SMART IMPACT - L'invité de SMART IMPACT : Frédéric Bardeau (Simplon.co)

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Mercredi 17 janvier 2024, SMART IMPACT reçoit Frédéric Bardeau (Président cofondateur, Simplon.co)
Transcript
00:00 [Générique]
00:06 Bonjour Frédéric Bardot, bienvenue.
00:08 Bonjour.
00:09 Heureux de vous accueillir pour ce grand entretien.
00:10 Vous êtes le co-fondateur, le président de Saint-Plon.co,
00:14 l'aventure qui a commencé il y a un peu plus d'une décennie, 2013.
00:18 On fait un peu d'historique, pourquoi vous l'aviez créée ?
00:20 On était plusieurs à avoir la même idée en même temps.
00:22 On s'est lancé en même temps que l'école 42, de Xavier Niel, Le Wagon.
00:25 Donc il y a eu une génération spontanée de gens qui ont vu ce modèle apparaître aux Etats-Unis
00:29 et qui ont choisi de l'importer en France, chacun avec sa touche particulière.
00:32 Et nous c'était la touche économie sociale et solidaire et inclusion.
00:35 Donc on s'est tous lancé en même temps.
00:37 On avait envie de répondre à deux problèmes, le pénurie de main d'oeuvre
00:41 et le fait qu'il y ait des gens super qui sont à Pôle emploi
00:43 et qui devraient être sur le monde du travail parce qu'ils ont du talent.
00:47 Onze ans plus tard, vous avez atteint les objectifs initiaux.
00:50 Vous êtes bien au-delà de ce dont vous riez.
00:52 Oui, on a pris une grosse vague.
00:54 C'est vrai qu'on ne s'était pas imaginé que dix ans après,
00:56 on aurait 120 écoles dans 25 pays, qu'on aurait formé 30 000 personnes
01:00 qui sont à l'emploi à 80%.
01:03 C'est vrai que ça a dépassé, notamment l'international,
01:05 ça a beaucoup dépassé nos espérances.
01:07 On pensait qu'on resterait franco-français principalement.
01:09 Alors moi, ça progresse parce que j'avais ce chiffre de plus de 25 000 personnes formées depuis 2013.
01:14 40% de femmes, 44% de personnes peu ou pas diplômées.
01:18 Je reviens au modèle entreprise sociale et solidaire.
01:22 Pour vous, c'était quoi ? C'était une évidence ?
01:26 Pourquoi vous avez choisi ce modèle ?
01:28 C'est drôle parce qu'on voit beaucoup dans l'actualité Sam Altman.
01:31 C'était un de nos modèles, mais avant qu'il soit chez Chath-GPT,
01:34 il s'occupait d'un incubateur qui s'appelle Y Combinator.
01:36 Et nous, on voulait être une startup sociale.
01:38 C'est-à-dire qu'on voulait appliquer les méthodes des startups,
01:40 c'est-à-dire aller vite, grandir vite, mais avec un objectif d'impact.
01:44 Et donc, cette idée de faire des formations gratuites, c'était exactement ça.
01:47 On avait envie de proposer ce modèle-là et d'aller chercher des gens
01:50 qu'on ne trouve pas dans le numérique et de leur donner ces pouvoirs-là.
01:53 Vu les tensions sur le marché, c'était ça l'idée.
01:56 On voulait aller vite et fort.
01:59 Formation gratuite, super. Mais alors, de quoi vous vivez ?
02:03 Comment vous payez les salariés de Saint-Plon ?
02:05 Je dis souvent ça à mes enfants.
02:07 Rien n'est gratuit dans la vie sauf Saint-Plon, mais ce n'est pas vrai.
02:09 Il y a des gens qui payent à la place des apprenants.
02:11 Quand on a la chance d'être en France, c'est des gens comme Pôle emploi,
02:14 qui en France travaillent, ou sinon les OPCO, les régions, l'État,
02:17 les entreprises aussi, qui payent pour recruter.
02:20 Elles désespèrent d'avoir ces profils-là, donc elles mettent la main à la poche aussi.
02:23 Les gens dans l'écosystème, des Microsoft, des Méta,
02:26 ils ont intérêt à ce qu'il y ait des gens sur le marché pour que leur business tourne.
02:30 Donc, eux aussi, ils nous payent.
02:31 Mais dès qu'on parle d'ailleurs qu'en France, il y a des systèmes différents.
02:35 En Afrique, c'est la Banque africaine de développement, ça peut être l'Union européenne.
02:39 Il faut être inventif.
02:40 Il faut être agile et créatif.
