Découvrez l'histoire exceptionnelle de Danilo Pagliaro au sein de la Légion étrangère française, où il a servi pendant 24 ans. Il nous révèle les motivations, les défis, et les succès de sa carrière, offrant un aperçu rare de la vie au sein de cette institution emblématique. À travers son histoire, découvrez les aspects méconnus de la Légion, l'esprit de fraternité qui y règne, et le profond respect et la gratitude qu'il éprouve envers la France, son pays d'adoption.
Merci à Danilo et aux Editions Mareuil pour leur confiance.
Retrouvez Danilo sur Instagram : https://www.instagram.com/danilo.pagliaro/
Son livre " Ne jamais baisser les bras " est disponible : https://www.fnac.com/a18114492/Danilo-Pagliaro-Ne-jamais-avoir-peur-J-etais-un-legionnaire-un-homme-sans-nom
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AmusantTranscription
00:00 J'ai vu en Côte d'Ivoire une gamine, mais vraiment une gamine,
00:03 elle pouvait avoir difficilement 10 ans,
00:05 elle avait été violée par je ne sais pas combien de gens,
00:07 bien sûr ça te marque, elle était dans un état épouvantable,
00:10 évidemment ça te marque.
00:12 J'ai vu des gens brûler, bien sûr ça te marque.
00:15 Je me suis fait tirer dessus, bien sûr ça te marque.
00:18 J'ai tiré, bien sûr ça te marque.
00:21 Tu n'as pas de cauchemar, tu n'es pas traumatisé de guerre
00:24 comme beaucoup de gens qui n'ont jamais rien fait
00:27 veulent apparaître.
00:30 Je suis un ancien légionnaire,
00:31 j'ai fait 24 ans de service et j'ai fait plein d'autres choses.
00:35 Un légionnaire c'est tout simplement un homme
00:38 qui a décidé de servir dans un corps d'armée français
00:43 qui s'appelle la Légion étrangère,
00:45 qui a un statut assez spécial,
00:47 qui permet même aux étrangers justement
00:52 de pouvoir servir sous les armes de la France,
00:56 ce qui n'est pas possible en principe dans le monde entier.
00:59 C'est une spécificité, c'est une excellence française.
01:04 Je fais mon service militaire dans la marine italienne.
01:07 Je me suis marié, j'ai eu deux enfants, j'ai toujours travaillé.
01:10 Ma première femme elle était française.
01:12 Donc on savait qu'ici en France, la vie était quand même plus sûre
01:16 parce qu'en Italie à l'époque le chômage n'existait pas.
01:19 Tu travaillais c'était bien, tu ne travaillais pas, tu avais zéro.
01:22 Donc on est venu en France.
01:23 Vous savez à l'étranger on ne sait pas si c'est un mythe, juste une légende.
01:26 Oui elle a existé, mais est-ce qu'elle existe encore ?
01:31 J'ai découvert qu'elle existait vraiment.
01:33 Et comme j'ai toujours voulu faire de toute façon quelque chose
01:36 ou dans les forces armées ou dans les forces de l'ordre,
01:40 c'était vraiment mon rêve de gamin.
01:41 Du coup même si j'étais vieux, j'avais 36 ans,
01:44 j'ai dit tiens il y a une petite fenêtre qui s'ouvre.
01:46 J'en ai parlé avec ma femme, donc tout le monde était d'accord.
01:49 Et j'ai essayé.
01:50 À 33-34 ans, vous auriez pu déjà sortir des armées avec une retraite.
01:56 Moi à 36 ans, au lieu de sortir des armées, j'ai commencé ma carrière.
02:00 Et en plus pas dans n'importe quelle armée.
02:02 Mais justement je n'ai jamais baissé les bras.
02:05 Contrairement à ce qu'on pense, on n'est pas martyrisé,
02:10 on n'est pas torturé, on n'est pas...
02:12 J'ai entendu des bêtises hallucinantes par rapport à ça.
02:15 Ce n'est pas du tout vrai.
02:18 La sélection, vous allez à Aubagne, il y a le service de sécurité
02:22 qui commence à enquêter sur vous.
02:24 Dès que vous vous présentez, vous êtes obligé d'amener un passeport valide
02:28 par la carte d'identité. Pourquoi ?
