• il y a 9 mois
Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien

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00:00 Et le grand entretien en forme de table ronde ce matin dans le cadre donc de cette journée
00:05 smartphone tous accros, comment dompter nos écrans ? Journée que vous propose Inter,
00:11 temps passé devant ces écrans, problème de concentration, addiction, effet sur nos
00:15 relations sociales, beaucoup de questions à poser à nos invités, en plus des vôtres
00:19 chers auditeurs que nous attendons avec Léa au 01.45.24.7000 et sur l'application France
00:27 Inter, oui parce que ça marche quand même encore aujourd'hui en dépit de cette journée
00:30 écran.
00:31 Nos invités Léa ! Grégoire Borst, professeur de psychologie
00:35 et de neurosciences de l'enfant et de l'adolescent, vous êtes directeur du laboratoire LapsiD
00:39 au CNRS et vous êtes l'un des experts de la commission écran réunie par Emmanuel
00:42 Macron.
00:43 Bonjour à vous, merci d'être là.
00:44 Justine Rist, bonjour, vous êtes directrice générale de Youtube France, beaucoup de
00:49 questions à vous poser.
00:50 Et puis également autour de la table, Romain Salzman, vous êtes directeur des opérations
00:53 de l'application Biril.
00:54 C'est la nouvelle application qui cartonne chez les jeunes, vous recevez une notification
00:59 et vous devez prendre deux photos à poster à vos abonnés tous les jours.
01:02 C'est une application française et qui cartonne dans le monde, je crois que c'est 25 millions
01:06 d'utilisateurs dans le monde entier, notamment au Japon, en Chine, aux Etats-Unis.
01:09 180 pays, on me dit dans l'oreillette, oui, 180 pays également, voilà, on a fait la
01:14 pub, on y va !
01:15 Alors on y va, et pour mieux vous connaître, même question à tous, combien d'heures
01:19 passez-vous tous les jours sur vos écrans ? 3, 4, 5, davantage ? Soyez francs, s'il
01:24 vous plaît, Justine Rist !
01:26 Alors, travail compris ?
01:28 Ah bah oui, oui, oui, c'est tout compris !
01:30 Tout compris, je dirais 8, je pense, 8, 9.
01:34 8, 9, oui.
01:35 Grégoire Borst ?
01:36 Ah bah moi je pense que j'explose littéralement, je vais être entre 12 et 14 heures par jour,
01:42 parce que j'y suis tout le temps sur mon…
01:43 Tu fais ça tous aux 14 heures par jour ?
01:45 Bah je suis en permanence devant un écran, je donne des cours sur un écran, je fais
01:49 des conférences sur des écrans, j'écris mes articles sur un écran, donc c'est aussi…
01:53 On voit bien aussi la multiplicité des usages, je pars en permanence sur Biril.
01:57 Alors Biril, il passe combien de temps ?
02:02 Entre 8 heures et 10 heures par jour sur un écran ?
02:04 Bon, bah sachez que les Français passent en moyenne 4,6 heures par jour devant un écran,
02:10 tout super confondu, donc vous explosez la moyenne des Français.
02:14 Mais quand même, le temps de moyenne, c'est 29% du temps hors sommeil.
02:21 Si on enlève le temps de sommeil, c'est à l'état où on est réveillé, on passe
02:24 quasiment un tiers en moyenne de notre journée devant un écran, parfois plus.
02:29 Est-ce que vous considérez qu'on est tous accros ?
02:31 Alors je peux commencer ?
02:35 Oui, allez-y !
02:36 Évidemment, je peux parler d'un point de vue de YouTube.
02:38 En fait, ce qu'on voit nous, c'est… YouTube, c'est la première destination vidéo en
02:42 France, et on est mesuré par médiamétrie depuis 4 ans, et on voit que les Français
02:47 passent 37 minutes par jour sur YouTube.
02:51 Et en fait, dans la manière de se comporter sur la plateforme, on voit qu'on est vraiment
02:59 dans une logique de l'intention, c'est-à-dire que quand on va sur YouTube, il y a une logique
03:02 de requête, on va chercher quelque chose, et puis ensuite, on a ce chemin de navigation.
03:07 D'ailleurs, YouTube est le deuxième moteur de recherche dans le monde.
