Huit années après la signature des accords de paix entre les FARC et le gouvernement colombien, où en est la réconciliation ?
La « paix totale » promise par le président colombien, élu en 2022, est-elle possible ? Une équipe d’ARTE Reportage est allé à la rencontre d’anciens combattants des FARC, les Forces armées révolutionnaires de Colombie. Des hommes qui ont accepté de se soumettre au programme de justice transitionnelle, issu des accords de paix de 2016. Selon leur degré d’implication, ces derniers pourront bénéficier de remises de peine, à condition, qu’ils demandent pardon et prouvent leur volonté de réparation à l’encontre des victimes. Ils doivent aussi révéler toute information susceptible de retrouver les corps des disparus. Le pays est encore profondément marqué par une guerre civile qui aura duré pendant plus de cinquante ans et fait des centaines de milliers de morts, de disparus, de déplacés.
La « paix totale » promise par le président colombien, élu en 2022, est-elle possible ? Une équipe d’ARTE Reportage est allé à la rencontre d’anciens combattants des FARC, les Forces armées révolutionnaires de Colombie. Des hommes qui ont accepté de se soumettre au programme de justice transitionnelle, issu des accords de paix de 2016. Selon leur degré d’implication, ces derniers pourront bénéficier de remises de peine, à condition, qu’ils demandent pardon et prouvent leur volonté de réparation à l’encontre des victimes. Ils doivent aussi révéler toute information susceptible de retrouver les corps des disparus. Le pays est encore profondément marqué par une guerre civile qui aura duré pendant plus de cinquante ans et fait des centaines de milliers de morts, de disparus, de déplacés.
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PersonnesTranscription
00:00Rien n'a changé par ici.
00:16Oui, c'est le même endroit.
00:20Ils m'ont dit qu'ils devaient être enterrés là-bas.
00:25J'entendais le bruit des pelles.
00:29Je me souviens dans cette direction.
00:31La région du Catatumbo, dans le nord-est de la Colombie, a longtemps été le théâtre
00:41d'affrontements violents entre la guérilla marxiste des Farc, l'armée et les paramilitaires
00:47d'extrême droite.
00:48Mais qu'est-ce que c'est, ça ? On dirait une racine, non ?
00:53Attention, certains ossements peuvent ressembler à des bouts de bois.
00:56C'est bon, on peut considérer que cette partie est fouillée.
01:01Allons voir plus loin.
01:02Ce qui est sûr, c'est que tous nous indiquent ce périmètre.
01:06Il y a sept personnes qui nous ont indiqué cet emplacement.
01:11Oui, alors nettoyons cette zone.
01:13Arsegno Silva et son équipe sont des anciens membres des Farc, les forces armées révolutionnaires
01:23de Colombie.
01:24Ils parcourent cette région située à plus de 600 kilomètres au nord de Bogotá, à
01:29la recherche des victimes de la guerre.
01:31Ces ex-combattants espèrent trouver les corps d'anciens compagnons d'armes.
01:35Morts au combat il y a 20 ans, ils ont été enterrés sur place, le plus souvent dans
01:41l'urgence.
01:42Ces gens étaient nos compagnons de lutte.
01:45Ils étaient comme notre famille.
01:47Ça nous fait du mal de les savoir au milieu de nulle part.
01:52Et c'est comme ça pour beaucoup de guerrilleros enterrés sur tout le territoire national.
01:55Mais cette fois, c'est particulier pour nous, parce que ces personnes enterrées ici, nous
02:03les avons connues.
02:04Après un conflit long de plus de 50 ans, une partie des Farc a accepté de rendre les
02:12armes.
02:1313 000 d'entre eux se sont retirés de la lutte armée.
02:15En 2016, après de longues négociations, les Farc signent un accord de paix historique
02:23négocié avec le gouvernement colombien.
02:25On est au bon endroit.
02:29Regarde ça, c'est là qu'ils ont enterré le traître.
02:33Qu'il s'agisse de victimes civiles, de paramilitaires, de soldats, de policiers ou de guerrilleros,
02:44toutes ces personnes disparues doivent être recherchées, retrouvées et remises à leurs
02:48proches.
02:49Cet accord ne peut pas fonctionner si les familles de victimes n'obtiennent pas réparation.
02:56Et je pense que l'une des réparations les plus importantes est de savoir ce qui est
03:03arrivé à un proche disparu.
