• il y a 8 mois
Les grands groupes s'intéressent tous à l'Intelligence artificielle générative (GenAI). Que ce soit pour gagner en efficacité sur des activités quotidiennes ou une analyse de données plus rapide, le secteur n'hésite pas à se saisir de ce tournant technologique. Selon Stéphane Bazoche, associé responsable de la practice santé chez Deloitte, le prochain défi pour ces entreprises sera d'intégrer l'IA directement au cœur de leurs processus de gestion.

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Transcription
00:00 [Générique]
00:04 Et pour nous accompagner, Emmanuel Frénéard. Bonjour Emmanuel.
00:07 Bonjour Stéphane.
00:08 En t-shirt comme tout grand éco ce qui se respecte quoi.
00:12 Exactement, mon t-shirt de l'IA.
00:14 Ah oui c'est vrai.
00:16 C'est ça, il y a un message sur le t-shirt, c'est pas juste un t-shirt.
00:19 Et il n'est pas un corporate qui prouve que Sanofi n'est plus une start-up
00:22 parce que si t'étais à la tête d'une start-up, t'aurais un truc corporate.
00:25 Il y a un petit logo Sanofi derrière.
00:27 Donc tu es vice-président exécutif, d'ailleurs c'est important Stéphane, tu vas insister là-dessus.
00:33 Tu es au COMEX, chief digital officer de Sanofi.
00:36 Et puis Stéphane Bazoche qui nous accompagnait déjà sur le premier numéro.
00:40 Stéphane, associé de l'Ouat, en charge de la practice santé.
00:44 Avant Stéphane que tu nous fasses un panorama de ce qui se joue en ce moment avec l'IA et avec l'industrie de la santé,
00:53 moi j'ai quand même une question au chief digital officer.
00:56 Sors-toi de Sanofi.
00:58 Donc ça fait quoi maintenant ? Un an et demi à peu près ?
01:02 La bombe Tchadjipiti ?
01:04 À peu près, oui.
01:06 Est-ce que pour toi ça a été une bombe ?
01:09 Et est-ce que vraiment, on va décrire ce qui se passe dans le secteur de la santé,
01:14 est-ce que c'est une rupture comme tu n'as peut-être jamais vue dans ta carrière ?
01:18 C'est une très bonne question. J'ai eu la chance de voir l'Internet.
01:21 Et d'être au début justement de l'Internet et d'avoir quelques ratés moi personnellement dans l'Internet.
01:27 Il y a un côté extrêmement ludique de ce qui est en train de se passer.
01:31 Moi je n'avais jamais expérimenté. L'Internet était un peu technique quand même au début.
01:34 Il fallait développer, il fallait inventer de nouveaux business models.
01:37 Là c'est à la portée de quasiment tout le monde.
01:39 Tu peux créer de la vidéo, tu peux créer du texte, tu peux traduire, tu peux...
01:43 À la portée de tout le monde. Et ça, ce côté ludique, pour moi il est unique.
01:47 Et c'est pour ça, est-ce que c'est une énorme rupture ?
01:50 Alors, le technologiste que je suis se dit oui. Parce qu'on a envie également.
01:54 On a envie de trouver une nouvelle rupture, quelque chose d'innovant.
01:57 Mais comme je vois que mes parents l'utilisent, je me dis que oui, ça a touché beaucoup plus de monde.
02:02 Et à une vélocité qu'on n'avait pas vue avant.
02:05 Donc il y a quelque chose. Il y a un mouvement, il y a un gros mouvement.
02:08 Plus qu'en fait la technique pure, c'est la capacité de diffusion dans l'ensemble de la population.
02:15 Finalement un petit peu comme le smartphone.
02:18 Créer la rupture, c'est davantage ça en fait.
02:21 En fait, on peut tous l'utiliser, demain.
02:23 On peut tous créer une photo, on peut tous créer du contenu, de la pub si tu voulais.
02:29 Demain, avec des outils qui sont à la portée de tous et qui sont très abordables.
02:34 Alors, on va rentrer justement dans le...
02:37 Non, parce que ce que tu dis aussi donne, et ça je sais que beaucoup de chefs d'entreprise aujourd'hui le partagent,
02:42 une forme de sentiment d'urgence.
02:45 Qu'est-ce que moi mes équipes sont en train de faire ?
02:48 Est-ce que je sais, mais on va en parler, est-ce que je sais ce qu'elles sont en train de faire ?
02:52 Il y a un mec dans son coin en Malaisie qui est en train d'inventer un truc de dingue.
02:55 Qu'est-ce que mes concurrents sont en train de faire ?