03:11 Mais 37 minutes par jour sur YouTube, vous trouvez… Alors évidemment, vous dirigez
03:18 YouTube France, donc vous n'allez pas dire qu'on veut baisser le temps d'écran
03:22 devant YouTube.
03:23 J'imagine que vous espérez que cette moyenne monte à une heure par jour, peut-être deux
03:26 heures.
03:27 Est-ce qu'il y a une idée de sobriété chez YouTube ou non ? C'est le plus…
03:30 Alors déjà, bien sûr, il y a surtout une idée de qualité du temps passé, d'utilité
03:37 du temps passé.
03:38 Quand on voit, par exemple, le périmètre, le territoire de création que propose YouTube,
03:45 on est beaucoup, et d'ailleurs en France en particulier, sur des sujets de vulgarisation
03:50 du savoir, sur des sujets de connaissance.
03:52 La maison France Inter vient de passer le million d'abonnés sur YouTube.
03:55 Vous avez Hugo Descripts, je crois, tout à l'heure, qui est un des vrais ambassadeurs
04:00 de ce qu'on peut trouver sur la plateforme.
04:01 Donc c'est surtout un sujet de temps utilement passé, qualitativement passé, et puis bien
04:06 sûr, après, un temps très balisé quand on va parler des audiences plus jeunes.
04:10 On va y venir, les enfants.
04:12 Alors, Grégoire Borst, vous faites partie de la commission « Écrans réunis par l'Elysée
04:16 » en début d'année qui doit rendre ses conclusions prochainement, Léa le disait.
04:21 Cette commission est co-présidée par l'adictologue Amine Benyamina et la neurologue Servane Mouton.
04:27 Elle rassemble une dizaine d'experts.
04:29 Qu'on ait donné la co-présidence d'une telle commission à un addictologue, qu'est-ce
04:34 que cela dit de notre rapport aux écrans ? Est-ce que les écrans sont une nouvelle
04:39 forme d'addiction contemporaine, au même titre, je ne sais pas, que la drogue ou l'alcool ?
04:44 Je pense que ça montre surtout, effectivement, la perception qu'on en a dans nos sociétés
04:48 et la façon dont on aborde cette problématique-là.
04:50 On l'aborde, effectivement, sous le prisme de l'addiction.
04:53 Ensuite, est-ce que c'est une addiction comme la drogue ? Alors, on n'a pas besoin
04:57 de dissocier alcool et drogue.
04:59 L'alcool est une drogue, au même titre que le cannabis ou d'autres types de substances
05:03 psychoactives.
05:04 Ce qu'on sait, c'est que ça ne fonctionne pas exactement de la même manière.
05:06 C'est-à-dire que si je consomme de l'alcool ou des cigarettes ou du cannabis, j'ai
05:10 des transformations, finalement, de certaines molécules dans mon cerveau qui font que ça
05:15 va avoir des impacts sur, notamment, les syndromes de manque.
05:17 Ce n'est pas exactement la même chose sur les écrans.
05:19 Certains addictologues ont parlé d'addiction comportementale.
05:22 C'est plutôt, effectivement, des espèces de routines comportementales qu'on va avoir
05:25 dans lesquelles ça va être difficile de s'en extraire.
05:27 Et puis, l'addiction, il faut bien comprendre qu'il y a plein de conditions à avoir pour
05:32 être dans l'addiction.
05:33 Il faut notamment avoir aussi du retrait social, aussi manquer de plaisir à faire
05:38 d'autres activités que celle-là.
05:39 Et donc, on voit que sur les écrans, c'est un peu borderline.
05:42 C'est-à-dire qu'on est peut-être juste entre l'addiction et une utilisation excessive.
05:47 Et d'ailleurs, quand on regarde les classifications internationales, on a quelque chose sur le
05:49 jeu vidéo, mais on n'a pas encore, sur les réseaux sociaux, de classification.
05:53 Mais c'est intéressant la question.
05:54 Est-ce qu'on trouve du plaisir à faire autre chose quand on regarde des écrans toute
05:58 la journée ? Ça, c'est quelque chose, on va en parler avec les enfants et les adolescents,
06:01 mais c'est vrai qu'on a l'impression que leur bonheur ou leur plaisir, du moment
06:04 où ils regardent l'écran, que ce soit le jeu vidéo ou YouTube, etc. est plus grand
06:10 que toutes les autres activités qu'on leur propose par ailleurs.
