Ancien cycliste, Pierre-Yves Chatelon est aujourd'hui le sélectionneur de l'équipe de France espoirs. Au micro de Cyclism'Actu, il est revenu sur le début de saison tonitruant de son coureur de l'équipe de France U23, Paul Magnier, qui en est déjà, depuis le début d'année et sous le maillot de la Soudal - Quick Step, à 2 victoires chez les pros pour sa première saison professionnelle. À seulement 19 ans, Paul Magnier fait sensation !
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00:00 Bonjour Pierre-Yves Jatellon, vous êtes le sélectionneur de l'équipe de France Espoir
00:09 sur route et on voulait vous appeler sur Cyclism Actu parce qu'il y a un garçon qui crève l'écran
00:15 depuis le début de la saison, c'est Paul Magnier qui a signé chez la Suda Quick-Step à l'intersaison
00:22 et qui a déjà remporté deux victoires depuis le début de la saison, ce qui est assez exceptionnel
00:27 pour un Néo Pro. Je voulais savoir si vous étiez surpris par les performances de ce garçon.
00:35 Oui, qu'il évolue tout de suite à ce niveau là, effectivement on est un petit peu surpris,
00:42 même si on l'avait vu arriver, surtout dans le registre de pure sprinter dans lequel il évolue
00:50 actuellement. Moi j'avoue personnellement je ne l'avais pas trop catalogué comme tel jusqu'ici.
00:57 Ah oui d'accord, vous ne le pensiez pas capable d'avoir cette pointe de vitesse là ?
01:04 Oui, on le savait capable d'aller très vite sur des arrivées difficiles, en type puncher,
01:15 et puis dans des petits groupes. On les a démontré en junior et puis en espoir l'an dernier,
01:21 notamment sur la médaille de bronze au championnat d'Europe au col du VAM aux Pays-Bas,
01:28 qui était une arrivée très dure mais très technique. Mais de là à briller sur des massifs,
01:34 emmener de loin, c'est vrai que je ne lui prêtais pas encore ces qualités là. Mais on le découvre
01:41 aussi de jour en jour parce que c'est un garçon qui vient du VTT à la base. Oui, surtout un garçon
01:47 très jeune, il n'a que 19 ans, qui a encore une marge de progression assez importante, et
01:51 manifestement il a déjà franchi un cap en un hiver avec la Soudan Quick-Step. Ah oui, complètement.
01:58 L'an dernier, sa première saison espoir où il s'est vraiment mis à la route a été quand même
02:06 pas mal escamoté par une mononucléose qui l'a mis sur le flanc une bonne partie pendant trois mois
02:14 sur le premier semestre de 2023. Il a surmonté ce petit coup d'arrêt de l'an dernier de façon
02:26 assez exceptionnelle pour qu'il évolue à ce niveau là maintenant. Vous me dites que vous êtes
02:33 surpris par ses performances en sprint. Quel type de coureur c'est selon vous de ce que vous avez
02:39 vu dans les années précédentes ? Vous le cataloguez comme quel type de coureur ? Alors moi je le
02:46 catalogue vraiment comme un puncher. Je suis capable de passer quand même les bosses d'une certaine
02:54 distance et d'une certaine difficulté, même si ce sera jamais un grand coureur. On ne connaît pas
03:01 encore toutes ses limites. Sa formation de VTT en cross country fait que ses qualités de punch
03:11 qui sont développées à haute intensité dans les jeunes catégories en VTT. Donc plutôt dans un
03:17 registre puncher où je pense qu'il pourra évoluer avec brio sur les classiques vallonnées et peut
03:27 être voir même les petites courses par étapes de moins d'une semaine. Et au niveau de sa personnalité,
03:34 qu'est ce que vous pouvez nous dire sur lui ? Il a l'air d'être un garçon assez cool,
03:40 assez souriant. Ah oui complètement, c'est une crème un garçon avec qui on aime bien travailler,
03:48 qui fait preuve parfois de beaucoup de naïveté parce qu'il découvre plein de choses. Ce genre
03:57 de garçon en sélection, c'est vraiment intéressant pour le collectif. Par exemple, l'an dernier,
04:01 j'avais amené en sélection à l'Orlènes Nation, une coupe des Nations Espoir dans l'Est. Et puis
04:08 c'est lorsqu'il a déclaré sa mononucléose, donc il a été hors délai de la deuxième étape. Il était
04:16 malade et donc après je lui ai fait suivre les étapes avec moi dans la voiture et il découvrait
04:21 tout. Il découvrait ce qu'était une bordure, ce qu'était un barrage fait par les commissaires.