02:30 Parce que c'est beaucoup plus difficile de falsifier un passeport
02:36 qu'une carte d'identité.
02:38 Et donc contrairement à ce qu'on pense, la région étrangère, la France,
02:42 ne veut pas de criminels dans ses rangs.
02:46 Donc dès que vous arrivez, d'un côté il y a la sécurité militaire
02:50 qui commence à enquêter sur vous, et d'autre part,
02:53 on commence toute une série, toute une batterie assez importante
02:58 de tests, tests physiques, visites, analyses médicales.
03:03 Chaque épreuve est éliminatoire.
03:06 Si tout va bien, vous arrivez à la fin de tous vos contrôles,
03:10 il y a le dernier passage devant les bureaux de sécurité.
03:14 Si vous passez aussi cet entretien, vous êtes engagé.
03:19 Donc à partir de là, vous partirez à Castelnaudary,
03:23 obligé, au 4e régiment étranger.
03:25 C'est là où l'instruction est faite aux jeunes légionnaires.
03:29 On fait les 4 premiers mois environ de formation de base.
03:33 On reviendra sur Aubagne, et là, les tout nouveaux légionnaires
03:37 seront affectés dans un des régiments de la région étrangère.
03:41 Dès que vous arrivez à votre destination finale,
03:44 vous recommencez avec le peloton d'instruction
03:48 du régiment où vous êtes, et après, vous serez affecté
03:52 dans une des unités de compagnie ou des escadrons.
03:55 Moi, j'étais au Rec, c'est la cavalerie,
03:58 donc nous avons des escadrons.
04:00 C'est la même chose que la compagnie.
04:02 Et vous commencez votre vie de légionnaire.
04:05 Les gens pensent que nous sommes des voyous,
04:08 que nous sommes des répandus, que nous sommes des gens
04:11 recherchés par toutes les polices du monde.
04:14 Déjà, il y a un fond de vérité.
04:17 Et après, cette "vérité", elle a été amplifiée
04:21 par tous les films, la littérature, les chansons,
04:25 le Hollywood, qui a exploité à fond cette image
04:29 de la personne paumée qui va se réfugier
04:33 dans le rang de la région.
04:35 La région ne veut pas de délinquants,
04:37 de criminels, de voyous.
04:39 Et pour cela, il faut s'identifier dès qu'on arrive
04:42 au poste d'engagement.
04:43 Aujourd'hui, c'est très simple de vérifier
04:46 la position civile pénale d'une personne,
04:48 peu importe d'où elle vient.
04:51 Mais la région est née en 1831.
04:53 Je vois mal les enquêteurs, nos enquêteurs,
04:56 d'il y a deux siècles, rechercher sur Internet
05:00 la position d'un Congolais, d'un Chinois, d'un Russe.
05:05 Falsifier un papier, c'était la chose la plus simple du monde,
05:08 il y a deux siècles.
05:09 Donc c'est sûr qu'il y a plein de monde,
05:11 beaucoup de gens qui ont profité de cette situation
05:15 pour s'engager à la région étrangère.
05:17 Mais de là à dire que la région voulait engager des criminels,
05:23 ça c'est totalement faux.
05:24 Moi personnellement, pas plus tard qu'il y a trois mois,
05:27 j'étais à Rome, j'ai été arrêté par des militaires italiens
05:30 qui m'avaient reconnu.
05:31 Il y avait un chef qui lui, devant ses hommes en plus,
05:35 il me dit "Ah tu sais, moi aussi,
05:37 j'ai failli m'engager à la région étrangère,
05:39 j'avais tout passé, tous les tests,
05:42 les tests très durs que tu connais,
05:43 il faut être vraiment des hommes très..."
05:46 Mais finalement, je n'ai pas été engagé
05:49 parce que je n'avais pas un passé assez lourd.
05:52 Pourquoi ce chef il a dit une chose pareille ?
05:54 Parce qu'il y avait ses hommes devant lui,
05:56 il voulait faire voir qu'il était, à son avis, un surhomme.
05:59 Donc voilà, il y a plein de désolés,
06:01 on perd un peu d'élégance,
06:03 plein d'abrutis, frustrés,
06:05 qui ne sont pas contents de ce qu'ils sont.