02:42 On est obligé de trouver le modèle économique ad hoc pour quasiment chaque apprenant.
02:46 - Si c'est une entreprise qui paye, est-ce que, je ne sais pas comment dire ça,
02:51 elle se garde les salariés qui sont formés ou alors c'est simplement une contribution ?
02:55 - Ça dépend.
02:56 Il y a un peu des deux.
02:57 La plupart du temps, plus il y a des gens sur le marché, mieux c'est.
03:00 Puis en plus, en termes de RSE, diversité, ça coche un peu les cases.
03:03 Mais parfois, ça alimente leur écosystème.
03:05 C'est le cas des écoles qu'on a avec Microsoft.
03:07 Il y a 10 000 partenaires de Microsoft en France qui ont besoin de compétences.
03:10 Donc là, Microsoft amorce la ponce et propose des gens pour que son écosystème profite
03:15 et qu'il achète ces technologies.
03:17 - Économie sociale et solidaire, c'est-à-dire que vous ne versez pas de dividende ?
03:20 - C'est ça. On ne peut pas être coté en bourse.
03:22 On a un écart de salaire entre 1 et 7 à Saint-Plon.
03:25 Et puis, tout est en gouvernance un peu partagée.
03:28 - Il y a des bénéfices ? Vous en faites quoi ?
03:30 - Des bénéfices, malheureusement, il n'y en a pas. En tout cas, pas assez.
03:33 On a beaucoup grandi. La croissance nous a beaucoup fait faire de pertes.
03:36 Et puis, c'est un modèle qui est un peu rock'n'roll quand même économiquement.
03:39 Pour l'instant, le cas n'est pas posé.
03:41 Mais si on avait, on pourrait les reverser directement à l'interne sur la mission sociale.
03:45 Puis, on a aussi une fondation à côté.
03:47 Donc, le jour où on fera des bénéfices, je pense qu'on pensera d'abord à la fondation.
03:50 - Vous saurez quoi en faire.
03:52 Vous avez créé des formations spécifiques, reconnues ?
03:56 - Oui, complètement. On est un des organismes de formation qui a le plus de diplômes qu'il a créés.
04:01 Donc, on en a trois. C'est des Bac +5. Il y a même des Bac +3, 4.
04:05 Donc, le titre de développeur en IA, qui n'existait pas en France,
04:08 maintenant, il existe ce diplôme-là. Il est disponible pour tout le monde.
04:11 C'est nous qui l'avons créé. On en est le certificateur.
04:14 Pareil pour l'académie du Métavers qu'on avait fait avec Meta.
04:17 On a un truc qui s'appelle "développeur 3D temps réel".
04:19 Donc, sur le Métavers, les jeux vidéo, des choses comme ça.
04:22 Et là, on vient d'avoir à nouveau une certification sur "data engineer".
04:26 Donc, on parle beaucoup d'IA, mais sans data, il n'y a pas d'IA.
04:30 Et donc, il faut des data engineers, des gens qui manipulent ces données-là.
04:33 Donc, ça, c'est des diplômes simples. On en a un sur l'agilité, sur la blockchain aussi.
04:36 – OK. On va revenir sur le Métavers, les Métavers,
04:40 réalité augmentée, réalité étendue.
04:43 Mais je voudrais reprendre d'abord quelques-unes des priorités de Saint-Planc.
04:46 Les femmes, le handicap, la reconversion.
04:49 Sur d'abord la féminisation des métiers du numérique.
04:53 Le constat de départ, c'était quoi ?
04:55 Il y a plein de jeunes filles qui sont hyper bonnes en maths,
04:58 qui sont hyper bonnes en sciences, qui vont jusqu'au bac.
05:00 Et puis, plus on avance, moins elles sont dans ces métiers, c'est ça ?
05:03 – Oui, c'est vraiment ça.
05:05 On a un gros problème de féminisation en Europe du Nord, plutôt, aux États-Unis aussi.
05:09 Nous, on est dans d'autres géographies.
05:11 On est au Maroc, en Inde. Et là, il n'y a aucun problème.
05:14 Un développeur sur deux, c'est une développeuse.
05:15 – OK. – Donc, c'est vraiment quelque chose de culturel.
05:17 Et effectivement, il y a une atrophie, c'est ce que vous avez décrit.
05:19 On est le même nombre à l'école primaire, pareil au collège.
05:22 Et à la fin, en école d'ingénieur, il y a 2, 3, 5 personnes.
05:25 – Mais c'est lié à quoi ? – C'est lié à la culture.
05:27 – Une espèce de machisme ambiant ?
05:28 – Je ne sais pas si vous avez des enfants,
05:30 peut-être que votre fille, vous ne la destinez pas à être ingénieur informaticien.
