• il y a 6 mois
Le président de la République a dévoilé ce jeudi 25 avril sa vision d’une « Europe puissance », à un peu plus d’un mois des élections européennes. Durant 1h45, Emmanuel Macron a égréné les grands défis du continent.
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Transcription
00:00:00Monsieur le Préfet de région,
00:00:03Madame la maire, monsieur le recteur,
00:00:05mesdames et messieurs les ambassadrices et ambassadeurs,
00:00:09mesdames et messieurs en vos grades et qualités,
00:00:137 ans après le discours de la Sorbonne,
00:00:16je souhaitais venir ici, dans ce même lieu,
00:00:19pour renouer le fil de nos accomplissements
00:00:21et parler de notre avenir.
00:00:24Notre avenir européen,
00:00:26mais par définition l'avenir de la France.
00:00:29Ils sont indissociables.
00:00:32Ici même, en septembre 2017,
00:00:34je disais que notre Europe, trop souvent,
00:00:37ne voulait plus, ne proposait plus,
00:00:40par lassitude ou par conformisme,
00:00:43et l'esprit européen était livré à ceux qui l'attaquaient.
00:00:48Nous proposions alors de bâtir une Europe plus unie,
00:00:51plus souveraine, plus démocratique,
00:00:54plus unie pour peser face aux autres puissances
00:00:57et aux transitions du siècle,
00:00:59plus souveraine pour ne pas se faire imposer
00:01:01par d'autres son destin, ses valeurs,
00:01:03ses modes de vie, plus démocratique
00:01:06parce que l'Europe est cette terre
00:01:09où est née la démocratie libérale
00:01:11et où les peuples décident par eux-mêmes.
00:01:15J'avais alors fixé un horizon comme rendez-vous,
00:01:187 ans, nous y voilà.
00:01:20Alors, nous n'avons pas tout réussi,
00:01:23et il faut être lucide, en particulier
00:01:26lorsque vous souhaitez rendre notre Europe plus démocratique,
00:01:31il faut bien le constater,
00:01:34les avancées ont été limitées sur ce point,
00:01:36parfois par frilosité de changer les traités,
00:01:39de changer nos règles, notre organisation collective,
00:01:42et même s'il y a eu quelques innovations en la matière,
00:01:45conventions importantes et des réflexions menées,
00:01:47nous ne sommes pas allés assez loin.
00:01:49Mais il y a eu des réussites, en particulier en matière
00:01:52d'unité et de souveraineté, ce qui n'était pas acquis.
00:01:57L'Europe a traversé des crises,
00:01:59elles aussi inédites dans cette période.
00:02:01Le Brexit, bien sûr,
00:02:04une déflagration dont on a vu depuis les effets délétères,
00:02:08et ce qui fait, j'ai pu le constater,
00:02:09qu'aujourd'hui, plus personne n'ose tellement
00:02:13proposer des sorties ni de l'Europe ni de l'euro.
00:02:16La pandémie mondiale,
00:02:18retour soudain de la mort dans nos vies,
00:02:20la guerre en Ukraine,
00:02:22retour du tragique dans le quotidien,
00:02:25et risques existentiels sur notre continent.
00:02:30Mais malgré cela,
00:02:33et dans un contexte qui a toujours été,
00:02:35durant ces dernières années,
00:02:36d'accélération des transitions environnementales
00:02:39et technologiques qui rebattent en profondeur
00:02:42les cartes de notre manière de vivre, de produire,
00:02:47notre Europe a décidé, elle a avancé,
00:02:50et ce concept qui pouvait sembler, il y a 7 ans,
00:02:53étant très français, de souveraineté,
00:02:56s'est progressivement imposé en européen.
00:03:00Et malgré cette conjonction inédite de crise,
00:03:06rarement l'Europe n'aura autant avancé,
00:03:09ce qui est le fruit de notre travail collectif.
00:03:14Et ce, à travers quelques pas,
00:03:19que je crois historiques,
00:03:20que nous avons accomplis ces dernières années.
00:03:22D'abord, le choix de l'unité financière
00:03:24pour sortir de la pandémie.
00:03:26Je veux essayer de rappeler, parce que rien n'était dit
00:03:29sur ce sujet, évidemment, avant que la pandémie n'arrive,
00:03:33mais lorsque nous proposions aux Français
00:03:35une capacité d'endettement commun,
00:03:36on disait, là aussi, belle idée française, formidable,
00:03:39mais ça n'arrivera jamais.
00:03:41Eh bien, nous avons su d'abord bâtir
00:03:42un accord franco-allemand quelques semaines
00:03:44après le début de la pandémie.
00:03:46Puis, nous l'avons en européen porté
00:03:49pour lever 800 milliards d'euros.
00:03:52Ce pas franchi de l'endettement commun,
00:03:56par lui-même, a été ce que, à l'époque,
00:03:58le ministre des Finances Scholz,
00:04:01devenant ensuite chancelier, a appelé un moment Hamiltonien,
00:04:03à juste titre.
00:04:05Mais c'est un choix d'une Europe unie
00:04:09dont nous avons, partout sur nos départements,
00:04:13dans nos communes, vu les conséquences directes.
00:04:16Grâce à ce que nous avons fait en européen,
00:04:17nous avons pu porter des projets de relance,
00:04:20des soutiens à nos entreprises,
00:04:22et les PME, partout dans notre pays,
00:04:24ont pu en avoir les fruits.
00:04:29Second choix décisif,
00:04:31ça a été le choix de l'unité stratégique
00:04:34sur des sujets qui, jusque-là, étaient restés
00:04:36du seul ressort des nations.
00:04:39La santé.
00:04:40Le commissaire Breton est là, qui s'en souvient,
00:04:42lui, qui a piloté, avec la présidente de la commission
00:04:45et sa collègue en charge de la santé,
00:04:47une politique qui n'existait pas,
00:04:48qui n'était pas prévue dans les textes.
00:04:52Produire des vaccins en européen,
00:04:54sécuriser les approvisionnements
00:04:56et les distribuer partout en Europe.
00:04:58Nous l'avons fait.
00:05:00Et si la France a pu vacciner dès le début de l'année 2021,
00:05:04c'est parce qu'il y a eu ce réflexe européen
00:05:07et cette capacité à bâtir cette politique
00:05:09qui, pourtant, n'existait pas dans nos textes.
00:05:11Nous ne produisions pas le dit vaccin sur notre sol,
00:05:15nous, Français.
00:05:16Ayons l'humilité de le reconnaître.
00:05:18C'est par l'Europe et ce sursaut que nous avons su avancer.
00:05:22De la même manière, sur l'énergie,
00:05:24qui aurait cru que nous pourrions nous défaire
00:05:25de notre dépendance aux hydrocarbures russes,
00:05:28acheter en commun et réformer si vite
00:05:30notre marché de l'électricité ?
00:05:33Et la défense ?
00:05:34Qui aurait parié sur l'unité européenne
00:05:36dès le 1er jour de l'agression russe en Ukraine
00:05:39et sur un soutien militaire massif de l'Union européenne ?
00:05:42Et nous l'avons fait.
00:05:45Le 3e pas décisif de ces dernières années,
00:05:48c'est que nous avons commencé à jeter les bases
00:05:50d'une plus grande souveraineté technologique et industrielle.
00:05:55Aucune zone du monde que l'Europe
00:05:58n'aurait accepté autant que nous de dépendre des autres
00:06:02sur des produits vitaux, des composants essentiels.
00:06:05Dès 2018, nous avons lancé une initiative avec l'Allemagne
00:06:08pour soutenir notre filière de batteries,
00:06:12étendue ensuite à l'hydrogène, à l'électronique
00:06:14ou encore la santé.
00:06:16Nous avons aussi lancé avec l'Allemagne
00:06:18des grands projets, le char du futur,
00:06:20le système de combat aérien du futur
00:06:23et avec nos amis néerlandais sur les sous-marins,
00:06:26là aussi, des initiatives structurantes.
00:06:30Mais dès le moment de la pandémie
00:06:32et surtout dès les premières semaines
00:06:34après l'agression russe contre l'Ukraine,
00:06:37nous avons bâti, lors du sommet de Versailles,
00:06:41une vraie stratégie d'autonomie.
00:06:44Oui, cette autonomie stratégique dont on a à ce moment-là parlé,
00:06:47assumant ce concept en européen,
00:06:50c'est ce choix de mettre fin à nos dépendances stratégiques
00:06:52dans des secteurs clés,
00:06:54des semi-conducteurs aux matières premières critiques.
00:06:58Des textes européens ont été pris,
00:07:00une politique a été assumée,
00:07:02d'investissement, de sécurisation, de relocalisation,
00:07:06ce qui était inédit dans notre histoire contemporaine.
00:07:09Et depuis 7 ans, l'Europe a commencé à sortir
00:07:11de cette naïveté, si je puis dire,
00:07:15technologique et industrielle,
00:07:16comme elle a commencé aussi à corriger
00:07:19sa politique commerciale,
00:07:21même si, sur ce sujet, j'y reviendrai,
00:07:23nous ne sommes, à mes yeux, qu'à mi-chemin.
00:07:28Le 4e pas décisif des dernières années,
00:07:32c'est que nous avons fait le choix fondamental
00:07:34et, je crois, unique de penser, préparer et planifier
00:07:38les grands défis de l'Europe.
00:07:40On a beaucoup entendu critiquer,
00:07:43en particulier le Green Deal qui a été pris.
00:07:46Pardon de cet anglicisme dans ce lieu.
00:07:49Mais l'Europe est le seul espace politique au monde
00:07:56qui a planifié ces transitions.
00:07:58Et en prenant des directives sur le numérique
00:08:01qui permettent de réguler à la fois le contenu et le marché,
00:08:05et en prenant un texte qui permet de poser les jalons
00:08:08de notre transition énergétique,
00:08:10et, en quelque sorte, de construire la cohérence
00:08:12de notre politique en européen
00:08:14par rapport à nos engagements internationaux.
00:08:16Nous avons construit un choix en transparence.
00:08:21Simplement, maintenant, il nous faut prévoir
00:08:22les flexibilités d'application dans chaque pays
00:08:25et surtout la politique d'investissement qui va avec.
00:08:28Mais nous avons posé une planification européenne
00:08:32de ces transitions.
00:08:34Là où, partout dans le reste du monde,
00:08:36des grandes puissances ont pris des engagements,
00:08:38mais n'ont pas commencé à expliquer
00:08:39comment elles allaient les respecter.
00:08:42Et donc, ce sont là des socles qu'il faut voir
00:08:46comme des jalons maintenant stables,
00:08:49et je reviendrai tout à l'heure sur la manière de les articuler
00:08:51pour qu'ils puissent être compatibles
00:08:53avec une politique de croissance, de plein emploi
00:08:56et de développement industriel.
00:08:59Le cinquième pas décisif de ces dernières années,
00:09:02c'est que l'Europe a commencé à réaffirmer clairement
00:09:06l'existence de ses frontières.
00:09:09L'Europe est une idée généreuse,
00:09:10fondée sur la libre circulation des personnes et des biens.
00:09:13Parfois, elle avait oublié d'assumer et de protéger
00:09:15ses frontières extérieures.
00:09:19Non les frontières comme forteresses étanches,
00:09:21mais comme limites entre un dedans et un dehors.
00:09:24Et il n'y a pas de souveraineté s'il n'y a pas de frontières.
00:09:28Et nous avons, ce faisant, malgré les divisions
00:09:32qui avaient bloqué depuis près de 10 ans
00:09:34nos avancées en la matière,
00:09:36conçu en particulier durant la présidence française
00:09:40un 1er accord sur l'asile et l'immigration
00:09:45qui vient d'être adopté, et je remercie l'ensemble
00:09:49de tous ceux qui l'ont rendu possible,
00:09:51mais qui, pour la 1re fois, permet d'améliorer la maîtrise
00:09:54de nos frontières en instaurant des procédures obligatoires
00:09:58d'enregistrement et de filtrage systématique
00:10:00à nos frontières extérieures pour identifier
00:10:03ceux qui sont éligibles à une protection internationale
00:10:05et ceux qui devront retourner dans leur pays d'origine
00:10:07et améliorer les coopérations au sein de notre Europe.
00:10:12C'est un acquis essentiel des dernières années.
00:10:15Et puis, le 6e avancé, c'est que nous avons commencé
00:10:19à repenser notre géographie dans les limites
00:10:22de notre voisinage.
00:10:25L'Europe se pense désormais comme un ensemble cohérent
00:10:28après l'agression russe en affirmant que l'Ukraine
00:10:30et la Moldavie font partie de notre famille européenne
00:10:33et ont vocation à rejoindre l'Union le moment venu,
00:10:36comme les Balkans occidentaux.
00:10:39Je l'ai dit l'an dernier à Bratislava,
00:10:40il nous revient d'assurer leur ancrage européen,
00:10:42de soutenir dès maintenant les réformes nécessaires
00:10:45pour préparer ce chemin qui n'existe que
00:10:48s'ils intègrent l'acquis communautaire
00:10:51et de réformer en parallèle notre Union,
00:10:54qui ne peut s'élargir que si elle se réforme en profondeur
00:10:57et se simplifie.
00:10:59Nous avons aussi pensé pour la 1re fois nos liens avec tous
00:11:03à l'échelle du continent,
00:11:04avec la communauté politique européenne.
00:11:07Cette initiative que nous avons proposée en mai 2022
00:11:10permet précisément d'aller au-delà du cadre A27
00:11:14et de penser notre Europe, de nos amis britanniques
00:11:18à la Norvège en passant jusqu'aux Balkans occidentaux
00:11:21et à l'échelle du continent
00:11:23sur une maille qui est signifiante géographiquement,
00:11:27de commencer à bâtir des coopérations concrètes.
00:11:33Depuis 2017, tout ça a été possible grâce à l'engagement
00:11:36et l'action de beaucoup qui sont aujourd'hui dans cette salle.
00:11:40Je veux saluer le travail des ministres successifs,
00:11:45des administrations, de l'ensemble des équipes
00:11:47qui ont en particulier permis le succès
00:11:49de cette présidence française du 1er semestre 2022,
00:11:52mais remercier aussi l'ensemble des collègues européens
00:11:55qui ont porté cette ambition,
00:11:57nos parlementaires européens qui l'ont voté
00:12:00et le travail ardent de la Commission
00:12:02durant ces dernières années.
00:12:04C'est un travail collectif que je viens ici
00:12:09de manière très synthétique de retracer,
00:12:10mais qui a fait que ce concept qui paraissait étrange
00:12:14de souveraineté s'est progressivement imposé
00:12:17et que, oui, l'Europe a été au rendez-vous de ces défis
00:12:19durant ces 7 dernières années.
00:12:21Nous l'avons fait aussi avec une méthode
00:12:23sans doute différente.
00:12:26Qui n'a pas été qu'une méthode bruxelloise,
00:12:29si je puis utiliser cette formule.
00:12:31J'ai souhaité me rendre dans toutes les capitales européennes
00:12:33durant mon 1er mandat, toutes, sans exception.
00:12:37Et nous avons aussi bâti des liens particuliers,
00:12:40resserré nos liens avec l'Allemagne
00:12:42par le traité d'Aix-la-Chapelle,
00:12:43avec l'Italie par le traité du Quirinal,
00:12:46avec l'Espagne par le traité de Barcelone
00:12:48et demain avec la Pologne, là aussi, par un nouveau traité.
00:12:51Déployer une politique entre égaux,
00:12:56réengager avec nos partenaires d'Europe centrale et orientale,
00:13:00permettre aussi d'engager un dialogue nouveau
00:13:03et des formats dits Weimar à celui du Med9,
00:13:07essayer d'avoir cette géographie, si je puis dire, multiple,
00:13:11qui crée des sympathies, des affinités particulières
00:13:14au sein de cette Europe,
00:13:15mais de proche en proche, lui permet d'avancer.
00:13:20Et donc, oui, nous avons, ces dernières années, beaucoup fait.
00:13:25Alors, sans cette action, sans ces progrès
00:13:27de la souveraineté et de l'unité européenne,
00:13:30sans doute aurions-nous été dépassés par l'histoire.
00:13:34Et d'ailleurs, si nous avions réagi
00:13:37comme nous l'avions fait au moment de la crise financière,
00:13:40la situation serait dramatique.
00:13:43La crise financière, nous l'avions abordée divisée
00:13:46et en étant peu souverain.
00:13:48Et c'est pour ça que nous avons mis,
00:13:50oserais-je dire, 4 à 5 ans à la régler
00:13:53quand elle l'a été en moins d'un an aux Etats-Unis d'Amérique,
00:13:56d'où elle venait.
00:13:58Les crises que nous avons vécues,
00:14:00nous y avons réagi vite, de manière unie,
00:14:03ce qui nous permet aujourd'hui de nous tenir ensemble
00:14:06et d'être là.