02:57 Est-ce que mes barrières à l'entrée sont toujours mes barrières à l'entrée ?
03:00 À partir du moment où effectivement il y a une capacité, une vitesse de diffusion qui est celle que tu viens de décrire.
03:06 Stéphane, qu'est-ce que Deloitte observe dans l'industrie ?
03:10 À ce moment-là on se resserre sur la pharma, j'imagine, autour de l'irruption de l'intelligence artificielle.
03:15 Nous effectivement, en tout cas ce qu'on observe, c'est une accélération très très forte de l'adoption de l'AI et de Gen AI dans l'industrie pharmaceutique.
03:23 Surtout ces 18 mois, avec des milliards d'euros investis par l'industrie pour aller plus loin, pour développer des modèles, développer des applications.
03:33 Et les enjeux sont faramineux puisque nous on estime que la valeur qui peut être créée par Gen AI s'élève à environ 10% du chiffre d'affaires de l'industrie.
03:43 De l'ensemble du secteur ?
03:44 Exactement, soit en termes de création de chiffre d'affaires supplémentaires, soit en termes de réduction de coût.
03:50 Donc des enjeux économiques très très importants pour l'industrie.
03:54 Et puis aussi un enjeu vital qui est d'être plus efficace, plus efficient pour la R&D.
04:02 Et ça c'est un enjeu absolument critique.
04:05 Il y a 10 ans, développer un médicament ça coûtait 1,3 milliard de dollars en moyenne.
04:11 Aujourd'hui c'est 2,3 milliards de dollars.
04:14 Donc ce coût qui explose c'est absolument pas tenable.
04:18 L'industrie doit absolument être capable de trouver des moyens d'être plus efficace, d'être plus rapide et Gen AI est un levier clé pour ça.
04:26 2,3 milliards de dollars tu nous dis c'est ça ?
04:29 2,3 milliards de dollars.
04:30 Sur 10-12 ans je crois ?
04:33 Sur 10-12 ans, dont la moitié en développement clinique.
04:38 Mais c'est marrant parce que j'ai vu ça encore très très récemment aux Etats-Unis,
04:42 où t'as encore un collectif qui a désossé un stylo injecteur pour de l'insuline et qui a dit ça vaut 3,50 euros.
04:49 C'est irréel quand même de prendre le truc comme ça, de prendre les composants, de dire ça vaut 3,50 euros.
04:56 Pourquoi est-ce que vous nous le vendez ? Je sais pas combien, 3,50 dollars, pourquoi est-ce que vous nous le vendez ?
05:00 Je sais pas combien, je crois que l'insuline est particulièrement chère et particulièrement aux Etats-Unis.
05:03 C'est dans la précédente émission de Smart Care où j'apprenais que 90% des profits de l'industrie pharmaceutique mondiale étaient faits aux Etats-Unis.
05:11 Je crois que c'était à peu près ça la proportion ?
05:13 Un petit peu moins mais une partie significative.
05:15 Une partie très significative.
05:16 Bon, Emmanuel, avant de rentrer dans le détail, quelle est la démarche ?
05:22 Vous prenez cette bombe, cette irruption technologique, quelle est la démarche ?
05:29 Comment est-ce qu'on travaille pour essayer de savoir, comme tu le dis, on peut le mettre absolument partout,
05:35 comment prioriser les investissements et définir les priorités ?
05:40 Alors, il y a des entreprises comme Deloitte qui ont un peu des formules pour aller chercher la valeur assez vite.
05:48 Ce qu'on a fait, nous, on a décidé de regarder la technologie et la valeur que l'on pouvait créer avec la technologie.
05:54 La technologie évolue très très vite, plus vite que même on a un peu du mal, nous, on y court un peu après.
05:59 Et on a cherché ce qu'on appelle des use cases, des domaines spécifiques où on peut appliquer cette technologie
06:07 pour accélérer certains process, le développement. Et on a été chercher à peu près, je dirais, une dizaine d'endroits spécifiques
06:18 entre la R&D, le manufacturing dans nos usines, mais également dans le commercial.
06:23 Je parlais de génération d'images, de contenus, on a fait de la pub, par exemple, pour...
06:27 On va redétailler tout ça. R&D, manufacturing, commercial.
06:30 On a cherché dans ces domaines et on s'est dit on a à peu près 10 domaines où on peut aller livrer de la valeur avec cette technologie
06:36 et qu'elle est prête. Parce que la technologie va continuer à évoluer. Il y a des choses qu'elle n'est pas capable de faire encore.
06:41 On va attendre, il y aura un GPT5, il y aura un GPT... On connaît ces cycles d'évolution.
