Anne Fulda reçoit Nicolas Seydoux pour son livre «Le cinéma, 50 ans de passion» dans #HDLivres
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00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Nicolas Cédou.
00:02 Vous êtes président de Gaumont depuis 50 ans.
00:06 Vous venez de publier un livre de mémoire
00:08 "Le cinéma, 50 ans de passion", paru chez Gallimard.
00:11 Il est très divers.
00:13 Il y a des entrées diverses.
00:15 Il dresse une évolution du cinéma
00:17 à travers les ans.
00:20 Vous parlez des grands succès, des fiascos,
00:23 des personnalités que vous avez rencontrées,
00:25 acteurs, producteurs, réalisateurs.
00:28 D'abord, vous, qui avez toujours cultivé une certaine discrétion,
00:31 pourquoi êtes-vous décidé à écrire ce livre de souvenirs,
00:35 certes pudique, qui reste pudique ?
00:37 -Ecoutez, c'est très simple.
00:40 Vous venez de le dire, 50 ans.
00:43 Celles et ceux qui travaillent chez Gaumont,
00:45 la plupart sont rentrés il y a moins de 15 ans.
00:48 Ils ne connaissent pas cette histoire.
00:50 Quand je suis arrivé chez Gaumont,
00:52 Gaumont n'avait pas d'histoire.
00:54 La plus ancienne société de cinéma du monde
00:57 n'avait pas son histoire.
00:58 Je pense indispensable, pour savoir où on va,
01:01 de savoir où on vient.
01:02 C'est vrai pour les familles, pour les citoyens,
01:05 c'est évidemment indispensable pour les sociétés.
01:08 Donc, c'est d'abord...
01:09 J'espère que j'irai un peu au-delà des salariés de Gaumont,
01:13 mais c'est d'abord pour eux que ça a été écrit.
01:15 -Ce qui est amusant, ce que vous racontez dans le livre,
01:19 initialement, vous n'étiez pas destiné à travailler dans ce secteur.
01:22 Vous auriez pu, si vous n'aviez pas loupé le concours d'entrée,
01:26 vous auriez été à bon au fonctionnaire.
01:28 C'était une chance de l'avoir loupé ?
01:30 -Je pense que j'aurais été à bon au fonctionnaire,
01:33 mais comme la haute fonction publique n'a pas voulu de moi,
01:37 je pense que c'est un retournement formidable que j'ai fait
01:40 et je fais ce qu'on peut faire de mieux,
01:42 c'est-à-dire que mon métier, c'est ma passion,
01:45 et quand on a un métier passionnant, ce n'est plus un métier.
01:49 -Alors, vous arrivez chez Gaumont en 74,
01:52 et en 75, vous faites venir
01:53 notamment l'un de vos amis que vous avez connu à Sciences Po,
01:57 Daniel Toscan du Plantier,
01:59 qui est un producteur assez génial, flamboyant.
02:04 Vous écriviez à son propos,
02:06 "Parmi ces innombrables qualités,
02:08 "figurait un sens exceptionnel de la communication
02:10 "qui lui a permis d'incarner Gaumont et d'en devenir le ministre de la parole,
02:15 "mais malgré les beaux films qu'il a produits,
02:17 "vous vous êtes séparés."
02:19 Est-ce qu'il y a encore des producteurs comme Toscan
02:22 qui vont bénéficier des Pialat ? -Je pense que...
02:26 Ça doit être le milieu en général.
02:29 Toscan était une vedette.
02:31 Belmondo et Delon sont des vedettes.
02:35 Je ne suis pas sûr que nous ayons,
02:37 un producteur comme Toscan,
02:40 des vedettes comme Belmondo et Delon.
02:42 Je pense que c'est de plus en plus difficile d'être une vedette.
02:47 Les réseaux sociaux, les attaques permanentes,
02:51 et qu'en plus, probablement, le monde s'y prête moins,
02:55 et c'est vrai des grands comédiens américains.
02:57 -Alors, les attaques permanentes,
02:59 c'est vrai que vous vous parlez de tous les comédiens
03:03 que vous avez connus, notamment, vous en citez beaucoup,
03:06 Clavier, Huppert, Jean Reno, qui est, notez-vous,
03:09 Alain Poiré, je crois qu'il disait de lui
03:11 que c'est un des acteurs qui ne soit pas prétentieux.
