• il y a 10 mois
Ce mardi 23 janvier 2024, un représentant des Protestants, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, le président de la conférence des Evêques de France, le Grand Rabbin, et l'Union bouddhiste de France donnaient leur point de vue sur le futur projet de loi sur la fin de vie.
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Transcription
00:00 En protestantisme, le suicide n'est ni un péché, ni un tabou,
00:04 c'est un malheur.
00:06 Et la question c'est comment est-ce qu'on peut accompagner ce malheur ?
00:09 C'est là qu'une réflexion théologique qui peut s'articuler à la question de la loi.
00:13 C'est ça, à mes yeux, le rôle du théologien et donc du responsable religieux.
00:18 C'est d'arriver à articuler une pensée sur le réel,
00:22 et pas simplement rester dans la théorie,
00:25 en disant "le pauvre il a envie de se suicider, on va tout faire pour l'accompagner".
00:28 Il y a là vraiment un enjeu, me semble-t-il, de société et de solidarité.
00:34 Loin de l'hubris, très loin de l'hubris.
00:36 J'ai été témoin de demandes de suicides.
00:40 Les personnes qui sont dans cette situation sont loin de l'hubris.
00:43 Elles sont dans la détresse la plus totale.
00:47 La plus totale.
00:49 Elles sont tout en bas de l'échelle de la vie.
00:51 Elles sont vraiment perdues.
00:53 Alors c'est vrai que l'argument c'est de dire
00:56 "de quel droit est-ce que tu veux maîtriser ta mort ? Quel orgueil !"
01:01 Mais vous vous rendez compte, c'est un jugement supplémentaire
01:05 qu'on fait peser sur la personne qui est en demande.
01:08 Et ça ne veut pas dire qu'il faut dire "oui, on va t'accompagner tout de suite".
01:12 On est loin de ça dans les traditions qui sont déjà à l'oeuvre en Suisse, en Belgique.
01:16 C'est en tout cas les deux situations que je connais.
01:19 J'ai été, on va dire, déplacé dans ma réflexion
01:24 en évoquant ce que j'appelle l'éthique hérétique.
01:27 Alors vous me direz, pour un protestant, ce n'est pas très original,
01:29 mais quand même, sur ce sujet, oui.
01:31 L'éthique hérétique avec ce mot d'hérésie qui, vous le savez,
01:34 est un magnifique mot qui veut dire "le choix", "le libre choix".
01:40 A hérésis, en grec, c'est "le choix libre".
01:44 Et c'est sur cette liberté-là,
01:48 qui n'est pas une liberté personnelle, individuelle,
01:51 mais qui est une liberté qui fait droit aussi à la solidarité,
01:54 à la bienveillance et à l'accompagnement du corps social
01:57 que j'ai voulu mettre en valeur.
02:00 Et donc, du coup, engager la foi, la fidesse,
02:06 dans un dialogue confiant,
02:08 et je reprends le mot que je disais au début de mon propos,
02:11 avec la raison.
02:13 Donc, fidesse et ratio se tiennent la main
02:17 sous le regard bienveillant de la caritas, de l'amour,
02:22 et en espérant que la loi, avec toutes les précautions nécessaires,
02:27 et Dieu sait s'il en faudra,
02:29 puisse permettre l'expression de cette liberté et de ce choix.
02:34 C'est cette dimension à la fois personnelle,
02:37 et non pas collective, mais humaine et humanisante,
02:41 qui concerne l'humanité entière,
02:43 de l'acte de mourir, que je crois important de souligner.
02:47 Je crains qu'en cherchant des solutions techniques,
02:49 comme le physioassisté ou l'euthanasie,
02:52 on contribue à perdre toute la richesse
02:55 de ces dimensions de l'acte de mourir.
02:59 Je souhaiterais que le débat qui s'est ouvert
03:02 et qui va se continuer puisse, au contraire,
03:04 aider à approfondir cela.
03:07 C'est ce qui se vit, notamment dans l'espoir palliatif,
03:11 dont nous appelons tous,
03:12 au développement réel dans notre pays.
03:16 Nous projetons la loi d'une façon peu importe,
03:19 parce que nous sommes plutôt réticents
03:20 au fait qu'il y ait une loi, tout simplement.