00:14:07Pour autant, est-ce suffisant ?
00:14:10Est-ce que je peux me présenter devant vous
00:14:12avec un discours de satisfait quitte,
00:14:14en disant, voilà, nous avons tout bien fait,
00:14:16formidable, l'Europe est forte, allons-y, on continue ?
00:14:21La lucidité et l'honnêteté commandent de reconnaître
00:14:23que la bataille n'est pas encore gagnée, loin de là,
00:14:28et qu'à l'horizon de la prochaine décennie,
00:14:30parce que c'est cet horizon-là qu'il nous faut saisir,
00:14:33le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué,
00:14:40parce que nous sommes dans un moment inédit
00:14:42de bouleversement du monde,
00:14:43d'accélération de grandes transformations.
00:14:46Et mon message d'aujourd'hui est simple.
00:14:50Paul Véléry disait au sortir de la Première Guerre mondiale
00:14:53que nous savions désormais que nos civilisations étaient mortelles.
00:14:57Nous devons être lucides sur le fait
00:15:00que notre Europe, aujourd'hui, est mortelle.
00:15:04Elle peut mourir.
00:15:06Elle peut mourir,
00:15:08et cela dépend uniquement de nos choix.
00:15:13Mais ces choix sont à faire maintenant.
00:15:17Parce que c'est aujourd'hui que se joue la question
00:15:19de la paix et de la guerre sur notre continent
00:15:21et de notre capacité à assurer notre sécurité ou pas.
00:15:25Parce que les grandes transformations,
00:15:28celles de la transition digitale,
00:15:30celles de l'intelligence artificielle,
00:15:32comme celles de l'environnement et de la décarbonation,
00:15:35se jouent maintenant, et la réallocation
00:15:37des facteurs de production se joue maintenant.
00:15:39Et la question de savoir si l'Europe sera une puissance
00:15:43d'innovation, de recherche et de production
00:15:46se joue maintenant ou pas.
00:15:49Et parce que l'attaque contre les démocraties libérales,
00:15:54contre nos valeurs,
00:15:56contre, je le dis dans ce lieu de savoir,
00:15:59ce qui est le substrat même de la civilisation européenne,
00:16:04une certaine relation avec la liberté, la justice, le savoir,
00:16:10se joue maintenant ou pas.
00:16:13Oui, nous sommes au moment de bascule,
00:16:16et notre Europe est mortelle, simplement, cela dépend de nous.
00:16:22Et ceci se fait sur des constats très simples
00:16:25pour documenter la gravité de mon propos.
00:16:30D'abord, nous ne sommes pas armés face au risque qui est le nôtre.
00:16:35Malgré tout ce que nous avons fait, que je viens de citer.
00:16:38Nous avons devant nous un enjeu crucial de rythme et de modèle.
00:16:42Nous avons engagé un réveil.
00:16:44La France elle-même a doublé son budget de défense.
00:16:48Nous sommes en train de le faire
00:16:49avec cette 2e loi de programmation militaire.
00:16:51Mais à l'échelle du continent, ce réveil est encore trop lent,
00:16:54trop faible face au réarmement généralisé du monde
00:16:57et à son accélération.
00:17:00La tension sino-américaine a conduit
00:17:04à une montée des dépenses d'armement,
00:17:07de l'innovation technologique,
00:17:09de l'accroissement des capacités militaires.
00:17:11Nous avons maintenant des puissances désinhibées régionales
00:17:14qui sont en train de monter aussi leurs capacités.
00:17:17La Russie, l'Iran, pour n'en citer que 2.
00:17:20Et l'Europe est dans une situation d'encerclement,
00:17:24poussée par nombre de ses puissances à ses frontières
00:17:27et parfois en son sein.
00:17:29Et donc, oui, nous sommes aujourd'hui encore trop lents,
00:17:33pas assez ambitieux face à la réalité de ce mouvement
00:17:38et dans un contexte, il faut bien le regarder,
00:17:40quelles que soient les échéances à venir.
00:17:43Les Etats-Unis d'Amérique ont 2 priorités,
00:17:46les Etats-Unis d'Amérique d'abord, et c'est légitime,
00:17:49et la question chinoise ensuite.
00:17:51Et la question européenne n'est pas une priorité géopolitique
00:17:55pour les années et les décennies qui viennent,
00:17:57quelle que soit la force de notre alliance
00:17:59et la chance d'avoir aujourd'hui une administration
00:18:01très engagée sur le conflit ukrainien.
00:18:05Et donc, oui, cette ère où l'Europe achetait son énergie
00:18:08et ses engrais à la Russie, faisait produire en Chine,
00:18:11déléguait sa sécurité aux Etats-Unis d'Amérique
00:18:13est révolue.
00:18:15Et donc, nous avons commencé des changements profonds,
00:18:18mais nous ne sommes pas à l'échelle.
00:18:21Parce que les règles du jeu ont changé.
00:18:25Et parce que le fait même que la guerre soit revenue
00:18:27sur le sol européen, mais qu'elle soit menée
00:18:29par une puissance dotée de l'arme nucléaire change tout.
00:18:32Parce que le fait même que l'Iran soit au seuil
00:18:34de se doter de l'arme nucléaire change tout.
00:18:39Premier changement des règles.
00:18:42Le deuxième, c'est que sur le plan économique,
00:18:45notre modèle tel qu'il est conçu aujourd'hui
00:18:46n'est plus soutenable.
00:18:48Parce que nous voulons légitimement tout avoir,
00:18:50mais ça ne tient plus ensemble.
00:18:53Nous voulons évidemment le social,
00:18:55et nous avons le modèle social et de solidarité
00:18:58le plus généreux du monde. C'est une force.
00:19:00Nous voulons le climat avec l'énergie décarbonée,
00:19:02je le disais, mais nous sommes le seul espace géographique
00:19:06qui a pris les règles pour y arriver.
00:19:08Les autres ne vont pas au même rythme.
00:19:11Et nous voulons un commerce qui nous profite,
00:19:14mais avec plusieurs autres qui commencent à changer les règles,
00:19:17du jeu qui sursubventionne,
00:19:19de la Chine aux Etats-Unis d'Amérique.
00:19:22On ne peut pas durablement avoir les normes environnementales
00:19:26et sociales les plus exigeantes,
00:19:29moins investir que nos compétiteurs,
00:19:31avoir une politique commerciale plus naïve qu'eux,
00:19:35et penser qu'on continuera à créer des emplois.
00:19:38Ca ne tient plus.
00:19:40Et donc le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage.
00:19:44Et cela, nous commençons déjà à le voir.
00:19:47Malgré tous nos efforts,
00:19:50le produit intérieur brut par habitant
00:19:54a augmenté aux Etats-Unis de près de 60%
00:19:56entre 1993 et 2022.
00:19:58Celui de l'Europe a progressé de moins de 30%.
00:20:02Et ceci avant même que les Etats-Unis d'Amérique
00:20:07ne décident de l'Inflation Reduction Act
00:20:09et donc d'une politique massive
00:20:11d'attraction de nos industries et de subvention
00:20:17de toutes les industries et de technologies vertes.
00:20:21Donc nous avons aujourd'hui un défi,
00:20:24c'est d'aller beaucoup plus vite
00:20:25et de revoir notre modèle de croissance.
00:20:29Parce que là aussi, les règles du jeu ont changé.
00:20:32Et elles ont changé de manière simple.
00:20:34Les 2 premières puissances internationales
00:20:37ont décidé de ne plus respecter les règles du commerce.
00:20:40Je le dis dans des termes très simples,
00:20:42mais c'est ça, la réalité, depuis l'Inflation Reduction Act.
00:20:46Là où, depuis 20 ans, tous collectivement, on disait
00:20:49on intègre la Chine dans l'OMC,
00:20:51et puis notre objectif, c'est qu'au fond,
00:20:53la 2e puissance commerciale et économique
00:20:55suive nos règles,
00:20:57c'est comme si la 1re économie du monde
00:21:00avait soudain décidé qu'elle allait faire comme elle.
00:21:02C'est ce qui s'est passé.
00:21:05Et donc, nous ne pouvons plus tenir nos objectifs.
00:21:10Le risque, c'est évidemment notre appauvrissement.
00:21:14Et l'appauvrissement est dramatique
00:21:15pour un continent comme le nôtre,
00:21:16qui, en plus, a le modèle social le plus exigeant
00:21:18et qui ponctionne le plus sur la richesse qu'il produit.
00:21:22Et puis le 3e constat qui fonde
00:21:27l'importance du moment que nous vivons,
00:21:29c'est la bataille culturelle,
00:21:30celle des imaginaires, des récits, des valeurs,
00:21:33qui est de plus en plus délicate.
00:21:35Nous avons longtemps pensé notre modèle irrésistible,
00:21:39la démocratie qui se diffuse,
00:21:40les droits de l'homme qui progressent,
00:21:42le soft power européen qui triomphe.
00:21:45Alors la démocratie continue d'être attractive
00:21:48pour beaucoup dans le monde,
00:21:50mais regardons les choses lucidement.
00:21:53Notre démocratie libérale est de plus en plus critiquée
00:21:55avec des faux arguments,
00:21:57avec une forme d'inversion des valeurs,
00:21:59parce qu'on laisse faire, parce que nous sommes vulnérables,
00:22:02mais partout sur notre Europe, dans notre Europe,
00:22:06nos valeurs, notre culture sont menacées,
00:22:09menacées parce qu'on vient en contester les fondamentaux,
00:22:14en pensant qu'en quelque sorte,
00:22:15des approches autoritaires seraient plus efficaces
00:22:17ou attractives, menacées aussi parce que nos rêves,
00:22:21nos récits sont de moins en moins européens
00:22:25et que partout, les contenus auxquels sont exposés
00:22:28nos enfants, nos adolescents
00:22:29sont de plus en plus américains ou asiatiques,
00:22:34appartenant au surgissement numérique qui occupe nos vies
00:22:37et sur lesquels je reviendrai tout à l'heure.
00:22:38Et donc oui, notre Europe
00:22:42est en train d'être de plus en plus contestée
00:22:46dans sa capacité à être attractive
00:22:48sur son modèle politique,
00:22:50avec, à mes yeux, beaucoup de mauvaises raisons
00:22:52et de faux arguments,
00:22:54et elle est surtout beaucoup moins puissante
00:22:56dans sa capacité à produire des grands récits
00:22:58et des grands récits qui font rêver la planète.
00:23:01Et elle consomme de plus en plus des récits produits ailleurs,
00:23:06ce qui ne nous permet pas de construire l'avenir.
00:23:10Et ce sont ces 3 constats,
00:23:12ce constat géopolitique et de sécurité,
00:23:13ce constat économique, ce constat, au fond, culturel
00:23:18et intellectuel qui me conduisent à dire aujourd'hui
00:23:21qu'au fond, la question de notre souveraineté,
00:23:24dans son contenu même,
00:23:25est aujourd'hui encore plus importante qu'hier.
00:23:28Mais qu'est-ce que c'est être souverain
00:23:30dans cette bascule du monde ?
00:23:31Qu'est-ce que c'est être souverain quand je vous dis
00:23:33l'Europe peut mourir ?
00:23:36C'est que nous devons répondre à ces 3 défis du temps,
00:23:38à cette accélération de l'histoire, à sa dramatisation.
00:23:41Et donc la solution est dans notre capacité,
00:23:46parce que les règles du jeu ont changé sur chacun de ces points,
00:23:50et bien de prendre des décisions stratégiques
00:23:53massives, d'assumer des changements de paradigmes,
00:23:58des changements de paradigmes,
00:24:00et au fond, d'y répondre par la puissance,
00:24:05par la prospérité et par l'humanisme.
00:24:08Et c'est sur ces 3 points aujourd'hui
00:24:10que je voudrais revenir.
00:24:11Et je pense que c'est par la puissance,
00:24:14la prospérité et l'humanisme
00:24:16qu'on donne un contenu, en quelque sorte,
00:24:18à cette souveraineté européenne
00:24:20et qu'on permettra à l'Europe, oui,
00:24:23d'être un continent qui ne disparaît pas,
00:24:25un projet politique qui se tient dans ce monde
00:24:29et à cette époque où il est menacé plus que jamais.
00:24:33La puissance, d'abord.
00:24:37L'Europe puissante, c'est simple.
00:24:39C'est une Europe qui se fait respecter
00:24:41et qui assure sa sécurité.
00:24:44C'est une Europe qui assume d'avoir des frontières
00:24:46et qui les protège.
00:24:47C'est une Europe qui voit les risques
00:24:49auxquels elle est exposée
00:24:51et qui s'y prépare.
00:24:54Pour ça, il nous faut, en quelque sorte,
00:24:58sortir d'une forme d'état de minorité stratégique.
00:25:03Pourquoi ? Parce qu'implicitement,
00:25:05nous étions, en quelque sorte, conçus comme cela.
00:25:10Beaucoup de pays européens avaient accepté,
00:25:12dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale,
00:25:13on l'avait souvent imposé,
00:25:15de déléguer leur sécurité à d'autres.
00:25:18Parce que nous ne voulions pas les voir se réarmer trop vite.
00:25:21Et comme je le disais tout à l'heure,
00:25:22tout ce qui est stratégique dans notre monde,
00:25:25nous l'avions un peu délégué.
00:25:27Notre énergie à la Russie,
00:25:30notre sécurité pour plusieurs de nos partenaires,
00:25:32pas la France, mais plusieurs aux Etats-Unis,
00:25:34et des perspectives aussi critiques à la Chine.
00:25:38Nous devons les reprendre.
00:25:40C'est ça, l'autonomie stratégique.
00:25:42Et d'abord, en changeant d'échelle sur la défense.
00:25:47Le principal danger pour la sécurité européenne
00:25:50est évidemment aujourd'hui la guerre en Ukraine.
00:25:54La condition sine qua non de notre sécurité,
00:25:57c'est que la Russie ne gagne pas la guerre d'agression
00:26:00qu'elle mène contre l'Ukraine.
00:26:03C'est indispensable.
00:26:04C'est pourquoi nous avons eu raison,
00:26:06dès le début, de sanctionner la Russie,
00:26:10d'aider les Ukrainiens,
00:26:12et de continuer à le faire,
00:26:14d'avoir la chance d'avoir les Américains à nos côtés
00:26:16pour cela,
00:26:17et sans cesse de relever notre aide et d'accompagner.
00:26:23Simplement.
00:26:26J'assume totalement le choix en la matière,
00:26:29le 26 février dernier à Paris,
00:26:31d'avoir réintroduit une ambiguïté stratégique.
00:26:35Pourquoi ?
00:26:36Nous sommes face à une puissance qui est désinhibée,
00:26:39qui a attaqué un pays d'Europe,
00:26:40mais qui n'est plus dans une opération spéciale
00:26:42et qui ne veut plus nous dire quelle est sa limite.
00:26:45Pourquoi, chaque matin, devrions-nous dire, nous,
00:26:47quelles sont toutes nos limites, stratégiquement ?
00:26:50Si nous disons que l'Ukraine
00:26:53est la condition de notre sécurité,
00:26:54que se joue en Ukraine davantage
00:26:58que la souveraineté et l'intégrité territoriale de ce pays,
00:27:00déjà clé, mais la sécurité des Européens,
00:27:04avons-nous des limites ?
00:27:07Non.
00:27:09Et donc, nous devons être crédibles,
00:27:12dissuader, être présents et continuer l'effort.
00:27:16Mais cette guerre engageant une puissance
00:27:18dotée de l'arme nucléaire,
00:27:19et qui utilise celle-ci dans sa rhétorique,
00:27:22n'est sans doute que le 1er visage
00:27:25des tensions géopolitiques
00:27:27avec lesquelles l'Europe doit apprendre à vivre.
00:27:30Et c'est pourquoi nous sommes en train de vivre
00:27:33un changement très profond en termes de sécurité.
00:27:36Les événements les plus récents ont démontré
00:27:38l'importance des défenses antimissiles,
00:27:40des capacités de frappe dans la profondeur,
00:27:43qui sont indispensables au signalement stratégique
00:27:45et à la gestion de l'escalade face à des adversaires désinhibés.
00:27:51C'est pourquoi ce qu'il nous faut faire émerger,
00:27:53et c'est cela le paradigme nouveau en matière de défense,
00:27:57c'est une défense crédible du continent européen.
00:28:03Alors, évidemment, le pilier européen au sein de l'OTAN
00:28:07que nous sommes en train de bâtir,
00:28:08dont nous avons convaincu tous nos partenaires
00:28:11du bien fondé ces dernières années, est essentiel.
00:28:17Mais il nous faut donner un contenu
00:28:19à ce qu'est cette défense crédible de l'Europe,
00:28:22qui est la condition même pour rebâtir
00:28:24un cadre de sécurité commun.