03:05Quel a été son dernier moment ? Quels ont été ses derniers mots ? Qu'est-il arrivé
03:11à la personne que vous aimez ?
03:12Dans le cadre d'une justice réparatrice, ces anciens combattants participent au travail
03:25de réconciliation nationale.
03:26Nous avons complètement changé de vie.
03:34On mène des activités très différentes.
03:38Avant, on était engagés dans une lutte armée pour défendre le territoire et la
03:46population.
03:47Maintenant, on est investis dans un travail humanitaire.
03:55Le conflit a entraîné la mort de 450 000 personnes.
04:03Le pays compte 9 millions de victimes.
04:05Cette guerre intérieure est la plus longue et meurtrière du continent sud-américain.
04:11La société colombienne reste aujourd'hui profondément marquée et encore traumatisée.
04:19Je m'appelle Helmut Santiago Angulo Castanea.
04:24J'ai 52 ans et je suis le fils d'un couple de personnes âgées séquestrées, torturées
04:30et assassinées par les FARC.
04:34Je ne viens pas d'une famille riche mais plutôt de la classe moyenne.
04:39Ma mère est une personne qui s'est dédiée à l'éducation de ses cinq enfants et mon
04:45père travaillait pour subvenir aux besoins de la famille.
04:48Heureusement, nous n'avons jamais manqué de rien.
04:50Pour se financer, les FARC ont pratiqué des enlèvements en échange de rançons.
04:57Helmut Angulo, lui, n'a jamais revu ses parents.
05:03Depuis 20 ans, cet ingénieur en mécanique cherche le corps de son père.
05:13Au revoir maman, dans quinze jours je reviens te rendre visite, je serai de nouveau à tes
05:26côtés.
05:27Prends soin de moi, aide-moi à trouver papa, s'il te plaît aide-moi avec papa.
05:32Sympathisant des FARC lors du conflit, John Leone fut également leur conseiller durant
05:46les accords de paix.
05:47Aujourd'hui, il dirige une organisation de recherche des disparus et accompagne Helmut.
05:54Oui c'est vrai que leurs attentes pour notre père sont très importantes, mes frères
06:02me laissent faire et quoi qu'il arrive, ils me soutiennent dans ma démarche.
06:05Mais je sais aussi que tout le monde est épuisé, ça fait tellement longtemps que ça dure.
06:12Toute cette histoire les a vraiment marqués, mais il n'y a pas le choix.
06:15Mais bon, ma famille ne s'attend pas à ce qu'on baisse les bras et je pense qu'ils
06:21veulent continuer les recherches.
06:22Je viens tout juste de recevoir une nouvelle information, ça fait un moment que nous parlons
06:31avec cet homme mais qui, comme vous le savez, n'est pas très ouvert à la conversation.
06:35Et ce que je viens d'apprendre c'est qu'en fait son frère faisait partie des FARC, et
06:44lui il sait que les FARC ont voulu déplacer mes parents ailleurs.
06:46Selon lui, l'objectif n'était pas de les assassiner mais seulement de les déplacer.
06:50Le problème est que ma mère n'avait plus la force de marcher et c'est pour ça qu'ils
06:57l'ont tué.
06:58Mais seulement ma mère.
07:01Mon père, lui, a continué de marcher après avoir vu son épouse mourir.
07:04Toutes ces relations sont très importantes pour comprendre à qui nous parlons et comment
07:10s'adresser à eux.
07:12Helmut et John Leone sont accompagnés d'une anthropologue, d'une psychologue et d'un
07:17avocat.
07:18Nous devons nous organiser et prévenir l'unité de recherche que nous aimerions retourner
07:24sur place.
07:25Mais je voulais aussi vous proposer autre chose, c'est que nous cherchions du côté
07:32de l'autre frère.
07:33Pas à pas, il reconstitue les événements qui ont mené à l'assassinat de ses parents.
07:41Grâce à ce travail impliquant d'anciens FARC, Helmut a pu retrouver il y a deux ans
07:46le corps de sa mère.
07:47Tout commence à partir des informations qu'Helmut m'apporte.
07:53Par exemple, ils ont le surnom des gens, le nom de certains lieux, les différents liens
07:59entre les familles.
08:00Et moi ensuite, je peux relayer ces informations vers les personnes qui étaient présentes
08:05à l'époque et qui connaissent parfaitement la zone.
08:07Parce que malheureusement, il y a des gens qui ne veulent pas parler avec Helmut pour
08:12différentes raisons qui leur appartiennent.