06:07 Donc comme des cas comme ça, il y en a des milliers,
06:10 mais des centaines de milliers dans le monde entier.
06:13 Voilà que le mythe totalement faux
06:16 du légionnaire méchant, voyou, criminel,
06:19 est entretenu, mais ce n'est pas du tout vrai.
06:23 Ce n'est vraiment pas vrai.
06:24 Le très commun qu'il y a parmi les légionnaires
06:28 d'il y a deux siècles et nous,
06:30 moi-même et les jeunes légionnaires,
06:32 c'est que nous tous, à un moment donné de notre vie,
06:35 nous avons été en rupture avec la société,
06:36 ça c'est certain.
06:37 Cela ne veut pas dire qu'on a volé, qu'on a violé,
06:41 qu'on a tué quelqu'un.
06:43 Ce n'est pas ça, être en rupture.
06:45 Ça peut être la mort de quelqu'un,
06:47 ça peut être un divorce,
06:49 ça peut être un amour déchu, je n'en sais rien.
06:52 Ça peut être les cas de la vie.
06:55 À un moment donné, on ne se sent plus à notre place
06:59 au milieu de la société, pour plein de raisons.
07:01 Mais cela n'implique pas, mais absolument pas,
07:04 le fait d'avoir fait quelque chose de mal.
07:07 Moi, j'ai été placé sous l'anonymat,
07:09 l'anonymat que nous appelons l'identité déclarée,
07:12 tout simplement parce que
07:14 une des conditions pour pouvoir être engagé
07:17 à la Légion étrangère est d'être célibataire,
07:21 alors que moi j'étais marié.
07:22 La Légion a pensé que j'aurais pu être engagé dans ce rang.
07:28 Je suis rentré dans les bureaux de la sécurité militaire
07:31 en étant Danilo Pagliaro Nea,
07:36 et j'en suis sorti en étant Perini Pedro, célibataire.
07:41 On ne change pas d'identité pour cacher quelqu'un à la loi,
07:46 à la justice, du tout, du tout, du tout.
07:49 Changer d'identité, c'est protéger par rapport à certaines choses.
07:53 Et le fait d'être mis sous anonymat,
07:56 sous identité déclarée,
07:58 on ne peut pas y rester toute notre vie.
08:02 Souvent les gens sont mis sous identité déclarée
08:05 parce qu'apparemment ils sont bons, ils sont bien,
08:08 ils n'ont aucun problème.
08:09 Mais la Légion veut quand même enquêter un peu plus.
08:13 Ils sont engagés sous identité déclarée,
08:15 comme ça il n'y aura pas de problème.
08:17 En principe, dans la première année,
08:18 ils doivent reprendre, si tout va bien,
08:20 ils doivent reprendre leur vraie identité.
08:23 Combien de fois j'ai entendu,
08:25 on s'engage à la Légion, on change d'identité,
08:27 on disparaît à jamais. Faux.
08:29 Ça par contre, ça n'a jamais été vrai,
08:32 même pas dans le passé.
08:34 Un légionnaire qui soit sous identité déclarée,
08:38 s'il meurt, peu importe pourquoi, comment,
08:41 pendant le service, il reprend son identité.
08:43 Un légionnaire, au moment où il quitte l'institution,
08:48 il reprendra son identité.
08:50 Ce n'est pas possible de garder,
08:52 ça n'a jamais été possible.
08:54 La Légion, les légionnaires étaient les premiers
08:58 qui étaient envoyés, ça c'est vrai.
09:00 Absolument pas parce qu'ils étaient
09:02 ou ils sont de la chair à canon,
09:04 tout simplement, avant il y avait la conscription obligatoire.
09:07 Donc, quand il y a eu toute la guerre que la France a faite,
09:11 dans les choses récentes, la guerre d'Algérie,
09:13 la guerre d'Indochine,
09:14 on n'envoie pas contre les viettes des appelés,
09:17 il fallait envoyer des soldats professionnels.
09:19 Et il y a 50 ans en arrière, c'était des légionnaires.
09:22 Mais il ne faut pas oublier les troupes de marines,
09:25 ce que vous appelez la coloniale, très peu de monde le sait,
09:28 là où la Légion a été, les gars de la coloniale étaient.