00:28:27L'Europe doit savoir défendre ce qui lui est cher
00:28:30avec ses alliés,
00:28:32à chaque fois qu'ils sont prêts à le faire à nos côtés
00:28:35et seuls si c'est nécessaire.
00:28:39Est-ce que pour cela, il nous faut un bouclier antimissile ?
00:28:42Peut-être.
00:28:44Est-ce en augmentant nos capacités de défense ?
00:28:46Et lesquelles ? Sans doute.
00:28:48Est-ce suffisant face aux missiles russes ?
00:28:52Il nous faut travailler sur ce point.
00:28:54Mais quand nous avons un voisin devenu agressif,
00:28:56qui n'explique plus ses limites,
00:28:59mais qui dispose de capacités balistiques
00:29:02sur lesquelles il a beaucoup innové ces dernières années,
00:29:04dont les portées et la technologie s'est transformée,
00:29:08qui dispose de l'arme nucléaire et en a monté les capacités,
00:29:13on voit bien qu'il nous faut bâtir
00:29:16ce concept stratégique d'une défense européenne crédible
00:29:20pour nous-mêmes.
00:29:23C'est pourquoi, dans les prochains mois,
00:29:25j'inviterai tous mes partenaires
00:29:27à bâtir cette initiative européenne de défense
00:29:30qui doit d'abord être un concept stratégique
00:29:32dont nous déduirons ensuite les capacités pertinentes.
00:29:35Antimissile, tir dans la profondeur,
00:29:37comme toutes les capacités utiles.
00:29:40La France y jouera tout son rôle.
00:29:42Nous qui avons un modèle d'armée complète,
00:29:45dont l'objectif est d'être l'armée la plus efficace du continent,
00:29:49et qui sommes aussi dotés de l'arme nucléaire
00:29:51et donc de la capacité de dissuasion qui va avec.
00:29:55La dissuasion nucléaire est en effet au coeur
00:29:57de la stratégie de défense française.
00:29:58Elle est donc par essence un élément incontournable
00:30:02de la défense du continent européen.
00:30:05C'est grâce à cette défense crédible
00:30:10que nous pourrons bâtir les garanties de sécurité
00:30:14qu'attendent tous nos partenaires partout en Europe,
00:30:19et qui aura vocation aussi
00:30:21à construire le cadre de sécurité commun.
00:30:24Garantie de sécurité pour chacun.
00:30:26Et c'est ce cadre de sécurité
00:30:28qui nous permettra, le jour d'après aussi,
00:30:32de construire les relations de voisinage avec la Russie.
00:30:37Au-delà de cela et de ce changement de paradigme
00:30:40essentiel, profond pour notre Europe,
00:30:42il s'agit de créer entre les armées européennes
00:30:44une véritable intimité stratégique.
00:30:47Cela passe par le lancement d'une 2e étape
00:30:50de l'initiative européenne d'intervention.
00:30:53Celle-ci, je l'avais proposée en 2017.
00:30:55Elle a été un véritable succès.
00:30:5713 Etats membres l'ont rejoint.
00:30:59Nous avons pu bâtir des coopérations pragmatiques,
00:31:02opérationnelles.
00:31:03Nous l'avons fait au Sahel avec la task force Takouba.
00:31:07C'est ce qui aussi a été le cadre qui nous a permis
00:31:11de construire une opération européenne,
00:31:13à Spidez, en mer rouge, inédite.
00:31:16Cette capacité à conduire des coalitions ensemble
00:31:19nécessite en effet une culture commune.
00:31:22Ce qui passe par l'élaboration de stratégies européennes
00:31:25de sécurité et de défense régionales
00:31:27en Méditerranée, en Afrique, en Indo-Pacifique, en Arctique,
00:31:31pour unifier nos visions
00:31:32et mieux répartir nos forces entre Européens,
00:31:35mais aussi par la création d'une académie militaire européenne
00:31:39pour former les futurs cadres militaires et civils européens
00:31:43aux enjeux de sécurité et de défense.
00:31:47Il nous faut aussi nous presser dans la mise en oeuvre
00:31:50de la boussole stratégique
00:31:52que nous avons conclue sous présidence française
00:31:55et tout particulièrement mettre en place
00:31:57une force de réaction rapide
00:31:58pour pouvoir déployer rapidement jusqu'à 5 000 militaires
00:32:02dans des environnements hostiles d'ici à 2025,
00:32:04en particulier pour venir en aide à nos ressortissants.
00:32:09Nous devons également, pour ce faire,
00:32:14investir les nouveaux espaces de conflictualité.
00:32:17Là où nous le voyons dans la guerre hybride
00:32:20que nous mène la Russie,
00:32:21se joue déjà une part de la guerre d'aujourd'hui.
00:32:24Là où se protègent nos infrastructures,
00:32:26qu'il s'agisse des transports, des hôpitaux,
00:32:28des réseaux électriques ou des télécommunications.
00:32:32Aussi, je souhaite que nous développions
00:32:34une capacité européenne de cybersécurité
00:32:37et de cyberdéfense.
00:32:39Et alors même que nous sommes tous en train de commencer
00:32:41à bâtir ces capacités pour nos propres armées,
00:32:43c'est une occasion inédite
00:32:46de tout de suite bâtir des coopérations européennes
00:32:49et d'agir en Européens face à ces risques.
00:32:52Vous le voyez, prendre nos responsabilités,
00:32:54c'est décider pour nous-mêmes
00:32:56et piloter notre action européenne en matière de défense.
00:33:01Bâtir un nouveau paradigme, plus d'intimité
00:33:06et des initiatives concrètes ensemble.
00:33:08Alors pour cela, nous avons déjà des cadres,
00:33:12des partenariats inédits.
00:33:14Les Britanniques sont des alliés naturels, profonds,
00:33:18et les traités qui nous lient,
00:33:19dont celui de Lancaster House, jettent des bases solides.
00:33:23Il faut les poursuivre, les renforcer,
00:33:26car le Brexit n'a pas affecté cette relation.
00:33:28Peut-être même faut-il les élargir à d'autres partenaires.
00:33:33Et la communauté politique européenne
00:33:34est à coup sûr le bon lieu
00:33:38pour bâtir ce nouveau paradigme de sécurité,
00:33:42cette intimité supplémentaire
00:33:45et construire ce cadre commun
00:33:49de sécurité et de défense.
00:33:53Enfin, évidemment, il n'y a pas de défense
00:33:54sans industrie de défense.
00:33:57En la matière, il s'agit de transformer
00:33:59l'urgence du soutien à l'Ukraine en efforts de longue durée.
00:34:02C'est ce qu'on appelle l'économie de guerre
00:34:04que nous poussons tant avec le ministre.
00:34:07Le chemin est long, car nous avons,
00:34:10il faut être lucide,
00:34:11des décennies de sous-investissements
00:34:13dans nos propres productions.
00:34:15Et au fond, les dividendes de la paix
00:34:19ont fait que les Européens ont insuffisamment produit, investi.
00:34:22Ce qui a aussi créé une très forte dépendance
00:34:24à l'égard de l'industrie non européenne.
00:34:29Alors, face à cela, on doit produire plus vite,
00:34:32on doit produire davantage
00:34:34et on doit produire plus en Européens.
00:34:37Et c'est fondamental, là aussi.
00:34:42C'est pourquoi j'assume le fait qu'il nous faut
00:34:45une préférence européenne dans l'achat de matériel militaire.
00:34:49Regardez la facilité européenne de paix
00:34:51que nous avons bâtie pour les débuts de la guerre.
00:34:55Les 3 quarts ont été utilisés
00:34:56pour acheter du matériel non européen.
00:34:59Alors, il y avait un critère d'urgence.
00:35:00On ne savait pas tout produire en Européens,
00:35:02mais il y avait aussi des réflexes solidement établis.
00:35:05C'est toujours mieux d'acheter, souvent américain, parfois coréen.
00:35:09Mais comment voulons-nous construire notre souveraineté,
00:35:12notre autonomie à terme,
00:35:14si nous n'assumons pas aussi
00:35:15de développer une industrie de défense européenne ?
00:35:20Et donc, oui, il nous faut pour cela
00:35:23réussir à bâtir une préférence européenne,
00:35:27réussir à bâtir des programmes industriels européens,
00:35:30assumer un soutien inclus
00:35:33de la Banque européenne d'investissement
00:35:34et assumer des financements supplémentaires,
00:35:37y compris les plus innovants,
00:35:38comme l'idée d'un emprunt européen
00:35:40qui a été proposée par la Première ministre Kayak Alas.
00:35:44L'objectif d'une stratégie européenne industrielle de défense,
00:35:48c'est bien de produire plus vite, davantage, en européen.
00:35:53Alors, pour nous qui avons une industrie de défense forte,
00:35:56c'est une occasion extraordinaire,
00:35:58parce que nous pouvons aussi, si nous savons nous organiser,
00:36:03pousser nos standards.
00:36:04Ce que nous avons fait d'ailleurs ces dernières années
00:36:07avec le Rafale et de la Croatie à la Grèce,
00:36:10qui pensait, il y a 7 ans, que le Rafale deviendrait
00:36:12une des solutions de la défense aérienne européenne ?
00:36:15C'est en train de le devenir.
00:36:17Mais c'est ce qui va aussi nous pousser à développer en européen
00:36:21des standards communs.
00:36:23Car l'un des problèmes que nous avons en européen,
00:36:25c'est que nous restons trop divisés
00:36:26en matière d'industrie de défense.
00:36:28Notre fragmentation est une faiblesse.
00:36:32Nous l'avons vécu de manière cruelle et concrète
00:36:35pendant cette guerre,
00:36:37où parfois, nous découvrions nous-mêmes entre Européens
00:36:40que nos canons n'étaient pas du même calibre,
00:36:43que nos missiles ne correspondaient pas de l'un à l'autre
00:36:45et que ça réduisait de fait notre capacité à agir ensemble
00:36:49sur un même théâtre d'opération.
00:36:51Donc oui, cet effort va aussi passer par de la standardisation,
00:36:55le fait de construire des grands champions
00:36:56et donc de la consolidation européenne
00:36:58et l'organisation d'une vraie politique industrielle
00:37:00de défense.
00:37:02C'est une nécessité, il faut l'assumer.
00:37:05Vous l'avez compris,
00:37:08il nous faut passer pas simplement une nouvelle étape,
00:37:10mais bâtir véritablement un nouveau paradigme
00:37:14en matière de défense du concept stratégique
00:37:17à la plus grande intimité, au nouveau cadre commun
00:37:20jusqu'aux capacités nouvelles.
00:37:23Mais cette Europe puissance de défense
00:37:26s'appuie évidemment sur une diplomatie qui va avec.
00:37:31La diplomatie, chaque Etat membre l'apporte,
00:37:33elle relève de nous,
00:37:35mais nous pouvons la démultiplier
00:37:37et l'asseoir sur une plus grande cohérence européenne.
00:37:40C'est pourquoi je crois qu'il nous faut poursuivre
00:37:42dans les années qui viennent
00:37:43en complément de cette approche
00:37:45et de ce réveil de sécurité et de défense,
00:37:48il nous faut continuer d'avoir des partenariats
00:37:52avec les pays tiers.
00:37:54Oui, c'est-à-dire bâtir une Europe en capacité
00:37:58de montrer qu'elle n'est jamais le vassal
00:38:02des Etats-Unis d'Amérique
00:38:04et qu'elle sait aussi parler à toutes les régions du monde,
00:38:07aux émergents, à l'Afrique, à l'Amérique latine,
00:38:10et pas simplement par des accords commerciaux,
00:38:13mais avec des vraies stratégies
00:38:15de partenariats équilibrés et réciproques.
00:38:18C'est ce que nous avons voulu bâtir
00:38:20du sommet Union européenne-Afrique du 1er semestre 2022
00:38:24jusqu'à la stratégie indo-pacifique européenne.
00:38:26Montrer que nous sommes une puissance d'équilibre
00:38:30qui parle au reste du monde
00:38:32et qui refuse en quelque sorte la confrontation bipolaire
00:38:35dans laquelle trop de continents sont en train de s'installer.
00:38:38Avoir une stratégie arctique, avoir une stratégie indo-pacifique,
00:38:41avoir une stratégie latino-américaine
00:38:43et avec le continent africain,
00:38:45c'est montrer que l'Europe
00:38:47n'est pas simplement un bout d'Occident,
00:38:51mais bien un continent-monde qui pense son universalité
00:38:55et les grands équilibres de la planète,
00:38:56qui refuse la confrontation entre plaques
00:38:59et veut bâtir ces partenariats équilibrés.
00:39:02C'est absolument essentiel,
00:39:04et il nous faut poursuivre ce chemin qui nous permet,
00:39:06sur les sujets d'éducation, de santé, de climat,
00:39:09de lutte contre la pauvreté, d'avoir une voix singulière,
00:39:12comme nous l'avons fait avec le pacte
00:39:14pour les peuples et la planète,
00:39:16et de montrer qu'il n'y a jamais chez nous de double standard
00:39:19et que nous avons bien, là aussi, notre autonomie.
00:39:25Et l'Europe puissance,
00:39:26c'est aussi une Europe qui maîtrise ses frontières.
00:39:30Je le disais en parlant de l'adoption du pacte asile
00:39:33et migration qui a été une avancée majeure.
00:39:35Mais je le redis dans un moment où nous le savons tous,
00:39:38cette question des frontières de l'immigration
00:39:40bouscule toutes nos sociétés, notre pays, de manière légitime.
00:39:44C'est encore plus important pour la France,
00:39:46parce que la France est un pays,
00:39:49pardon d'utiliser ce terme qui peut paraître technique,
00:39:52mais de mouvement secondaire, comme on dit.
00:39:55C'est-à-dire que l'immigration n'arrive pas en France directement.
00:39:58Elle rentre sur le continent européen,
00:40:00et en particulier dans l'espace Schengen,
00:40:02par d'autres frontières.
00:40:04Et donc la France, parfois plus que d'autres,
00:40:07a besoin d'une politique européenne efficace
00:40:09et d'une bonne coopération,
00:40:11parce que l'immigration commence aux frontières européennes
00:40:16et pas simplement aux frontières françaises.
00:40:19Nous sommes un pays où arrivent des femmes et des hommes
00:40:23qui fuient la misère,
00:40:24qui parfois sont aussi les victimes de réseaux de trafiquants,
00:40:29qui parfois recherchent l'asile légitime
00:40:31quand ils sont des combattants de la liberté,
00:40:34mais qui arrivent toujours, qui par l'Espagne,
00:40:35qui par l'Italie, qui par les Balkans, la Grèce,
00:40:38sur le sol européen, puis cheminent jusqu'à notre pays.
00:40:42Et donc, oui, chez nous plus qu'ailleurs, sans doute,
00:40:45il nous faut une coopération européenne plus forte.
00:40:48C'est pourquoi, après ce pacte asile-immigration,
00:40:51maintenant, il va falloir le mettre en oeuvre,
00:40:53parce qu'il nous offre des instruments inédits
00:40:54que nous n'avions pas, l'enregistrement, le suivi
00:40:57et des conditions de retour vers le pays
00:40:58de 1re entrée plus efficaces.
00:41:00C'est déjà une avancée inédite.
00:41:04Mais nous devons agir avec plus de fermeté
00:41:06en matière de retour et de réadmission
00:41:09pour toutes les femmes et les hommes
00:41:10qui arrivent sur notre sol et qui n'ont pas vocation à rester
00:41:13et qui ne sont pas éligibles à l'asile.
00:41:15Ceci impose une vraie politique européenne
00:41:19et une vraie coordination.
00:41:21Ca passera par davantage de coopération
00:41:23avec les pays d'origine et de transit,
00:41:25des conditionnalités plus franches
00:41:27et une lutte sans relâche contre le modèle économique
00:41:30des passeurs et des trafiquants d'êtres humains.
00:41:32C'est à Vincette et en particulier au sein de Schengen
00:41:35que nous devons mener ces coopérations
00:41:37et bâtir ces politiques.
00:41:40Je ne veux pas d'une politique de naïveté.
00:41:42Et nous ne pouvons pas nous contenter de regarder
00:41:45l'inefficacité aujourd'hui de nos politiques de retour
00:41:47parce qu'elles sont trop divisées.
00:41:50Mais je ne crois pas non plus au modèle
00:41:52qu'on nous propose aujourd'hui,
00:41:53qui consisterait à trouver des pays tiers
00:41:56sur le continent africain ou ailleurs
00:41:58où il s'agirait d'aller raccompagner
00:42:01des gens venus illégalement sur notre sol
00:42:02et qui ne viennent pas de ces mêmes pays.
00:42:04Nous sommes en train de créer une géopolitique du cynisme
00:42:07qui trahit nos valeurs
00:42:08et qui construira de nouvelles dépendances
00:42:12et qui s'avérera totalement inefficace.
