Anne Fulda reçoit David Foenkinos pour son livre «La vie heureuse» dans #HDLivres
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00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, David Fuenke-Donoson.
00:03 On n'a pas besoin de vous présenter.
00:04 Tout le monde connaît vos livres,
00:06 "Charlotte", "La délicatesse", "Numéro 2", il y a peu de temps.
00:10 Et là, vous venez de publier "La vie heureuse".
00:13 C'est paru chez Gallimard.
00:14 C'est un livre délicieux qui tient un peu du compte philosophique,
00:18 mais sans phrases sentencieuses.
00:20 Il dispense une espèce de leçon de vie merveilleuse,
00:23 un rayon de soleil qui fait du bien.
00:25 Alors, c'est en fait une variation autour du changement de vie
00:29 qu'incarne le héros principal,
00:31 qui est un peu un anti-héros.
00:33 Eric Kersson, parlez-nous de ce Eric Kersson.
00:37 -Oui, c'est un personnage qu'on découvre,
00:39 qui est à la quarantaine,
00:41 qui a gravi tous les échelons de Décathlon.
00:43 On comprend qu'il est traversé par une forme de mélancolie.
00:46 On apprend un peu plus tard, dans le livre,
00:49 qu'il a vécu un drame dans sa jeunesse,
00:51 qu'il est ravagé par la culpabilité.
00:53 Et il va être confronté, lors d'un voyage professionnel,
00:56 à quelque chose qui va le bouleverser,
00:58 qui va lui permettre, d'une certaine manière,
01:00 de résoudre, ou en tout cas d'atténuer sa fragilité.
01:04 -Oui. Alors, cet événement exceptionnel, en fait,
01:08 c'est qu'il décide un jour de pousser la porte
01:12 de Happy Life,
01:16 qui est un centre où l'on peut assister
01:18 à ses propres funérailles, ce qui n'est pas courant.
01:21 C'est un voyage qui se passe en Corée, à Séoul.
01:24 C'est quelque chose qui existe.
01:26 Est-ce que vous vous êtes documenté là-dessus ?
01:29 -Ca m'a passionné. Ca existe.
01:31 C'est un véritable phénomène en Corée du Sud.
01:33 C'est une société traversée par beaucoup de pression,
01:36 de difficultés, de mal-être.
01:38 -Il y a beaucoup de suicides. -Il y a le plus grand nombre.
01:41 C'est une sorte de thérapie-choc.
01:43 On se retrouve face à son cercueil,
01:45 avec sa photo, son nom sur le cercueil.
01:48 On doit rédiger son épitaphe.
01:50 Qu'est-ce qu'on dit de nous, avant de vivre physiquement,
01:53 ce dernier instant ?
01:55 On se glisse dans le cercueil pendant une heure,
01:57 dans l'obscurité et le silence.
01:59 J'ai lu tous les commentaires sur les forums coréens
02:02 qui racontent à quel point c'est une sorte d'électrochoc.
02:05 C'est quelque chose qu'on peut comprendre.
02:08 L'idée que, confronté physiquement à la finitude ou à la mort,
02:11 on est propulsé, après, dans un désir nouveau
02:14 de vivre ou de relativiser les choses.
02:16 -Vous-même, vous l'avez raconté,
02:18 vous avez frôlé la mort lorsque vous étiez jeune, à 16 ans,
02:22 et ça a complètement bouleversé aussi votre vie.
02:26 Vous avez un regard nouveau
02:28 et vous avez eu une sorte d'appétence
02:30 pour la création et la beauté.
02:32 -Oui, c'est ça.
02:33 C'est pour ça que je n'ai pas eu besoin de pratiquer.
02:36 Je viens de faire des photos pour Paris Match dans un cercueil.
02:39 J'ai apprécié, mais...
02:41 Oui, j'ai vécu une expérience de mort à l'âge de 16 ans,
02:44 et donc j'ai été propulsé dans une seconde vie,
02:47 davantage liée à la sensibilité.
02:51 Je me suis mis à lire, à écrire, à aimer la musique.
02:54 Je sais à quel point la mort, la proximité avec la mort,
02:57 peut vous donner une nouvelle énergie.
02:59 C'est quelque chose qu'on peut tous ressentir.
03:02 Quand on va à un enterrement, on se dit qu'on va relativiser,
03:05 qu'on va changer notre rapport à la vie.
03:07 On est assez vite repris par des broutilles.
03:10 -Pour vous, qu'est-ce que c'est, "La vie heureuse",
03:13 qui est le titre du livre ?
03:14 Est-ce qu'il faut avoir frôlé la mort
03:16 pour savoir ce que c'est, pour l'appréhender ?
03:19 -Je vais vous donner la recette. -Dites-nous.
03:21 -J'aimerais bien.
03:23 Chacun a son propre rapport au bonheur et à l'épanouissement.
03:26 Dans ce livre, tous les personnages sont traversés
03:29 par la réinvention d'eux-mêmes.
03:31 Il y a aussi une femme,
03:32 puisque c'est l'histoire d'un couple,
03:34 ce livre aussi.
03:36 Voilà, ces deux personnages.
03:38 Et les autres aussi vont, à un moment donné, changer de vie.
03:41 Et en tout cas, aller chercher ce qui est essentiel.
03:46 Et ça, c'est important. Ne plus se laisser encombrer
03:49 par des choses superficielles.
03:51 -Ce qui est intéressant, c'est qu'il y a cette femme,
03:54 Amélie Mortier, grâce à qui Éric Querson
03:58 va quitter Décathlon et se retrouver dans les milieux du pouvoir.
04:02 Elle, c'est en apparence une battante, une femme de pouvoir.
04:05 On a l'impression que c'est frappant,
04:07 le réalisme avec lequel vous décrivez ce monde-là.
04:11 Là aussi, on se demande...
04:14 -Vous connaissez mieux que moi le monde politique.
04:16 Mais comme il y a le rituel coréen...
04:19 J'avais besoin d'encrire mon roman dans la réalité.
04:22 En tout cas, c'est une femme qui, au moment où elle prend ses fonctions
04:25 au secrétariat du commerce extérieur,
04:28 a besoin de personnes de la société civile.
04:30 Donc, elle va rappeler un ancien camarade de lycée
04:33 dont elle a vu sur Facebook qu'il était devenu
04:36 un des grands patrons de Décathlon.
04:38 J'adorais l'idée qu'ils se rencontrent à 20 ans,
04:40 se retrouvent à 40 ans avec de l'incompréhension.
04:43 Finalement, ils se retrouveront plus tard.
04:46 Ma référence, c'était le film "Quand Henri rencontre Sally".
04:49 L'idée qu'un groupe peut se croiser et se retrouver sur 30 ans.
04:53 -Oui, en tout cas, vous décrivez...
04:55 C'est vrai que vous avez un oeil perçant
04:58 qui décrit extrêmement bien les milieux
05:02 dans lesquels vous vous plongez.
05:04 Il y a aussi l'importance du temps, du moment.
05:06 Il y a toujours un bon moment.
05:09 Ça, on ne peut pas trop développer.
05:11 -Vous conseillez vraiment de lire ce livre.
05:13 C'est un très bon cru, Fuenkinau.
05:15 "On ne se trompe pas, la vie heureuse",
05:18 c'est paru chez Gallimard. Merci beaucoup.
05:20 [Musique]
05:25 [SILENCE]