08:14Mais l'important, c'est que moi, je récupère ces informations, que je les analyse pour
08:20prendre des décisions.
08:26En Colombie, la justice transitionnelle mise en place suite à l'accord de paix s'inspire
08:31en partie de l'exemple sud-africain.
08:35Les responsables de crimes de guerre ont un devoir de vérité et de réparation envers
08:40les victimes.
08:44L'un des piliers de cette justice, la juridiction spéciale pour la paix, a pour mission de
08:49juger les personnes impliquées dans le conflit armé.
08:52Jusqu'à présent, aucune peine n'a été prononcée.
08:59La Colombie a opté pour un modèle de justice restaurative et non pour un modèle punitif,
09:05ni pour un modèle carcéral ou un modèle de détention, mais bien pour un modèle de
09:10réhabilitation et de réparation.
09:13Nous avons choisi ce modèle parce que c'est un moyen différent de rechercher et d'accéder
09:17à la paix.
09:18En ce sens, ce modèle de justice restaurative place les victimes au centre, répare les
09:23dommages qui leur ont été causés et nous permet également de parvenir à une paix
09:27stable et durable.
09:30Si les responsables des crimes les plus graves assument leurs responsabilités et apportent
09:35une contribution complète et détaillée de la vérité, une vérité qui permet de
09:39clarifier les faits et de comprendre les schémas criminels, dans ce cas, ils peuvent
09:44bénéficier d'une sanction de restriction des droits pendant 5 à 8 ans, sans peine
09:49de prison.
09:50Pendant ces 5 à 8 ans, ceux considérés comme responsables doivent réaliser des travaux
09:58et des activités dans un but de réparation.
10:09Depuis les accords de paix de 2016, les FARC sont divisés.
10:24Présents dans plusieurs régions du territoire, de nombreux combattants n'ont jamais accepté
10:29de déposer et de rendre les armes.
10:31Darwin est l'un des commandants du Front 33, déployé dans le Nord-Est, une unité
10:40des FARC qui opère à la frontière du Venezuela.
10:43Pour éviter d'être repéré, ce commandant nous a donné rendez-vous quelque part au
10:50milieu d'une jungle.
10:51Nous n'avons jamais cru au processus de paix de 2016, la seule mesure qu'ils ont
11:00accomplie fut de désarmer les FARC, mais pour tout le reste, tout ce qui concerne les
11:10problèmes de fond qui touchent les régions et tout le pays, rien n'a été résolu.
11:14Qu'est-ce qu'on demande ? Qu'il y ait une santé de qualité, qu'il y ait un accès
11:21à l'éducation, qu'il y ait de l'emploi, qu'il y ait des logements, et par-dessus
11:30tout, que l'on procède à une réforme agraire dans le pays.
11:37Sur cette question, nous sommes l'un des pays les plus en retard, nous n'avons pas
11:42encore engagé de réforme agraire, et cela n'a fait qu'intensifier les guerres dans
11:47notre pays.
11:48C'est pourquoi, je vous le dis, tant que les causes profondes à l'origine de ce conflit
11:58ne seront pas réglées, l'organisation continuera de grandir.
12:02Le président colombien Gustavo Petro a obtenu une trêve avec les Farc.
12:17Loin des grandes villes, les accords de paix peinent à être appliqués.
12:23Le texte prévoyait d'éradiquer progressivement les plantations de coca, mais la Colombie
12:31reste le premier producteur mondial de cocaïne, et son trafic alimente les violences dans
12:36le pays.
12:37Dans le nord du Catatumbo, la coca est la principale culture des paysans.
12:45« Ça c'est mon champ, il fait à peu près deux hectares.
12:56»
12:57Emel Sanchez, producteur de coca, déplore la prolifération de cette culture illégale.
13:04« Il y a plusieurs variétés, il s'agit d'une plante qui s'appelle chipera, celle-ci
13:13tue, et celle-ci est encore une autre variété.
13:16Pourquoi on surnomme la coca le ministre de l'éducation ? Parce que grâce à ce que
13:23cette plante rapporte, nous pouvons acheter des livres pour que les enfants étudient.
13:27S'il faut des vêtements de sport pour l'école, on peut les acheter grâce à cette plante.
13:34Et c'est aussi notre ministre de la santé, avec l'argent qu'on gagne, on peut aller
13:41à l'hôpital, soigner nos enfants malades et acheter des médicaments.
