Chaque vendredi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Catherine Nay livre son regard sur l'actualité.
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00:00 Mais d'abord, comme tous les vendredis, vous retrouvez Catherine Ney. Bonjour Catherine.
00:03 Bonjour Dimitri, bonjour à tous.
00:05 Alors Catherine, François Bayrou a donc refusé d'entrer au gouvernement,
00:09 prétextant des accords profonds avec une majorité à ses yeux trop coupées de la base, trop gestionnaire.
00:14 Et ces critiques ont révulsé ses propres amis du Modem.
00:17 Oui, parce que comme d'habitude, il n'avait prévenu personne.
00:20 Les députés Modem dînaient chez Marc Fesneau,
00:22 et l'ont accueilli à la soupe à la grimace.
00:24 Non mais qu'est-ce qui te prend ? Tu veux qu'on démissionne ? Qu'est-ce que tu veux ?
00:27 J'ai été humiliée à lâcher Bayrou et voilà pourquoi il a jeté son fiel.
00:32 C'est plus fort que lui.
00:33 Relaxé par la justice après sept ans d'enfer, il espérait revenir en majesté,
00:37 avec le rang de numéro 2, le titre de ministre d'État.
00:41 Il voulait le ministre de l'Éducation nationale, le secteur le plus en crise.
00:45 Et Gabriel Attal lui a dit trois fois non.
00:47 Vous remarquerez qu'Emmanuel Macron lui a laissé le soin de traiter son ami Bayrou,
00:51 c'est que ces derniers temps, il se montrait plutôt lassé de ses conseils.
00:54 Mais on comprend que le Premier ministre n'ait pas eu envie de se retrouver en sandwich.
00:58 André-Emmanuel Macron, omniprésent, veillissant.
01:01 Et ce numéro 2 qui se prendrait vite pour le numéro 1,
01:04 un père la morale et donneur le sang en chef. Merci, pas question.
01:07 On s'étonne Catherine que François Bayrou ait demandé l'éducation.
01:11 Et oui parce qu'il se trouve que dans sa longue vie politique,
01:13 François Bayrou a été ministre deux fois, et toujours à l'Éducation nationale.
01:18 En 93, gouvernement baladur, il avait voulu abroger la loi Fallou qui datait de 1850.
01:24 Elle restreignait les aides à l'enseignement privé.
01:28 Le projet avait été voté à l'Assemblée nationale,
01:30 mais provoquant une grosse fronte de l'Éducation nationale
01:33 qui n'avait pas obtenu en 81 la création du grand service public,
01:38 l'AUC unifié, qui aurait mis fin à l'enseignement privé.
01:41 Grosse manif partout en France, Bayrou était conspué,
01:45 c'est Mitterrand qui avait signé la fin de la partie, un mauvais souvenir.
01:49 Puis voilà que Jacques Chirac entra à l'Élysée.
01:51 Alain Juppé, Premier ministre, propose à François Bayrou d'entrer au gouvernement.
01:56 "Je veux les affaires étrangères."
01:57 "Ah non, tu auras l'Éducation nationale ou rien."
01:59 Alors mal remis des manifs, François Bayrou, la mort dans l'âme,
02:03 revient à rue de Grenelle, bien décidé à ne rien faire.
02:06 Et il a tenu promesse pendant deux ans, laissant la gouverne du ministère au syndicat.
02:11 Alors retour pour la troisième fois à l'Éducation nationale.
02:14 Aurait-il été le grand réformateur comme voulait l'être à Tal ?
02:18 Rien n'est moins sûr, mais il se trouve qu'on se pose aussi la question,
02:21 avec l'arrivée de Nicole Belloubet.
02:23 François Bayrou ne sera pas ministre, mais en revanche il se tient prêt pour 2027.
02:27 Je n'ai jamais renoncé à aucun des devoirs qui sont les miens, a-t-il prévenu.
02:31 En vérité, François Bayrou s'est toujours cru prédestiné.
02:35 Un jour, il rentrerait à l'Élysée, Marielle de Sarnez, son âme-sœur,
02:39 hélas décédée, l'entretenait dans ce fantasme.
02:41 Il aimait se comparer à Gédéon dans la Bible, vous savez ce fils d'Israël,
02:45 issu d'une famille très pauvre, envoyée par le Seigneur pour combattre les ennemis des Hébreux,
02:50 les mandanites, avec 300 hommes contre 120 000.
02:54 « Va avec ta force, je serai avec toi », lui disait le Seigneur.
02:57 Eh bien Bayrou, même pas peur.
02:58 Première présidentielle, 2002, 6,84% de voix, un score bien chiche.
03:04 2007, là c'est presque 19%.
03:07 Il est le troisième homme derrière Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal,
03:10 laquelle a essayé d'obtenir son soutien.
03:12 Et BFM avait même organisé un débat entre les détours du jamais vu.
03:16 Bayrou ne voulait pas quitter la scène, mais il n'a pas franchi le Rubicon pendant cinq ans.
03:21 Nicolas Sarkozy, pour Nicolas Sarkozy, il fut l'opposant le plus systématique et malveillant.
03:27 Et en 2012, Bayrou arrive en cinquième position, moins de 10%.
03:31 Cette fois, il apporte son soutien à François Hollande.
03:34 Il est le premier centriste à se rallier à la gauche,
03:37 laquelle, bien à gratte, ne lui propose rien.
03:40 Humiliation.
03:41 Et donc 2017, François Bayrou, là cette fois, ne se porte pas candidat.
03:45 Catherine, il choisit d'apporter son capital de voix à Emmanuel Macron.
03:48 Oui, de gré ou de force, parce que voilà que ce blanc-beigle de 39 ans
03:51 réalisait son rêve politique du dépassement du clivage droite-gauche.
03:55 Et voilà qu'il est élu grâce à lui.
03:57 Bayrou devient faiseur de roi, mais c'est pour du win-win aussi.
04:00 Bayrou est ministre d'État, ministre de la Justice, avec la promesse de moraliser la vie politique.
04:06 Le modem se rinquinque, 75 investitures.
04:09 Mais la justice met fin à ce beau rêve.
04:12 Il démissionne du gouvernement, un lot de consolation.
04:15 Macron le consulte beaucoup et lui offre le poste de haut-commissaire au plan.
04:21 Plan, plan, ratat-plan.
04:22 Là, quel est son bilan, mystère ?
04:24 Comme la seconde fois au ministère de l'Éducation, finalement, ce passage au plan.
04:29 Merci beaucoup Catherine Ney.
04:30 Portrait de François Bayrou ce matin sur Europe.