00:42:15La clé, c'est simplement de conditionner nos visas,
00:42:19nos préférences commerciales
00:42:21avec les pays d'origine et de transit
00:42:22et de responsabiliser ces pays sur la politique migratoire.
00:42:26Si nous le faisons ensemble, ce sera une approche efficace.
00:42:29Simplement, aujourd'hui, nous ne sommes pas trop divisés.
00:42:33Le retour des migrants irréguliers dans le pays d'origine
00:42:35doit être un des axes clés sur notre politique de visa
00:42:39et nos préférences commerciales en matière de conditionnalité.
00:42:43Nous devons aussi nouer de nouveaux partenariats opérationnels
00:42:46pour lutter contre le trafic de migrants,
00:42:47la traite des êtres humains,
00:42:49pour mobiliser aussi Frontex,
00:42:51qui atteindra bientôt 10 000 gardes-frontières
00:42:53et gardes-côtes afin de soutenir les retours
00:42:55et aller plus loin dans la montée en charge de cette structure.
00:42:58Nous y croyons, je l'ai toujours défendu,
00:43:00je continue d'y croire,
00:43:01même si parfois ceux qui l'ont servi se mettent en douté.
00:43:07Pour protéger ces citoyens, vous le voyez bien,
00:43:09l'Europe doit aussi lutter contre les menaces et les réseaux
00:43:12qui ignorent les frontières et les Etats.
00:43:14Et c'est là aussi un sujet de cohérence européenne.
00:43:17Au-delà de l'immigration,
00:43:19le terrorisme, la criminalité organisée,
00:43:22le trafic de drogue, la haine et la criminalité en ligne
00:43:26sont des sujets sur lesquels nous devons
00:43:28renforcer l'action européenne.
00:43:30C'est pourquoi, d'abord, je veux que le Conseil Schengen
00:43:33devienne un véritable Conseil de sécurité intérieure de l'Union.
00:43:38Nos frontières sont un bien commun.
00:43:42Pour l'euro, bien commun que nous avons créé,
00:43:44nous avons su bâtir
00:43:47une forme politique qui s'est décidée
00:43:50de manière intergouvernementale crédible.
00:43:53Le Conseil est coffine.
00:43:55Nos frontières sont un bien commun.
00:43:57Nous devons bâtir une structure politique
00:43:58qui permet de décider entre tous les pays qui la partagent
00:44:02et de prendre sur les sujets d'immigration,
00:44:05de lutte contre la criminalité organisée, de terrorisme,
00:44:07de lutte contre le trafic de drogue ou la cybercriminalité,
00:44:11des décisions ensemble.
00:44:12Changeons la gouvernance pour la rendre beaucoup plus efficace.
00:44:16Nous devons aussi, dans le cadre du système d'information Schengen,
00:44:19aller beaucoup plus loin dans le partage d'informations.
00:44:22Pour prévenir le départ de combattants terroristes,
00:44:25les retours des zones de conflit, prévenir la radicalisation,
00:44:30avoir aussi une vraie politique
00:44:32de retrait des contenus terroristes,
00:44:34mais surtout de retrait des contenus haineux,
00:44:37racistes et antisémites.
00:44:39Et c'est en Européen que nous pourrons l'obtenir
00:44:40des plateformes qui, aujourd'hui,
00:44:42ne tiennent pas leurs engagements sur ce sujet,
00:44:45ni en termes de modération, ni en termes de retenue.
00:44:48Et c'est en Européen, dans le cadre d'un tel Conseil,
00:44:52que nous pouvons avoir une politique efficace
00:44:54contre la criminalité organisée et la drogue.
00:44:57Fléau véritable qui touche aujourd'hui, en particulier,
00:45:02les pays les plus exposés
00:45:03parce qu'ils ont des grands ports et des points d'entrée,
00:45:06ou parfois aussi parce qu'ils pensaient, pour certains,
00:45:08que les politiques les plus libérales
00:45:10étaient celles qui préviendraient la criminalisation,
00:45:12ce qui est tout le contraire.
00:45:14Nous avons besoin d'avoir une approche européenne,
00:45:16là aussi, sur ce sujet.
00:45:19Vous l'avez compris,
00:45:22cette Europe de la puissance,
00:45:24c'est celle tout à la fois de la défense
00:45:27et de la protection de nos frontières,
00:45:29et c'est un changement de paradigme profond
00:45:32sur le fait que, nous, Européens,
00:45:34si nous voulons résister à ce changement de règles,
00:45:38à cette escalade de la violence,
00:45:40à cette désinhibition des capacités
00:45:42sur notre continent et au-delà,
00:45:45eh bien, nous devons nous adapter
00:45:46en termes de concepts stratégiques, de moyens,
00:45:48et nous devons retrouver la maîtrise de nos frontières
00:45:51pleinement, entièrement, et l'assumer.
00:45:55Le 2e élément clé de la réponse,
00:45:57c'est celui de la prospérité.
00:45:59Oui, si nous voulons être souverains
00:46:02au moment de ces transformations profondes que j'évoquais,
00:46:06nous avons besoin de bâtir un nouveau modèle
00:46:09de croissance et de production.
00:46:13C'est indispensable parce qu'il n'y a pas de puissance
00:46:16sans assise économique solide.
00:46:18Sinon, on décrète la puissance,
00:46:19mais très rapidement, elle est financée par d'autres.
00:46:21Il n'y a pas non plus de transition écologique
00:46:23sans modèle économique solide.
00:46:26Et il n'y a pas de modèle social qui est une force des Européens
00:46:28si on ne produit pas l'argent qu'on veut ensuite redistribuer.
00:46:32Et l'Europe a longtemps été le principal atout
00:46:34de notre croissance,
00:46:36dans un modèle ordo-libéral de concurrence
00:46:38et de libre-échange,
00:46:40et à une époque où, au fond, les règles étaient très différentes.
00:46:44Les matières premières ne semblaient pas limitées,
00:46:46il n'y avait pas de géopolitique de la matière première,
00:46:49le changement climatique était ignoré,
00:46:51le commerce était libre et tout le monde en respectait les règles.
00:46:55C'était ça, le monde dans lequel on vivait jusqu'à récemment.
00:46:59Et en quelques années, tout a changé.
00:47:01Tout.
00:47:02Les matières premières sont limitées,
00:47:04matériaux critiques, énergie.
00:47:07Et pour ce qui est des énergies fossiles,
00:47:08nous ne les produisons pas sur notre sol,
00:47:10nous sommes dépendants,
00:47:11contrairement aux Etats-Unis d'Amérique ou beaucoup d'autres.
00:47:14Pour les matériaux critiques, nous en avons besoin,
00:47:17et la Chine a commencé à faire son commerce
00:47:18et à en sécuriser beaucoup de capacités.
00:47:20Et pour le commerce, comme je le disais,
00:47:22les règles sont en train de changer, de fait.
00:47:24Retour à l'état de nature.
00:47:27Pourtant, on a des objectifs clairs.
00:47:29On veut produire plus de richesses
00:47:32pour améliorer notre niveau de vie
00:47:35et créer des emplois pour tous.
00:47:36On veut garantir le pouvoir d'achat des Européens.
00:47:39C'est la préoccupation de tous nos compatriotes.
00:47:40C'est très concret.
00:47:42C'est l'objectif de notre politique européenne.
00:47:44On veut décarboner nos économies
00:47:46et répondre aux défis de la biodiversité et du climat.
00:47:50On veut assurer notre souveraineté
00:47:53et donc maîtriser nos chaînes de production stratégiques.
00:47:56Et on veut conserver une économie ouverte
00:47:58pour rester une grande puissance commerciale que nous sommes.
00:48:01Nos objectifs sont clairs, mais nous n'y sommes pas,
00:48:06et nous ne pouvons pas les tenir avec nos règles actuelles.
00:48:11Nous n'y sommes pas.
00:48:13Nous n'y sommes pas parce que nous sommes décalés
00:48:15par rapport à la recomposition du monde.
00:48:18Nous n'y sommes pas parce que nous réglementons trop,
00:48:21nous investissons trop peu,
00:48:23et nous sommes trop ouverts
00:48:26et ne défendons pas assez nos intérêts.
00:48:29C'est ça, la réalité.
00:48:31Donc il faut là aussi bâtir un nouveau paradigme
00:48:35de croissance et de prospérité
00:48:36si nous voulons tenir les 5 objectifs que je viens de rappeler.
00:48:40Parce que si nous faisons avec les règles
00:48:41de politique de concurrence, de politique commerciale,
00:48:44de politique monétaire et budgétaire
00:48:47qui sont les nôtres aujourd'hui, nous n'y arriverons pas.
00:48:50Et ça se fera avec un ajustement simple,
00:48:54c'est que nous perdrons la production.
00:48:55Et pourquoi, là aussi, j'ai le sentiment d'urgence ?
00:48:58D'abord parce que je vois ce décalage des 30 dernières années
00:49:01entre l'Europe et les Etats-Unis,
00:49:03mais parce que la réallocation des facteurs de production
00:49:06se joue maintenant.
00:49:08Parce que la question de savoir où seront les technologies vertes,
00:49:11la question de savoir où seront les capacités
00:49:14d'intelligence artificielle et des calculs,
00:49:16elle se joue dans les 5-10 ans qui viennent,
00:49:18sans doute peut-être plus encore dans les 5
00:49:20que les 10 ans qui viennent.
00:49:22Et donc c'est maintenant qu'on doit être au rendez-vous
00:49:23de l'histoire.
00:49:25Et donc c'est maintenant qu'il nous faut
00:49:29stopper la surréglementation,
00:49:32accroître l'investissement, changer nos règles
00:49:35et mieux protéger nos intérêts.
00:49:37Voilà l'objectif, voilà le nouveau modèle.
00:49:40Et au fond, c'est ce pacte de prospérité
00:49:41qu'il nous faut bâtir.
00:49:43Et il repose autour de quelques éléments très simples.
00:49:48D'abord, il faut produire plus et vers.
00:49:50Et la production décarbonée, c'est une opportunité
00:49:54de réindustrialisation et de maintien
00:49:56de nos industries en Europe.
00:49:58On l'a d'ailleurs vu ces dernières années.
00:50:00De l'hydrogène au semi-conducteur aux batteries électriques,
00:50:02la France a recréé de la capacité industrielle
00:50:06par la transition.
00:50:07Et donc il faut cesser d'opposer
00:50:09la décarbonation et la croissance,
00:50:13si nous savons le faire et qu'elle ne passe pas.
00:50:14Des nouveaux secteurs de l'investissement,
00:50:17ça fonctionne.
00:50:18Et c'est ça, le modèle que nous prenons.
00:50:21Nous sommes en passe de devenir des champions des batteries.
00:50:23L'objectif de 100% de batterie, de besoin de batterie en 2030
00:50:26couvert par des batteries européennes,
00:50:28nous l'atteindrons.
00:50:29Et nous rattraperons aussi notre retard
00:50:31dans les semi-conducteurs avec l'objectif de doublement
00:50:34de la part de marché de l'Europe d'ici 2030.
00:50:37Et comme je le disais,
00:50:39les résultats en termes d'emplois de Dunkerque à Fos,
00:50:43en termes de formation, de territoires attractifs innovants,
00:50:45de réduction de nos dépendances sont là.
00:50:48Et donc la réindustrialisation verte,
00:50:52c'est l'Europe qui la permet et qui l'accompagne,
00:50:54et c'est ce qui nous permettra de réavoir des capacités,
00:50:57d'être aussi le 1er continent zéro pollution plastique,
00:51:01d'être un continent au coeur de la décarbonation
00:51:04et de l'électrification.
00:51:06La 2e condition, c'est la simplification.
00:51:11Depuis que Jacques Delors a fait le marché intérieur
00:51:13il y a 30 ans, nous l'approfondissons,
00:51:14nous l'augmentons par toujours plus d'intégration.
00:51:17Et c'est une action de bon sens, et marché unique,
00:51:20c'est une action de simplification.
00:51:22C'est passer de 27 systèmes de règles à 1.
00:51:27Enrico Letta, dans son rapport,
00:51:29vient de nous proposer de continuer cette modernisation
00:51:31et ce travail au service de nos compatriotes
00:51:34et de nos entreprises.
00:51:35Je suis favorable à ce qu'en effet, nous poursuivions
00:51:40le marché unique sur des secteurs
00:51:42qui avaient été jusque-là ignorés par celui-ci,
00:51:44l'énergie, les télécommunications, les services financiers.
00:51:47C'est indispensable parce que c'est ce qui nous permet
00:51:49de réduire la fragmentation de nos règles
00:51:51sur ces grands secteurs,
00:51:53et donc de réussir à dégager plus d'innovation,
00:51:56de réduire les coûts de transaction,
00:51:58d'avoir plus de capacités, en effet, d'innovation
00:52:01et d'investissement, et de mieux servir nos intérêts.
00:52:05Il nous faut aussi assumer l'évolution
00:52:07de notre politique de concurrence
00:52:09pour faire émerger les champions européens
00:52:11et assumer de soutenir massivement les entreprises
00:52:14dans nos secteurs stratégiques
00:52:16avec des nouveaux investissements à 27.
00:52:18J'y reviendrai dans un instant.
00:52:20Mais la simplification, c'est donc plus de marché unique,
00:52:23c'est lever les règles qui sont autant de frontières
00:52:27entre les 27 pour permettre d'avoir pour nos start-up
00:52:31tout de suite un marché domestique
00:52:32qui est le marché européen,
00:52:34parce que sinon, c'est un vrai désavantage compétitif
00:52:36par rapport à une start-up chinoise ou américaine.
00:52:39Nous avons cette force, c'est notre marché intérieur,
00:52:41c'est 450 millions de consommateurs.
00:52:45Marché unique, c'est un choix de simplification.
00:52:48Mais il nous faut, en quelque sorte,
00:52:50mettre aussi fin à l'Europe compliquée.
00:52:53Il faut bien le dire.
00:52:54Nous avons bâti des réglementations utiles
00:52:58qui donnaient des jalons, des repères, des capes,
00:53:01mais nous avons aussi parfois été beaucoup trop dans le détail,
00:53:06empêchant aussi les acteurs économiques
00:53:08de se projeter dans le temps long
00:53:10et créant des désavantages compétitifs pour nos acteurs
00:53:13par rapport à leurs compétiteurs internationaux.
00:53:16Nous devons avoir le courage de l'allègement,
00:53:18en 1er lieu par une revue des seuils et des obligations
00:53:21pesant sur les TPE-PME.
00:53:24Nous devons mieux associer nos entreprises,
00:53:25nos citoyens à nos territoires en amont,
00:53:27prendre en compte leurs contraintes
00:53:29dès l'étape d'élaboration de la norme,
00:53:31mais aussi dans leur mise en oeuvre.
00:53:32Nous devons revenir au principe de proportionnalité,
00:53:36c'est-à-dire plus d'ambition sur les grands enjeux,
00:53:38plus d'accompagnement, plus de confiance et moins de texte,
00:53:41et au principe de subsidiarité.
00:53:45Cela permet d'avoir des ambitions et des règles européennes
00:53:47pour ce qui en relève, mais de laisser
00:53:48de la flexibilité nationale dans la mise en oeuvre.
00:53:52Et c'est pourquoi aussi, les prochaines années,
00:53:54la prochaine mandature devra passer
00:53:57par plusieurs vagues de simplification
00:54:00de nos réglementations,
00:54:02sans rien enlever de nos ambitions et de nos jalons
00:54:04sur les grands points que nous avons décidés,
00:54:07mais en simplifiant la mise en oeuvre
00:54:10et en permettant de mieux accompagner
00:54:11nos acteurs économiques.
00:54:14La 3e condition de ce pacte de prospérité,
00:54:17c'est d'accélérer sur la politique industrielle.
00:54:20C'était un gros mot, il y a encore 7 ans.
00:54:23Je vous le rappelle.
00:54:24Politique industrielle,
00:54:27c'est vraiment pas l'objectif de l'Europe.
00:54:29Et au moment où beaucoup sont en train de revenir
00:54:31sur un concept d'ailleurs intéressant
00:54:32qui est le droit de rester,
00:54:34c'est la politique industrielle qui y répond.
00:54:36C'est la possibilité de produire partout sur le sol européen,
00:54:40là où, en quelque sorte, notre Europe,
00:54:42qui part trop reposer sur un modèle de compétitivité,
00:54:46y compris intra-européenne et de modèles de concurrence,
00:54:49eh bien, a créé ses propres déséquilibres
00:54:53que la politique de cohésion n'avait pas suffisamment compensé
00:54:56et qui, d'ailleurs, a créé ensuite les déséquilibres démographiques
00:54:59que connaissent nombre de nos partenaires.
00:55:02Je crois très profondément que la politique industrielle
00:55:04est un jalon-clé de notre prospérité
00:55:07par rapport à l'extérieur,
00:55:09mais aussi d'un bon aménagement du territoire européen.