09:33 Et les gars de la coloniale, eux, ils sont tous des bons Français,
09:36 des vrais Français de pure souche.
09:39 Mais ils étaient des soldats professionnels.
09:41 Et ils étaient sur nos théâtres d'opération.
09:44 Aujourd'hui, ce n'est plus du tout comme ça.
09:46 Les appelés n'existent plus.
09:48 Donc la France a beaucoup moins d'hommes et femmes sous les armes.
09:53 Par contre, tout le monde est professionnel.
09:54 De plus en plus, ce sont d'autres corps d'armée,
09:58 de l'armée française, qui sont envoyés sur des théâtres d'opération.
10:02 C'est aussi simple que ça.
10:04 Moi, quand je me suis engagé en 1994,
10:06 il y avait la guerre de Yougoslavie en cours.
10:08 Pour mille raisons, j'étais convaincu que
10:13 je n'aurais pas terminé vivant mon premier contrat de cinq ans.
10:18 Parce que moi aussi, j'ai subi, en quelque sorte,
10:22 tout l'imaginaire collectif.
10:25 Moi, la région étrangère, j'ai découvert, et ça je le dis haut et fort,
10:29 avec infiniment d'amour pour cette institution
10:32 et pour ce pays qui permet ça.
10:33 Moi, la région, j'ai découvert l'amour,
10:37 la fraternité, la tolérance, la liberté, la démocratie.
10:43 Là, il y a quelqu'un sûrement qui va dire qu'il a pété quelques connexions.
10:48 Non, non, non, la liberté et la démocratie.
10:50 La liberté ne veut pas dire, maintenant j'ai envie de sortir, tout pété,
10:54 donc je suis libre de... Non, non, ça ne se parle ni de la liberté ni de la démocratie.
10:57 La liberté et la démocratie, c'est qu'il y a des lois,
11:00 il y a des règles, il y a un savoir-vivre commun.
11:03 Tu sais que c'est comme ça, tu veux l'accepter,
11:06 tu viens, tu l'acceptes, tu restes dans les limites et tout ira bien.
11:10 Ça, c'est la liberté.
11:13 En plus, on est libre, c'est vrai que la discipline est stricte,
11:16 mais on est libre de sortir des limites,
11:20 à savoir que tu sors des limites, tu seras puni.
11:24 Il n'y a pas de "mais, peut-être", il n'y a pas de "mais".
11:26 Limite gauche, limite droite, tu restes dans les limites, tout se passe bien.
11:30 Pas vu, pas pris, ça c'est vraiment légion.
11:32 Et une semaine plus tard, tu peux dire à ton chef,
11:35 "Vous savez, chef, c'était moi."
11:38 Il n'y aura pas de problème, mais sur le fait, pas vu, pas pris.
11:41 Par contre, vu, pris, puni.
11:43 Après, à toi, la liberté de choisir si tu veux risquer,
11:47 si tu veux être tranquille.
11:49 À la région, il y a un truc, il y a un motif de punition
11:52 qu'on appelle "motif trop con", à savoir, bien sûr, tu peux faire le mur,
11:57 mais après, si une fois que tu es en ville, tu bois, tu fais la fête,
12:01 que quand tu rentres au quartier, tu ne sais même plus si tu marches
12:04 sur terre ou sur la tête, et tu rentres par la porte principale.
12:08 Là, tu prendras deux semaines, tu prendras un peu plus,
12:14 parce que tu as été trop con.
12:15 Ça, c'est la liberté et la démocratie.
12:18 La discipline, chez nous, elle n'est pas plus stricte.
12:21 Le règlement militaire est le même pour les armées françaises.
12:26 Et je répète, nous faisons partie de l'armée française.
12:30 Chez nous, il y avait l'application du code de discipline.
12:34 Dans les forces armées françaises, autre que la région, ça flottait un peu.
12:38 Mais sinon, le règlement, je répète, est le même.
12:40 Les missions de l'époque, c'était l'ex-Yougoslavie, justement,
12:44 donc tout de Sarajevo, le Kosovo, la Bosnie.