06:13 Ça, ça reste effectivement de l'ordre, peut-être parfois, des biais qu'on peut
06:18 avoir.
06:19 On a beaucoup de stéréotypes négatifs sur les écrans.
06:21 C'est un peu logique.
06:22 Parce que qu'est-ce que ça fait ?
06:23 Il y a une fascination.
06:24 Non, mais bien sûr, il y a une fascination.
06:26 C'est quelque chose d'extrêmement intéressant.
06:28 Mais d'une part, il y a plein d'usages différents sur un écran.
06:29 Même vos enfants, ils font plein de choses différentes sur un écran.
06:32 Ils ne font pas toujours la même chose.
06:33 C'est aussi une façon de pouvoir rester en contact avec leur groupe social d'appartenance.
06:37 Ce n'est pas négligeable.
06:39 C'est ce que veulent faire les adolescents.
06:40 Ils veulent rester en contact.
06:41 Mais pour nous, parents, c'est quand même très complexe.
06:43 Parce que jusqu'à maintenant, quand il n'y avait pas d'écran, globalement, la
06:46 période de l'adolescence, elle se caractérise par aller chercher un lien d'attachement
06:48 qui était intrafamilial à l'extérieur de la cellule familiale.
06:52 Maintenant, en fait, ils le font alors même qu'ils sont dans la cellule familiale.
06:55 Et pour les parents, c'est quand même assez difficile à accepter.
06:58 Je pense qu'il faut qu'on fasse attention.
06:59 Ils prennent plein de plaisir par ailleurs en dehors des écrans.
07:02 Il ne faut pas caricaturer non plus les choses.
07:03 Donc il y a effectivement aussi une façon de penser que se développer aujourd'hui,
07:09 ça ne peut pas être que sur les écrans.
07:11 Et ça, je pense que c'est un message qu'il faut qu'on fasse passer aux enfants, aux
07:14 adolescents et évidemment aux parents.
07:16 Oui, c'est pas gagné.
07:17 Romain Salzman, votre application Biril envoie une notification qui tombe à n'importe
07:21 quel moment de la journée et qui implique donc de faire, c'est ça l'application,
07:25 on reçoit une notification et tout de suite, il faut faire deux photos, c'est ça.
07:28 Moi, je n'y suis pas.
07:29 Il faut faire deux photos.
07:30 Donc, en fait, tout le monde reçoit une notification en même temps, au même moment et à une
07:36 heure imprévue.
07:37 Vous avez deux minutes pour prendre une photo de ce que vous êtes en train de faire maintenant.
07:39 Et ça prend une photo avec la caméra avant et arrière.
07:42 Et l'idée derrière ce mécanisme, c'est d'éviter que vous partagiez seulement les
07:46 meilleurs moments de votre vie, comme vous pouvez le faire sur d'autres plateformes.
07:49 Vous ne partagez que quand vous faites des choses cool.
07:50 Oui, c'est l'anti Instagram.
07:51 Exactement.
07:52 Et vous partagez des moments spontanés, authentiques, candides et vulnérables.
07:55 Est-ce que ça ne crée pas une addiction, ce b-reel ? C'est-à-dire qu'on attend
08:00 toute la journée notre notification pour pouvoir faire cette double photo et l'envoyer
08:03 à notre communauté.
08:04 Est-ce que vous ne créez pas une addiction puisque c'est le thème de la journée ?
08:08 Je vais vous dire, hier, on préparait l'émission avec toute notre équipe de la matière sur
08:13 l'addiction au passable.
08:14 Et ça n'a pas manqué.
08:16 Notre assistant chef, Jean, a reçu sa petite notification.
08:20 Il a donc interrompu la réunion pour faire ses deux petites photos.
08:22 Et puis la réunion a repris après.
08:24 Mais bon, vous stimulez quelque chose en envoyant la notification.
08:29 Déjà, merci à Jean de sa fidélité.
08:30 Ensuite, on est chez B-reel précisément conscients du problème.
08:37 Et c'est exactement ce qui nous a donné envie de créer B-reel.
08:38 On avait le sentiment que les autres plateformes sociales étaient devenues un peu toxiques.