06:47 Donc là où on peut l'utiliser aujourd'hui, et on a commencé déjà à le déployer. On a déployé, on déploie à partir de demain déjà dans nos usines des nouvelles...
06:55 Mais ça veut dire que la démarche, ça a été un comité, on va dire ça comme ça, qui regarde l'ensemble des process de Sanofi
07:04 et qui décide de définir des priorités. Dans d'autres grosses boîtes, on a été en mode révolution culturelle.
07:11 On a été en mode que 100 fleurs fleurissent et on verra bien ce qui arrive derrière.
07:16 On a clairement pris cette approche. Pourquoi ?
07:18 On a refusé de prendre cette approche, et délibérément. Et je pense que le conseil qu'on a reçu également de partenaires externes, c'est
07:25 de prendre une approche assez centralisée pour commencer. Donc on a créé une gouvernance plutôt stricte.
07:30 On avait une valeur à livrer. Il faut que ça livre de la valeur ou de la top line ou de la bottom line.
07:36 Mais il faut que ça livre de la valeur. Sinon justement il y a les 100 fleurs. Et 100 fleurs, malheureusement, ne fleurissent pas toutes.
07:42 Et on a pris des domaines où on était assez confiant qu'il y a une véritable valeur aujourd'hui que l'on peut réaliser vite pour Sanofi.
07:49 Et cette valeur n'est pas toujours d'efficience humaine, parce que c'est souvent le parallèle que l'on fait.
07:54 Pour nous, c'est d'aller plus vite sur la R&D. Stéphane vous parlait...
07:58 On va y aller, je reste sur la démarche. Le risque, c'est que tu rates quelque chose.
08:02 C'est vrai. C'est vrai, le risque, c'est qu'on rate quelque chose.
08:05 Mais parce qu'il le dit publiquement, par exemple, Patrick Pouyanné chez Total, alors tu vas me dire qu'il a les moyens, on est d'accord.
08:12 Il le dit lui-même d'ailleurs aussi. Mais démarche totalement inverse. Allez-y les gars.
08:17 Il va sortir des trucs qu'on n'est pas capable d'imaginer, donc allez-y.
08:21 Dans notre gouvernance, on a une représentation de toutes les fonctions de la boîte.
08:24 On a mis tout le monde dans la gouvernance. On a mis l'excom dans la gouvernance.
08:28 On a mis chaque fonction dans la gouvernance pour s'assurer qu'on était capable de voir toutes ces fleurs et de capturer celles qui avaient le plus de potentiel tout de suite.
08:38 Et ensuite, c'est vrai, on pourrait rater des choses, mais on est très confiant que sur les domaines sur lesquels on est,
08:43 on va livrer quelque chose qui va être matériel plutôt que potentiellement ces centaines de fleurs ou ces milliers de fleurs.
08:50 Stéphane, le risque, c'est de se disperser évidemment.
08:53 Et peut-être même de perdre en efficacité dans la mise en production, puisqu'on va y venir, des solutions qui peuvent émerger.
08:59 Nous, ce qu'on observe, c'est que les laboratoires qui sont plus en avance, y compris Sanofi, adoptent effectivement cette approche.
09:05 En fait, on observe trois étapes. Il y a eu une première étape qui était autour de comment je mets GenEye à disposition de mes employés sur des applications type bureautique.
09:18 Comment je gagne en efficacité sur des activités quotidiennes sur mon ordinateur.
09:25 Donc ça, c'est typiquement des applications type copilote.
09:29 Et puis l'industrie s'est vite rendue compte qu'en fait, ce n'était pas à l'industrie pharmaceutique de développer ce type d'application,
09:36 puisque d'autres acteurs comme Microsoft le font extrêmement bien et que ces applications deviennent généralisées, disponibles et très efficaces.
09:44 La deuxième étape, c'est vraiment ce que vient d'expliquer Emmanuel. C'est-à-dire qu'on identifie, on priorise des use case qui sont ceux qui sont le plus créateurs de valeur.
09:54 Parce que c'est des activités qui sont fortement consommatrices d'informations, de gros volumes d'informations qu'il faut synthétiser pour générer d'autres documents, générer des matériaux.
10:07 Et là, typiquement, Gen AI, c'est parfait pour ce type d'activité. Et donc là, il y a de la valeur très rapide à aller chercher.
10:14 Et donc là, c'est vraiment là qu'est l'industrie aujourd'hui sur la priorisation et le développement de ce type d'application et sa mise en œuvre qui commence aujourd'hui au sein des grands laboratoires pharmaceutiques.