03:14 Vous parlez aussi de Depardieu, au centre de l'actualité,
03:17 dont vous dites qu'il est, à vos yeux,
03:20 le plus grand comédien de sa génération,
03:22 mais que pensez-vous de sa quasi-excommunication ?
03:25 Aujourd'hui, on a décidé,
03:27 sur des faits qui ne sont pas avérés,
03:29 que c'était le diable.
03:31 -Deux sujets.
03:33 S'il y a viol, c'est impardonnable,
03:36 c'est incavilifiable,
03:37 et je pense que, s'appelant Gérard Depardieu,
03:40 il sera même plus condamné qu'un autre.
03:43 Il appartient à la justice, c'est la justice seule de trancher,
03:47 et la présomption d'innocence n'existe pas dans son cas,
03:51 comme elle n'existe pas dans la plupart des cas,
03:54 et je trouve ça scandaleux.
03:56 Deuxièmement, j'ai vu ce reportage en Corée du Nord.
03:59 Corée du Nord.
04:00 Alors, dans quelles conditions ça a été...
04:02 Je ne sais pas.
04:04 Les propos sont inqualifiables,
04:05 mais c'est pas parce qu'ils sont inqualifiables
04:08 que c'est un criminel.
04:10 Il ne faut pas tout mélanger.
04:11 -Les choses sont claires.
04:13 Néanmoins, alors qu'aujourd'hui, c'est votre fille,
04:16 la femme de Thomas, qui dirige Gaumont,
04:18 est-ce que vous ne pensez pas que cette moralisation excessive
04:21 et cette incursion du hockyisme dans le cinéma
04:24 lui porte plus tort qu'autre chose ?
04:26 Certains veulent refaire réécrire des films
04:29 parce qu'il y a des choses
04:30 qui, à la lumière d'aujourd'hui, paraissent choquantes.
04:34 -Ecoutez, la culture, c'est le respect de la différence.
04:38 Si nous ne pouvons plus nous exprimer sur certains sujets,
04:42 c'est catastrophique pour la littérature,
04:44 pour le cinéma, pour le théâtre.
04:46 Là où vous avez malheureusement raison,
04:49 c'est que certains films,
04:50 "Les Valseuses", "Emmanuel",
04:52 mais même "Rabbi Jacob" ne pourraient plus être tournés.
04:55 Je trouve ça catastrophique.
04:57 -Vous parlez, vous évoquez beaucoup de cinéastes
05:01 que vous avez rencontrés.
05:03 Il y a Pialat, Lautner, Molinaro, Truffaut,
05:05 et étonnamment, l'un de ceux avec qui vous êtes le mieux entendu,
05:09 c'est Godard.
05:10 Comment expliquez-vous cette entente singulière ?
05:14 -Ecoutez, pourquoi on devient ami,
05:18 même pourquoi on devient amoureux,
05:20 il ne faut pas chercher à l'expliquer.
05:22 C'est ainsi, le fait est que ce personnage improbable,
05:26 Jean-Luc Godard...
05:27 Malheureusement, Gaumont n'a pas travaillé avec lui
05:31 au début de la nouvelle vague.
05:34 Je regrette qu'il n'y ait pas dans le catalogue Gaumont
05:37 les premiers films de Godard,
05:39 mais il se trouve que sur la fin,
05:41 nous avons été son partenaire régulier.
05:44 Nous avons commis ensemble notamment "Histoire de cinéma",
05:48 d'ailleurs associé à tout ce qui existait
05:52 qui pouvait soutenir ce type de film.
05:54 Je peux vous dire qu'Antoine Gallimard,
05:56 qui a quelques idées des auteurs,
05:58 a été surpris par l'auteur Jean-Luc Godard.
06:01 -En tout cas, c'est à lire.
06:03 Je vous conseille de lire "Le cinéma, 50 ans de passion".
06:06 Merci beaucoup, Nicolas Cédoux.
06:08 C'est donc un livre qui est paru chez Gallimard.
06:11 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
06:14 [SILENCE]