08:44 Et donc, on avait envie de créer une alternative.
08:46 Et il y a beaucoup de mécanismes dans l'application de B-reel qui sont mis en place pour apprendre
08:51 des erreurs du passé et des autres plateformes.
08:52 Notamment le temps passé sur B-reel est en général d'une dizaine, une quinzaine
08:55 de minutes.
08:56 Donc très inférieur au temps que vous passez sur les autres plateformes.
08:58 Et on vous connecte avec vos amis les plus proches sur B-reel.
09:01 Vous partagez du contenu avec vos 30, 40 amis les plus proches, avec vos parents, avec
09:05 vos amis, avec votre famille.
09:06 J'ai ma grand-mère sur B-reel et je vois ce qu'elle fait tous les jours.
09:08 Donc c'est un cercle très restreint.
09:09 Donc c'est une cigarette, ce n'est pas une cartouche.
09:12 C'est ça ce que vous nous dites.
09:13 En termes d'addiction ?
09:14 Alors si vous prenez un rapport avec la quantité, on pourrait dire ça.
09:18 Mais après le sujet c'est la qualité du temps passé.
09:20 Oui, c'est ce que vous dites à la fois YouTube et B-reel.
09:23 Vous essayez d'expliquer que ça dépend de ce qu'on regarde ou de la qualité avec
09:29 qui on partage ces photos-là et de la vérité de ces photos-là par rapport à celle d'Instagram.
09:33 On n'est pas dans un monde merveilleux.
09:34 Je pense que c'est vrai de tous les médias.
09:36 C'est vrai de la radio, c'est vrai de la télévision et c'est vrai des réseaux sociaux.
09:39 Le sujet c'est la quantité de temps passé et le sujet c'est les contenus.
09:42 Et en l'occurrence, les contenus qui sont sur B-reel sont drastiquement différents
09:46 des contenus que vous avez sur d'autres plateformes.
09:47 Ce que vous pouvez trouver sur Instagram, c'est des contenus de gens que vous n'avez
09:50 jamais rencontrés, qui partagent des contenus fakes de leur meilleure vie.
09:54 Et ce que vous voyez sur B-reel, encore une fois, c'est la vraie vie des amis qui sont
09:59 proches de vous.
10:00 Il faut donner les chiffres quand même parce qu'ils sont hallucinants.
10:03 Dès deux ans, un enfant passe en moyenne 56 minutes devant un écran par jour selon Santé
10:08 Publique France.
10:09 La durée passe à 1h20 en moyenne par jour à trois ans et demi.
10:14 1h34 à cinq ans et demi.
10:17 Quelle réaction avez-vous tous les trois face à ces chiffres ? Passer 1h30 tous les
10:21 jours devant un écran quand on a cinq ans, est-ce sain ou est-ce fou ?
10:26 Moi je vais bien vous répondre déjà parce que je suis d'autant plus concernée que
10:29 je suis maman de trois enfants.
10:31 Alors maintenant ils ont 14, 15 et 19.
10:34 Donc j'ai fait ce chemin.
10:35 Maintenant je suis dans la partie adolescence, jeune, adulte.
10:37 Mais on les connaît bien ces chiffres.
10:41 Nous on travaille beaucoup avec les associations, notamment e-enfance.
10:43 Ce qu'on peut rajouter c'est que je crois que c'est quasiment la moitié des enfants
10:48 ont leur premier smartphone à 10 ans.
10:51 Le premier contact avec Internet c'est avant 6 ans avec les parents.
10:54 Avant 7 ans sans les parents.
10:56 Donc on est hyper conscient de notre rôle et de notre responsabilité.
11:00 D'où l'importance d'outils adaptés à une expérience à un âge adapté.
11:06 C'est pour ça qu'on a été pionniers, là je parle de YouTube, à mettre en place
11:12 des outils.
11:13 Le premier ça s'appelle YouTube Kids.
11:15 A tous les parents qui nous écoutent, avant 13 ans c'est YouTube Kids.
11:19 Et je vous regarde Léa parce que je sais que vous avez des petits d'avant 13 ans.
11:23 Donc ça c'est vraiment important.
11:25 Comment on installe ? Expliquez-moi.
11:27 Alors c'est une application.