12:49 J'ai été envoyé en République centrafricaine, au Cameroun,
12:54 j'ai été envoyé en Côte d'Ivoire, j'étais au 5e escadron
12:57 du 1er Régiment étranger de cavalerie.
12:59 On a été envoyé à deux reprises, il me semble, en Égypte,
13:03 pour travailler avec les Égyptiens dans leur désert.
13:07 On a toujours participé à celle qu'aujourd'hui,
13:11 on appelle l'opération Sentinelle,
13:13 donc la sécurisation du sol français, à Métropole.
13:16 C'est la normalité des choses, je veux dire.
13:18 Un soldat, il est là pour ça.
13:20 Et un légionnaire aussi, puisqu'un légionnaire est un soldat.
13:23 Partir au combat, c'est quelque chose de...
13:27 Alors c'est bizarre d'en parler, parce que les gens,
13:30 ceux qui n'y ont jamais été, ont toujours cette image de...
13:34 Tu pars en opération, à un moment donné,
13:36 tu te retrouves dans des situations plus ou moins dangereuses,
13:40 plus ou moins tendues, et là tu réagis en conséquence.
13:43 Après, souvent la question "mais est-ce que tu as eu peur ?"
13:45 Mais tu ne peux pas avoir peur, tu n'as pas le temps d'avoir peur.
13:48 Après, tu peux avoir peur.
13:50 Après, tu peux réaliser ce qui s'est passé,
13:53 ce qui aurait pu se passer, ce que tu...
13:56 Mais le fait de "tu as tué", "qu'est-ce que ça fait de tuer un homme ?"
13:59 Mais ça ne se passe pas comme ça, ça c'est dans les films.
14:03 Ça c'est dans l'imaginaire des gens qui n'ont jamais fait des choses comme ça.
14:07 Et donc, ils reçoivent ces informations visuelles,
14:11 et vous élaborez ces choses, mais en étant ici, dans un studio,
14:16 ou en étant devant la télé, dans un sofa, au chaud chez vous, justement.
14:22 Bien sûr, il y a des choses qui marquent.
14:24 J'ai vu en Côte d'Ivoire une gamine, mais vraiment une gamine,
14:27 qui pouvait avoir difficilement 10 ans,
14:29 elle avait été violée par je ne sais pas combien de gens,
14:32 bien sûr ça te marque.
14:33 Elle était dans un état épouvantable, évidemment ça te marque.
14:36 J'ai vu des gens brûler, bien sûr ça te marque.
14:40 Je me suis fait tirer dessus, bien sûr ça te marque.
14:43 J'ai tiré, bien sûr ça te marque.
14:45 Tu n'as pas de cauchemar, tu n'es pas traumatisé de guerre,
14:49 comme beaucoup de gens qui n'ont jamais rien fait,
14:52 veulent apparaître, parce que ça fait, je ne sais pas,
14:57 il y a un charme peut-être du guerrier, combattant, traumatisé,
15:00 qui a vu, qui a fait, ça c'est dans les films.
15:02 Dans la réalité, il y a des gens qui ont des sensibilités différentes,
15:06 donc le même épisode peut marquer différemment.
15:10 Nous, ma génération, on n'a pas non plus fait l'Indochine,
15:14 on n'a pas non plus fait l'Algérie.
15:17 Nous, on n'a pas vécu toutes ces histoires de violence gratuite,
15:20 de torture, de massacre, d'assaut à l'arme blanche.
15:26 Bien sûr, je parlerais différemment probablement si j'avais vécu ça.
15:29 Moi, je parle par rapport à ma génération et je n'aime pas parler de ça.
15:33 Pas parce que j'ai fait des choses indicibles ou immondes,
15:37 alors loin de là, mais parce que de toute façon,
15:41 vous ne pourriez pas comprendre.
15:43 On parle vraiment d'un autre langage,
15:45 on parle d'un autre monde qui ne vous appartient pas.
15:48 Et c'est d'autant mieux.
15:50 Laissez les régionnaires faire le boulot,
15:52 laissez les soldats en général,
15:53 laissez vos soldats, laissez vos hommes et femmes
15:56 qui ont décidé de servir la France faire le boulot.
15:59 À un moment donné, j'en ai eu marre d'entendre toutes les bêtises
16:03 qu'on entend sur la région.