00:55:14Le Made in Europe est un sujet
00:55:17de grande convergence franco-allemande.
00:55:20Le chancelier Scholz l'a appelé de ses voeux
00:55:22lors de son discours de Prague en août 2022.
00:55:24C'est au coeur de notre stratégie depuis 7 ans
00:55:27et c'est au coeur de cette stratégie de Versailles
00:55:29que nous avons bâtie en européen.
00:55:33Cette politique industrielle,
00:55:36comme nous l'avons fait ces dernières années en innovant,
00:55:38j'ai retiré du CHIPS Act,
00:55:40en passant par tout ce qui a été fait
00:55:42sur les cleantech ou d'autres,
00:55:44doit avoir des objectifs de production
00:55:46sur le sol européen, des actions de formation,
00:55:48des investissements communs
00:55:51et consolider ce que nous avons déjà fait
00:55:54sur les secteurs stratégiques.
00:55:55Matières premières stratégiques,
00:55:58semi-conducteurs, numériques, santé,
00:56:01où la politique européenne, là aussi,
00:56:04est une réponse aux besoins de nos compatriotes,
00:56:06parce que c'est cette politique qui seule va nous permettre
00:56:09de répondre aux pénuries de médicaments que nous vivons
00:56:13et aussi au sujet d'accès aux patients.
00:56:17Produits alimentaires,
00:56:19et j'y reviendrai en parlant d'agriculture dans un instant.
00:56:21Et donc, vous le voyez, oui, nous devons continuer
00:56:25à consolider cette stratégie industrielle sur ces secteurs.
00:56:27La méthode fonctionne, nous devons l'étendre
00:56:30au secteur stratégique de demain,
00:56:32sans attendre que des dépendances se créent.
00:56:35Décidons maintenant de faire de l'Europe
00:56:37un leader mondial d'ici 2030
00:56:39dans 5 secteurs parmi les plus émergents
00:56:41et les plus stratégiques.
00:56:43L'intelligence artificielle,
00:56:45en investissant massivement sur les talents,
00:56:47mais aussi les capacités de calcul,
00:56:49on a 3% des capacités de calcul mondiales.
00:56:52Imaginez, nous, Européens, 3%.
00:56:55Donc c'est un objectif de rattrapage,
00:56:57mais il nous faut, d'ici 2030, 2035,
00:57:00passer à au moins 20% si nous voulons être des acteurs crédibles.
00:57:03L'informatique quantique,
00:57:07l'espace, où il nous faut consolider Ariane 6,
00:57:09et je le dis au moment où on entend tant et tant de choses.
00:57:12Ariane 6, c'est la condition d'un accès européen à l'espace.
00:57:16Nécessité absolue.
00:57:17Mais il nous faut, au-delà du New Space
00:57:20aux missions spatiales embarquées,
00:57:22avoir une Europe de l'ambition spatiale.
00:57:24Les biotechnologies, évidemment,
00:57:27et les nouvelles énergies,
00:57:28hydrogène, réacteurs modulaires et fusion nucléaire.
00:57:32L'Union européenne doit se doter de stratégies
00:57:34de financement dédiées sur au moins ces 5 secteurs stratégiques.
00:57:38Pour cela, on doit avoir les bons instruments.
00:57:41Donc il faut définir, il faut investir sur ces secteurs,
00:57:44agir ensemble.
00:57:45Mais il faut, je disais, qu'on ait les bons instruments.
00:57:48Alors on a commencé à avoir des instruments pertinents.
00:57:51Ce sont nos fameux projets importants
00:57:53d'intérêt européen commun.
00:57:55Les PIEC.
00:57:57Nos industriels les connaissent bien.
00:57:59Et ils ont été très structurants
00:58:00quand on a décidé dès 2018 avec l'Allemagne d'avancer.
00:58:04Simplement, là aussi, on doit se resynchroniser.
00:58:07Post-Inflation Reduction Act et surinvestissement chinois,
00:58:13ça ne marche plus.
00:58:15Parce que c'est trop lent, trop incertain.
00:58:18Et donc on doit inventer en quelque sorte les nouveaux PIEC,
00:58:21c'est-à-dire qu'on doit donner de la visibilité
00:58:23à nos industriels, réduire les délais
00:58:28au moins en les divisant par 2,
00:58:30mais avoir des mécanismes aussi simples
00:58:33que les mécanismes de crédit d'impôt.
00:58:37En donnant de la visibilité sur 5 à 10 ans aux industriels,
00:58:40en répondant dans des délais très rapides, 3 à 6 mois,
00:58:43et en réussissant sur, justement, les secteurs clés à accompagner.
00:58:47Mais on le voit bien, dans les secteurs
00:58:49comme les médicaments critiques ou la chimie,
00:58:51on perd aujourd'hui des capacités
00:58:52parce que nos instruments ne sont pas assez rapides,
00:58:54efficaces, visibles.
00:58:57Mais nous devons aussi assumer des règles différentes
00:59:00pour la politique industrielle et la politique de concurrence.
00:59:03Nous devons insérer dans nos traités
00:59:04la préférence européenne dans les secteurs stratégiques,
00:59:07la défense et le spatial,
00:59:10parce que, de fait, nos compétiteurs l'ont.
00:59:14Ils l'ont.
00:59:16S'il n'y a pas une préférence européenne sur le spatial,
00:59:18il n'y aura plus de spatial.
00:59:20Idem sur le nucléaire.
00:59:21Qui a vu le département de la défense américaine
00:59:24ou de l'énergie américaine financer
00:59:26un acteur émergent européen ?
00:59:29J'ai vu beaucoup de start-up américaines
00:59:31qu'on dit uniquement le fruit de génie spontané d'entrepreneurs
00:59:35être massivement subventionnés
00:59:37par une politique institutionnelle américaine.
00:59:39Faisons la même chose. Nous sommes en compétition.
00:59:42Préférence européenne dans les secteurs stratégiques,
00:59:45défense et espace,
00:59:46et dérogation à la libre concurrence
00:59:48pour soutenir les secteurs clés en transition.
00:59:51Sur l'intelligence artificielle, sur les technologies vertes.
00:59:56C'est indispensable.
00:59:58C'est la seule chose qui nous permettra de répondre
01:00:01à la sursubvention chinoise et à la sursubvention américaine.
01:00:06Parmi les secteurs stratégiques,
01:00:08il y en a 2 sur lesquels je veux dire quelques mots
01:00:10plus spécifiques, c'est l'énergie et l'agriculture.
01:00:13L'énergie, parce que c'est sans doute celui
01:00:16sur lequel on a le plus de réformes,
01:00:19mais c'est là où on a besoin des transformations à venir
01:00:21les plus fondamentales.
01:00:22Nous devons assumer de construire l'Europe de l'atome.
01:00:26En assumant que le projet Euratome, par ailleurs,
01:00:28fait partie des ambitions fondatrices
01:00:29des traités de 1957,
01:00:32et les défis sont majeurs, mais on en a besoin.
01:00:36L'Europe, aujourd'hui, dans ce problème de compétitivité-prix,
01:00:39un problème de compétitivité-prix sur le facteur travail,
01:00:43par nos réformes, on essaie d'y répondre,
01:00:45mais compte tenu de notre modèle social,
01:00:47on sait qu'on a des limites sur ce point.
01:00:49Mais on a un problème de compétitivité-prix
01:00:50sur l'énergie, parce qu'on a des dépendances
01:00:54et qu'aujourd'hui, nous ne produisons pas
01:00:56des hydrocarbures fossiles.
01:00:58Plus vite nous ferons la transition,
01:00:59plus vite nous retrouverons cette compétitivité.
01:01:03Et donc, oui, l'énergie décarbonée
01:01:06produite en Europe, c'est la clé de la réconciliation,
01:01:09climat, souveraineté, création d'emplois.
01:01:12Et donc, il nous faut une stratégie combinée,
01:01:14efficacité énergétique,
01:01:17déploiement du renouvelable et déploiement du nucléaire.
01:01:21C'est ce qui fera de l'Europe
01:01:23une véritable puissance électrique.
01:01:26Et c'est ça, la clé.
01:01:27Et aujourd'hui, nous avons commis des erreurs
01:01:30ces dernières années en commençant déjà
01:01:32à fragmenter le marché européen
01:01:34de l'hydrogène ou de l'électrique.
01:01:36On doit être absolument sur la neutralité technologique.
01:01:39Au fond, il nous faut bâtir une Europe
01:01:41de la libre circulation des électrons décarbonés.
01:01:44Pardon de le dire comme ça,
01:01:45mais c'est exactement ce qu'il faut faire.
01:01:47Qu'importe qu'il soit produit avec du renouvelable ou du nucléaire,
01:01:49on s'en fiche.
01:01:51Si, sur le sol européen,
01:01:52on sait produire des électrons décarbonés,
01:01:55c'est une chance,
01:01:57parce que ça évite l'électron carboné
01:01:59et ça évite celui qu'on importe.
01:02:02Et donc, il nous faut la neutralité technologique,
01:02:06il nous faut assumer de construire beaucoup plus de capacités
01:02:08en renouvelable et nucléaire,
01:02:10il nous faut consolider cette alliance du nucléaire
01:02:12que nous avons bâtie
01:02:13et qui rassemble une quinzaine d'Etats membres,
01:02:15assumer cette Europe de l'atome
01:02:17et investir dans les interconnexions électriques
01:02:19en Europe. C'est ça, la clé.
01:02:21Pour que partout en Europe, les industriels
01:02:23comme les particuliers puissent faire des contrats
01:02:26qui ont de la visibilité et qui sécurisent
01:02:30de la fourniture d'électricité qui sera à bas coût,
01:02:34qui sera produite sur le sol européen
01:02:36et qui sera décarbonée.
01:02:38L'autre élément sur lequel, le secteur stratégique
01:02:40sur lequel je voulais revenir, c'est l'agriculture.
01:02:42Nous en avons beaucoup parlé de manière un peu défensive
01:02:45compte tenu de la colère qui s'est exprimée.
01:02:47Mais la colère de nos agriculteurs
01:02:49n'a pas été une colère contre l'Europe.
01:02:51Et ils le savent ô combien, en particulier en France,
01:02:53où l'Europe, c'est près de 10 milliards d'euros
01:02:56de subventions à notre agriculture,
01:02:59où c'est le seul marché pertinent.
01:03:01Nous qui avons aussi une agriculture
01:03:02qui est une puissance exportatrice.
01:03:05La colère, c'était une colère contre la surréglementation,
01:03:07la complexité, les normes aberrantes,
01:03:10la mauvaise application du droit européen et français.
01:03:14Et donc, il y a eu un très gros effort fait
01:03:16par le Premier ministre et les ministres sur ce sujet
01:03:19pour bâtir une feuille de route
01:03:20qui est déjà plus aux trois quarts appliquée,
01:03:24qui est de simplification et qui est, justement,
01:03:27demande d'accompagnement.
01:03:29Mais l'Europe est clé en matière agricole
01:03:32parce que, là aussi, c'est un sujet
01:03:33de politique industrielle et de souveraineté.
01:03:36Je le disais dès la période Covid.
01:03:39Qui serait assez fou pour déléguer son alimentation ?
01:03:42Nous n'avons pas le droit de laisser s'installer
01:03:44des dépendances alimentaires.
01:03:46Nous en avions déjà, on a commencé à les réparer,
01:03:49en particulier sur les protéines animales,
01:03:51qui était un vieux choix géostratégique d'après-guerre
01:03:56où nous l'avions déléguée, en quelque sorte,
01:03:58à d'autres continents.
01:03:59Mais nous devons continuer absolument
01:04:02de consolider notre souveraineté alimentaire.
01:04:05Et il est insensé, quand j'entends tellement de collègues,
01:04:07que l'agriculture soit à chaque fois
01:04:09la variate d'ajustement des contrats commerciaux.
01:04:12Non. Non.
01:04:14On a besoin de produire notre alimentation,
01:04:17de continuer à importer, exporter,
01:04:18de le faire de manière ouverte.
01:04:20Mais on a besoin de ne pas dépendre.
01:04:24Le jour où vous serez totalement dépendants
01:04:26sur la protéine végétale,
01:04:28le jour où vous serez totalement dépendants
01:04:29sur une partie de votre alimentation en européen,
01:04:32bon courage.
01:04:33Alors on aura beau jeu d'avoir expliqué
01:04:34qu'on a recréé de la souveraineté
01:04:35sur les semi-conducteurs ou le reste.
01:04:37Vous imaginez.
01:04:38On ira devant nos compatriotes en disant,
01:04:40on a tout bien fait, simplement,
01:04:41on pensait que l'alimentation,
01:04:42ça circulerait toujours librement.
01:04:46Il y a une géopolitique aussi de l'alimentation.
01:04:50Et donc l'agriculture, c'est une question
01:04:52de souveraineté, d'emploi, de production.
01:04:55On a besoin d'une PAC forte, simplifiée,
01:04:57qui diminue la complexité et la charge administrative.
01:05:00Mais on a besoin, pour notre agriculture
01:05:01comme pour notre pêche,
01:05:03d'accompagner les transitions de manière durable,
01:05:06d'accompagner le changement des pratiques,
01:05:08la sortie des phytosanitaires
01:05:09partout où il y a des solutions technologiques,
01:05:11de renouveler nos flottes de pêche pour les décarboner,
01:05:13comme on l'a fait encore récemment pour nos Outre-mer.
01:05:16Mais on a très clairement besoin de défendre ce secteur
01:05:22et d'assumer une politique
01:05:24de meilleure information du consommateur,
01:05:28d'accompagnement pour gérer justement
01:05:30l'impact climatique et environnemental,
01:05:33mais aussi de protéger contre les pratiques déloyales
01:05:36nos producteurs et de les protéger
01:05:38avec une vraie mise en oeuvre homogène au niveau européen.
01:05:42C'est ce que nous réclamons à travers
01:05:43des autorités sanitaires et de contrôle européennes
01:05:46qui évitent les pratiques déloyales entre Européens
01:05:48et une vraie force douanière européenne
01:05:50qui fait que les produits qu'on importe
01:05:51et qui, parfois, sont juste réétiquetés dans un port
01:05:54pour ensuite revenir sur le marché européen,
01:05:56on s'assure qu'ils aient bien les mêmes règles de production
01:05:58que nous lorsque c'est imposé.
01:06:02Ca, c'est la clé d'une politique industrielle ambitieuse.
01:06:07Ca me conduit au 4e aspect de ce pacte de prospérité.
01:06:11C'est la révision de notre politique de commerce.
01:06:14Et c'est là où il y a sans doute un des changements de paradigme
01:06:17à mes yeux les plus fondamentaux.
01:06:19L'ouverture, oui, mais en défendant nos intérêts.
01:06:22Et je le disais, ça ne peut pas marcher
01:06:24si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce
01:06:27telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans.
01:06:29Si les Chinois et les Américains ne les respectent plus
01:06:32en sursubventionnant les secteurs critiques,
01:06:35on ne peut pas être les seuls à le faire.
01:06:36Ca ne va pas marcher.
01:06:38Et d'ailleurs, ça ne marche pas.
01:06:40Et nous sommes, à cet égard-là aussi,
01:06:43trop naïfs ou avec une culture trop faible,
01:06:45on a un vrai levier.
01:06:47Nous sommes un marché de 450 millions de consommateurs.
01:06:50C'est une force immense.
01:06:52Et donc on doit bien protéger notre santé
01:06:55en appliquant strictement nos standards sanitaires.
01:06:57On doit protéger notre modèle social
01:07:00en impliquant, là aussi, nos standards sociaux.
01:07:03Et on doit protéger nos ambitions climatiques
01:07:06en défendant nos standards environnementaux.
01:07:08Sinon, nous allons inventer un continent
01:07:13qui surcontraint les producteurs sur son sol
01:07:15et, par sa politique commerciale,
01:07:17lève les contraintes sur les produits qu'il importe.
01:07:20C'est formidable.
01:07:21On va devenir un marché de consommateurs
01:07:24où il n'y aura plus de producteurs conformes à nos objectifs
01:07:27et qui sera, par les dépendances ainsi créées,
01:07:31obligé de consommer des produits
01:07:33qui ne respectent pas nos normes.
01:07:34C'est ça, la réalité.
01:07:36Donc si on veut être cohérent avec nos ambitions,
01:07:38on a besoin de réajuster très profondément
01:07:41notre politique commerciale.
01:07:42On a commencé à le faire.
01:07:45Le CETA qu'on a conclu avec les Canadiens,
01:07:47par le travail qu'on a fait,
01:07:49par, justement, ce qu'on a ajusté, est un bon accord.
01:07:51Je le dis parce qu'il faut céder à aucune démagogie.
01:07:55Et je suis chagrin de ce que j'ai pu voir,
01:07:56y compris dans le débat français ces dernières semaines.