11:28 Exactement.
11:29 C'est vrai que YouTube, je vais vous dire, on est très contents de vous avoir, mais
11:32 c'est un fléau pour les enfants à la fois.
11:35 Ce que je veux dire c'est que c'est une telle addiction d'avoir ces… il y a TikTok,
11:38 il y a YouTube, ces petites vidéos qui leur arrivent.
11:41 C'est important de distinguer YouTube des réseaux sociaux.
11:44 YouTube n'est pas un réseau social.
11:45 Vous n'avez pas de messagerie privée sur YouTube.
11:47 Vous avez plein de fonctionnalités que vous avez sur les réseaux que vous n'avez pas
11:52 sur YouTube.
11:53 Vous avez un temps long sur YouTube qui n'est pas… vous êtes dans une logique de l'intention.
11:57 Je reviens sur YouTube Kids.
11:59 Donc une application qu'on télécharge sur les stores, Android ou App Store.
12:05 Et là, vous avez une expérience qui est dédiée à l'usage pour les moins de 13
12:10 ans.
12:11 Ça commence par des contenus qui sont adaptés, donc dans le corpus de contenu, à ces âges-là.
12:16 Donc parce que c'est éducatif, parce que c'est qualitatif, parce que c'est positif,
12:20 par des règles d'usage, y compris dans le type de publicité.
12:23 On est encore plus strict dans nos règles publicitaires sur YouTube Kids que par exemple
12:29 les télévisions.
12:30 Et ensuite, le travail avec toutes les associations pour qu'elles puissent connaître ces outils,
12:36 aider les parents à avoir ces outils.
12:38 Je fais une dernière mention de l'outil Family Link qui est cet outil de contrôle
12:45 parental qui l'a peut-être plus adapté pour les ados, enfin pour les parents d'ados,
12:50 pouvoir minuter le temps passé, contrôler les applications, etc.
12:53 Ils sont très forts pour les contourner aussi.
12:55 L'autorité de régulation, l'ARCOM, préconise de ne pas exposer les enfants de moins de
13:01 3 ans à un écran et pas plus de 30 minutes par jour entre 3 et 8 ans.
13:06 Est-ce que c'est réaliste, Grégoire Borst ?
13:08 Je pense que c'est très très complexe dans le monde dans lequel on vit de pouvoir
13:13 mettre ça en place.
13:14 Pour autant, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas essayer effectivement de travailler
13:17 avec les parents, de travailler en fait sur l'éducation à la parentalité, parce que
13:20 c'est beaucoup plus dur d'être parent aujourd'hui que ça ne l'était il y a
13:22 20-30 ans, parce qu'il y a plein d'indéjacutions qui sont parfois paradoxales.
13:25 Il faut en même temps associer les enfants à la décision qui les concerne, c'est
13:32 le droit international qui dit ça.
13:34 Il faut en même temps réguler le temps d'écran.
13:36 Et puis en fait, la problématique, ce n'est pas tant la régulation du temps d'écran,
13:38 c'est la régulation des contenus.
13:39 C'est-à-dire qu'en fait, ce qu'on voit bien et qu'il faut qu'on sorte aujourd'hui
13:43 de ce discours sur uniquement le temps d'écran.
13:45 Le temps d'écran, ça va jouer globalement sur des problématiques somatiques.
13:48 Ça veut dire sédentarité, qualité du sommeil.
13:51 Ça, pour le coup, vous expliquez très bien que c'est très prouvé.
13:54 Plus d'écran, on dort mal, moins bien et moins.
14:00 Et donc, ça a des impacts sur tout le reste.
14:02 Parce que si vous dormez moins bien, ça joue sur la plasticité de votre cerveau, c'est-à-dire
14:05 votre capacité à apprendre.
14:06 Et donc, ça va avoir des effets sur vos apprentissages et sur votre santé mentale.
14:10 Parce que quand on dort peu, ça a aussi des incidences sur la santé mentale.
14:13 Donc là, il y a un enjeu.
14:14 C'est qu'effectivement, il faut qu'on arrive à préserver le sommeil des adolescents,
14:17 notamment parce qu'il y a des décalages de phase à l'adolescence qui font qu'ils
14:19 ne dorment pas du tout assez.