10:26 Mais après, il va y avoir effectivement la troisième étape, qui est sans doute l'étape qui va prendre le plus de temps et qui va être la plus compliquée,
10:35 parce qu'il s'agit de transformer l'entreprise en regardant les processus en détail et en généralisant l'utilisation de Gen AI sur toutes les différentes étapes.
10:48 Et ça, ça demande potentiellement de revoir les organisations, les processus et potentiellement les compétences. Mais c'est là qu'on va aller chercher l'intégralité de la valeur de Gen AI.
10:58 On va y aller. Et moi, j'ai aujourd'hui des exemples précis d'entreprises qui en sont déjà là, mais de manière assez simple, comme tu dis, sur les...
11:07 En fait, c'est le légal, c'est les immenses bases de données pleines de mots à analyser et qui sont obligées de mettre le frein parce que ça va trop vite, justement,
11:17 et parce que tu ne sais pas comment tu peux gérer les people derrière. Mais alors, le premier élément, Stéphane, par quoi on commence si...
11:24 Emmanuel, par quoi on commence si on décrit ce que Sanofi est en train aujourd'hui de mettre en production ?
11:30 On a regardé 4 domaines, comme indiquait Stéphane, le domaine de la productivité humaine des employés. Ça, je vais le laisser parce que c'est des outils du style copilote.
11:39 Ensuite, on a regardé dans la R&D ce que l'on pourrait faire, dans les usines ce que l'on pourrait faire et dans la partie commerciale.
11:45 Alors, démarrons avec la R&D.
11:47 Alors, il y a beaucoup de... Je pense qu'il y a un a priori de se dire « Bon, on va utiliser l'IA générative pour le développement de nouvelles molécules ».
11:54 Et c'est vrai que ça a un potentiel, mais ce sont des cycles très longs. Donc, même si on la met en place pour aider potentiellement à développer des nouvelles protéines
12:04 ou à identifier des... C'est pas forcément là où on va voir la valeur tout de suite parce que c'est des cycles longs de développement.
12:10 Sur les choses du style définir un essai clinique, traduire des essais cliniques en plusieurs langues, ça va très vite.
12:16 Et c'est des documents qui font plus de 200 pages, qui prenaient des semaines et des semaines, qui maintenant...
12:21 – Et qui n'étaient pas automatisés avant...
12:23 – Qui n'étaient pas automatisés avant, qui avaient un fort input humain derrière et qui sont assez standardisés.
12:31 Alors, il y a des choses qui sont compliquées à faire avec l'IA quand même, il ne faut pas trivialiser.
12:35 De lire un graphique, une interprétation d'un test et de pouvoir traduire ça en texte, ça prend quand même du temps pour l'instant.
12:42 On n'est pas à 100%. Je dirais que sur nos grands chapitres R&D, on est à 65-70% d'ajout de vitesse alors qu'on souhaite 100%.
12:54 Mais c'est quand même colossal. On parle de... Nous, on a commencé il y a quelques mois.
12:58 En quelques mois, on a transformé certaines fonctions, et d'où l'impact que mentionnait Stéphane, avec une vitesse qu'on n'avait jamais vue avant.
13:06 Et quelles que soient les technologies qu'on utilisait avant, que ce soit le cloud, l'Internet, on n'a jamais vu quelque chose
13:12 où en quelques mois, on pouvait vraiment faire aussi vite, avoir des résultats aussi vite.
13:16 – J'imagine moi, puisqu'on va aller sur le commercial en tant que consommateur, je me suis aussi, basiquement,
13:20 sur le côté légal, notice d'utilisation, effet secondaire, l'ensemble de ces éléments-là peuvent être assez facilement, sans doute,
13:31 gérés par l'intelligence artificielle ?
13:33 – Tout à fait. Et je vous dirais même, sur le parti commercial, ce qui est intéressant pour nous,
13:37 c'est comment est-ce que l'on connecte avec les professionnels de santé d'une façon très individualisée.
13:42 Et notre industrie n'a jamais été à la pointe de ça. Là, maintenant, on peut devenir beaucoup plus à la pointe de ça.
13:49 Donc on est capable de faire des contenus qui sont engageants, qui sont multilingues tout de suite,
13:55 parce que ça, ça prenait du temps également de faire ça en multilingue, qui sont visuels.
14:00 On a fait des pubs pour notre Consumer Health Care, on a fait des pubs sur le transit intestinal avec l'IA générative.
14:06 Des pubs qui sont à mourir de rire, qui sont vraiment, parce qu'on s'est permis d'avoir un processus créatif.
14:13 – Rassure-moi, tu as encore des créateurs pour que ce soit à mourir de rire.
14:16 – Bien sûr, on a des créateurs. – Elle n'a pas d'humour a priori.
