Gaza : une déclaration d'intention de coopération humanitaire signée par le Qatar et la France

  • il y a 8 mois

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00:00 - Une déclaration d'intention en matière de coopération humanitaire
00:07 notamment à Gaza, annonce faite à l'occasion de la visite de l'émir Tamim à Paris,
00:11 qui se poursuit ce mardi. Bonjour Sébastien Boussois,
00:14 merci de répondre à ces questions, vous êtes chercheur enseignant en relations internationales.
00:17 Votre dernier livre, "La guerre sainte de Poutine" est sorti l'an dernier,
00:21 mais avant cela on vous doit d'autres ouvrages, notamment sur le Moyen-Orient et les pays du Golfe.
00:25 Une déclaration d'intention en matière de coopération humanitaire sur Gaza,
00:29 est-ce qu'on aurait pu attendre davantage sur cette visite de l'émir du Qatar à Paris ?
00:33 - On voit bien au niveau de l'agenda que c'était ce qui était essentiellement mis en avant depuis le début,
00:37 essayer de trouver non pas une solution, mais en tout cas aller dans la continuité des discussions
00:41 qu'il y avait eu vendredi et qu'il y avait eu encore avant entre les Israéliens, les Qataris et les Américains.
00:47 L'objectif évidemment est d'essayer de trouver une solution le plus rapidement possible au-delà du cessez-le-feu,
00:51 mais l'urgence elle est évidemment à l'humanitaire.
00:54 Je crois que c'est déjà plutôt pas mal d'arriver à annoncer une action conjointe dans ce sens-là,
00:58 tant on voit que c'est extrêmement compliqué d'arriver à faire parvenir quoi que ce soit à Gaza.
01:03 Donc je pense que ça c'est déjà un point qui est évidemment important,
01:06 qui n'est pas l'absolu dans ce qu'on voudrait, c'est-à-dire une paix, un Etat palestinien ou autre,
01:10 mais en tout cas déjà la priorité elle va à l'humanitaire et là les deux pays ont plutôt évidemment visé juste.
01:15 - Mais le président Biden a annoncé en début de semaine un projet de cessez-le-feu
01:19 qui aurait été confirmé par les Israéliens pendant toute la durée du Ramadan.
01:23 On peut encore s'accrocher à cet espoir ?
01:26 - Ça fait des semaines qu'on imagine le meilleur et ça fait des semaines qu'on fait face au pire,
01:30 enfin en tout cas les Palestiniens de Gaza.
01:32 On voit bien aujourd'hui que personne n'est capable de dire clairement et concrètement
01:35 quand est-ce que la pluie va tomber et on est dans une situation, ou le soleil revenir en l'occurrence,
01:39 on est dans une situation où aucune des parties n'arrive à véritablement formaliser,
01:43 malgré l'action des Qataris, des Américains et malgré l'accord des Israéliens
01:47 dans les négociations sur les demandes du Hamas.
01:50 On voit bien qu'à chaque fois Benjamin Netanyahou la dernière fois a eu le dernier mot,
01:54 il a balayé les propositions qui auraient dû amener à un cessez-le-feu
01:57 et à une cessation provisoire des bombardements.
02:00 - Sur la bande de Gaza, la France a intérêt à être aux côtés des Qataris,
02:04 notamment pour la libération des otages, on rappelle qu'il y a encore trois Français
02:07 qui sont retenus dans la bande de Gaza.
02:09 - La France essaye d'être quelque part.
02:12 On voit bien à quel point l'Europe aujourd'hui ne pèse absolument pas
02:15 dans un certain nombre de zones de conflit et en particulier au Moyen-Orient.
02:18 - Mais qui pèse aujourd'hui ?
02:19 - Aujourd'hui on est sur un retour, en tout cas d'un point de vue des relations internationales et géopolitiques,
02:23 que ce soit sur le Caucase Sud, que ce soit sur la question de l'Ukraine
02:26 ou que ce soit sur le conflit israélo-palestinien,
02:29 on voit bien que ce sont les puissances régionales en réalité,
02:31 le retour de ces puissances régionales face à un multilatéralisme qui s'effondre,
02:35 face à des Nations Unies qui ont disparu de la circulation.
02:38 Ce sont les pays voisins qui le plus souvent essayent de parvenir à une négociation,
02:42 voire à un accord de paix en dernier ressort.
02:44 Mais on voit bien que c'est l'Egypte et les Qataris qui tiennent, je dirais,
02:48 la couverture de leur côté pour essayer d'arriver à quelque chose.