14:20 Mais ça a aussi des impacts sur la organisation de notre société.
14:23 On sait depuis 20 ans qu'il faut commencer deux heures plus tard les cours au collège
14:26 et au lycée et personne ne met ça en place.
14:27 Donc, il y a toute une infrastructure à changer.
14:30 Et la deuxième chose, c'est le contenu.
14:32 Alors, je sais bien, on en parlait juste avant l'émission.
14:34 Mais par exemple, sur YouTube Kids, c'est très bien de mettre le contenu journal sur
14:36 YouTube Kids.
14:37 Mais en fait, il faut le retirer de YouTube.
14:38 Si vous voulez que globalement, on puisse protéger efficacement les enfants, il faut
14:43 créer des bulles dans lesquelles le contenu qui les intéresse, il soit.
14:47 Et qu'il ne soit pas ailleurs.
14:48 Parce que sinon, en fait, ils font comme font tous nos enfants.
14:51 Ils prennent notre tablette sur laquelle on a créé un compte YouTube plus de 18 ans.
14:56 Et ils ont potentiellement exposé à des contenus non appropriés.
14:59 Je crois que vraiment, la question du contenu non approprié, c'est important.
15:01 Je prends un exemple sur YouTube, mais c'est vrai sur plein d'autres types de contenus.
15:05 Mais je dis simplement qu'il y a peut-être un enjeu du côté plateforme à se poser
15:08 la question d'une responsabilité de l'accès à des contenus non appropriés et que ce
15:12 n'est pas simplement toujours aux parents d'avoir la responsabilité de contrôler
15:15 ça.
15:16 - Je peux réagir ? - Oui, bien sûr.
15:18 - Tu es lyriste.
15:19 - Justine.
15:20 On en a parlé, mais bien sûr, cette responsabilité, on l'apprend, ça fait 20 ans qu'on existe
15:26 quasiment.
15:27 Donc on a parlé de YouTube Kids.
15:29 Quand on est mineur sur YouTube classique, on a par défaut tout ce paramétrage qui
15:34 va calibrer le type de contenu auquel on a accès.
15:36 Donc ça, c'est très important.
15:38 On s'est balise.
15:39 Comme vous le dites, c'est notre responsabilité.
15:40 Et encore une fois, on le prend très au sérieux.
15:43 C'est pour ça que ça fait deux décennies qu'on existe.
15:45 - Romain Salzman, on a dit ce chiffre-là, une heure et demie par jour pour un enfant
15:49 de 5 ans, ça c'est la moyenne française devant un écran.
15:52 Une heure et demie par jour.
15:53 Quand on passe au stade des adolescents, la moyenne, c'est 6 à 7 heures par jour, les
15:58 jours où ils n'ont pas d'école.
15:59 C'est-à-dire où ils regardent évidemment davantage le week-end.
16:02 Romain Salzman, le cœur de cible de Biril, ce sont les adolescents.
16:05 C'est eux qui regardent 70%, c'est les 14-24 ans.
16:08 Avec Biril, on est constamment sous le regard de l'autre.
16:11 Avec une injonction de se montrer tous les jours en faisant cette double photo quotidienne.
16:17 Est-ce que ça dit quelque chose ? Vous avez parlé des troubles du sommeil, on a vu une
16:21 autre enquête qui disait "attention les réseaux sociaux créent des troubles mentaux
16:26 chez les adolescents et chez les adolescentes, notamment sur leur apparence physique.
16:30 Nous empirons le rapport à son corps d'une adolescente sur 3 à cause des réseaux sociaux".
16:34 Qu'est-ce que vous avez à répondre sur ça, d'une application où il faut se montrer aussi ?
16:38 - J'ai à vous répondre qu'on est tout à fait d'accord avec vous et que c'est précisément
16:41 pour ça qu'on a créé Biril.
16:42 C'est-à-dire que ce qu'on voit sur les autres réseaux sociaux, notamment Instagram,
16:46 c'est que vous êtes incité à vous mettre en avant, à poster des photos de vous pour
16:49 récolter des likes.
16:50 Et c'est précisément ces dynamiques-là qui créent un rapport dysfonctionnel avec
16:54 la réalité et avec votre corps.
16:56 Et ce qu'on essaie de faire avec Biril, c'est précisément l'inverse.