14:20 – Mais c'est marrant parce que quand vous jouez avec la température de chaque GPT, ce concept de température,
14:25 est-ce que vous voulez qu'elle soit conservatrice ou pas cette IA, plus vous ouvrez, plus la température est chaude et plus…
14:34 – Plus elle est capable de vous proposer des trucs de dingue.
14:36 – Elle est capable de vous proposer des choses qu'on n'avait pas pensées.
14:38 Donc des pubs qui sont vraiment à mourir de rire, que l'on essaye,
14:41 et qu'on essaye vraiment avec nos consommateurs pour voir si ça fonctionne.
14:45 – Industrie maintenant peut-être ? Dans le process de fabrication industrielle, je vois que le temps tourne très vite.
14:51 – Je pense que ce qui est très intéressant, c'est qu'on parle d'IA générative beaucoup,
14:54 mais nous on a également l'IA que l'on utilise, on l'appelle ça l'IA l'experte.
14:57 L'IA l'experte, on l'utilise dans les usines par exemple pour tout ce qui est déviation de fabrication.
15:01 Et maintenant on est capable de combiner deux IA, parce que c'est là où je pense que ça va devenir très puissant.
15:06 C'est qu'on a une IA qui fait la prédiction, qui se dit "attention il y a un dérapage dans la fabrication,
15:11 donc c'est une anomalie, je la reconnais, et je l'ai déjà vu dix fois cette anomalie, donc je sais comment la gérer".
15:17 Et ensuite il y a l'IA générative.
15:18 – Donc là on est proche de la maintenance prédictive, etc.
15:21 Et donc là on est sur des éléments qui ont quand même plusieurs années là.
15:24 – Tout à fait, mais là, quand il y avait une anomalie, il fallait la documenter.
15:28 Et donc là l'IA générative vient en complément de cette IA qui était prédictive,
15:32 pour dire "j'ai découvert une anomalie, je l'ai résolue parce que ça fait partie de mon cahier des charges,
15:37 qui est très bien défini, qui est supervisé par un humain.
15:40 J'ai informé un humain qui a eu cette anomalie, et en plus j'ai fait le document pour l'humain,
15:45 et donc l'humain va revoir, parce que c'est important que l'humain soit toujours dans la boucle de ce qu'on fait,
15:50 l'humain va revoir l'anomalie, va revoir le document qui documente l'anomalie,
15:54 et va dire "très bien, je signe, c'est bon, ça peut continuer".
15:57 Ça c'est quand même extraordinaire.
15:59 – Et un élément au cœur du process industriel lui-même,
16:04 c'est-à-dire qui t'accélère ton process industriel aujourd'hui ?
16:07 – Ça, c'est un exemple.
16:09 – C'est un exemple, puisque les anomalies, les déviations, des fois arrêtées…
16:12 Et donc on est nous en prod à partir d'aujourd'hui, sur 4 de nos plus gros sites,
16:17 avec cette IA générative qui va vraiment documenter les anomalies,
16:21 pour les faire ratifier par un humain.
16:24 Je rappelle que dans notre charte éthique de l'IA,
16:27 on a l'humain au cœur de tout ce qu'on en fait.
16:29 – C'est intéressant parce que l'exemple que j'ai en tête, c'est exactement sur le même sujet,
16:33 c'est un gros équipement IA aéronautique, et c'est en fait les pannes chez les clients,
16:38 qui sont là aussi quand même globalement…
16:41 Enfin, il y a un historique très puissant,
16:44 et là aussi il gagne énormément de temps à répondre aux clients
16:46 sur la façon d'adresser sa panne.
16:48 Tellement de temps, et c'est donc la question que je te pose,
16:51 qu'ils mettent le pied sur le frein,
16:53 parce que s'il y a beaucoup de monde, qui tout à coup n'a plus de travail.
16:58 Est-ce que c'est quelque chose qui est aujourd'hui d'ores et déjà dans ta réflexion ?
17:02 Et donc la gestion prévisionnelle des talents est déjà dans ta réflexion ?
17:08 Ou est-ce que c'est trop tôt, pour l'instant on fonce,
17:10 on voit où est l'efficacité et ensuite on réfléchira ?
17:13 – Alors l'humain est important, c'est essentiel.
17:16 On ne peut pas aller dans une démarche d'automatisation,
17:21 de simplification ou de modernisation sans avoir l'humain au cœur de la discussion.
17:25 Je suis un optimiste, donc je suis convaincu qu'on va avoir besoin de plus d'humains,
17:29 et que l'on va libérer de l'humain pour se centrer sur des tâches qui sont plus importantes,
17:34 et c'est là la puissance.