03:22 Il y a déjà la loi Clé-Snéholéki qu'il faut faire vivre.
03:26 Maintenant, l'enjeu d'avoir deux textes de loi,
03:28 c'était de bien distinguer ce qui est un soin
03:32 et ce qui ne l'est pas, ce qui ne le serait pas.
03:36 Dans un certain nombre de pays,
03:37 comme l'Autriche en particulier,
03:40 il y a une distinction faite entre les soins palliatifs,
03:45 qui sont dans l'ordre du code de la santé, etc.,
03:47 et puis la dépénisation de tel ou tel acte
03:53 qui n'est pas pour autant considéré comme un acte de soin.
03:58 Quant aux précautions dont parle le pasteur Cléver-Auling,
04:01 pour ma part, très réservé, très sceptique
04:09 sur notre capacité sociale, collective,
04:13 à tenir quelques précautions que ce soit et s'occuper.
04:17 Et ce serait tragique de considérer que d'une manière ou d'une autre,
04:21 on rentre dans un monde,
04:23 que ce soit au moment où nous sommes en charge de quelque chose dans la société,
04:27 on rentre dans un monde où on dit "tu es un soin".
04:31 Après, on peut l'appeler comme on veut,
04:32 on va sûrement trouver un joli mot pour expliquer le suicide assisté.
04:37 "Don", en général, c'est toujours un mot
04:40 qui permet de faire passer un truc.
04:41 "Don", actif, de sérénité, on trouve un mot.
04:46 Mais le principe, c'est qu'on va rompre avec un système qui dit
04:52 "on ne peut pas donner la mort".
04:54 Cette loi a vocation à donner bonne conscience aux gens,
04:57 qu'ils se disent "c'est bon, c'est autorisé, donc je suis couvert".
05:01 Mais le job de la loi, ce n'est pas de donner bonne conscience aux gens,
05:03 c'est justement de faire en sorte, l'éthique,
05:06 c'est se poser des cas de conscience.
05:08 Et moi, je trouve que cette rupture anthropologique serait de dire
05:12 "don avant, on peut tuer".
05:14 Une fois qu'on rentre là-dedans, il n'y a plus de limite.
05:17 Donc, on rentrerait dans une société,
05:19 non plus de la bonne conscience ou du cas de conscience,
05:22 mais de la perte totale de confiance.
05:25 Il y aurait des endroits où on n'oserait pas rentrer en disant
05:27 "là, ils sont plutôt en besoin,
05:29 donc ils vont apprécier les choses différemment,
05:31 ils ne vont pas bien s'occuper de moi".
05:32 Et si on commence à douter du système global
05:35 et qu'on perd confiance dans le système de santé,
05:39 alors il n'y a plus de société.
05:40 Ce n'est même plus une rupture anthropologique,
05:42 c'est une rupture de société.
05:44 Voilà pourquoi je dis,
05:45 ni avec main tremblante, ni à rien.
05:47 On a une loi qui est très bien faite.
05:50 Mais en même temps, nous voyons que le président lui-même
05:53 est en train de réfléchir lorsqu'il dit
05:56 cette décennale des soins palliatifs.
05:59 Il l'a déclaré, il l'a dit,
06:01 et c'est important de rappeler aujourd'hui
06:03 qu'il y a une loi sur les soins palliatifs,
06:06 mais qui n'a pas été suffisamment mise en œuvre
06:08 parce que ça nécessite, je dirais, un budget conséquent.
06:12 On se retrouve seul face à la maladie,
06:15 face surtout à la souffrance,
06:17 loin de ses proches, loin de son intime.
06:21 Est-ce que le fait de dire "je veux mettre un terme à ma vie",
06:27 est-ce que c'est véritablement cette volonté qui s'exprime ?
06:32 Je crois qu'il faut renforcer aujourd'hui
06:35 cette chaleur humaine qui manque dans les hôpitaux,
06:39 qui manque aux patients qui souvent se retrouvent seuls,
06:43 en tête à tête avec ses médecins.
06:45 Croire, pour moi c'est vraiment une croyance.
06:48 De croire que mettre fin à sa vie
06:51 va mettre fin à nos souffrances,
06:53 pour nous c'est vraiment une croyance
06:54 et c'est vraiment de l'ignorance totale.
06:57 [Musique]

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