02:51 La France, évidemment, elle ne peut que se mettre du côté du Qatar pour la libération des trois otages,
02:56 mais elle ne pèse évidemment pas grand-chose si ce n'est qu'on accueille à Paris,
02:59 symboliquement et historiquement parlant, des négociations diplomatiques, on va dire.
03:04 - Emmanuel Macron a insisté aussi sur la solution politique, solution à deux États.
03:08 Est-ce que, malgré tout, malgré la guerre, malgré les attaques du Hamas,
03:12 cette solution politique est encore d'actualité ?
03:15 - Personnellement, je n'y crois pas, mais je n'y crois pas depuis très longtemps en réalité.
03:18 Je ne vois pas comment, dans la foulée du 7 octobre, et certains le disent d'ailleurs,
03:22 est-ce que la récompense pour les Palestiniens qui sont membres du Hamas,
03:26 c'est de parvenir à l'État palestinien.
03:28 C'est évidemment une question qui se pose, mais on voit bien que la priorité,
03:31 elle est d'abord à essayer de sauver le maximum de Gazaouis qui sont encore vivants,
03:36 de parvenir à un cessez-le-feu, de libérer encore les 140 otages israéliens,
03:40 un maximum de vivants évidemment si possible.
03:43 Et finalement, à chaque fois, on brandit cette question de l'État palestinien.
03:46 D'une vue pratique, on voit bien à quel point ça va être extrêmement compliqué,
03:50 ne serait-ce que pour évacuer les 400, 450 000 colons des territoires palestiniens.
03:56 Mais de toute façon, on voit bien que Benjamin Netanyahou et sa coalition au pouvoir
04:00 actuellement n'en veulent pas. Et c'est bien ça toute la difficulté.
04:03 On peut tirer des plans sur la comète, on peut faire agir la communauté internationale
04:07 pour fantasmer sur un État palestinien.
04:09 Il devrait exister depuis 1947 et malheureusement ça n'a pas été le cas.
04:13 Mais je ne crois pas que c'est dans une situation de guerre aussi tendue
04:16 entre deux sociétés qui ne sont évidemment pas prêtes à se parler
04:19 et des pouvoirs qui sont aussi en discrédit.
04:21 Le gouvernement israélien de Netanyahou est quand même dans une situation fragile,
04:24 tout comme l'autorité palestinienne de Marc Moudabas,
04:26 dont on attend les élections ou le renouvellement depuis je ne sais pas combien de temps.
04:30 Il n'y a aucune des deux parties aujourd'hui qui est à mon avis suffisamment crédible et forte
04:34 pour ne serait-ce qu'ouvrir à un moment ou à un autre des négociations sur un enjeu aussi important.
04:39 Revenons peut-être sur cette visite de l'émir du Qatar qui a par ailleurs annoncé
04:43 un investissement massif en France, 10 milliards d'euros,
04:46 un engagement en tout cas annoncé hier soir lors d'un dîner fastueux à l'Elysée.
04:50 Ludovic de Foucault.
04:52 Un honneur fait à la France qui illustre la profondeur des liens qui unissent les deux pays.
04:59 Voilà comment l'Elysée décrit cette première visite d'État d'un émir du Qatar depuis 15 ans
05:04 et la première de Tamim Ben Hamad Al-Thani depuis son accession au trône en 2013.
05:10 Avec l'émir qatari grand argentier du Hamas et principal médiateur entre le groupe islamiste et Israël
05:16 depuis les massacres du 7 octobre, le président français a renouvelé son appel à un cessez-le-feu au Proche-Orient.
05:23 Je tiens, votre Altesse, à vous redire ma reconnaissance pour votre rôle déterminant
05:31 et celui de votre diplomatie conduite par cher Mohamed pour la libération des otages et en particulier de nos otages.
05:38 Nos trois compatriotes encore retenus à Gaza sont notre priorité mais vous avez d'ores et déjà tant fait.
05:45 Entre les deux chefs d'Etat, le courant semble passer.
05:56 Cher ami, la France est une lumière de liberté et d'égalité
06:00 et je ne peux imaginer de partenaire plus fort en Europe pour faire pression,
06:04 instaurer la justice concernant les deux États, l'État de Palestine et d'Israël.
06:09 Parmi les invités remarqués, Nicolas Sarkozy, grand artisan du rapprochement entre Paris et Doha
06:17 pendant son mandat présidentiel, il était placé à la table d'honneur entre Brigitte Macron et le président du PSG.
06:24 - Enchanté. - Enchanté d'avoir l'heure.
06:27 Club dont l'attaquant vedette, Kylian Mbappé, qui a annoncé son intention de quitter la capitale
06:32 pour rejoindre le Real Madrid la saison prochaine, était aussi invité.
