
11:14 Je vais vous donner juste un seul exemple.
11:16 Dans la loi, dans le code de la construction, il y a des dispositifs qui sont facultatifs,
11:27 qui pourraient permettre aux maires, quand on fait des opérations mixtes,
11:30 logements privés et logements sociaux, d'avoir des bonus de constructibilité.
11:34 C'est à dire que vous pouvez faire 100 ou 1000 m² de plus parce que vous faites aussi du logement social.
11:41 C'est une possibilité qui est donnée aux maires. Ils ne s'en saisissent jamais parce que c'est facultatif.
11:45 Nous, on dit faisons en sorte que ça devienne une règle de droit commun.
11:49 C'est à dire que quand vous faites du logement social avec du logement privé pour de l'accession,
11:53 vous avez tout de suite ce bonus de constructibilité.
11:56 Et ça n'est que si les maires ne veulent pas qu'ils peuvent nous l'interdire.
12:00 C'est automatique. Et en gros, sur le même foncier, encore une fois,
12:05 au lieu de faire 60 logements, vous pouvez en faire 70 ou 80.
12:09 Là, ça baisse automatiquement les prix.
12:11 - Et du coup, ça ferait baisser les prix et ça améliorerait le résultat des promoteurs.
12:15 - Tout à fait. - Et ça, il n'y a pas besoin de passer par le gouvernement ?
12:20 - Non, aujourd'hui, déjà, ça ne coûte rien à l'État. Ça ne coûte rien à personne.
12:25 Ça demande une volonté politique de changer les textes, les décrets, les règlements et autres.
12:31 - Qu'est-ce qu'il faut changer ? Je crois pas. Très simplement.
12:34 - Très simplement, c'est que la loi dit que les maires peuvent accorder un bonus de constructibilité.
12:41 Nous, on dit, la loi dit, il y a automatiquement un bonus de constructibilité.
12:46 Vous voyez la subtilité ? On donne une opportunité, les maires ne s'en exigissent pas.
12:52 On le rend obligatoire. Et s'ils sont contents, ils l'enlèvent.
12:55 - Et c'est un dispositif. On n'a pas le temps, on va passer à la deuxième partie,
12:59 parce qu'on a déjà explosé un petit peu le compteur.
13:02 Juste pour bien synthétiser, ce que vous dites est fondamental,
13:05 parce que ça permettrait à la fois d'avoir un équilibre avec des promoteurs
13:08 qui relanceraient aussi la machine, et du coup, ça serait au bénéfice aussi des Français.
13:12 Parce qu'in fine, c'est au bénéfice des Français avec des prix qui sont maîtrisés.
13:15 Vous restez avec nous, Didier Bellegagnère.
13:17 À suivre, les amis, ça vous concerne avec une première partie.
13:21 Les questions que vous posez, on vous y répond tous les mois.
13:24 C'est dans le rendez-vous de l'Immobilier. À tout de suite.

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