01:08:00Il ne faut pas qu'on tombe vers le rejet
01:08:02de tout accord commercial,
01:08:03parce que là, bon courage, bienvenue à la démagogie.
01:08:06Tous ceux qui nous expliquent que le commerce est mauvais
01:08:08iront expliquer à tous nos agriculteurs
01:08:10qui sont gagnants avec le CETA face au Canada.
01:08:12Mais pourquoi on est gagnants sur le CETA ?
01:08:16Parce que, justement, on a mis des clauses miroirs.
01:08:19Parce que, justement, c'est un accord commercial
01:08:21de nouvelle génération
01:08:22qui permet à nos producteurs de fromage, de lait,
01:08:25d'exporter vers le Canada,
01:08:26mais qui, là où il y avait des normes différentes sur la viande,
01:08:30a évité l'importation, justement, de cette viande
01:08:32qui ne respectait pas les normes européennes.
01:08:36Mais nous ne sommes pas pour la fermeture.
01:08:39La fermeture, elle serait décroissante
01:08:41pour les industriels, les agriculteurs,
01:08:43les producteurs européens.
01:08:45On est pour la concurrence loyale
01:08:47et donc une politique commerciale revue comme on l'a fait,
01:08:50là aussi, avec la Nouvelle-Zélande.
01:08:52Les accords de commerce modernes et justes
01:08:54sont ceux où le respect de l'accord de Paris sur le climat
01:08:57est une clause essentielle,
01:08:58qui inclut des clauses fortes sur les conditions de production
01:09:01de certains biens sensibles, notamment agricoles,
01:09:04ce qui est toute la différence, en particulier,
01:09:05avec le projet d'accord Mercosur d'ancienne génération
01:09:08tel qu'il a été jusqu'ici négocié.
01:09:11Nous devons systématiser le recours
01:09:13à des instruments de concurrence loyale.
01:09:15Nous devons intégrer des clauses miroirs
01:09:18dans nos accords commerciaux.
01:09:19Nous devons lancer une grande stratégie de réciprocité
01:09:22pour imposer les mesures miroirs dans les nouvelles normes européennes
01:09:26et passer en revue les normes existantes.
01:09:28Nous devons, ce faisant aussi,
01:09:30afficher l'empreinte carbone des produits
01:09:32pour qu'elle soit connue des consommateurs
01:09:34qui réaliseront alors que le made in Europe
01:09:37est presque toujours meilleur pour la planète.
01:09:40Et soyons clairs, si un bien ne respecte pas les normes clés,
01:09:43alors il ne doit pas pouvoir entrer sur le sol de l'Union
01:09:47comme si de rien n'était.
01:09:49Des règles claires, un contrôle clair aussi
01:09:51avec des forces douanières communes.
01:09:53C'est ça, la politique commerciale qui est la seule crédible
01:09:55et qui, là aussi, est, en quelque sorte,
01:09:58une juste protection de nos frontières
01:10:00et de nos producteurs pour ne pas céder,
01:10:04sinon, à la désindustrialisation.
01:10:07La taxe carbone aux frontières est un outil qui ouvre la voie.
01:10:09Nous devons l'étendre, le compléter, l'améliorer
01:10:12pour qu'il ne puisse pas être contourné
01:10:13et qu'il touche les produits transformés.
01:10:15Et il nous faut enfin renforcer
01:10:17nos instruments de sécurité économique.
01:10:20C'est ce que j'avais évoqué
01:10:22aux côtés du Premier ministre Routeux à l'AE,
01:10:26c'est-à-dire la sécurité de nos emplois,
01:10:28de nos entreprises, de notre création,
01:10:30mieux protéger notre propriété industrielle et intellectuelle,
01:10:33mieux filtrer les investissements extra-européens
01:10:36dans les secteurs sensibles,
01:10:37mieux nous protéger contre les attaques physiques,
01:10:40par exemple, contre nos câbles sous-marins
01:10:42et télécommunications,
01:10:43ou aussi nos constellations européennes de satellites,
01:10:46comme Galiléo, Copernicus ou, demain, IRIS.
01:10:50La sécurité économique est aussi au coeur
01:10:53de cette stratégie commerciale.
01:10:56Le 5e pilier de cette prospérité commune,
01:10:58c'est la bataille pour l'innovation et la recherche.
01:11:02En effet, on doit avant tout avoir une obsession
01:11:05qui est celle de la productivité.
01:11:08Et pour ça, il faut être une grande puissance
01:11:10d'innovation, de recherche.
01:11:12Alors, nous sommes, pour beaucoup de nos pays,
01:11:15je parle dans ce lieu de savoir, d'ores et déjà une telle puissance,
01:11:19mais il nous faut former encore plus de talents,
01:11:21il nous faut surtout les garder dans nos laboratoires,
01:11:23nos universités, nos grands centres,
01:11:25et en attirer d'autres.
01:11:27Et il faut bien le voir, à cet égard, les risques existent.
01:11:32La concurrence américaine, mais aussi asiatique, est là.
01:11:36Pour cela, il nous faut réaffirmer l'objectif
01:11:38de 3% du PIB européen consacré à la recherche.
01:11:41Il est prioritaire.
01:11:42Nous avons réinvesti, nous, Français,
01:11:44mais nous devons encore continuer l'effort
01:11:47sur le plan du financement public,
01:11:49mais surtout du financement privé,
01:11:51avec des recherches partenariales supplémentaires.
01:11:53Mais partout en Europe, on doit maintenant consolider
01:11:55et montrer que c'est un élément clé de ce pacte de prospérité.
01:11:59Le programme Horizon Europe, que nos chercheurs connaissent bien,
01:12:01doit être renforcé en se concentrant
01:12:03sur les programmes les plus efficaces,
01:12:05notamment le Conseil européen de la recherche.
01:12:08Changer de paradigme dans le domaine,
01:12:09c'est aussi oser à nouveau des prises de risques.
01:12:12Le Conseil européen de l'innovation a permis, justement,
01:12:15de franchir des nouveaux caps ces dernières années,
01:12:17mais on doit aller beaucoup plus loin
01:12:18sur les innovations de rupture.
01:12:20Et il nous faut assumer d'aller jusque cette DARPA européenne,
01:12:24dont nous ne sommes pas encore pleinement dotés,
01:12:26mais qui, avec les meilleures équipes scientifiques
01:12:28dans chaque discipline,
01:12:29en assumant des prises de risques,
01:12:31et donc des pertes de capital quand les projets ne fonctionnent pas,
01:12:34parce que c'est la clé même
01:12:35des projets de recherche en rupture,
01:12:37eh bien d'assumer d'être un continent
01:12:40qui investit dans l'innovation de rupture
01:12:42et la recherche fondamentale la plus avancée.
01:12:46C'est par ces découvertes, en effet,
01:12:47que les ordinateurs quantiques, les matériaux de demain,
01:12:50les puces électroniques, les batteries basse consommation
01:12:53pourront repositionner l'Europe
01:12:56sur la carte géopolitique de la croissance.
01:12:59Et qu'il s'agisse de la sortie des produits phytosanitaires,
01:13:02qu'il s'agisse, justement, de répondre
01:13:05à cet objectif d'une santé,
01:13:07et donc du lien environnement-santé-humaine,
01:13:09qu'il s'agisse d'apporter une vraie réponse
01:13:12avec un plan européen de recherche et d'investissement
01:13:15pour les traitements contre les cancers,
01:13:17la maladie d'Alzheimer et les maladies neurodégénératives,
01:13:20ou les maladies rares et orphelines,
01:13:21l'Europe est le bonne échelle sur ces grands sujets de recherche,
01:13:25de réinvestissement et de programme commun.
01:13:28Il nous faut donc des objectifs clairs et ambitieux.
01:13:31Et la clé, c'est la formation
01:13:35et la capacité de garder et d'attirer nos talents.
01:13:40J'ai beaucoup parlé de ressources rares, de matériaux critiques,
01:13:43mais sans doute, demain encore plus qu'aujourd'hui,
01:13:46la ressource la plus rare est le capital humain, les talents.
01:13:50Et c'est pourquoi cette politique de formation, de recherche,
01:13:53d'enseignement supérieur
01:13:55est absolument déterminante pour notre Europe.
01:13:57Elle doit s'accompagner évidemment aussi d'une politique
01:14:00de déploiement et de développement de nos start-up,
01:14:02avec ce que nous avons commencé à lancer
01:14:04avec Scale up Europe, du talent, du capital,
01:14:07pour, justement, être un continent d'innovation.
01:14:09Et la dernière condition de ce pacte de prospérité,
01:14:12c'est précisément la capacité à investir.
01:14:17Pardon de le dire comme ça, l'argent.
01:14:20Et oui, nous avons aujourd'hui en Europe
01:14:26des règles du jeu qui ne sont plus adaptées.
01:14:29Parce que si on prend la défense et la sécurité,
01:14:31l'intelligence artificielle,
01:14:33la décarbonation de nos économies et les cleantech,
01:14:36nous avons un mur d'investissement.
01:14:38Alors tous les chiffres ont été articulés selon les rapports.
01:14:41Enfin, je lis tous les rapports, je regarde ce que M. l'Etat,
01:14:45M. Draghi sont en train d'écrire,
01:14:46ce que la Commission a pu écrire.
01:14:48Il y a un consensus, tout le monde dit,
01:14:50c'est entre 650 et 1 000 milliards par an de plus.
01:14:56C'est beaucoup.
01:15:01Et on ne peut pas différer cet investissement.
01:15:04Parce qu'on ne peut pas remettre à 2 mains notre sécurité.
01:15:08On ne peut pas pleurer sur le lait répandu.
01:15:11On ne peut pas remettre à 2 mains ces investissements
01:15:12parce que c'est maintenant qu'ils se font
01:15:15et que les décisions d'investissement se font là ou pas.
01:15:18Donc c'est maintenant, dans la décennie qu'il y a,
01:15:20qu'il faut faire cet investissement massif.
01:15:23Et on est en retard par rapport aux Etats-Unis
01:15:25et à la Chine.
01:15:27Alors cet investissement massif, il doit, en quelque sorte,
01:15:30là aussi, passer par un changement de paradigme
01:15:34de nos règles collectives.
01:15:39Il y a une 1re chose qui me semble caduque.
01:15:41On ne peut pas avoir une politique monétaire
01:15:43dont le seul objectif est un objectif d'inflation.
01:15:46Qui plus est dans un environnement économique
01:15:49où la décarbonation est un facteur
01:15:51d'augmentation des prix structurels.
01:15:53Nous devons lever le débat théorique et politique
01:15:58de savoir comment intégrer dans les objectifs
01:16:00de la Banque centrale européenne
01:16:03au moins un objectif de croissance
01:16:05voire un objectif de décarbonation,
01:16:08en tout cas de climat pour nos économies.
01:16:11C'est absolument indispensable.
01:16:13La 2e chose, c'est qu'il nous faut évidemment
01:16:16accroître nos capacités d'investissement en commun.
01:16:20On a besoin, je le disais,
01:16:21d'investir plusieurs centaines de milliards d'euros
01:16:24par an en plus.
01:16:27Alors la réponse qu'on a eue en Européens ces dernières années,
01:16:29elle a été de donner des flexibilités nationales,
01:16:31les aides d'Etat.
01:16:33Et c'est pas une réponse durable
01:16:34parce qu'elle fragmente le marché unique.
01:16:36Elle est contradictoire avec ce que je vous disais tout à l'heure.
01:16:38Il nous faut de la capacité commune.
01:16:41Et donc il nous faut à nouveau un choc d'investissement commun,
01:16:44un grand plan d'investissement collectif budgétaire.
01:16:49Ce sont des subventions qu'il nous faut.
01:16:51Alors je ne veux pas ici préempter les choses,
01:16:53et je veux qu'elles soient concertées
01:16:54avec tous nos partenaires.
01:16:55Est-ce que c'est une capacité d'emprunt commun ?
01:16:57Est-ce que c'est utiliser des mécanismes
01:16:59qui existent aujourd'hui,
01:17:00mécanismes européens de stabilité ou autres ?
01:17:02Mais au fond, il nous faut réussir à doubler
01:17:06la capacité d'action financière de notre Europe,
01:17:08au moins la doubler en budgétaire.
01:17:11Et donc il nous faut, voilà,
01:17:12ce choc d'investissement public
01:17:14pour investir de l'argent public sur ces secteurs.
01:17:17Ce qui supposera de rouvrir la question si délicate
01:17:20des ressources propres de l'Union.
01:17:23J'y suis favorable, et je pense qu'on doit avoir
01:17:24des ressources propres supplémentaires
01:17:26sans jamais peser sur les citoyens européens.
01:17:29Taxe carbone aux frontières,
01:17:31recette du système européen d'échange de quotas carbone,
01:17:34taxer les transactions financières comme le fait la France,
01:17:36imposer les bénéfices des multinationales,
01:17:38là où ils sont réellement réalisés,
01:17:41et utiliser les ressources issues d'ETIAS,
01:17:44la taxe payée par les ressortissants extra communautaires
01:17:47lorsqu'ils entrent sur le sol de l'Union.
01:17:49Il y a des tas de ressources propres
01:17:50qui ne touchent pas les ressortissants européens
01:17:52qui sont à utiliser pour ce budget.
01:17:55Et puis, au-delà de la politique monétaire,
01:17:57au-delà de notre politique budgétaire commune,
01:18:00qui doit être beaucoup plus ambitieuse et forte
01:18:02par ce plan 1 000 milliards supplémentaires,
01:18:07il nous faut davantage mobiliser l'investissement privé
01:18:11et nos capacités de financement privés.
01:18:14Chaque année, notre Europe,
01:18:16elle a 2 défauts, principalement.
01:18:19Je dirais même 3.
01:18:21Le 1er, c'est qu'elle fait beaucoup d'épargne.
01:18:23Nous accumulons de l'épargne.
01:18:24Nous sommes un continent très riche.
01:18:25On a des acteurs très compétitifs.
01:18:28Mais parce que notre système de marché des capitaux
01:18:31n'est pas intégré, cette épargne ne va pas
01:18:32dans les bons secteurs et les bons endroits.
01:18:34Premier défaut.
01:18:35Deuxième défaut, on ne va pas assez sur le risque.
01:18:38Parce que nous avons une économie qui est très intermédiaire,
01:18:4175 % passe par les banques et les assurances,
01:18:44et on leur a mis des règles qui ne leur permettent pas
01:18:45d'aller sur les fonds propres et le risque.
01:18:48Troisième défaut, chaque année, notre épargne,
01:18:52à hauteur d'environ 300 milliards d'euros par an,
01:18:55va financer les Américains,
01:18:57en tout cas le non-européen et surtout les Américains,
01:19:00que ce soit d'ailleurs les bons du trésor
01:19:02ou le risque en capital.
01:19:04C'est une aberration.
01:19:05Et donc, il nous faut répondre à ces 3 aberrations
01:19:08en ayant un vrai marché de l'épargne et de l'investissement,
01:19:11c'est-à-dire réussir à créer les éléments de solidarité
01:19:14pour que ça fonctionne, que nos faux d'investissement,
01:19:17que l'ensemble de nos acteurs des marchés de capitaux
01:19:19fassent circuler les épargnes
01:19:21pour qu'elles soient bien allouées dans notre économie.
01:19:24Alors, on essaie d'avancer, on a commencé,
01:19:26et je pense qu'il faut se donner 12 mois, pas plus,
01:19:30parce que ça fait trop d'années qu'on le promet.
01:19:33Et soit dans les 12 mois, on arrive à bâtir un système
01:19:36avec supervision unique, règles communes de faillite
01:19:40et des éléments de convergence de fiscalité
01:19:42pour bâtir un système assez comparable
01:19:44à ce qu'on a fait sur la supervision bancaire.
01:19:46Soit, comme certains le proposent,
01:19:47il faut peut-être concevoir un système
01:19:49comme on l'a fait sur la concurrence,
01:19:51qui permet d'avoir des systèmes d'évocation plus souples,
01:19:54mais qui permet d'avoir de l'union
01:19:56et de créer, en tout cas, de la circulation.
01:19:58Je ne veux pas préempter la solution technique,
01:20:00mais on a besoin de créer cette union,
01:20:03indispensable pour pouvoir faire circuler le capital.
01:20:06La 2e, il nous faut, là aussi,
01:20:09réviser l'application telle qu'elle est faite,
01:20:11de Ball et de Solvency.
01:20:13Nous ne pouvons pas être le seul espace économique
01:20:15au monde qui l'applique.
01:20:16Les Américains, qui étaient la source
01:20:19de la crise financière de 2008-2010,
01:20:21ont fait le choix de ne pas l'appliquer à leurs acteurs.
01:20:24Je ne suis pas pour tout enlever,
01:20:25je ne suis pas pour retrouver
01:20:26une culture de l'irresponsabilité financière.