17:36 C'est pour ça que l'optimisme que j'ai me dit que ça va être très actif,
17:41 de pouvoir passer plus de temps sur des problématiques complexes,
17:45 d'analyser pourquoi on a des déviations, plutôt que d'être là,
17:48 "on a des déviations, je signe des déviations",
17:50 de pouvoir avoir le recul, se dire "mais pourquoi on a ces déviations, pourquoi elles reviennent ?"
17:54 Donc je suis convaincu que l'humain…
17:56 Tu l'as mentionné Stéphane, il y a quand même de la formation à faire.
18:00 Il va y avoir des changements de rôle.
18:03 On ne va pas rester dans une structure telle qu'elle est maintenant.
18:07 Et on est d'accord, ce n'est pas le change management de la digitalisation telle qu'on la connaît depuis 20 ans.
18:11 Je pense que c'est un autre change management.
18:13 Je pense qu'il y a une autre, et tu l'as mentionné, une autre vélocité derrière.
18:16 Mais il y a également une technicité qu'il va falloir apprendre,
18:19 je ne sais pas ce que tu en penses,
18:21 mais il va falloir monter le niveau de nos collaborateurs en technicité,
18:24 pour utiliser les outils, plutôt que d'être le frein sur les outils,
18:28 de les utiliser et de mieux les incorporer dans leur quotidien.
18:30 Ce n'est pas toujours évident.
18:32 Stéphane, comment est-ce que tu vois ça ?
18:34 Oui, je suis d'accord.
18:35 Et puis, quand même pour certaines activités, effectivement,
18:38 on aura besoin de moins de personnes qu'il faudra utiliser pour faire d'autres activités
18:41 qui vont se développer pour gérer la croissance.
18:44 Et tout ça, ça demande…
18:45 Il y a un petit hiatus entre la vitesse de développement que vous décrivez là,
18:48 et puis, nous, notre vitesse de formation…
18:51 C'est une vraie transformation.
18:52 C'est une vraie transformation, et qui est beaucoup plus rapide, en tout cas,
18:55 qui s'initie beaucoup plus rapidement que la fameuse transformation digitale
19:01 qu'on observe depuis 10 ans, 15 ans, 20 ans.
19:04 Ce n'est pas le passage au cloud.
19:06 Des médicaments plus efficaces ?
19:08 On espère des médicaments plus efficaces.
19:11 Il y a un exemple, peut-être, il y a trois mois,
19:14 on a annoncé la découverte d'une nouvelle classe d'antibiotiques
19:18 qui permettrait de traiter les infections au staphylocoque doré.
19:23 Staphylocoque doré, c'est 15 000 décès chaque année en France,
19:27 1 million dans le monde,
19:28 et une infection qui est extrêmement résistante aux antibiotiques.
19:31 Donc, grâce à l'IA, en analysant 40 000 composés potentiels,
19:36 on a découvert un composé qui pourrait traiter l'infection au staphylocoque doré.
19:40 Donc, plus d'efficacité potentiellement.
19:43 Tu confirmes ça ? Plus d'efficacité ?
19:45 On est en train de partir sur une médecine plus de précision, également.
19:49 Et donc, dans cette médecine de précision, il y aura plus de médicaments,
19:52 parce qu'ils vont être plus adaptés à l'individu.
19:55 Donc, oui, il y a plus d'efficacité,
19:57 mais je pense qu'il y aura également plus de variantes de médicaments,
20:00 ce qu'on ne pouvait pas faire avant.
20:01 Tu vas avoir une sorte de molécule reine,
20:03 et ensuite, la capacité, justement, des systèmes d'intelligence artificielle
20:06 à l'adapter à des individus bien précis,
20:09 ce qui est d'ailleurs un des grands sujets pour toi,
20:11 de l'industrie pharmaceutique aujourd'hui.
20:13 Stéphane, on en parlait d'ailleurs à la précédente émission.
20:17 Des médicaments moins chers ?
20:19 Des médicaments moins chers ?
20:21 Parce que ce sujet-là, il est...
20:23 Alors, moins ici, en France,
20:27 parce qu'on ne se rend pas compte,
20:29 enfin, on dit que c'est l'État qui paye.
20:31 Enfin, bon, bref, je referme la parenthèse.
20:33 Aux États-Unis, tu le sais, tu y as vécu,
20:36 c'était au cœur de la précédente campagne électorale de Trump.
20:39 Ça va être encore au cœur de cette campagne électorale.
20:43 Est-ce que, là aussi, l'IA peut apporter des choses significativement nouvelles ?
20:48 À partir du moment où l'IA peut nous aider à réduire le temps de développement
20:53 qui y va de la recherche jusqu'au développement des zécliniques,
20:58 oui, il y a un moindre coût.