05:33 Peut-être que vous n'allez pas la pousser à faire ça.
05:35 Donc, il y a un truc culturel.
05:36 Alors que vous allez en Inde ou au Maroc, le rêve de n'importe quel père de famille,
05:39 c'est que sa fille, elle travaille chez Accenture ou Capgemini.
05:41 – Alors, sauf que quand on crée une entreprise comme la vôtre,
05:44 c'est compliqué de changer les mentalités d'une société.
05:47 Donc, qu'est-ce que vous avez mis en œuvre ?
05:48 – On travaille avec l'éducation nationale, on travaille avec les branches professionnelles,
05:51 on fait de l'orientation dans les collèges.
05:53 Donc, on essaie d'agir sur toute la chaîne.
05:55 Mais nous-mêmes, déjà, on va chercher les femmes au lieu d'attendre qu'elles viennent.
05:58 En fait, si vous vous attendez, vous avez 15%, comme tout le monde.
06:01 Donc, pour avoir 40%, il faut aller les chercher, il faut aller au-devant.
06:04 – Alors, comment vous faites ?
06:05 – On va dans les collèges, on va dans les lycées, on passe par des réseaux féminins,
06:08 il y a des associations spécialisées.
06:10 Et puis, en fait, c'est du bouche à oreille, beaucoup.
06:12 C'est-à-dire qu'on a fait aussi des formations qui sont réservées aux femmes.
06:15 Donc, au début, ça faisait un peu polémique, ça faisait un peu non-mixed,
06:18 vous voyez ce que je veux dire ?
06:19 – Oui, bien sûr.
06:20 – C'est un espace de parole où elles sont entre elles.
06:23 Donc, ça dure quelques semaines, c'est un peu cette espace hackeuse.
06:26 Et après, elles arrivent en environnement mix, et là, ça marche super bien.
06:30 – Comment je peux dire ça ?
06:32 Pourquoi elles hésitaient ?
06:33 Tiens, quand vous arrivez, que finalement, vous présentez les métiers du numérique,
06:38 toutes ces perspectives, qui sont quand même des perspectives assez exaltantes,
06:41 qu'est-ce qui faisait, au-delà du… peut-être, j'allais dire,
06:46 du matchisme ambiant, j'en sais rien, mais au-delà de ce poids culturel ?
06:49 Qu'est-ce qui les faisait hésiter ?
06:51 – Il y a déjà l'invisibilisation des femmes dans le numérique.
06:54 – Il n'y a pas de rôle-modèle, quoi.
06:55 – Il y en a, mais elles ont été invisibilisées.
06:57 La première codeuse de l'histoire, elle s'appelle Ada Lovelace, c'était une femme.
07:01 Et il y en a eu plein, le Fortran, le Cobol, il y a eu les filles qui travaillaient pour la NASA.
07:06 Donc, elles n'ont pas de rôle-modèle, ou alors c'est des rôles-modèles inatteignables.
07:10 Et puis, surtout, effectivement, elles ne se sentent pas légitimes.
07:13 Elles se disent, en fait, ce n'est pas pour moi, ce n'est pas pour rien
07:15 qu'il n'y a pas de femmes dans le numérique, c'est peut-être parce qu'on n'est pas fait pour ça.
07:18 Peut-être qu'elles ont croisé un prof ou un conseiller à Pôle emploi
07:20 qui leur a dit, ouais, tu sais, l'informatique, ce n'est pas forcément un truc de filles.
07:23 Elles ont plein d'histoires différentes, mais c'est vrai qu'elles…
07:26 Et il y a aussi un discours du numérique qui est trop technique.
07:29 C'est-à-dire, quand on met une annonce de "Venez vous former, apprenez Python",
07:32 la fille, ça ne les fait pas triper.
07:35 – C'est qui ce bonhomme ?
07:36 – Mais oui, et si on leur dit, ben non, venez apprendre le numérique
07:39 et créer des applications qui vont changer le monde,
07:41 ben, mathématiquement, on a plus de filles.
07:43 Donc, on a été obligé aussi de changer de discours
07:45 et c'est souvent ça qui fait bien la différence.
07:47 – Autre priorité, le handicap.
07:49 D'abord, peut-être une question très générale.
07:51 Comment le numérique peut ou est un levier d'inclusion aujourd'hui ?
07:55 – Il est à la fois un levier d'exclusion, je pense qu'on va en reparler,
07:59 mais donc il met à distance des gens et en même temps,
08:01 c'est un des pouvoirs magiques assez incroyables.