01:20:28Je suis juste pour qu'on remette de la culture de risque
01:20:31dans la gestion de notre épargne.
01:20:33S'il n'y a pas de culture de risque,
01:20:34il ne peut pas y avoir d'investissement
01:20:36dans la recherche, dans l'innovation,
01:20:37dans les start-up, dans nos entreprises.
01:20:41Et puis, je suis pour installer, là aussi,
01:20:44des produits, des solutions européennes
01:20:46pour que notre épargne puisse aller
01:20:49vers le financement de notre économie.
01:20:52Un vrai marché unique,
01:20:53une union de l'épargne et d'investissement,
01:20:56un assouplissement des règles qui chassent le risque
01:20:59et des produits européens
01:21:01qui nous permettent d'éviter cette fuite.
01:21:04Vous l'avez compris, ce que je dessine, là,
01:21:06c'est véritablement aussi un nouveau modèle de croissance
01:21:10de prospérité qui passe par la simplification,
01:21:15assumer une politique de décarbonation industrielle massive,
01:21:19un changement profond de notre politique industrielle,
01:21:22concurrentielle et commerciale, surtout,
01:21:24une vraie politique de recherche, d'innovation
01:21:26encore plus ambitieuse et ce changement
01:21:30de notre paradigme monétaire, budgétaire et financier.
01:21:35Alors, pour conclure, pourquoi faire tout cela ?
01:21:39Je disais au début que notre Europe pouvait mourir.
01:21:42Elle peut mourir si elle ne tient pas ses frontières
01:21:45et ne sait pas répondre aux risques extérieurs
01:21:47en termes de sécurité.
01:21:48Elle peut mourir si elle se met à dépendre des autres
01:21:50et elle ne peut produire pour créer ses richesses
01:21:53et les redistribuer.
01:21:55Mais elle est dans un moment où elle peut mourir d'elle-même.
01:21:59Parce que nous retrouvons un temps que notre Europe a connu.
01:22:02Peter Sutterdijk le décrit très bien dans les conférences
01:22:04qu'il est en train de faire au Collège de France
01:22:06avec ce pessimisme un peu ironique qu'on lui connaît
01:22:12en disant que nous retrouvons ces moments
01:22:14où l'Europe pense son déclin, doute d'elle-même.
01:22:18A nouveau, notre Europe ne s'aime pas.
01:22:24Quand on voit tout ce qu'elle a fait et ce qu'on lui doit,
01:22:26c'est étrange, mais c'est ainsi.
01:22:30Ce serait trop long, ici, de dire qu'il y a, en fait,
01:22:33dans notre Europe, structurellement,
01:22:35toujours ce doute sur elle-même.
01:22:37Nous sommes le continent, la civilisation
01:22:39qui a sans doute inventé le doute et le questionnement sur soi,
01:22:44la culture de l'aveu.
01:22:47Et je crois qu'il y reviendra lui-même dans ses conférences.
01:22:51Et nous sommes pris à des doutes aussi
01:22:52parce que notre démocratie est bousculée,
01:22:57comme je le disais tout à l'heure dans ses règles,
01:22:59parce que notre déclin démographique
01:23:01est une source d'inquiétude très profonde.
01:23:05Et donc le risque pour notre Europe,
01:23:10ce serait, en quelque sorte, de s'habituer à cette dépréciation.
01:23:14Et c'est pourquoi ce que je veux aujourd'hui vous proposer,
01:23:18en quelque sorte, la promesse que je voudrais sceller,
01:23:21c'est d'essayer quand même de défendre
01:23:23cet humanisme européen qui nous lie.
01:23:25Si on veut protéger nos frontières,
01:23:27si on veut rester un continent fort qui produit et qui crée,
01:23:29c'est quand même parce qu'on n'est pas comme les autres.
01:23:33Et il ne faut jamais l'oublier.
01:23:35Nous ne sommes pas comme les autres.
01:23:37Camus avait cette phrase magnifique,
01:23:39cette lettre à un ami allemand.
01:23:40Notre Europe est une aventure commune
01:23:41que nous continuons à faire malgré vous
01:23:44dans le vent de l'intelligence.
01:23:47C'est ça, l'Europe.
01:23:48C'est une aventure qu'on continue à faire
01:23:50malgré tous ceux qui doutent dans le vent de l'intelligence.
01:23:53Et qu'est-ce que ça veut dire ?
01:23:54Ca veut dire qu'être européen,
01:23:56c'est pas simplement habiter une terre,
01:24:01de la Baltique à la Méditerranée
01:24:02ou de l'Atlantique à la mer Noire.
01:24:04C'est défendre une certaine idée de l'homme
01:24:07qui place l'individu libre, rationnel et éclairé
01:24:09au-dessus de tout.
01:24:11Et c'est de se dire que de Paris à Varsovie
01:24:13et de Lisbonne à Odessa,
01:24:15nous avons un rapport unique
01:24:19à la liberté et à la justice.
01:24:22Nous avons toujours fait le choix
01:24:25de mettre l'homme au sens générique au-dessus de tout.
01:24:28Et de la Renaissance aux Lumières
01:24:30jusqu'à la sortie des totalitarismes,
01:24:32c'est ça qui a constitué l'Europe.
01:24:34C'est le choix constamment réitéré
01:24:37et qui nous différencie des autres.
01:24:38Ca n'est pas un choix naïf
01:24:40qui consiste à déléguer nos vies
01:24:43à des grands acteurs industriels
01:24:45sous prétexte qu'ils sont très forts,
01:24:47pas conformes avec le choix européen
01:24:48et l'humanisme européen.
01:24:49C'est un choix qui refuse de contrôler,
01:24:51de déléguer nos vies à des puissances
01:24:54de contrôle étatique qui ne respecteraient pas
01:24:56la liberté de l'individu rationnel.
01:24:58C'est une confiance dans l'individu libre, doté de raison.
01:25:02C'est une confiance dans le savoir,
01:25:04la liberté, la culture.
01:25:08Et c'est une tension constante
01:25:10entre une tradition aidée
01:25:15des permanences et une modernité.
01:25:18C'est un déséquilibre être européen.
01:25:20Et c'est cela qu'il nous faut défendre.
01:25:22Cet humanisme si fragile,
01:25:25mais qui nous distingue des autres.
01:25:28Et je veux ici plaider que ça se joue maintenant.
01:25:31Nous devons le défendre parce que, je le disais,
01:25:33la démocratie libérale n'est pas un acquis.
01:25:36Je le dis dans cette journée si importante,
01:25:39et j'ai une pensée pour nos amis portugais,
01:25:4150 ans, jour pour jour, après la révolution des oeillers,
01:25:43la liberté se conquiert.
01:25:45Et partout sur notre continent, elle s'est, justement,
01:25:48à force de combats, construite.
01:25:52Y compris jusqu'au début de ce siècle.
01:25:55Nous n'oublions jamais, elle n'est pas un acquis.
01:25:58Elle interdit de rester paresseuse.
01:26:00Et c'est pourquoi il nous faut continuer de défendre
01:26:03ce qui est constitutif de l'Etat de droit.
01:26:06La séparation des pouvoirs,
01:26:07le droit des oppositions et des minorités,
01:26:09la justice indépendante, la presse libre,
01:26:13les universités autonomes et la liberté académique.
01:26:16Elle est reniée dans trop de pays d'Europe.
01:26:20C'est pourquoi je défends ici la conditionnalité budgétaire
01:26:24liée à l'Etat de droit
01:26:25dans le versement des fonds de l'Union.
01:26:27Et nous devons encore la renforcer
01:26:28avec des procédures de constat et de sanctions
01:26:30quand il y a des violations graves.
01:26:32L'Europe n'est pas un guichet
01:26:35dans lequel on accepte, en quelque sorte,
01:26:38de choisir les principes.
01:26:41C'est pourquoi aussi nous devons renforcer notre capacité
01:26:45à lutter contre les ingérences et la propagande,
01:26:47en particulier en ces temps électoraux.
01:26:49Nos amis tchèques l'ont vécu comme nos amis belges
01:26:51et l'ont dénoncé.
01:26:52Mais nous avons aujourd'hui un retour sur notre sol
01:26:56par des chaînes de télévision, par les réseaux sociaux,
01:26:59par l'utilisation d'une forme de naïveté de nos règles
01:27:02qui était faite pour des acteurs
01:27:03qui respectaient en quelque sorte la civilité démocratique.
01:27:07Mais il y a un retour de la propagande,
01:27:09des fausses informations
01:27:11qui viennent bousculer nos démocraties libérales
01:27:13et prônent un autre modèle.
01:27:15Nous devons, sur ce sujet, lutter contre celles-ci,
01:27:17imposer la pleine transparence
01:27:20et surtout interdire ces contenus
01:27:22lorsqu'ils viennent déstabiliser des élections.
01:27:25Pour autant, il y a toutes les raisons d'être optimistes.
01:27:30Quand on voit la Pologne qui, il y a encore quelques mois,
01:27:35alors que d'aucuns nous disaient que tout était joué,
01:27:38a non seulement connu la plus grande participation
01:27:42de son histoire à un vote démocratique,
01:27:44mais a rechoisi un parti tout à la fois patriote
01:27:47et défendant la démocratie libérale.
01:27:49Et donc, il nous faut porter ce combat
01:27:51de la démocratie libérale,
01:27:53de l'ouverture politique partout sur le sol européen
01:27:57et essayer au maximum de l'européaniser.
01:27:59Pas ici être plus long, lors des conclusions
01:28:01de la conférence sur l'avenir de l'Europe,
01:28:03j'ai défendu la participation citoyenne,
01:28:05les panels de citoyens, l'initiative citoyenne européenne,
01:28:08les référendums européens.
01:28:09Je pense que ces initiatives,
01:28:11il nous faut les développer en européen.
01:28:13Elles sont essentielles pour donner plus de vigueur
01:28:16à un démos européen
01:28:18et permettre aussi ces listes transnationales,
01:28:21qui sont simplement la possibilité d'avoir,
01:28:23au moment des élections européennes,
01:28:25un vrai débat démocratique européen.
01:28:28Regardez les élections que nous avons aujourd'hui.
01:28:31Ce sont autant d'élections nationales.
01:28:34C'est ça, la réalité.
01:28:35Parce que nous n'avons pas de listes
01:28:37à travers le sol européen.
01:28:39Cette idée, pour l'instant, n'a pas, si je puis dire,
01:28:43suscité l'unanimité, pour rester pudique,
01:28:45de nos partenaires.
01:28:46Mais la clé, c'est qu'on ne peut pas avoir un continent
01:28:49des instances qui décident de plus en plus
01:28:53avec une participation démocratique
01:28:56qui reste au niveau de 1979.
01:29:00Et il nous faut de l'audace aussi
01:29:02pour plus de démocratie européenne.
01:29:04Et elle s'accompagnera aussi de règles révisées.
01:29:06Là aussi, il y a un accord franco-allemand très fort
01:29:08pour aller à la majorité qualifiée
01:29:10en matière de politique étrangère et de fiscalité.
01:29:14Ca fait partie des réformes indispensables,
01:29:17même s'il faudrait aller beaucoup plus loin sur ce sujet.
01:29:21Mais je ne vous accablerai pas aujourd'hui.
01:29:25Surtout, je le disais,
01:29:27défendre cet humanisme européen,
01:29:30c'est considérer qu'au-delà de nos institutions,
01:29:32de cette démocratie libérale à laquelle nous tenons,
01:29:35nous devons défendre et renforcer.
01:29:38C'est la forge des citoyens par le savoir, la culture,
01:29:41la science qui se joue dans notre Europe.
01:29:45Être européen, c'est penser
01:29:46qu'il n'y a rien de plus important, en effet,
01:29:48qu'être un individu libre, doté de raisons et qui connaît.
01:29:51Et au moment où on voit réapparaître
01:29:54le scepticisme, le complotisme,
01:29:57les doutes sur la science
01:29:58et l'autorité de la parole scientifique,
01:30:00nous avons une responsabilité en Européens
01:30:03pour la défendre, l'enseigner,
01:30:05défendre aussi une science libre et ouverte,
01:30:10partagée.
01:30:13Ce combat, nous le menerons à l'international,
01:30:15mais nous devons aussi en renforcer les instruments.
01:30:18Il y a 7 ans,
01:30:19je proposais les alliances d'universités.
01:30:21Plus d'une cinquantaine ont été créées
01:30:23grâce aux présidentes, présidents d'universités,
01:30:25aux étudiants et aux professeurs,
01:30:27et je veux vous en remercier.
01:30:29Elle permet de structurer la circulation des savoirs,
01:30:32les échanges.
01:30:33Il nous faut passer à une 2e étape,
01:30:35consolider les financements,
01:30:37mais renforcer leur intégration
01:30:38et que nous allions vers des diplômes européens
01:30:40pleinement conjoints.
01:30:42L'excellence européenne réside aussi dans les savoir-faire.
01:30:45C'est pourquoi il nous faut décupler l'Erasmus
01:30:46de l'apprentissage et de la formation professionnelle
01:30:49avec un objectif d'au moins 15%
01:30:51des apprentis en mobilité européenne d'ici 2030.
01:30:55Transmettre aussi par la création d'alliances
01:30:58de musées européens
01:30:59et des alliances de bibliothèques européennes
01:31:01pour faciliter les partenariats,
01:31:03encourager la numérisation, améliorer la circulation,
01:31:06l'accès aux oeuvres et aux ouvrages en Europe.
01:31:10Transmettre justement cet esprit européen,
01:31:12c'est aussi permettre de diffuser un imaginaire commun.
01:31:16Et je souhaite à ce titre que nous fassions d'Arte
01:31:18la plateforme audiovisuelle européenne de référence,
01:31:21la plateforme de tous les Européens
01:31:22qui puissent proposer encore plus qu'aujourd'hui
01:31:25des contenus de qualité distribués dans toutes les langues
01:31:27partout en Europe.
01:31:29Pour promouvoir la richesse
01:31:30de notre patrimoine culturel européen,
01:31:32promouvoir l'apprentissage des langues européennes
01:31:35et défendre notre modèle de protection des droits d'auteur
01:31:37et de financement de la création artistique
01:31:39comme nous l'avons consolidé ces dernières années.
01:31:43Transmettre l'esprit européen aux jeunes générations,
01:31:46c'est aussi leur donner l'occasion
01:31:47de faire l'expérience sensible de notre continent,
01:31:50c'est-à-dire voyager, échanger.
01:31:52Alors au-delà de l'Erasmus et de l'Erasmus de l'apprentissage,
01:31:55de manière très concrète,
01:31:57comme l'a d'ailleurs très bien pointé Enrico Letta
01:31:59dans son rapport,
01:32:01c'est de pouvoir circuler en train partout en Europe.
01:32:04Nos capitales ne sont pas encore reliées comme il faut.
01:32:06Le passe-interrail est un succès.
01:32:08Il doit désormais s'adosser à une Europe des trains,
01:32:10qui est autant un projet de connexion
01:32:12qu'un projet culturel,
01:32:14c'est-à-dire c'est un projet de circulation
01:32:16des étudiants, de la jeunesse, des savoirs entre les capitales.
01:32:20Et je souhaite pour ma part qu'il s'appuie
01:32:22sur une européanisation du passe-culture
01:32:25qui n'est pas une invention française.
01:32:29Vous savez pourtant combien nous aimons être chauvins,
01:32:33mais qui est une invention de l'Italie,
01:32:36de Matteo Renzi, que nous avons copiée.
01:32:39On a essayé de l'améliorer.
01:32:42Plusieurs autres nous ont suivis.
01:32:44Et c'est ça, l'Europe.
01:32:45C'est de s'inspirer des bons exemples.
01:32:46Mais maintenant, on doit la généraliser,
01:32:48parce que ce passe-culture permet de formidables accès
01:32:52pour les plus jeunes et pour beaucoup de familles.
01:32:54Et donc, vous le voyez,
01:32:56nous avons à assumer encore beaucoup d'ambition
01:32:59sur cette Europe du savoir, de la culture, de l'intelligence.
01:33:02Mais il nous faut aussi la défendre
01:33:07dans le moment que nous vivons.
01:33:09Parce que nous sommes là aujourd'hui, de cette université,
01:33:14dans un lieu physique où nous pouvons échanger
01:33:16sous les auspices de grands esprits,
01:33:19dans un temps et une civilité qui nous est familière.
01:33:23Mais nul ne saurait ignorer que nos vies, aujourd'hui,
01:33:27se passent dans un autre espace,
01:33:30celle de nos enfants et de nos adolescents encore plus,
01:33:33cet espace numérique.
01:33:35Et celui-ci, nous, Européens, nous n'en avons pas le contrôle.