04:25 Donc voilà, c'était très attachant. Finalement, on a pu un petit peu parfaire sa formation de
04:33 coureur de l'autre côté de la barrière en prenant dans la voiture. Donc voilà, c'est un garçon très
04:40 bien élevé, super gentil, reconnaissant et puis heureux de vivre. Ça c'est important. J'imagine
04:49 que ce sera l'un des hommes de base de votre sélection en 2024. Oui, alors bon, il y a toujours
04:55 une petite part de négociation à mener avec les équipes World Tour parce que dès lors que les
05:01 jeunes signent en World Tour, leur disponibilité pour la sélection Espoir n'est pas toujours
05:08 évidente. Mais là, oui, on a posé, je l'ai rencontré, Paul et son équipe à Calpe en stage
05:15 là début janvier. On a posé les bases. On retrouvera, même si le programme de l'équipe de
05:21 France n'est pas très copieux en termes de quantité, donc à quelques occasions, on pourra
05:27 retrouver Paul en sélection et notamment sur le mois de septembre avec un enchaînement en
05:32 championnat d'Europe, voire en championnat du monde en Suisse à Zurich qui pourrait bien convenir à
05:38 ses qualités. Alors on voit que Paul Manier a une grosse pointe de vitesse, un gros punch. Il y a
05:43 pas mal de jeunes coureurs français de la catégorie Espoir qu'on se profile, des garçons
05:48 comme Pierre Gautra, comme Thibaut Gruel, Noah Isidor. Il y a pas mal de sprinter-punchers, c'est
05:54 un registre qui se développe en France. Oui, exactement. Alors je ne sais pas si c'est un registre qui se développe, mais c'est un état de fait en tout cas.
06:03 Moi, je pense que c'est cyclique. On a eu des générations de très bons sprinters à l'époque de
06:11 Boigny, Cocard, Demare qui se sont révélés aussi relativement jeunes. Après, on a eu une période aussi de
06:19 grimpeurs avec Romain Bardet, Thibaut Pinot, un peu plus tard David Goddue. Voilà, je pense que
06:27 moi en tout cas, je n'explique pas. C'est un petit peu le hasard des générations qui fait que dans ce
06:34 registre-là, effectivement, on a des très bons coureurs. Et puis peut-être aussi que le calendrier
06:40 actuel, le calendrier français et international au niveau des épreuves de classe 2, et puis le
06:47 cursus de formation des garçons fait qu'ils développent aussi ces qualités-là. On va parvenir sur la saison 2023 de l'équipe de
06:56 Français Espoir qui a été assez exceptionnelle avec le titre de champion du monde d'Axel
06:59 Laurence notamment, la médaille de bronze de Paul Magnot aux Europes, la victoire d'Antoine
07:03 Nuby sur la course de la paix. Qu'est-ce qu'on attend de 2024 ? Qu'est-ce que Pierre-Yves
07:08 Châtelon attend de 2024 ? Est-ce qu'on peut faire mieux que l'an dernier ? Mieux, très honnêtement,
07:13 ce sera difficile. Comme vous l'avez dit, c'était une année relativement exceptionnelle. Ce qu'on attend, c'est de continuer à accompagner ces jeunes vers le haut niveau pour que leur transition vers la catégorie élite et le world tour pour certains se passe dans les meilleures conditions.
07:32 Après, les résultats, c'est secondaire, même si effectivement, ça gratifie tout le monde. C'est surtout leur inculquer des valeurs qui fait qu'après, notamment au niveau des sélections France-élite, on peut retrouver ces valeurs de collectif d'amour du maillot tel que Julien Réphilippe n'hésite pas à les rappeler lorsqu'il vient en sélection d'élite.
07:58 Je reviens un peu comme à la maison parce que j'ai toujours fait des sélections dans les équipes de jeunes. Ce qui m'importe, c'est de développer cet état d'esprit pour après retrouver des garçons dans les sélections élite qui ont cette patte équipe de France.
08:17 Par rapport à votre fonction, à votre travail, est-ce que vous constatez un changement par rapport au fait que les coureurs professionnels passent de plus en plus jeune, qui sautent même des fois la catégorie espoir ? Est-ce qu'il y a du changement par rapport à ça, avec ce développement des jeunes coureurs qui interviennent de plus en plus tôt ?
08:36 - Oui, clairement. Il y a déjà du changement dans la disponibilité des coureurs pour la sélection U23. On est plus dans la négociation avec les équipes pour que les coureurs qui ont envie de venir puissent venir en sélection parce qu'ils ont des programmes clétoriques, que ce soit en World Tour, dans les équipes continentales ou de développement.
09:02 Puisque souvent, dans les équipes de développement, ils servent en début de saison notamment de faire le nombre, la quantité au départ dans les équipes World Tour, les jeunes des équipes de développement.
09:18 Donc voilà, ça change un petit peu ça dans mes fonctions de sélectionneur, effectivement. C'est difficile de faire un programme très important, de mettre en place beaucoup de stages, voire de disputer beaucoup d'épreuves parce que très jeunes maintenant, dès la sortie des juniors, les jeunes sont apparés par le programme de leur équipe.
09:44 Alors je ne sais pas si c'est un bien ou un mal, mais en tout cas, c'est une évolution des choses.