16:05 On a des criminels, on a des mercenaires.
16:08 Donc, j'ai voulu écrire.
16:10 J'ai voulu écrire pour dire ce qu'est la région.
16:15 Après, on peut aimer ou pas aimer.
16:19 En aucun cas, on ne peut pas dire que ce que j'écris ne soit pas vrai.
16:25 Voilà pourquoi on dit souvent que c'est une autobiographie.
16:27 C'est vrai, mais c'est faux.
16:29 Je n'ai jamais dit, sur mes livres, dans mes livres,
16:33 on m'a dit que c'est dans ce sens-là que c'est une autobiographie.
16:36 J'ai toujours dit, j'ai vu, j'ai entendu.
16:41 J'étais là, j'ai entendu, j'ai fait, j'ai subi.
16:45 Mais c'est tout simplement parce que je veux apporter un témoignage direct.
16:49 Mais le sujet est la Légion.
16:51 Le sujet est notre Légion étrangère,
16:55 qui est tellement mal connue, méconnue et parfois méprisée, à tort.
17:00 Et donc, j'ai voulu la faire connaître.
17:01 Si vous, les Français, vous saviez ce que vous devez à vos légionnaires,
17:06 et si nous, les légionnaires, si on pouvait réellement comprendre
17:11 ce que nous devons à la France et à vous, les Français.
17:14 Le colonel Amilac Vary, commandant la 13e demi-brigade de Légion étrangère
17:19 pendant la guerre, la Deuxième Guerre mondiale,
17:22 il est mort à El Alamein.
17:23 Il a dit, et ça c'est vraiment, depuis que je l'ai connu,
17:27 cette devise, ça a été, et c'est ma façon de me conduire.
17:32 Il a dit, nous, les étrangers, nous n'avons qu'une seule façon,
17:37 qu'un seul moyen de démontrer à la France notre gratitude
17:41 pour l'accueil qu'elle nous a fait.
17:43 C'est de se faire tuer pour elle.
17:45 Pas de mourir pour elle.
17:47 On peut faire un accident et on meurt.
17:48 De se faire tuer pour elle.
17:50 Cela ne veut pas dire qu'il faut aller mourir, qu'il faut se faire tuer,
17:52 mais vive la France.
17:54 Et merci.
17:55 Merci à la France.
17:56 Donc voilà pourquoi je voulais écrire.
17:58 Pour dire un énorme merci à la France, aux Français et à la Légion étrangère.
18:02 Et pour faire savoir que non, ce n'est pas vrai.
18:06 Nous ne sommes pas des voyous, des criminels.
18:08 Je veux parler, ça c'est une mission que je me suis,
18:11 je ne sais pas si j'ai jamais dit ça,
18:13 mais c'est la réalité.
18:14 C'est une mission que je me suis donnée.
18:16 La Légion ne m'a rien demandé.
18:17 Je ne sais même pas s'ils sont contents de ce que je raconte.
18:20 La Légion ne m'a rien demandé, les forces armées encore moins,
18:23 la France non plus.
18:24 Je me suis posé cette mission.
18:26 Je veux parler pour ceux qui ne peuvent plus le faire.
18:30 Je répète, je n'ai pas fait la Deuxième Guerre mondiale,
18:32 l'Algérie, l'Indochine, je n'ai pas connu le combat à la baïonnette
18:36 ou avec des milliers de morts, heureusement d'ailleurs.
18:39 Mais j'ai eu des camarades morts.
18:41 Ces camarades ne peuvent plus le dire.
18:44 Mais moi je ne suis pas, je n'ai jamais été un criminel.
18:46 J'étais à la Légion pour mille raisons qui m'appartiennent.
18:49 Mais j'étais un brave garçon.
18:51 Toumata Riri, 24 ans, 25 ans, Tahitien, mort pendant la guerre
18:57 avec la Suédois, Gunther, maréchal de Logis,
19:02 une balle dans la gorge, à Sarajevo et combien d'autres.
19:05 Eh bien je veux parler pour eux.
19:07 Eux ne peuvent plus le dire.
19:08 Voilà pourquoi j'ai écrit.
19:10 Et donc ne jamais baisser les bras.