01:33:41Et dans cet espace-là,
01:33:42d'abord, nous ne produisons pas assez de contenu,
01:33:44c'est une partie de l'ambition que j'évoque là et que je défends,
01:33:48mais nous n'en déterminons même plus les règles.
01:33:53Et c'est un changement profond, anthropologique, civilisationnel.
01:33:58Quand aujourd'hui, des enfants passent des heures
01:34:00devant des écrans,
01:34:01quand des adolescents s'ouvrent à la culture,
01:34:06à la vie intime, à la vie affective,
01:34:10par ces écrans et les contenus auxquels peuvent être exposés,
01:34:13quand le débat démocratique se structure dans cet espace-là,
01:34:18cet espace numérique que nous habitons
01:34:20et qui est, au fond, l'espace que nous habitons le plus
01:34:22dans notre temps de vie aujourd'hui,
01:34:24est-ce que nous sommes sérieux, nous, Européens,
01:34:26de le déléguer à d'autres ?
01:34:29Non.
01:34:30Et à dessein, je vous dis
01:34:32que c'est un combat culturel et civilisationnel,
01:34:34parce que c'est là que se joue en vrai notre démocratie,
01:34:38parce que c'est là que se forge notre opinion publique.
01:34:40Une démocratie où le vote est libre, c'est formidable,
01:34:43mais enfin, si ce vote est influencé,
01:34:45si les consciences sont déformées,
01:34:47si les choix sont transformés par les orientations faites
01:34:51par les uns ou les autres,
01:34:53quelle démocratie a tout ?
01:34:57Et donc, je vous le dis avec beaucoup de force,
01:34:59c'est pas un sujet technique,
01:35:01c'est pas un sujet de politique publique.
01:35:04La capacité à créer un ordre public démocratique numérique
01:35:09est une question de survie pour nous.
01:35:14C'est une question de survie
01:35:15pour, justement, défendre notre humanisme.
01:35:17Parce qu'aujourd'hui, vous avez, au fond,
01:35:192 modèles qui s'imposent.
01:35:22Vous avez un modèle anglo-saxon,
01:35:24qui, de fait, est celui qui choisit de déléguer
01:35:26cet espace de vie à des choix privés.
01:35:30On va évoluer, mais on fait confiance.
01:35:32Il y a ces grandes entreprises
01:35:33qui ont des réseaux sociaux, des plateformes.
01:35:35Elles ont des algorithmes.
01:35:36Tout ça semble très compliqué,
01:35:37mais nous, consommateurs, on aime bien.
01:35:41Ca semble efficace.
01:35:43Mais c'est un choix qui met le citoyen
01:35:47en situation d'infériorité par rapport au consommateur.
01:35:52Puis vous avez un autre choix, celui du contrôle,
01:35:54qui est de dire, face à ce désordre, cette anomie,
01:35:57on contrôle.
01:35:58Reprise étatique, celui de la Chine,
01:36:01mais aussi plusieurs puissances autoritaires
01:36:02qui sont en train d'aller vers ce modèle.
01:36:04Le modèle humaniste, celui que l'Europe doit développer,
01:36:08et il ne peut exister qu'en européen.
01:36:11C'est un modèle qui crée un ordre démocratique,
01:36:14c'est-à-dire transparent, loyal,
01:36:17où nous débattons des règles et où nous les choisissons.
01:36:20C'est pourquoi je veux défendre une Europe
01:36:22de la majorité numérique à 15 ans.
01:36:25Avant 15 ans, il doit y avoir un contrôle parental
01:36:28sur l'accès à cet espace numérique,
01:36:31parce que c'est un accès,
01:36:32si on n'en contrôle pas les contenus,
01:36:35qui est le fruit de tous les risques
01:36:37et des déformations d'esprit,
01:36:39qui justifie toutes les haines.
01:36:41Nous devons, comme on le fait pour nos enfants,
01:36:44je le dis avec beaucoup de bon sens,
01:36:46est-ce que quelqu'un envoie son enfant dans la jungle
01:36:50à 5 ans, 10 ans, 12 ans ?
01:36:52Personne, je pense, ne le censait.
01:36:54On le protège dans la famille,
01:36:56on l'accompagne jusqu'aux portes de l'école, puis du collège,
01:36:59et on le remet à des gens de confiance qui vont l'éduquer.
01:37:01On va ensuite organiser des activités quand on le peut
01:37:04pour qu'il puisse apprendre davantage et s'émanciper.
01:37:07Et aujourd'hui, plusieurs heures par jour,
01:37:11on ouvre la porte de la jungle.
01:37:14Et le même est la proie du cyberharcèlement.
01:37:17Le même peut être la proie de contenus pornographiques,
01:37:22de la pédocriminalité. C'est ça, cet espace.
01:37:25Parce qu'il n'est pas régulé
01:37:27et parce qu'il n'est pas modéré non plus.
01:37:29Voulez-vous que je vous dise combien chacune de ces plateformes,
01:37:32de ces réseaux a de modérateurs en langue française ?
01:37:36Même pas une dizaine pour certains.
01:37:39Donc nous devons reprendre le contrôle de la vie
01:37:42de nos enfants et de nos adolescents en européen
01:37:45et imposer la majorité numérique à 15 ans.
01:37:48Pas avant.
01:37:50Et imposer aux plateformes la modération,
01:37:53la fermeture de certains sites.
01:37:55Et nous devons ensuite, beaucoup plus ardemment,
01:37:59reciviliser cet espace numérique.
01:38:02Là où nous interdisons les propos racistes,
01:38:05les propos antisémites, les discours de haine,
01:38:07nous devons avec la même force
01:38:09les interdire dans l'espace numérique
01:38:11où la présomption d'anonymat
01:38:14conduit à la désinhibition de la haine.
01:38:19C'est un combat civilisationnel et démocratique.
01:38:23Nous devons le mener en européen.
01:38:25Il est essentiel, et je le mets là,
01:38:27au coeur de cette bataille que nous devons conduire.
01:38:30Et puis notre humanisme européen est évidemment
01:38:32aussi un humanisme de dignité et de justice.
01:38:35Nous aimons la liberté, le savoir, mais nous avons ce goût.
01:38:40Il est dit pour la justice, l'égalité,
01:38:43ce qui nous distingue des autres continents.
01:38:47L'égalité entre les femmes et les hommes
01:38:49est au coeur de ce projet.
01:38:51Avec l'Europe, nous avons beaucoup accompli
01:38:53en matière d'équilibre entre vie professionnelle et vie privée,
01:38:55des parents des aidants,
01:38:56de la transparence des rémunérations,
01:38:58de la parité, etc.
01:39:00Je souhaite aujourd'hui que nous allions au-delà
01:39:02en inscrivant, comme nous l'avons fait
01:39:04dans notre Constitution,
01:39:06le droit à l'interruption volontaire de grossesse
01:39:08dans la charte des droits fondamentaux
01:39:10de l'Union européenne.
01:39:12Parce que l'égalité entre les femmes et les hommes
01:39:16est au coeur de ce projet humaniste.
01:39:19Elle est au coeur, précisément, de ce qui fait l'Europe.
01:39:24Cette Europe est aussi construite sur une cohésion sociale,
01:39:28c'est-à-dire une volonté de bâtir une cohésion de notre société.
01:39:32Fidèle à l'héritage de Jacques Delors,
01:39:34de son programme européen d'aide aux plus démunis,
01:39:38je propose de créer un programme européen des solidarités
01:39:41qui, s'appuyant sur le Fonds social européen,
01:39:43viendra accompagner les initiatives des Etats membres
01:39:45contre toutes les précarités
01:39:47et permettra d'accompagner de manière sociale
01:39:50les transitions que nous sommes en train de mettre en oeuvre.
01:39:53Et donc l'Europe doit aussi se doter d'instruments nouveaux
01:39:56pour accompagner les personnes et les territoires
01:39:58dans cette transition sociale.
01:40:01C'est indispensable.
01:40:02Protégeons, accompagnons les Européens
01:40:04avec cette politique de justice
01:40:06et d'une garantie d'une Europe, justement, là aussi,
01:40:11permettant d'exercer tous les droits,
01:40:12la libre circulation, l'accessibilité,
01:40:14la lutte contre les discriminations et d'avancer.
01:40:18Et quand on parle de justice,
01:40:20je ne mettrai pas ici le débat que je sens en vivant
01:40:25sur la fiscalité des revenus,
01:40:27parce que c'est un bon débat
01:40:28quand on voit l'accumulation des richesses
01:40:30dans la mondialisation que nous vivons.
01:40:32Mais ma conviction, c'est que ce n'est pas un débat
01:40:33que nous devons porter à l'échelle européenne,
01:40:35c'est un débat que nous devons porter à l'échelle internationale,
01:40:38comme nous l'avons fait sur la taxe minimale
01:40:40et comme la France a réussi à le porter.
01:40:43C'est pourquoi, avec le président Lula,
01:40:45nous avons, dans le G20, bâti cette alliance
01:40:47pour la taxation des très hauts revenus
01:40:49et que c'est dans le G20, à une échelle
01:40:52qui est celle de OCDE élargie,
01:40:54que nous devons mener ce combat existentiel.
01:40:59Au fond, cet humanisme européen,
01:41:01cette certaine idée de l'Europe dont parlait Georges Steiner,
01:41:05elle est faite de choses très sensibles.
01:41:09Cette idée de la liberté, de l'Etat de droit,
01:41:11cette volonté de préserver les savoirs, la culture,
01:41:15ce rapport à l'égalité que j'évoquais,
01:41:18mais c'est en effet cette Europe des cafés,
01:41:22de nos capitales qui sont autant de palimpsestes
01:41:24et c'est cette tension permanente que nous avons
01:41:27entre l'héritage à transmettre et la modernité qui bouscule.
01:41:33Et c'est pourquoi notre Europe est constamment prise
01:41:35dans cette tension, mais elle a son mot à y dire.
01:41:41Elle a son mot à y dire en continuant de défendre
01:41:43notre culture, sa transmission, comme je l'évoquais,
01:41:47en défendant la singularité, justement, de celle-ci,
01:41:54du dialogue entre ces universités,
01:41:56ces lieux de convivialité, ces cafés,
01:41:59mais en étant aussi ce bout de terre
01:42:03qui décide de protéger ses paysages.
01:42:08Et je crois que l'ambition que nous devons avoir
01:42:10et que nous avons commencé d'avoir pour nos forêts,
01:42:13nos mers et nos océans est à penser comme telle.
01:42:17Ce n'est pas une forme de lubide moderniste désincarnée
01:42:22qui voudrait mettre de l'écologie à tout voir,
01:42:24parce que parfois j'entends la caricature.
01:42:26Non. Protéger nos forêts, protéger notre biodiversité,
01:42:31protéger nos mers et nos océans,
01:42:33c'est juste mesurer, nous, humanistes européens,
01:42:40que nous savons compter jusqu'à 3.
01:42:44La génération d'avant, celle d'après est la nôtre.
01:42:47Et que notre Europe est un trésor que nous avons reçu en héritage
01:42:52et que nous allons transmettre.
01:42:54Et que tout ce que je viens de dire
01:42:55ne peut pas se faire en supprimant des ressources naturelles
01:43:00qui ne sont pas remplaçables.
01:43:02Et c'est pourquoi l'ambition de biodiversité,
01:43:05l'ambition de protection de nos forêts, de nos océans
01:43:08et tout ce que nous aurons à développer dans les politiques
01:43:11à mener pour notre Europe,
01:43:13c'est une ambition qui est avant tout humaniste.
01:43:15Je le dis aussi parce que je ne fais pas partie de ceux
01:43:17qui pensent que la nature a des droits supérieurs à l'homme.
01:43:21Et c'est un humanisme européen qui, à mes yeux,
01:43:23assume de protéger la nature
01:43:26parce qu'elle fait partie de nos équilibres
01:43:28et de ce qui nous a été transmis.
01:43:31Mais de le faire en humaniste pour nous et nos enfants.
01:43:36Mesdames et messieurs,
01:43:38j'ai été trop long, j'en ai conscience.
01:43:41Mais il y aurait encore tant de choses à dire.
01:43:42Et je sais très bien qu'à l'issue de ces propos,
01:43:45d'aucuns me reprocheront de ne pas assez avoir parlé
01:43:48du continent africain et de notre voisinage,
01:43:50de réforme des traités, de la modernisation de ces derniers
01:43:53et de tout ce que je n'ai pas dit.
01:43:56L'Europe est une conversation qui ne se termine pas.
01:44:01Et c'est un projet, d'ailleurs, qui n'a pas de borne.
01:44:05D'un point de vue philosophique, civilisationnel, c'est vrai,
01:44:09n'oublions jamais que le rapte d'Europe
01:44:13se fait sur des terres qu'on prétend asiatiques
01:44:16par un dieu grec.
01:44:18Il y a une forme d'ambiguïté,
01:44:19et c'est pour ça que ça ne se termine pas.
01:44:21Ici même, à la Sorbonne,
01:44:23Ernest Renan se demandait ce qu'était une nation.
01:44:27Et l'heure est venue pour l'Europe de se demander
01:44:31ce qu'elle compte devenir.
01:44:33A mes yeux, parler de l'Europe est toujours parler de la France.
01:44:36Mais vous l'avez compris, nous vivons un moment décisif.
01:44:42Notre Europe peut mourir, je vous le disais.
01:44:44Et elle peut mourir pour une forme de ruse de l'histoire.
01:44:48C'est qu'elle a fait énormément de choses,
01:44:50ces dernières décennies.
01:44:51C'est qu'en quelque sorte, les idées européennes
01:44:55ont gagné le combat grâme-chien.
01:44:57C'est que tous les nationalismes à travers l'Europe
01:44:59n'osent plus dire qu'ils vont sortir de l'euro et de l'Europe.
01:45:03Mais ils nous ont tous habitués à un discours
01:45:07qui est le oui-mais,
01:45:10qui est dire j'empoche tout ce que l'Europe a fait,
01:45:13mais je le ferai plus simple,
01:45:16mais je le ferai en ne respectant pas les règles,
01:45:19mais je le ferai, au fond, en baffant ses fondements.
01:45:23Au fond, ils ne proposent plus de sortir de l'immeuble
01:45:26ou de l'abattre, ils proposent juste
01:45:28de ne plus avoir de règles de copropriété,
01:45:30de ne plus investir, de ne plus payer le loyer.
01:45:33Et ils disent ça va marcher.
01:45:35Et le risque, c'est que tous les autres
01:45:36sont en train de devenir timides
01:45:39en disant les nationalistes, les anti-européens
01:45:45sont très forts partout dans nos pays, c'est normal.
01:45:48Il y a de la crainte, il y a de la colère
01:45:49dans les moments de choc que nous vivons précisément
01:45:52parce que nos compatriotes partout en Europe
01:45:55sentent que nous pouvons mourir ou disparaître.
01:45:58La réponse n'est pas dans la timidité,
01:46:00elle est dans l'audace.
01:46:02La réponse n'est pas dans le constat de dire
01:46:05ils sont en train de monter partout,
01:46:07mais dans se dire on a le choix.
01:46:10Cette année, les Britanniques vont choisir leur avenir,
01:46:12les Américains vont choisir leur avenir,
01:46:13le 9 juin, les Européens aussi.
01:46:18Mais le choix, c'est pas de faire comme on a toujours fait,
01:46:22c'est pas juste d'ajuster,
01:46:24c'est d'assumer, de porter des paradigmes nouveaux.
01:46:28Alors je sais bien, après Voltaire,
01:46:30c'est difficile d'être optimiste.
01:46:33C'est peut-être même pour certains
01:46:34une question de crédibilité, je le suis.
01:46:37Mais c'est une forme d'optimisme de la volonté.
01:46:40Oui, je crois que nous pouvons reprendre
01:46:43le contrôle de nos vies, de notre destin,
01:46:47par la puissance, la prospérité
01:46:49et l'humanisme de notre Europe.
01:46:52Et au fond, au moment où les temps sont incertains,
01:46:56pour reprendre sans bien la citer
01:46:59ce qu'Anna Arendt disait
01:47:01dans la condition de l'homme moderne,
01:47:04c'est la meilleure manière de connaître l'avenir
01:47:09quand les événements reviennent,
01:47:11quand l'imprévu est là.
01:47:14La meilleure manière de connaître l'avenir,
01:47:20c'est de faire des promesses que l'on tient.
01:47:24Eh bien, ce que je vous propose,
01:47:27c'est, fort de notre lucidité,
01:47:29de nous faire ces quelques grandes promesses
01:47:31pour l'Europe de la décennie à venir
01:47:34et de nous battre ardemment pour les tenir.
01:47:38Alors, nous avons peut-être une chance
01:47:41de connaître l'avenir.
01:47:43En tout cas, nous nous serons battus
01:47:46pour choisir le nôtre.
01:47:48Vive l'Europe, vive la République et vive la France.
01:47:51Applaudissements
01:47:53...
01:48:21...

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