21:00 Le problème actuel, c'est que ce coût, il est porté par la durée,
21:04 une durée qui s'est allongée dans le temps.
21:07 Je suis convaincu qu'on peut réduire cette durée,
21:09 donc des médicaments qui sortiront, qui coûteront moins cher.
21:12 Stéphane ?
21:13 C'est intéressant, parce qu'effectivement, je pense que l'avenir, c'est du Genii,
21:17 partout, dans tout, dans l'industrie.
21:20 Alors, ça va prendre un certain temps,
21:22 mais ça va permettre, effectivement, aux laboratoires pharmaceutiques
21:25 d'être beaucoup plus lean,
21:27 de développer des médicaments pour moins d'argent, moins cher,
21:31 de les commercialiser plus efficacement,
21:34 avec des business models plus lean également,
21:36 et ça, ça va permettre d'aborder,
21:38 de résoudre un certain nombre de défis de l'industrie.
21:41 Il y a le premier défi, qui est le défi que je mentionnais tout à l'heure,
21:44 qui est le coût de la R&D, qui est très important,
21:46 et du coup, la difficulté du retour sur investissement,
21:49 de cet investissement en R&D.
21:51 Le deuxième défi, c'est celui que tu as mentionné,
21:53 c'est la pression sur les prix et les budgets alloués aux médicaments,
21:57 aux US et en Europe, mais surtout aux US,
22:00 avec notamment l'Inflation Reduction Act de Joe Biden,
22:03 et puis cette incertitude sur ce que va faire le prochain président,
22:07 quel qu'il soit.
22:09 Et le troisième défi, tu as aussi commencé à le mentionner,
22:12 c'est comment on fait...
22:14 - Je suis en train de penser, s'il y a un truc qui à la fin résistera à l'intelligence artificielle,
22:18 c'est peut-être Donald Trump, en fait.
22:20 Pardon, je ne sais pas.
22:22 - Peut-être, peut-être. Le troisième défi, c'est comment on fait
22:24 pour faire en sorte que 85% de la population mondiale
22:28 qui vit dans les pays à revenus faibles et modérés
22:31 ait un accès plus facile à l'innovation.
22:34 Et ça, effectivement,
22:36 Geneai pourrait nous aider en tout cas à résoudre ces défis
22:40 ou en tout cas être dans une meilleure position pour les aborder.
22:43 - Ils contribuent en tout cas. - Oui, ils contribuent.
22:45 Et c'est vrai qu'on se dit bien qu'en termes de standardisation de la production,
22:49 d'éléments comme ça, pour, après, on va dire, les tout premiers brevets,
22:54 faire baisser les coûts de manière drastique,
22:56 là, sans doute, l'intelligence artificielle peut apporter beaucoup de choses.
23:00 Dernier élément quand même dont il faut qu'on parle, Emmanuel,
23:03 c'est l'élément de souveraineté aujourd'hui pour l'entreprise.
23:07 Qu'est-ce que tu partages ? Qu'est-ce que tu ne partages pas ?
23:10 Comment est-ce que ça se passe avec les autres gros laboratoires,
23:16 avec tes concurrents, et néanmoins...
23:19 - Mais sûr, on a tous le même objectif.
23:22 - Voilà, c'est ça, vous avez tous quand même le même objectif.
23:24 - La même mission. - Voilà, quand on n'est pas complotiste,
23:26 l'idée, c'est quand même d'essayer de soigner les gens.
23:28 - Accélérer la qualité de la vie des gens.
23:30 Alors, ce qu'on aimerait, nous, pouvoir partager,
23:32 puisque l'on est dans des cycles de développement qui vont être accélérés potentiellement
23:36 de plus en plus d'indications, si tu veux,
23:38 donc les médicaments vont partir sur plus d'indications,
23:40 c'est est-ce qu'on pourrait partager d'une façon transparente la toxicité
23:46 quand on évalue sur les traitements.
23:48 Donc, quand on développe un traitement, la première chose que l'on va regarder,
23:51 c'est la toxicité, même avant l'efficacité.
23:53 On veut s'assurer qu'on ne fait de mal à personne.
23:56 Et de pouvoir partager ça sur des nouvelles méthodes,
23:58 des nouvelles plateformes, des nouvelles molécules,
24:01 pouvoir partager ça d'une façon anonyme avec les autres laboratoires,
24:03 c'est quelque chose qui est vraiment à cœur de ce qu'on souhaite faire dans ces démarches,
24:07 parce que justement, l'IA va nous permettre d'accélérer les choses
24:10 et on voudrait surtout que personne ne se trompe.