19:12 Pourquoi ce titre?
19:13 Parce qu'il faut aller toujours de l'avant.
19:16 Parce qu'il ne faut jamais baisser les bras.
19:20 Parce que si vous y croyez, peu importe en quoi,
19:23 si vous croyez en quelque chose,
19:25 il faut courir à 1000 km/h vers votre but,
19:28 sans peur de tomber.
19:30 Vous tombez, vous vous rélevez.
19:31 Combien de fois j'entends, oui, mais tout le monde dit ça.
19:34 Oui, c'est très beau à dire.
19:36 Ça donne un ton, quelqu'un qui te dit,
19:38 oui, mais tu tombes 10 fois, tu te réleves 11 fois.
19:40 Oui, mais après il faut refaire.
19:41 Moi, je me suis retrouvé totalement déraciné.
19:44 Je suis arrivé en France.
19:45 Tout ce que je savais de français,
19:47 c'était voulez-vous coucher avec moi ce soir?
19:49 Il y avait la chanson à l'époque.
19:51 J'ai vite découvert qu'il ne fallait pas dire ça
19:53 aux sergents de semaine parce que ça aurait pu mal tourner.
19:56 Mais c'était donc je me suis retrouvé sans langue,
19:59 sans ma culture, sans mes origines.
20:02 Je me suis retrouvé à la région.
20:03 Ma maman est décédée, divorcée.
20:06 J'avais plus de maison.
20:07 Je suis tombé combien de fois?
20:09 Je me suis rélevé.
20:10 Grâce à la région, bien sûr.
20:12 Mais il faut toujours s'accrocher à quelque chose.
20:14 Et une fois que tu t'es rélevé,
20:16 il faut reprendre à courir, à foncer.
20:19 Tu ne peux pas dire, mais auparavant,
20:21 je suis tombé, je me suis pété une jambe.
20:23 C'est bien, la jambe a été réparée.
20:25 Et bien, maintenant, tu cours, pas moins vite,
20:28 par peur de tomber.
20:29 Tu tombes, tu te réleves une autre fois.
20:30 Tu te pètes une autre fois.
20:31 Tu te fais soigner, tu répares.
20:33 Mais il faut vivre à 1000 kilomètres.
20:36 Vous me voyez, j'y crois.
20:38 Il faut vivre à 1000 kilomètres à l'heure.
20:41 Demain, tout pourrait s'arrêter.
20:43 Il ne faut pas avoir peur de se remettre en question.
20:46 À 36 ans, je me suis engagé dans un
20:48 parmi les plus durs corps d'armée au monde.
20:51 Et j'y suis resté 24 ans.
20:53 Je suis sorti.
20:54 À 60 ans, je n'ai rien mieux trouvé à faire
20:58 que de me remettre en question.
21:00 J'ai eu un master.
21:01 Mon master 1, j'ai eu mon master 2.
21:04 Là, actuellement, je suis en doctorat.
21:07 Je prépare un doctorat, une histoire dans la recherche.
21:09 Ne jamais avoir peur.
21:11 Qu'est-ce qu'ils vont me faire ?
21:12 Qu'est-ce qu'ils vont me dire ?
21:13 Et si je n'y arrive pas, je fonce pour y arriver.
21:15 Je n'y arrive pas, ce n'est pas dans mon langage.
21:18 À la rigueur, tu tomberas en essayant d'y arriver.
21:21 Pas mourir.
21:22 Tomber, ça ne veut pas dire mourir.
21:23 Bien sûr, je deviens vieux.
21:25 Bien sûr, j'ai 66 ans.
21:27 Là, je suis en pleine forme.
21:29 Je fais plein d'activités physiques.
21:30 Mais bien sûr, à un moment donné,
21:31 j'aurai moi aussi mon déambulataire.
21:33 Mais il ne faut pas subir cette évidence.
21:36 Il faut combattre.
21:38 Mais dans le sens noble du terme.
21:39 Ne jamais baisser les bras.
21:41 C'est tout le sens de mon livre, de ma vie,
21:43 du témoignage que je veux apporter.
21:45 Et vive la région étrangère qui m'a donné la possibilité
21:48 d'en être là.
21:49 Et la France.