08:03 Parce que dès que vous vous débrouillez un petit peu en numérique,
08:05 il y a une telle pénurie de compétences
08:07 qu'on ne vous demande pas forcément quels sont les diplômes que vous avez faits,
08:10 mais si vous savez faire des choses, vous êtes le bienvenu.
08:12 Donc, il y a un pouvoir comme ça d'empowerment,
08:14 d'encapacitation qui est assez fort.
08:16 Et après, sur le handicap, s'il n'y avait pas le numérique,
08:19 vous pouvez demander à n'importe quelle personne dans la situation de handicap,
08:21 elle serait encore plus exclue.
08:23 – Oui, c'est un moyen de sortir en partie de son isolement.
08:27 – D'accéder à la formation, d'accéder à la connaissance.
08:30 Sans le numérique, il y aurait plein de choses qui se feraient mal.
08:33 Là, on a vécu le travail à la maison, le télétravail,
08:37 là encore, s'il n'y avait pas de numérique, il n'y aurait rien du tout.
08:39 – Bien sûr, d'où l'importance de la lutte contre l'électronisme.
08:42 On y reviendra à la fin de cet entretien,
08:44 parce que je voudrais quand même qu'on consacre pas mal de temps à ce livre blanc
08:47 pour des technologies, usages et expériences immersives plus responsables.
08:52 D'abord, pourquoi cette démarche ?
08:53 Ça vous semblait le bon moment pour le faire ?
08:56 – C'était le contrepoint d'une autre initiative qu'on avait lancée,
08:59 qui est l'Académie du Métavers avec Méta,
09:01 où on a formé des femmes, des hommes, au métier du Métavers.
09:04 Développeurs de Métavers, gestionnaires de casques, etc.
09:07 On s'est dit, bon, ça c'est super, ça crée de l'emploi, c'est très positif,
09:11 mais il y a aussi des côtés négatifs dans le Métavers.
09:13 Dans le numérique, il a deux faces, Stiegler, Diget, le pharmacon, le remède et le poison.
09:18 Et bien le côté poison, on avait envie de le traiter.
09:20 C'est-à-dire qu'on avait envie de dire que le Métavers c'était bien,
09:22 mais on n'avait pas envie de se cacher derrière son petit doigt
09:25 et de se dire, oui, il y a un impact écologique,
09:27 oui, il y a des problèmes d'accessibilité, il y a peut-être des problèmes d'exclusion,
09:30 il y a des problèmes juridiques aussi, de sécurité.
09:33 Et donc on avait envie de creuser ça et on avait envie de le faire à plusieurs.
09:36 - Mais alors, moi quand j'ai commencé à bosser sur l'interview,
09:38 je me suis dit, ok, le Métavers, plus personne n'en parle.
09:41 C'est marrant comme ça, vite, le numérique, il y a un an, on ne parlait que de ça.
09:44 Et aujourd'hui, tout le monde se dit, bon, de toute façon, Méta s'est planté,
09:47 donc c'est mort, ça n'existera pas.
09:49 - Non, non, c'est vrai.
09:50 - Dans les deux cas, on était dans la caricature.
09:52 - Ah oui, comme d'habitude, c'est-à-dire que c'est un clou chasse l'autre.
09:54 Mais vous savez, en IA, on dit qu'il y a des hivers et des étés.
09:57 Vous savez, il y a eu des moments où la mode était à l'IA.
10:00 Il y a eu des moments pendant 10, 20 ans, on disait,
10:02 le IA, ça ne marchera jamais, c'est nul.
10:04 Vous voyez que ça a rebondi assez facilement.
10:07 Et puis quand on voit des acteurs comme Apple et comme d'autres
10:09 qui vont lancer le 2 février un Vision Pro,
10:13 on se dit qu'il y a beaucoup d'avenir.
10:15 Donc le Métavers tel que Métal l'avait proposé au public,
10:18 il y a eu un problème d'adoption.
10:19 Les gens ne se sont pas projetés là-dedans.
10:23 Il n'y a personne qui a assez de casques chez lui pour pouvoir participer à une expérience.
10:26 Par contre, c'est là pour durer sous d'autres modalités.
10:29 Vous en avez parlé, la réalité augmentée, la réalité mixte,
10:32 il y a plein de choses à lire, des lunettes.
10:34 - Alors, ce qui est intéressant dans votre livre,
10:36 c'est qu'il y a le positif et le négatif à chaque fois.
10:40 Si on prend, on peut dire quoi ?
10:43 Que les dérives de la vraie vie, elles se retrouvent dans le métavers ou dans les métavers ?