24:12 Donc, de pouvoir partager des choses comme ça, je pense que tout le monde y gagne.
24:17 - La vitesse pourrait amener à minimiser les risques.
24:21 - Exactement.
24:22 Donc, transparence plus vitesse pour minimiser les risques vers le patient,
24:26 c'est l'objectif pour nous.
24:27 - Stéphane ?
24:28 - Une vraie transformation pour le bénéfice du patient
24:33 et pour plus d'innovation qui est accessible à plus de monde.
24:36 - Mais sur le partage, sur l'idée, justement,
24:40 qui est compliquée à définir pour toutes les boîtes aujourd'hui,
24:42 ne serait-ce que dans les différents modèles que proposent aujourd'hui
24:47 Open AI et d'autres boîtes d'intelligence artificielle.
24:51 Qu'est-ce que je garde pour moi, vraiment pour moi ?
24:53 Je m'assure d'ailleurs que ça ne se barre pas.
24:55 Qu'est-ce que je laisse partir ?
24:56 C'est toujours un équilibre aujourd'hui qui est difficile à trouver.
24:59 - Un équilibre qui est difficile à trouver.
25:01 Et puis, qui détient la donnée ?
25:02 C'est quand même ça la question, effectivement.
25:04 - On en revient toujours là.
25:05 [Rires]
25:07 Depuis tes premières heures d'Internet, on en revient toujours à qui détient la donnée.
25:11 Non, je retiens juste pour finir, Emmanuel.
25:13 Tu es enthousiaste.
25:14 - Très enthousiaste.
25:15 - Mais n'ayez pas peur.
25:17 - Il y a énormément de chance d'être là.
25:19 C'est un moment, je pense, qui va être inoubliable pour nous tous.
25:23 De faire partie de la génération qui a découvert l'IA générative
25:27 et qui va pouvoir l'exploiter, pour moi, c'est un cadeau.
25:31 - Et tu dirais c'est quoi ? C'est l'électricité ?
25:34 - Je ne sais pas si c'est l'électricité,
25:35 parce que je pense que c'est quand même un pouvoir transformationnel encore supérieur.
25:39 Mais je reviens, c'est l'Internet pour moi.
25:41 Ou le smartphone.
25:42 C'est quelque chose comme ça.
25:44 - Et c'est, au sens plus large, mais on est au bout de cette émission,
25:48 on est dans des sociétés qui s'interrogent beaucoup aujourd'hui
25:51 sur leur modèle de croissance, sur leurs projets,
25:54 sur les rêves qu'elles peuvent encore générer.
25:57 Il y a là pour toi quelque chose de puissant là-dessus ?
25:59 - Je pense que c'est très démocratisant.
26:00 Tout le monde peut lancer un nouveau business model demain,
26:02 alors qu'il y avait une certaine technicité qui était requise
26:05 pour pouvoir lancer de nouveaux business models.
26:07 Le cloud n'est pas forcément facile.
26:09 Là, je pense qu'on a vraiment mis à portée de main une des technologies.
26:13 J'ai hâte de voir ce qu'il va se passer en Afrique,
26:16 ce qu'il va se passer en Asie du Sud-Est,
26:18 où j'ai habité, dans des pays encore en voie de développement,
26:21 comment ils vont pouvoir l'exploiter et nous surprendre.
26:24 - Mais l'Europe a encore une carte à jouer.
26:25 - L'Europe a une carte à jouer.
26:26 - Tout vient des États-Unis quand même, une nouvelle fois.
26:28 - Je suis moyennement d'accord en fait.
26:30 Il y a eu une innovation américaine, c'est vrai,
26:32 mais il y a un modèle d'innovation américain qui est plus porteur que le nôtre.
26:36 C'est plus facile d'avoir du capital aux États-Unis,
26:39 c'est plus facile de lancer des projets aux États-Unis.
26:41 Donc à nous également de favoriser ça,
26:43 d'être un peu plus ouvert et pas forcément vieille garde.
26:46 Mais il y a une forte innovation en Europe
26:49 et en France, sur le domaine de la santé, il y a une très forte innovation.
26:52 - Stéphane, un mot ?
26:54 - L'industrie pharmaceutique européenne, en tout cas,
26:56 n'a pas à rougir de là où elle en est aujourd'hui sur Gen Y.
26:59 - Et aborder tout ça avec enthousiasme.
27:01 Merci messieurs.
27:02 - Merci.
27:03 - Et merci à vous de nous avoir suivis
27:05 et d'avoir suivi ce nouveau numéro de Smart Care,
27:07 en partenariat avec Deloitte.

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