16:58 C'est-à-dire d'encourager les gens à se montrer comme ils sont, authentiques, vulnérables
17:03 et la vie comme elle est, dans ces moments banals et dans ces moments formidables.
17:07 Et ce qu'on voit, et c'est assez intéressant, c'est que quand les gens commencent à utiliser
17:09 Biril, ils ont tendance à prendre leur Biril, à se trouver pas beau et à le reprendre
17:15 plusieurs fois.
17:16 Et en fait, on montre aux autres utilisateurs combien de fois vous avez repris votre Biril.
17:20 Donc si vous, Léa Salamé, vous reprenez votre Biril et vous trouvez "ah, pas très
17:22 joli, mais je vais en refaire un autre" et vous en refaites trois ou quatre, en fait
17:25 Nicolas Demorand pourra voir que vous avez fait quatre Birils.
17:27 Et donc c'est un peu nul de ma part.
17:29 Elle ne veut pas montrer la vérité des choses, elle s'optimise.
17:32 Exactement.
17:33 Et ce qui se passe avec le temps, et c'est un vrai sujet, c'est que Léa, en utilisant
17:39 Biril, va devenir de plus en plus réelle.
17:40 Et ce qu'on voit très concrètement, c'est qu'on voit nos utilisateurs, c'est qu'ils
17:44 commencent par prendre trois ou quatre fois leur Biril au début, et à la fin, ils le
17:47 prennent et ils le perdent.
17:48 Ils assument leur sacole.
17:49 Voilà, on est très conscients du problème et on essaie présidemment de le régler.
17:53 Allez, on passe au Standard Inter.
17:54 Bonjour Julie.
17:55 Oui, bonjour.
17:56 On vous écoute.
17:57 Oui, je vous appelle parce que je suis mère de famille et orthophoniste.
18:02 Et dans mon activité professionnelle, ça fait 20 ans que je suis orthophoniste, et
18:08 je dirais que depuis une dizaine d'années, je n'ai plus les mêmes enfants du tout.
18:11 J'ai des enfants extrêmement touchés, qui ont des troubles de langage, mais pas qu'eux,
18:18 qui ont des troubles qu'on caractérise aujourd'hui de troubles neurodéveloppementaux.
18:22 J'ai beaucoup d'enfants qui sont considérés comme handicapés parce qu'ils sont stimulés
18:29 par les écrans.
18:30 C'est une réalité, le terrain.
18:31 Je suis très documentée sur la question, je fais beaucoup de prévention.
18:37 Et aujourd'hui, ce que je souhaite, ce pourquoi je me lève le matin, c'est pour que les
18:42 parents reçoivent des messages clairs, pas des choses qu'ils ne comprennent pas.
18:49 Les parents pensent que, par exemple, les écrans c'est éducatif.
18:52 C'est faux.
18:53 Ce qui est éducatif pour leurs enfants, c'est eux, les parents.
18:56 Donc, il y a un phénomène qui est la technoférence, qui est le fait que le parent soit beaucoup
19:01 sur son propre écran.
19:02 Il n'y a pas que l'enfant qui consomme son écran.
19:05 Il y a aussi le parent.
19:07 Il faut que ce soit très clair.
19:08 Ce qu'il y a de mieux pour un enfant, c'est son parent, c'est l'interaction et c'est
19:13 du temps disponible pour jouer.
19:14 Donc, quand on parle de temps d'écran, bien entendu, ça impacte le sommeil, ça impacte
19:20 la mobilité, mais surtout ça prive l'enfant d'un temps d'expérimentation extrêmement
19:25 précieux.
19:26 Il faut que ce soit très clair pour les parents.
19:29 - Bien compris.
19:30 Merci Julie pour cette intervention.
19:32 Grégoire Bors te vous répond.
19:34 - La réponse, elle est simplement de dire qu'évidemment, on est tout à fait sensible
19:38 au fait de ce qui remonte du terrain et notamment des professionnels de santé, que ça permet
19:43 d'avoir des signaux faibles, de se dire peut-être qu'il y a une problématique de ce point
19:46 de vue-là.
19:47 Par contre, je vais corriger tout de suite ce qu'a dit cette personne.
19:51 Julie, il n'y a pas de lien entre l'exposition aux écrans et les troubles neurodéveloppementaux.