09:49 - Le calendrier d'espoir, il y a une épreuve qui attire particulièrement les gens, c'est le Tour de l'Avenir. L'équipe de France n'a plus gagné cette course depuis 2016, n'a même plus placé de coureurs sur le podium depuis 2016.
10:04 Est-ce que c'est quelque chose qui vous manque ? C'est une ambition particulière pour cette année de voir l'un de vos coureurs monter sur le podium du Tour de l'Avenir ?
10:13 - Oui, c'est toujours un petit regret en tout cas, depuis effectivement la victoire de David Codu en 2016, de ne pas pouvoir y briller plus.
10:25 Mais ceci dit, bon an, mal an, il y a toujours des résultats plutôt sympas.
10:31 L'an dernier, le bon point de satisfaction, c'était la deuxième place sur le complément de par équipe, une chose qu'on avait travaillée de façon très spécifique, très technique,
10:40 qu'on a perdu seulement pour quelques secondes face aux Danois. Donc il y a toujours des motifs de satisfaction, même si on aimerait effectivement pouvoir remporter le Tour de l'Avenir.
10:51 Il y a 3-4 ans, avec Clément Champoussin, c'était pas loin, il s'est passé 4e l'année où Pocacar gagne le Tour de l'Avenir.
11:01 Donc voilà, encore une fois, le résultat final n'est pas une finalité, mais le but, y compris dans le Tour de l'Avenir, c'est de faire progresser les coureurs vers le haut niveau,
11:15 qu'ils apprennent des choses, défendre un maillot. Il y a quelques années aussi, Simon Guigui-Hermi par exemple avait porté le maillot jaune, on l'avait défendu.
11:25 Donc voilà, ça reste des apprentissages qui sont relativement intéressants et formateurs pour les coureurs, même si au final, le résultat n'y est pas.
11:34 Bon, l'an dernier, c'était la victoire d'Antoine Hubi sur la course de la Paix, et il avait fallu défendre ce maillot beige et rongle sur la dernière étape,
11:45 avec des coureurs issus du World Tour comme Pierre Gauthra, d'autres coureurs issus des clubs amateurs de N1.
11:51 Donc voilà, c'est ce qui est intéressant et formateur pour les coureurs de réaliser ce genre de prestations.
11:59 En tout cas, ça étoffe leur bagage pour arriver chez les pros.
12:03 En tout cas, vous devriez avoir du beau matériel au mois d'août pour le Tour de l'Avenir, puisque avec Mathis Rondel, Alexis Fort-Prost, Léo Bizzio, il y a du très bon jeune grimpeur en France.
12:15 - Oui, exactement. Donc c'est tous des garçons que j'ai rencontrés justement en stage en Espagne en janvier, là. Les places sont chères.
12:23 On a essayé de poser déjà quelques jalons. Mais oui, ça nous fait saliver un Tour de l'Avenir plutôt intéressant.
12:34 On attend avec impatience le parcours du Tour de l'Avenir 2024 pour voir un petit peu comment il sera intéressant de jouer avec tous ces jeunes que vous citez.
12:46 - Et pour finir, il y a Léo Bizzio qui passe Espoir cette année.
12:50 On sait que la différence de niveau entre juniors et Espoir est assez importante et c'est difficile de briller la première année.
12:56 Mais ces résultats en cyclocross obtenus cet hiver sont vraiment encourageants pour la route.
13:01 - Oui, oui. Mais bon, moi, j'essaie de rester un petit peu toujours sur la réserve.
13:08 Aujourd'hui, par exemple, moi, je compare pour l'instant les performances en junior de Léo Bizzio à des garçons comme Hugo Toumire qui avait gagné la course de la Pêche junior, par exemple.
13:22 Et aujourd'hui, rien ne nous dit que le potentiel de Léo soit supérieur à celui d'Hugo Toumire qui tarde à confirmer son potentiel chez les pots.
13:30 Donc voilà, en tout cas, on essaie de ne pas mettre trop de pression à des garçons comme Léo, même si effectivement, ça suscite des espoirs et des espérances.
13:41 Mais voilà, une carrière est toujours faite de haut et de bas et il ne faut pas aller trop vite en besogne pour ne pas griller déjà mentalement ces jeunes coureurs.
13:54 - Alors quel sera le premier rendez-vous de l'équipe de France Espoir en 2024 pour finir ?
13:59 - Eh bien, le rendez-vous est relativement tardif. C'est la Coupe des Nations qui se déroule dans l'Est, organisée par l'organisation du Tour de Pologne World Tour, l'Orlen Nation, le Grand Prix Orlen Nation, pardon,
14:16 qui a lieu sur les pays limitrophes en Hongrie, Slovaquie, Pologne. Donc ce sera le premier rendez-vous qui interviendra à la mi-mai, ouais, course par étape de cinq jours.
14:28 - Eh bien, on suivra ça avec beaucoup d'intérêt Pierre-Yves, en tout cas je vous remercie pour cet entretien accordé à Cyclisme Actu, c'était très intéressant.
14:36 - Ok, merci à vous ! - Merci !
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