13:45»
13:46« La coca rapporte, mais ça profite surtout aux narcos qui l'exportent, ça oui, ça
13:54leur rapporte.
13:55Mais nous, en tant que paysans, on est juste des esclaves de la coca.
13:59Elle nous permet tout juste de survivre.
14:01Si le gouvernement créait des routes, nous pourrions avoir d'autres cultures et nous
14:07pourrions créer des coopératifs dans lesquels nous regrouper et transporter nos récoltes.
14:11Et comme ça, on éradiquerait la coca.
14:14»
14:15Dans ces zones rurales délaissées par l'État, l'engagement d'un accès à l'éducation,
14:27à la santé, à l'emploi et même à l'eau potable n'a pas été respecté.
14:31Les espoirs de paix suscités par les accords se sont évanouis.
14:37Maria est une jeune paysanne originaire de la région.
14:42Elle vient de rejoindre le groupe de recherche d'Arsenio pour travailler comme cuisinière.
14:47« Quoi, quoi, quoi ? C'est triste, tu sais ? C'est vraiment terrible ! Il faut
14:58être sérieux ! »
14:59Comme beaucoup de jeunes du Catatumbo, la fille de Maria envisage de rejoindre un groupe
15:04de FARC et de quitter ses parents.
15:06« C'est compliqué, tu sais ? Mais qu'est-ce qu'on peut faire ? Mais au pire, on y va,
15:15on la cherche.
15:16Si je dois y aller, j'y vais ! »
15:17« Ici, il n'y a aucune opportunité pour les jeunes.
15:31Il n'y a pas de professeur, il n'y a aucun établissement de santé, rien non plus pour
15:38les premiers soins.
15:39Le résultat de tout ça, c'est que beaucoup de personnes et surtout de nombreux jeunes
15:46choisissent de rejoindre des organisations armées.
15:48Et ce n'est pas parce qu'ils le veulent, mais parce que c'est leur seule option.
15:50Moi, j'ai une fille de 12 ans et pour plusieurs raisons, je suis sur le point de la perdre.
16:01J'ai deux petites filles aussi, en bas âge.
16:06J'ai deux garçons à la maison aussi.
16:13Il n'y a rien pour eux ici.
16:17Et malheureusement, oui, oui, bien sûr, j'ai peur.
16:22Je ne veux pas que mes enfants aient la même vie que la nôtre.
16:24J'ai peur de les perdre.
16:27Le gouvernement parle de paix, mais tant qu'on aura faim, il n'y aura pas de paix.
16:47Depuis leur désarmement, et par peur de représailles, les anciens Farc vivent sous
16:57protection.
16:58Pour Arsenio et son groupe d'anciens combattants, le retour à la vie civile est souvent très
17:04compliqué.
17:05Réintégrer la société n'a pas été facile.
17:14Ça m'a même été très difficile.
17:16Nous avions appris à vivre en communauté et nous formions une famille, une famille
17:26unie.
17:27Retourner dans la société a été un choc, car on n'y retrouve pas de solidarité, de
17:32fraternité, de camaraderie.
17:33C'est la politique du chacun pour soi.
17:35C'est très dur d'assimiler les codes de la vie en société et le retour dans ma famille
17:44se fut...
17:45Comment dire ? J'étais très émue de voir qu'elles vivaient toujours dans les mêmes
17:53conditions.
17:54On a tant lutté pour obtenir des changements et, malgré tout, on constate que rien n'a
17:58évolué.
17:59Même avec le processus de paix, les conditions de vie en Colombie continuent d'empirer chaque
18:04jour.
18:05Ces anciens guerriers-héros restent nostalgiques des années de résistance passées ensemble.
18:14Ils sont encore attachés aux convictions politiques des Farcs.
18:19Je pense que quand on croit en ses idéaux, quand on défend des principes, alors on se
18:35bat pleinement et avec détermination.
18:37On est prêt à donner sa vie pour ses convictions et pour l'amour de la nation.
18:44On s'est toujours battu pour un autre système, guidé par un autre idéal de société.
18:51On défendait la cause des prolétaires, des plus défavorisés et des plus pauvres de ce
18:58pays.
18:59Nous étions l'armée du peuple.
19:03L'armée de ceux qui n'ont rien.
19:06Pour Arsenio, comme pour les autres Farcs qui ont rendu les armes, le plus dur reste
19:20à faire.