19:56 C'est impossible.
19:57 Un trouble neurodéveloppemental, c'est préexiste à toute consommation des écrans.
20:02 Pour autant...
20:03 - Est-ce que ça l'accroît ?
20:04 - Ça peut accroître les symptômes liés à ce trouble.
20:07 C'est qu'effectivement, si vous avez déjà des difficultés, mais par exemple, il n'y
20:09 a pas d'autisme virtuel, ça n'existe pas.
20:12 Il y a des troubles du spectre autistique et effectivement, la gravité de ces troubles
20:16 peuvent être plus ou moins modulés par le temps que vous passez devant des écrans.
20:18 Mais il faut être très clair là-dessus.
20:19 Il y a deux choses différentes.
20:20 Il y a des enfants dont le développement langagier peut être effectivement un peu
20:25 décalé du fait précisément de ce que Julie a très bien expliqué, c'est-à-dire qu'on
20:30 a besoin d'avoir des interactions avec des êtres humains pour apprendre le langage.
20:33 On a besoin d'avoir des interactions avec les êtres humains pour construire notre rapport
20:36 à l'autre.
20:37 Et effectivement, le fait que les parents utilisent des écrans et que les enfants utilisent
20:40 des écrans, ça prive cela.
20:41 - Mais n'y a-t-il pas un risque de créer ce que le chercheur Michel Desmergers appelle
20:45 un "crétin digital" ?
20:46 - Alors, j'aime beaucoup Michel Desmergers, mais d'une part, ça n'est absolument pas
20:50 un spécialiste du développement de l'enfant.
20:52 Il travaille sur les états de conscience chez les patients.
20:55 Et la deuxième chose, c'est que contrairement à ce qu'il dit, l'intelligence humaine n'a
20:58 pas diminué entre la génération des adolescents actuelles et notre génération des adolescents.
21:03 Elle a continué à augmenter.
21:04 Alors, je sais que ça paraît terrible à dire, mais en fait, nos ados sont plus intelligents
21:06 que nous.
21:07 - Il nous reste deux minutes.
21:08 Question courte, réponse très courte de notre appli Inter.
21:11 Alice, faut-il supprimer TikTok ?
21:13 - Je pense que la solution, ce n'est pas de supprimer, c'est de créer des alternatives
21:18 et de faire que les adolescents préfèrent les alternatives.
21:20 - YouTube, qu'est-ce qu'elle en dit de supprimer TikTok ?
21:24 - Il faut prendre ses responsabilités.
21:26 Et ses responsabilités, c'est baliser le terrain, protéger les jeunes audiences et
21:32 parfois moins, c'est mieux.
21:33 - Cyril, sur l'appli d'Inter, quelle est la différence entre les écrans et les vieux
21:37 qui regardent leur télé ?
21:38 - C'est globalement à peu près la même chose pour un certain nombre de domaines.
21:46 Mais par exemple, on sait que sur les réseaux sociaux, il y a quand même une vigilance
21:48 spécifique parce que ça peut avoir sur du long terme et sur des effets cumulatifs,
21:53 il y a des premières données qui commencent à sortir, qui montrent et qui suggèrent
21:55 qu'au bout de quatre ans d'utilisation, on peut avoir des effets non négligeables sur
21:58 la diminution des capacités attentionnelles.
22:00 - Enfin, dernière question, Florestan, moi c'est France Inter tous les jours, comment
22:04 réduire mon temps de radio ?
22:05 - Ne le faites pas !
22:06 - Surtout pas !
22:07 - Je peux dire un dernier mot à Julie ?
22:11 On a sorti un guide du numérique pour les familles, donc un guide de la parentalité
22:15 numérique avec les associations et notamment avec l'UNAF, l'Union Nationale des Associations
22:20 de Familles et l'OPEN, l'Observatoire de la Parentalité et de l'Éducation Numérique.
22:24 C'est sorti en un million d'exemplaires et on le mettra en ligne, je vous le laisse
22:27 ici.
22:28 Pour les parents, c'est en effet un guide très précieux.
22:31 - Merci à tous les trois.
22:32 Grégoire Borst, Justine Rist et Romain Salzman.
22:36 Merci encore d'avoir été à ce micro ce matin.

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