10:47 C'est-à-dire quand il y a du racisme, de la misogynie, de l'homophobie,
10:50 elles vont s'exprimer de la même façon ?
10:52 - Oui, complètement.
10:53 - Ou peut-être encore plus parfois ?
10:54 - Pas forcément plus.
10:56 On a un effet un peu comme les réseaux sociaux.
10:58 C'est un reflet de l'humanité, comme les datas de l'IA.
11:00 On dit que l'IA est biaisée, mais c'est nous qui sommes biaisés.
11:02 Ce ne sont pas les IA.
11:04 Mais dans le métavers, on a trouvé que c'était les avatars, par exemple.
11:08 Ça permet d'effacer aussi la personnalité qu'on est, d'être moins discriminant,
11:12 d'avoir une autre petite personnalité.
11:14 Si vous êtes en situation de handicap, vous n'êtes pas obligés d'être en situation de handicap dans le métavers.
11:17 Donc l'avatarisation, le fait de ne pas forcément être soi-même,
11:20 ça peut permettre aussi d'être un peu plus inclusif.
11:22 Donc il y a vraiment les deux.
11:24 Il y a des dérives, comme dans les jeux vidéo, où il y a du harcèlement,
11:26 il y a eu des cas de viol.
11:28 - Oui, alors ça peut sembler très étonnant, des cas de violence sexuelle ou de viol,
11:32 alors qu'évidemment on est dans un monde virtuel.
11:34 Sauf que l'impact psychologique, il est réel.
11:36 - On le sait, que les mots tuent.
11:38 - Bien sûr.
11:40 - Là c'est vrai aussi, il y a des cas de harcèlement qui sont connus de longue date dans le monde du jeu vidéo.
11:44 Donc il s'est retrouvé effectivement dans le métavers.
11:46 Mais là, les acteurs ont tout de suite pris des mesures technologiques
11:50 pour pouvoir mettre les gens à distance, avoir une bulle de sécurité.
11:54 Orange, ils ont monté des "safe space",
11:56 donc des endroits où on peut se réfugier quand on est victime et parler à quelqu'un.
12:00 Donc l'écosystème s'organise aussi.
12:02 - Alors ça dépend de l'écosystème ou ça dépend de la puissance publique ?
12:06 C'est-à-dire que c'est pas un monde...
12:08 - C'est pas un Far West.
12:10 - C'est pas un Far West, c'est pas un monde sans lois.
12:12 Est-ce que les lois de la vraie vie, là où je touche les objets et les gens, s'appliquent dans le métavers ?
12:16 - Oui, oui, ça commence à s'appliquer.
12:18 C'est le droit des contrats.
12:20 Quand vous signez les conditions générales d'utilisation, c'est la plateforme qui est responsable.
12:23 Et après, il y a le RGPD, ça s'applique dans le métavers.
12:25 Pour l'instant, il n'y a pas eu de cas pénal de meurtre virtuel ou de viol virtuel,
12:31 mais une grosse partie de la loi s'applique.
12:33 - Si on parle de santé publique, santé physique, santé mentale,
12:37 je vais commencer par le positif.
12:39 Il y a beaucoup d'impacts positifs de la réalité étendue.
12:44 Je vais penser à des opérations chirurgicales faites à distance,
12:49 ce qu'on appelle le jumeau numérique qui est hyper utilisé de plus en plus par les médecins, les chirurgiens.
12:54 On n'en est qu'au début, d'une certaine façon ?
12:57 - Oui, et puis il y a un autre pan qui est moins connu, mais qui est tout aussi puissant,
13:00 c'est le fait de traiter des syndromes post-traumatiques, des phobies, des peurs,
13:05 même des cas de schizophrénie.
13:07 Le côté immersif du métavers et de la réalité virtuelle fait qu'on peut traiter des choses comme ça,
13:13 des psychoses, donc il y a pas mal de choses aussi dans ce domaine-là.
13:16 - Avec un cas de réalité virtuelle, on va faire vivre à une personne qui souffre de ces pathologies,
13:21 des situations qui la mettront moins en danger que si on la faisait revivre dans la vallerie,
13:26 c'est ce que je comprends.
13:27 - C'est la thérapie cognitivo-comportementale, c'est-à-dire que si vous avez peur des araignées,
13:30 on va vous montrer des araignées au fur et à mesure, pareil pour le vertige
13:33 et pour les syndromes post-traumatiques aussi.
13:35 - Et ça, ça marche très bien, ça.
13:36 - Ça, c'est vraiment très documenté scientifiquement, effectivement.
13:38 - Et donc on peut même imaginer des soins à distance, je l'ai dit, des rééducations, c'est ça,
13:43 avec des casques XR.
