Xerfi Canal a reçu Stanislas Pottier, Senior Advisor auprès de la direction général d'Amundi, Membre du bureau exécutif de l'institut de la finance durable, pour parler d'une compliance européenne indépendante.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:08 Bonjour Stanislas Potier.
00:10 Bonjour Jean-Philippe Zy.
00:11 Stanislas Potier, vous êtes membre du Bureau exécutif de l'Institut de la Finance Durable.
00:15 Vous êtes Senior Advisor à la Direction Générale d'Amundi.
00:19 Stanislas Potier, Capitalisme contre Capitalisme, c'était un ouvrage de Michel Albert,
00:25 qui nous opposait le capitalisme anglo-saxon à un capitalisme on va dire rénant à l'européenne.
00:32 Aujourd'hui c'est ça le sujet dans lequel on est avec tout ce qui touche à la compliance.
00:39 Oui, je pense qu'on a identifié les limites d'un capitalisme financier
00:44 qui a quand même été, qu'il est toujours très dominant,
00:47 d'autant plus dominant que les acteurs financiers américains sont absolument dominants.
00:52 Il a à la fois structuré les marchés financiers, les contrôles,
00:56 et il a été à l'origine des dérives principales de ces dernières années.
01:05 Il copierit en matière d'éthique, en matière environnementale, etc.
01:09 Alors, on voit bien aujourd'hui que la société est en attente d'un modèle différent, alternatif,
01:13 je pense d'ailleurs au-delà de l'Europe, même dans une certaine mesure aux Etats-Unis,
01:17 et l'Europe découvre qu'elle a un modèle différent.
01:21 Auteur dans les buts monumentaux de la compliance,
01:24 ouvrage coordonné par Marianne Frison-Roch,
01:27 j'ai envie de vous poser la question très clairement,
01:30 le juge s'invite dans la gestion, comment ça va se passer ?
01:34 On ne sait pas très bien.
01:36 Jusqu'à présent, l'entreprise, c'est vrai, avait voulu tenir le juge à l'écart,
01:41 enfin le juge ne fait vraiment pas, il fait un peu peur.
01:44 D'abord, on a beaucoup vu le juge américain,
01:47 et lui il fait très peur, il a coûté très cher.
01:50 Mais c'est une compliance, encore une fois, très procédurale, à l'américaine.
01:56 Mais on a vu, à ce moment-là, au moment des grands procès,
02:00 notamment contre les banques françaises,
02:03 qu'il y avait une mécanique, une forme de collusion entre le juge,
02:07 l'entreprise, la finance et les autorités américaines,
02:10 pour quand même aller tondre le concurrent étranger.
02:13 C'est quand même de ça dont il s'agit.
02:15 Je pense qu'il y a eu une prise de conscience,
02:17 qu'on avait nous aussi un modèle qu'on pouvait défendre,
02:20 en utilisant un petit peu les mêmes moyens.
02:23 Et ce n'est pas, à mon avis, un hasard,
02:27 si le droit de la compliance a émergé un peu,
02:31 comme ça, ces dernières années, en France, en Angleterre aussi d'ailleurs,
02:34 et en Europe, pour voir les choses, mais de façon un peu différente.
02:38 Mais pour revenir au juge communautaire,
02:42 jusqu'à présent, vous avez des bataillons juristes dans les entreprises
02:45 qui essayent de faire en sorte que tout se passe bien,
02:47 et que surtout, on ne voit jamais le juge.
02:49 Et là, on a un devoir de vigilance en France,
02:52 puis maintenant la directive sur le devoir de vigilance européenne qui va arriver,
02:56 qui nous dit, l'entreprise doit se préoccuper
02:59 de l'ensemble de sa chaîne d'approvisionnement, de sa chaîne de valeur,
03:03 regarder les risques potentiels,
03:06 et à la fois les prévenir, documenter,
03:09 essayer de corriger quand il y a des erreurs qui se sont faites,
03:14 alors on parle surtout, pour le moment,
03:18 de sujets liés au climat et à l'exploitation sociale,
03:22 mais c'est l'ensemble des sujets de durabilité
03:25 qui tombent dans le champ d'application de ces nouvelles réglementations,
03:28 et c'est le juge civil qui est responsable du contrôle
03:34 de ce que les entreprises font.
03:36 Donc, il y a un enjeu de découverte de l'entreprise par le juge,
03:39 parce qu'il ne connaît pas très bien le fonctionnement d'entreprise,
03:42 ni les moyens qu'elle a à sa disposition pour agir ou pas,
03:45 et les limites aussi qu'elle a dans cette action.
03:48 Et pour l'entreprise, il y a un enjeu d'envisager le juge de façon différente,
03:52 d'abord lui expliquer qui elle est, ce qu'elle fait,
03:54 les moyens qu'elle a et comment elle les met en œuvre,
03:57 et peut-être même de travailler avec la justice
04:02 pour essayer de voir comment on peut utiliser les moyens de l'entreprise
04:06 pour œuvrer en faveur de ces buts collectifs que la société se choisit.
04:11 Par ses instances politiques, démocratiques, etc.
04:15 Donc, c'est quand même un changement copernicien, je pense,
04:19 mais en même temps, c'est un changement qui est très enthousiasmant,
04:22 parce que ça veut dire que tout d'un coup,
04:25 on a un instrument qui est finalement quand même assez précis,
04:28 le droit, le droit de la compléhense,
04:30 pour resituer l'entreprise dans la cité.
04:33 Parce que parfois, elle est un peu perdue, l'entreprise.
04:35 On lui dit qu'elle a des arbitrages à faire
04:37 entre des attentes contradictoires de ses différentes parties prenantes,
04:39 comment elle fait ?
04:41 Ce n'est pas une institution démocratique,
04:42 elle n'est pas outillée forcément pour faire ses arbitrages.
04:44 Mais néanmoins, elle doit les faire.
04:46 Là, tout d'un coup, avec une structuration du droit précise
04:52 et le juge en appui,
04:55 elle a quand même un cadre qui lui permet, je pense,
05:01 d'être plus sereine dans les arbitrages qu'elle fait,
05:03 dans l'utilisation de ses ressources sur des enjeux
05:06 qui sont quand même des enjeux politiques,
05:08 qui vont au-delà de son business model.
05:10 Un cadre institutionnel qui bouge
05:12 et qui va faire bouger le cadre organisationnel,
05:13 pour faire simple.
05:15 Absolument, sans doute.
05:16 Mais on ne sait pas très bien comment.
05:18 Merci Stanislas Petier.
05:19 Merci Jean-Philippe Beny.
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