Chaque vendredi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Catherine Nay livre son regard sur l'actualité.
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00:00 Mais d'abord, comme tous les vendredis sur Europe, Catherine est avec nous. Bonjour Catherine !
00:04 Bonjour Dimitri et bonjour tout le monde.
00:06 La colère des agriculteurs, Catherine, ne fait que croître.
00:09 On verra si Gabriel Attal, qui a reçu à Matignon tous les syndicats de paysans,
00:13 arrive à éteindre le feu avec des mesures à effet rapide.
00:17 Ce qui se joue derrière cette colère, vous nous dites ce matin, Catherine,
00:19 que c'est rien moins que l'avenir des Français.
00:21 Oui, parce que ça, durant le premier quinquennat, Macron, Stéphane Travert, Didier Guillaume,
00:26 Julien Denormandie, furent ministres de l'agriculture et de l'alimentation.
00:31 Deuxième quinquennat, Marc Fesneau est, lui, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
00:38 Eh bien, ce glissement sémantique en dit long.
00:40 Quand on nomme les choses, c'est bien qu'il y a urgence, réarmement.
00:43 Dites-vous, on doit cette expression à Laurent Duplon, sénateur à l'ère de Haute-Loire,
00:47 un éleveur qui, depuis cinq ans, est l'auteur de rapports remarqués sur l'érosion de notre souveraineté agricole.
00:53 Sa première proposition de loi, pour y remédier, a été discutée en mai au Sénat,
00:58 mais le gouvernement n'a pas cru bon l'inscrire à l'Assemblée nationale.
01:01 Il revient à la charge en en déposant une autre, il y a deux jours,
01:05 avec 42 mesures dont il dit qu'elles pourraient être adoptées par simple décret,
01:10 bref, s'il y a une volonté politique.
01:12 Alors, souveraineté alimentaire, vous l'avez dit, Catherine,
01:14 ça signifie que la France est capable de couvrir sa consommation nationale.
01:18 Vous savez, pendant le Covid, on s'est aperçu qu'il manquait beaucoup d'objets du quotidien,
01:21 comme des ampoules électriques, parce qu'elles venaient de Chine.
01:23 On ne les fabrique plus en France depuis longtemps.
01:25 Alors, imaginons une nouvelle pandémie aujourd'hui.
01:28 Sachez que la France importe 72% des fruits, 48% des légumes.
01:33 Dans les grandes surfaces, la moyenne a fait plus de 5000 km pour arriver sur les étals,
01:38 et c'est souvent immangeable.
01:39 On importe 53% des poulets.
01:42 Quand un élevage dépasse 21 500 poules, elle est classée comme une entreprise industrielle,
01:48 avec les taxes nouvelles.
01:50 Des importations viennent de poulets, viennent du Brésil, d'Ukraine,
01:53 où là, les élevages d'un million et demi de poules sont autorisés.
01:57 Nous importons aussi 50% du porc.
02:00 Il y a 10 ans, nous étions encore de grands exportateurs.
02:02 Alors évidemment, ces importations viennent de pays qui ne respectent pas nos normes environnementales.
02:07 Exemple, les cerises.
02:08 La mouche Suzuki fait des ravages dans les vergers.
02:11 Le diméthoate, pour y remédier, est interdit en France,
02:14 si bien que beaucoup d'agriculteurs ont dû arracher tous les cerisiers.
02:17 Du coup, elles sont importées de Turquie, qui utilisent cette molécule.
02:21 - Et vous dites, Catherine, que la France est le seul pays au monde à interdire pratiquement tous les pesticides ?
02:26 - Oui, exemple, les néonicotinoïdes.
02:28 4 familles qui sont interdites en Europe, mais une est autorisée.
02:32 Mais pas du tout en France, merci Ségolène Royal.
02:34 La filière betterave est dans l'impasse.
02:37 Les surfaces cultivées se réduisent.
02:39 Notre filière industrielle du sucre s'écroule au profit de nos voisins.
02:42 Il y a 10 ans, on exportait 700 000 tonnes de pommes.
02:46 Aujourd'hui, c'est moitié moins.
02:47 Le marché a été raflé par les Polonais.
02:49 La France doit en racheter 200 000 tonnes pour les compotes,
02:52 aliments favoris des enfants et des personnes âgées.
02:55 Mais vous ne verrez jamais leur provenance sur les emballages.
02:57 Elles ont bénéficié d'une molécule interdite en France.
03:00 En 2025, on peut vous l'annoncer, l'endive aura disparu parce que la France a établi
03:05 une liste de nouvelles 75 molécules interdites.
03:08 - Dans toutes ces injonctions contradictoires,
03:11 paralysent le potentiel productif de la Ferme France, Catherine ?
03:14 - Les agriculteurs sont la profession la plus surveillée, espionnée, pénalisée.
03:20 Celle dont le pouvoir d'achat ne cesse de dégringoler.
03:22 Pour recevoir l'aide de la PAC, les contraintes se multiplient.
03:26 Être agriculteur, c'est lire Kafka sur un tracteur, dit Laurent Duplon,
03:30 qui voue aux gémonies l'Office français de la biodiversité,
03:34 l'OFB créé en 2020, qui multiplie les contraintes pour les 24 obligations,
03:39 mais sans prendre en compte les spécificités de chaque région.
03:42 Il en a toujours eu des en Normandie, en Vendée, mais pas en Haute-Loire par exemple.
03:46 C'est la même règle partout, le préfet n'est plus un recours,
03:49 les pénalités tombent, et pareil pour nettoyer les fossés.
03:52 Les menaces sont si fortes que le travail n'est pas fait,
03:55 et voilà comment on retarde la décrue des inondations.
03:57 - Dans sa conférence de presse, Emmanuel Macron, en parlant de l'agriculture,
04:01 plaidait pour la France du bon sens plutôt que la France du tracas.
04:05 On en est loin là.
04:06 - Oui, mais parlez d'or, comme toujours.
04:08 Mais voilà qu'on est passé du tracas au fracas.
04:10 C'est le ras-le-bol, le sentiment d'être abandonné.
04:13 Ajoutez à cela les aléas climatiques, les pillages de récoltes,
04:16 de matériel agricole, l'agro-bashing permanent des écolos,
04:20 le sentiment d'insécurité grandissant.
04:22 Et voilà que la Commission européenne espère conclure l'accord marque au sûr
04:26 avant les élections européennes, ce qui ouvrirait la concurrence
04:30 avec l'Argentine, le Rugué, encore plus le Brésil.
04:33 On souhaite bon courage ce soir au Premier ministre.
04:36 - Signature européen, Catherine Ney. Merci beaucoup, Catherine.
04:39 À vendredi prochain.