13:45 - Oui, et puis après, c'est vraiment le cas d'usage principal, c'est la formation.
13:48 C'est-à-dire que pour entraîner des chirurgiens, ils vont s'entraîner sur des...
13:51 Et ça, c'est génial, tous les métiers dangereux, les choses comme ça.
13:54 - Après, si je vais dans la colonne "moi", il y a quand même le risque de sédentarisation de la société.
14:01 - Tout à fait.
14:02 - C'est un risque qui existe déjà aujourd'hui.
14:03 - Oui, complètement.
14:04 - Vous vous souvenez du film "Wall-E" que vous avez certainement vu ?
14:06 C'est un petit robot qui est la vigie de la planète, qui a été quasiment vitrifiée, on va dire ça,
14:11 et qui espère qu'une plante va se remettre à pousser.
14:13 L'humanité, elle est dans des vaisseaux spatiaux, et alors, elles sont toutes obèses,
14:18 dans des fauteuils roulants, avec un casque de réalité virtuelle et un soda à la main.
14:21 - Oui, oui, et puis c'est le...
14:22 - Est-ce que ce risque, vous le pensez totalement...
14:25 Voilà, c'est la création d'un scénariste, ou alors que c'est une vraie possibilité ?
14:29 - Non, non, il y a une tendance, mais on a reproché ça aussi à la télévision.
14:31 - Bien sûr, bien sûr.
14:32 - Donc, toutes les choses comme ça.
14:34 Mais la télévision, ça met aussi des gens en mouvement,
14:36 on peut faire aussi de la réalité virtuelle avec du sport.
14:38 Donc, effectivement, il y a un risque, mais après, il n'est pas spécifique au métavers.
14:43 Et il n'y a pas de raison que...
14:45 Enfin, le télétravail aussi, c'est quelque chose qui a reproché aussi la partie scélentarisation.
14:50 Donc, oui, il y a un risque, mais là encore, c'est qu'est-ce qu'on va pousser comme usage,
14:53 c'est qu'est-ce qu'on va en faire, en fait, ce truc-là.
14:55 Si c'est effectivement "Coach Potato" et puis on est sous perfusion, et tout ça, ça ne va pas le faire.
15:00 - Mais c'est intéressant parce que ça rejoint aussi le bilan carbone de ces outils de réalité étendue ou de réalité augmentée.
15:08 C'est-à-dire que l'argument positif, c'est de dire on va moins prendre l'avion,
15:12 on va moins bouger pour aller voir une expo, un concert, aller au stade, etc.
15:17 Super, effectivement.
15:18 - Difficile à calculer, c'est vrai qu'il y a un peu des querelles d'experts sur quels sont les coûts et vraiment éviter.
15:24 Comment est-ce qu'on compte le carbone d'un côté ou de l'autre ?
15:27 Est-ce que quelqu'un qui est branché sur une électricité nucléaire décarbonée comme nous,
15:31 il faut le compter pareil que quelqu'un qui est en Allemagne avec du charbon ?
15:33 - Non.
15:34 - Voilà, non.
15:35 - Clairement non.
15:36 - Et un événement, qu'est-ce qu'on compte dans tout l'événement ?
15:38 Est-ce qu'on compte les casques, la fabrication des casques ?
15:40 On n'avait pas encore de données sur combien ça coûte en carbone, en énergie, de faire un casque.
15:44 Maintenant, il y a des analyses de cycle de vie.
15:46 J'ai vu que dans l'émission précédente, vous parliez du cycle de vie.
15:49 Donc voilà, on manquait de données, puis on n'a pas tous le même référentiel.
15:52 - Oui, et c'est aussi une question de l'effet rebond.
15:54 C'est-à-dire que toute l'énergie qu'on va gagner à ne pas faire des événements physiques parce qu'on sera dans le métavers,
15:58 est-ce que ça va vraiment empêcher d'autres événements de se produire ?
16:02 - Oui.
16:03 - C'est le problème de l'effet rebond.
16:04 - Parce qu'on aura sans doute toujours envie d'aller assister physiquement à de vrais événements.
16:08 - Voilà. En fait, ça ne se substitue pas.
16:10 - Ce bilan carbone de cette réalité étendue a été augmenté.
16:16 Vous dites qu'il a été compliqué. On commence à pouvoir vraiment le faire ?
16:19 - Non, on est au tout début.
16:20 Il y a des projets de recherche qui sont dans le livre blanc, il y a des analyses de cycles de vie,
16:25 il y a des gens qui font des expérimentations événements virtuels face à événements réels.
16:29 Donc là, on en est au début.