06:36 Outre la situation au Proche-Orient, les relations bilatérales étaient aussi au menu.
06:41 Emmanuel Macron a annoncé la signature d'accords portant sur des investissements qu'Atari
06:46 à hauteur de 10 milliards d'euros dans l'économie française à l'horizon 2030.
06:51 Des engagements qui pourraient être détaillés ce mercredi quand les premiers ministres des deux pays présideront un forum économique.
06:58 - Voilà, pour parler de ce dîner d'hier soir, toujours Sébastien Boussois en plateau,
07:08 les relations entre la France et les Qataris sont aujourd'hui au bout fixe.
07:13 Ça n'a pas toujours été le cas sous Emmanuel Macron qui avait plutôt misé sur les Saoudiens, sur les Émiratis.
07:19 Là, les Qataris sont de retour, vous êtes bien de retour ?
07:21 - Je n'étais pas au dîner, mais en tout cas sur la relation entre la France et le Qatar,
07:25 on a eu effectivement du côté des présidents une forme de politique à géométrie variable.
07:29 Nicolas Sarkozy, ça a été rappelé dans le sujet, a été effectivement l'artisan du rapprochement avec Doha.
07:35 Puis ensuite, du temps de François Hollande, on était plutôt sur un rapprochement avec l'Arabie Saoudite.
07:39 Et je pense qu'Emmanuel Macron en arrivant en 2017 en pleine crise du Golfe,
07:43 c'est-à-dire le Qatar complètement mis au banc de tous ses pays voisins au sein du Conseil de coopération des pays du Golfe,
07:48 a cru bon à un moment de misée sur les Émirats Arabes-Unis.
07:52 Puis il s'est probablement rendu compte que l'évolution géopolitique du Moyen-Orient,
07:56 telle que les Émirats l'avaient rêvé, était plutôt aussi une forme d'autoritarisme
08:00 et de retour à des pouvoirs extrêmement forts et extrêmement autoritaires,
08:03 et qu'il fallait peut-être un peu aussi compenser en rééquilibrant sa relation avec le Qatar,
08:07 qui était sur une autre option concernant le Moyen-Orient.
08:11 Donc on assiste effectivement à un renforcement des relations avec le Qatar.
08:14 Évidemment que la crise, la guerre plutôt entre l'Ukraine et la Russie n'y est pas pour rien.
08:18 La question du gaz, elle importe.
08:20 Et puis il y a une tradition historique depuis des années, voire des décennies,
08:25 d'investissement et d'échanges bilatéraux et de coopération entre la France et le Qatar,
08:29 qui passe par l'immobilier, qui passe par les clubs sportifs, qui passe par la culture,
08:34 ou tout un tas d'autres domaines qui d'ailleurs concernent les fameux 10 milliards dont on a parlé.
08:38 C'est dans ces secteurs-là que seront investis les 10 milliards ?
08:41 C'est dans l'immobilier, c'est dans le tourisme, c'est dans les nouvelles technologies,
08:44 dans l'intelligence artificielle, le sport bien évidemment,
08:47 et aussi évidemment dans les équipements militaires,
08:49 puisque la France est un grand pourvoyeur d'équipements militaires pour le Qatar et d'autres pays.
08:54 Oui, c'est ça. C'est ce que viennent aussi chercher les Qataris ?
08:57 Oui, aujourd'hui on l'a.
08:58 Des armes ?
08:59 Oui, alors le Qatar manie la diplomatie, mais a aussi évidemment besoin d'armes,
09:04 parce que c'est un des premiers importateurs au monde d'armes avec l'Inde par exemple,
09:09 et la France évidemment elle joue un rôle majeur.
09:11 Il y a une concurrence d'ailleurs avec l'Allemagne sur un certain nombre d'équipements,
09:14 notamment des véhicules blindés, parce qu'ensuite le Qatar met à disposition un certain nombre de ces équipements,
09:19 soit sur des terrains où des pays sont fragilisés,
09:22 soit tout simplement dans des opérations qui peuvent être liées aux Nations Unies,
09:25 par exemple le maintien de la paix ou autre.
09:27 Donc on est aujourd'hui évidemment dans la nécessité que la France se positionne,
09:31 notamment face à ses concurrents européens.
09:33 Je pense effectivement à l'histoire de la société Nexter,
09:36 qui a des véhicules blindés que le Qatar pourrait avoir envie,
09:40 mais l'Allemagne a aussi évidemment de son côté d'autres véhicules qui peuvent séduire Doha.
09:45 Merci beaucoup Sébastien Boussois de vos lumières sur le Qatar.
09:48 - C'est une question de la France.

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