19:21Obtenir le pardon des victimes.
19:23Ce processus est lent.
19:27À Bogotá, Helmut et John Leone ont mis du temps à entamer un dialogue.
19:39Entre nous, ce fut d'abord très difficile.
19:46Oui, c'est évident.
19:47La première fois que l'on s'est rencontré avec John et que l'on s'est assis l'un à
19:51côté de l'autre, on se regardait vraiment du coin de l'œil et on ne se parlait pas.
19:55Et puis, au fur et à mesure, on a commencé à échanger un peu plus.
20:00Il m'a aussi expliqué les souffrances des Farcs, leurs histoires plus personnelles.
20:05J'ai compris que souvent, ils n'avaient pas eu d'autre choix.
20:07Parler de réconciliation dans les accords de paix est une chose, mais s'y confronter,
20:19en est une autre.
20:20Personne n'est préparé à tout ça.
20:22La famille d'Helmut n'était pas prête à rencontrer les Farcs, à leur parler et
20:27à écouter ce qu'ils avaient à dire sur ces parents assassinés.
20:30Et c'est aussi vrai pour les Farcs.
20:35Ils n'étaient pas prêts à se montrer ou à répondre.
20:38C'est quelque chose qu'ils faisaient et qui continue de faire peur à tout le monde.
20:42Personne n'est prêt à une telle confrontation.
20:45Pour avoir pris part aux accords de paix aux côtés des Farcs, John Leon est menacé
20:54de mort par des groupes paramilitaires d'extrême droite.
20:57Il vit désormais sous protection.
20:59A l'image de la société colombienne, la famille d'Helmut Angulo est très divisée.
21:10Sa sœur aînée et sa femme n'approuvent pas cette justice transitionnelle.
21:14Je ne comprends pas comment mon frère peut fréquenter ces personnes, comment il peut
21:25leur parler.
21:26Mais j'essaie de me dire que ce sont des gens comme nous, que c'est la situation politique
21:33et leur conviction qui les ont amenés à être ce qu'ils sont.
21:39Moi, la vérité, c'est que j'aimerais qu'ils aillent en prison, au moins un petit peu,
21:44qu'ils payent un minimum.
21:46Mais je ne suis pas d'accord avec l'idée qu'on ne leur fasse absolument rien.
21:51Savoir que les Farcs parlent de pardon et que ça n'aille pas plus loin, ça me paraît
22:04un peu trop facile comme situation.
22:05Selon moi, on ne prend pas assez en compte la douleur que ressentent les familles.
22:11J'accepte de collaborer avec d'anciens Farcs parce que ce sont aussi des gens qui
22:22ont souffert.
22:23Disons que je travaille beaucoup avec eux aussi dans le but de pouvoir aider d'autres
22:27personnes, d'autres familles qui ont perdu des proches, qui ne savent pas où ils sont
22:31et qui les cherchent.
22:32C'est pour ça que le pardon est nécessaire.
22:34Il est nécessaire pour que je puisse avoir l'esprit tranquille, mais aussi pour que
22:38je puisse aider les autres.
22:39J'ai la conviction que nous devons travailler sur ce point, sur cette question de réconciliation,
22:44parce que nous ne pouvons pas continuer à nous entretuer.
22:46Arsenio et les anciens Farcs de son groupe vont continuer leur travail de réconciliation
23:09nationale.
23:10En tant qu'ancien combattant des Farcs, en tant qu'ancien chef dans cette région
23:20et en tant que signataire des accords de paix, je ne suis pas satisfait car cette fois-ci
23:28nous n'avons trouvé aucun corps.
23:30Merci à tous pour vos recherches.
23:34La prochaine fois, nous reviendrons avec des informations plus précises pour continuer.
23:41Tant que l'on n'aura pas rendu tous ces corps à leur famille, on portera comme un
23:48poids sur nos épaules.
23:49Ce n'est pas une mission que l'on peut décider d'abandonner.
23:52On doit la mener jusqu'au bout.
23:54Sur l'ensemble du territoire, plus de 100 000 personnes sont toujours portées disparues.
24:02Huit ans après les accords de paix et la mise en place d'une justice transitionnelle,
24:09la situation reste fragile.
24:11Dans plusieurs départements du sud de la Colombie, le cessez-le-feu avec les Farcs a été rompu
24:19et les combats ont repris.
24:39Sous-titrage Société Radio-Canada