16:30 Mais il faut qu'on ait les mêmes critères. Il y a une norme ISO pour calculer tout ça.
16:33 Il faut que tout le monde ait la même règle. Sinon, en fait, ça ne joue pas.
16:36 - Mais l'objet... Alors, je vais taper volontairement et d'une façon un peu simplificatrice sur Mark Zuckerberg,
16:43 l'objectif de Mark Zuckerberg, quand il bascule, quand il crée Meta, c'est de nous faire acheter de nouveaux objets.
16:50 - Oui, oui.
16:51 - Qu'il va falloir produire. Donc, ça pose une vraie question.
16:54 - Oui, mais pareil pour le Vision Pro d'Apple.
16:57 - Oui, oui. J'ai cité celui-là, j'aurais pu en citer l'autre.
16:59 - Mais derrière, il y a une vision...
17:00 - Mais est-ce que c'est logique ?
17:01 Quand on est dans une période où on se dit, au contraire, les ressources de la planète sont limitées,
17:07 essayons de moins consommer et de créer de nouveaux objets.
17:09 - Ça a fait beaucoup de débats dans les rédacteurs du livre blanc.
17:11 Mais en fait, il y a une vision derrière. Ce n'est pas juste pour nous faire acheter des casques.
17:14 Par exemple, chez Apple, on dit souvent qu'il ne restera plus que le casque, il n'y aura plus de clavier.
17:18 Et ce sera ça, notre interface.
17:20 Donc, c'est censé se substituer.
17:21 - Oui.
17:22 - À mon avis, ça va s'ajouter.
17:23 - Oui, jusqu'à présent, on a toujours ajouté les diverses les uns aux autres.
17:27 - Mais après, le principal coût carbone du numérique, c'est le matériel, c'est l'équipement.
17:32 Et en fait, ce n'est pas forcément les casques de la réalité virtuelle.
17:35 Si on a beaucoup, si on est un milliard à être dans la réalité virtuelle, il va y avoir un problème.
17:39 - Oui.
17:40 - Mais alors, ça veut dire qu'on ne va pas faire les trucs de santé, de formation, tout ce dont on a parlé avant.
17:45 - Donc, c'est pour ça que je pose cette question.
17:46 C'est-à-dire, est-ce que finalement, cette technologie qui peut être, qui est déjà géniale, il ne faut pas la prioriser ?
17:53 - Ah ben, vous posez la question.
17:54 Les gens qui proposent ça parlent de discernement.
17:57 C'est-à-dire, on va pousser les usages positifs et freiner, taxer les usages négatifs.
18:02 Donc, si c'est pour s'envoyer des photos de chats dans le métavers, ça n'a aucun intérêt.
18:06 Si c'est pour aller, effectivement, sauver des gens ou faire de la formation, ça a plus de sens.
18:11 - 4 minutes, je garde du temps.
18:13 Je n'oublie pas sur l'électronisme.
18:14 Mais je voudrais quand même vous poser une question sur l'IA générative, notamment.
18:19 Parce que, alors là, vous disiez, il y a des hivers et des étés.
18:23 On est en plein été.
18:24 - C'est la canicule.
18:25 - Oui, c'est ça.
18:26 C'est la canicule.
18:27 Là aussi, ça va dépendre de l'usage qu'on en fait.
18:31 - C'est-à-dire que quand vous entendez des gens qui crient "Arrôt, attention, danger, l'humanité va court à sa perte", c'est totalement caricatural pour vous ?
18:41 - Oui, oui, complètement.
18:42 Ça, c'est vraiment du marketing.
18:44 On est très, très loin.
18:45 C'est comme la surpopulation sur Mars.
18:47 C'est un problème qui n'arrivera que dans un temps assez long.
18:50 - Malgré l'accélération, quand on voit à quel point les nouvelles générations sont plus performantes que les précédentes.
18:54 - Oui, oui, parce qu'on est sur des choses qui prédisent le mode après.
18:56 On est sur des trucs qui ne raisonnent pas.
18:58 On a un effet magique, mais qui ne correspond pas du tout.
19:01 C'est vraiment avoir une piètre idée de l'intelligence humaine de dire qu'ils vont nous dépasser.
19:05 Là aussi, on peut faire des choses avec le handicap et l'IA générative.
19:08 On peut faire des trucs géniaux dans l'éducation, dans la formation.
19:11 Tous les gens qui sont illettrés ou qui ne parlent pas notre langue, ils peuvent interagir avec un chatbot.
19:16 Vous imaginez ServicePublic.fr en mode chat GPT pour accéder à vos droits.
19:20 C'est un rêve.
