Chaque vendredi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Catherine Nay livre son regard sur l'actualité.
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00:00 Comme chaque semaine, Catherine Ney est avec nous. Bonjour Catherine.
00:03 Bonjour Dimitri, bonjour à tous.
00:05 Catherine, il y a ce sondage Europe Insight News, le JDD hier, 57% des français estiment qu'il faut revenir sur l'interdiction du cumul des mandats.
00:14 On en débattra justement la semaine prochaine dans l'hémicycle le 14 mars à l'initiative du Groupe Horizon d'Edouard Philippin.
00:21 La loi votée en 2014 durant le quinquennat Hollande interdit aux députés et sénateurs d'occuper une fonction exécutive locale.
00:29 Maire ou président de conseil général, l'idée vient de loin. Vous savez, jadis Michel Debray s'était interrogé.
00:37 Lionel Jospin lui-même, Premier ministre, avait créé une commission.
00:40 Alors l'idée était de diversifier les profils, renouveler, peut-être casser des baronies.
00:45 Et la loi est entrée en vigueur en 2017 à l'avènement d'Emmanuel Macron.
00:50 On a vu que 38% des députés sortant de droite ou de gauche ont choisi leur mairie, comme Edouard Philippe, François Baroin.
00:57 Ceux qui ont choisi la députation l'ont fait la mort dans l'âme, toujours.
01:01 Mais le plus gros impact sur le renouvellement de l'hémicycle est que les 577 candidats macronistes pour les législatives
01:07 ont été sélectionnés sur internet après appel public et pour plus de la moitié.
01:12 Les autres étaient soit d'anciens membres de cabinet socialiste et aussi quelques transfus de la droite.
01:17 Résultat, une victoire écroisante.
01:19 310 élus, plus les 42 alliés modem de François Bayrou, tous des néophytes, donc Godillot, forcément, Jupiter pouvait être Jupiter.
01:29 - Oui, on avait dit à l'époque même une chèvre avec l'étiquette Macron aurait pu gagner.
01:33 Bon, on s'est vite aperçu qu'il y avait comme un vide au Parlement.
01:35 - Mais vous savez, tous les grands politiques, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac, Alain Juppé, Pierre Moroy, Gaston Defer,
01:41 Rocart, mais aussi François Fillon, Bayrou, voilà, tous ont été des cumulards.
01:45 Et ces maires députés faisaient profiter leurs collègues de la densité de la connaissance du territoire pour faire la loi.
01:51 Ils étaient comme des tuteurs, mais aussi des contrepoids parlementaires au gouvernement.
01:55 Et ils formaient une armada de second rôle, un vivier de vedettes locales dans lequel l'exécutif puisait pour composer tous les gouvernements.
02:03 Parce que c'était des professionnels.
02:05 Alors, premier effet secondaire du non-cumul des mandats, au moment des Gilets jaunes.
02:10 Les députés Macronistes étaient pour eux des inconnus.
02:12 Les maires ne pouvant plus être leurs messagers à Paris, ils sont venus manifester dans la capitale,
02:16 certains pour tuer le roi, et on se souvient de tous ces samedis de violence.
02:20 J'ajouterai aussi la suppression de la réserve parlementaire en août 2017 par l'éphémère ministre François Bayrou,
02:26 au nom de la moralisation, ce qui a brisé un lien entre l'élu et sa circonscription.
02:31 Vous savez, c'était cette enveloppe laissée à leur discrétion des députés et des sénateurs pour un financement de proximité.
02:37 Elle devait être remplacée par un fonds de développement qui, bien sûr, n'a jamais été abondé.
02:42 Le Sénat a voté pour son rétablissement en décembre dernier, mais pas encore l'Assemblée.
02:46 - Alors, on se souvient que la majorité macroniste en 2017, elle a eu du mal à prendre ses marques.
02:51 On ne s'improvise pas, législateur, comme ça.
02:52 La presse moquait son amateurisme et gros malaise dans ses rangs.
02:56 14 députés étaient partis.
02:59 - Oui, c'était début 2020, mais vous vous souvenez, Emmanuel Macron était venu réconforter ses députés.
03:05 Il leur avait dit "si les professionnels sont ceux qu'on a virés il y a deux ans et demi,
03:09 et que les amateurs c'est vous, soyez fiers d'être des amateurs".
03:13 C'est ce qui s'appelle un retournement de l'insulte.
03:16 "Revendiquez donc ce qui vous est reproché", comme si être professionnel de la politique était un gros mot.
03:21 Alors, certains y ont vu un mépris pour le Parlement.
03:24 En réalité, le non cumule des mandats à contribuer à la dégradation de la vie démocratique.
03:29 C'est qu'on a cassé tout un écosystème qui marchait très bien.
03:32 - Alors, il faut aussi noter, Catherine Ney, et on le constate à chaque remaniement,
03:35 la pauvreté de la ressource humaine, du vivier.
03:38 - Ben oui, on n'arrive plus à recruter. Mais pourquoi ? Mais qui a envie d'être ministre aujourd'hui ?
03:43 La haute autorité de la Transparente dissuade des professionnels de s'investir.
03:47 Non seulement parce que c'est toute leur vie qui est passée au scanner,
03:50 leur patrimoine, leur vie passée, celle des conjoints,
03:52 mais en plus, elle voit des conflits d'intérêts partout. Vous êtes a priori coupable, mais de quoi ?
03:56 Et les interrogatoires sont menés quasi de façon policière.
03:59 Vos aveux sont escorqués, ils peuvent être rendus publics.
04:03 Or, dans un pays où l'argent est tabou, parfois entre conjoints,
04:06 on ne se dit même pas combien on gagne, qui a envie d'étaler son patrimoine dans la presse ?
04:11 Personne, voilà, encore une arme de destruction de la vie politique.
04:14 - Signature Europe 1, Catherine Ney. Merci beaucoup Catherine.
04:17 Dans un instant, Eugénie Bastier et la revue de presse d'Europe 1, signée Olivier Delagarde. À tout de suite.