19:21 Il y a des trucs vraiment géniaux à faire.
19:23 Et là encore, qu'on ne me dise pas que chat GPT pollue, parce que c'est l'épaisseur du trait par rapport à Netflix ou par rapport à autre chose.
19:29 - Alors, ça nous amène à cet enjeu de lutte contre l'électronisme.
19:33 Un peu plus de 15% des personnes de 15 ans et plus en situation d'électronisme en France.
19:37 Ce chiffre qui est donné par l'INSEE, il date de 2021.
19:41 Est-ce que ça n'a sans doute pas beaucoup changé ?
19:43 - Non, il y a eu d'autres études qui montraient que 30%, voire 35% des Français avaient une difficulté avec le numérique de base.
19:48 Donc, c'est énorme.
19:49 Ce n'est pas l'épaisseur du trait, c'est des millions de personnes.
19:51 - Est-ce que, alors je vais peut-être être totalement caricatural, est-ce que c'est plutôt des ruraux ?
19:57 Comment on peut définir ce qu'est l'électronisme aujourd'hui ?
20:00 - Il y a une surpondération des gens de plus de 70 ans et de gens qui sont effectivement peu qualifiés ou peu diplômés et assez pauvres.
20:07 Ça, c'est sûr.
20:08 Mais il y a un électrisme qui est spécifique aux jeunes, par exemple.
20:11 Ou à certaines professions, col bleu, à haute ouvrier ou des choses comme ça.
20:15 Donc, en fait, il n'y a pas que des chômeurs ou des personnes de plus de 70 ans.
20:19 - Comment vous, chez Simplon, vous luttez contre cet électrisme, l'électronisme ?
20:23 - Déjà, on l'a pris en pleine figure parce qu'en fait, on s'adresse à des gens qui sont exclus.
20:26 Et souvent, la première marche, ils n'arrivaient pas à la franchir chez Simplon parce qu'ils n'avaient pas les bases.
20:30 On a créé des formations.
20:31 Ces formations, on les a fait reconnaître par France Compétences, qui est l'instance suprême des diplômes.
20:36 On a fait un diplôme de compétence informatique fondamentale.
20:39 Donc, ça, c'est les bases de la base pour la lutte contre l'électrisme.
20:42 Et maintenant, on intègre ça aussi chez des salariés.
20:45 On a formé des gens de Suez, de Schneider Electric parce qu'ils n'arrivaient pas à déposer leur congé parce qu'il fallait passer par l'intranet.
20:51 Vous imaginez ?
20:52 Cette exclusion, on ne l'attend pas ici.
20:54 Et là, ce n'est pas des gens de 70 ans ou des illettrés.
20:57 C'est des salariés dans une usine.
20:59 - Qui n'en parlaient à personne, évidemment.
21:01 - Qui n'avaient pas d'email et tout ça.
21:03 Et le jour où l'ADH a dit « Maintenant, votre congé, vous passez par l'intranet », là, 20 % des gens disent « Moi, je ne sais pas faire ».
21:09 - « Je ne sais pas faire ».
21:10 Vous avez un tout petit peu répondu, mais il y a une prise de conscience des pouvoirs publics.
21:13 Il y a des aides. Comment vous êtes-vous accompagné dans ce combat ?
21:17 - Oui, c'est une des priorités de la politique publique.
21:19 L'inclusion numérique, c'est assez standard et c'est continu depuis tous les secrétaires d'État et le prochain ou le nouveau ou le même.
21:26 - On l'attendait.
21:27 - C'est ça.
21:28 Donc ça, c'est une vraie politique publique.
21:29 Il y a une problématique d'accessibilité numérique aussi pour les services administratifs.
21:35 Donc là aussi, pour que les gens ne soient pas à une rupture d'égalité.
21:38 Donc oui, il y a une politique publique.
21:39 Les entreprises s'en mêlent aussi.
21:41 Il y a des fonds de la formation professionnelle qui sont dédiés à ça pour que les gens raccrochent.
21:46 Et puis, il y a aussi des fondations.
21:48 Tout le monde s'y met, mais des millions de personnes.
21:51 - Oui, il y a encore du travail.
21:52 Merci beaucoup Frédéric Bardot.
21:54 - Merci à vous.
21:55 - Votre livre blanc pour les technologies, usage et expérience immersive plus responsable qui est publié par Simplon.
22:02 - Et 30 partenaires.
22:03 - Et 30 partenaires qui ont contribué au livre blanc.
22:08 - Merci encore. On passe à notre rubrique consacrée aux start-up et aux responsables.
22:12 Lutte contre le gaspillage et la précarité alimentaire au programme.

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