Carlos dit Le Chacal, le mercenaire sans frontières

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Ilich Ramírez Sánchez, dit Carlos ou le Chacal, fut surement l'homme le plus recherché au monde.
Connu pour son habileté à rester dans la clandestinité, il fut condamné par la justice française à la réclusion criminelle à perpétuité.
Qui était réellement cet homme qui a fait trembler la France entière ?
Transcript
00:00Le terroriste le plus recherché au monde, l'insaisissable Ilich Ramirez Sanchez, alias
00:27Carlos, dort ce soir à la prison de la Santé, à Paris, arrêté à Khartoum, au Soudan.
00:32Il a été extradé vers la France, Carlos est impliqué dans une longue série d'attentats
00:36meurtriers en Europe, les plus particulièrement en France, attentats qui ont fait au total
00:4083 victimes.
00:41Arrivé ce matin à l'aéroport militaire de Villacoublet, Carlos est d'abord conduit
00:45dans les locaux de la DST.
00:47Quatre heures après, il est emmené en trombe à la prison de la Santé.
00:51Ce soir, l'ennemi public numéro un dormira derrière les barreaux, la cavale du sanglant
00:56mercenaire est terminée.
00:57En vingt ans, le chacal a grossi.
01:02Le voici photographié récemment dans une rue de Khartoum, au Soudan.
01:05Ilich Ramirez Sanchez est né le 12 octobre 1949, à Caracas, au Venezuela.
01:17Son père, filmé ici contre son gré bien des années plus tard, un avocat aisé et
01:34communiste.
01:35Un père, marxiste convaincu, marxiste authentique, tellement qu'il va baptiser ses trois garçons
01:42Carlos Ilich, Lénine, Vladimir Ilich-Lénine, les noms symboles du communisme.
01:49Ilich fréquente ce collège, mais les études l'intéressent moins que la politique.
01:57A 15 ans, il rejoint la jeunesse communiste.
01:59Avec sa mère Elba, Ilich et ses deux frères s'installent en 1966 à Londres, rapide escale.
02:06En 1968, Ilich est à Moscou, où son père l'a inscrit à l'université Patrice Lumumba.
02:16Là encore, les études ne sont pas au centre de ses préoccupations, ainsi qu'en témoigne
02:21Gustavo Machado, un ami du père.
02:23Je les ai vus à Moscou et ils n'étudiaient pas.
02:28C'était des gens sans contrôle.
02:30Ils recevaient beaucoup d'argent.
02:32Ils faisaient de la politique.
02:35Non, non, de la politique, non.
02:37Ils faisaient des épisodes, qui avaient beaucoup d'argent, qui avaient des guitares, des jeunes filles, tout ça.
02:46Il paraît qu'il était un homme, une femme.
02:48Un homme, oui.
02:50Un ancien co-disciple se souvient fort bien d'Ilich.
02:54Il avait de l'argent et à cause de ça, il avait des problèmes avec les services d'ordre de l'université Lumumba.
03:00Parce que très souvent, dans sa chambre au foyer des étudiants, il y avait des scandales.
03:08On buvait, on cassait des bouteilles, il y avait des filles.
03:13C'était une personnalité indépendante.
03:15C'était une personnalité forte sur sa santé.
03:19Et en plus, c'était un homme de conviction.
03:22C'est un fou de marxisme, mais pas de marxisme scientifique, de l'économie politique de capital de Marx.
03:29C'était un activiste.
03:30C'était romantique.
03:32Carlos était viré de l'université Patrice Lumumba au bout de deux ans.
03:36Alors la version officielle, l'explication officielle, c'est indiscipline.
03:40Pour certains observateurs occidentaux, projet SCIA, il faut l'en connaître, on dit que c'est la couverture idéale pour un futur agent du KGB.
03:49Moi, je ne suis pas certain que Carlos ait été recruté comme agent du KGB.
03:55Je veux dire que la personnalité, le profil du personnage, sa mégalomanie, son côté indocile, son côté incontrôlable, on ne fait pas forcément un très bon agent.
04:12Après Moscou, le Vénézuélien tourne son regard vers le Proche-Orient.
04:16Au lendemain de la guerre des 6 jours, des dizaines de milliers de réfugiés palestiniens s'entassent dans les camps.
04:21La question palestinienne est devenue cruciale dans la région.
04:26Un nouveau leader, Yasser Arafat, surgit à la tête de l'OLP, Organisation de Libération de la Palestine.
04:41C'est lui qui est à la tête de l'organisation la plus importante du point de vue numérique, qui s'appelle le FATAR.
04:47Et puis à sa gauche, il y a un certain nombre d'organisations qui existent ou qui vont rapidement exister.
04:53Notamment le Front Populaire de Libération de la Palestine de Georges Abach.
05:08Le Front Populaire de Libération de la Palestine va se proclamer marxiste-léniniste.
05:12D'une part, il dit, nous n'avons pas seulement comme ennemi l'impérialisme américain, nous n'avons pas seulement comme ennemi le sionisme, nous avons également comme ennemi les états arabes réactionnaires.
05:22Donc nous sommes pour une révolution avec le fer de lance palestinien qui s'appuie sur les masses arabes et sur, éventuellement, les états progressistes.
05:32Voilà le discours de Georges Abach.
05:42Le FPLP, le premier, se lance dans les opérations spectaculaires de détournement et de destruction d'avions.
05:50L'écho est fantastique. Vous savez qu'entre terrorisme et médias, il y a une relation quelque peu perverse.
05:55D'un seul coup, les Palestiniens ont la une partout.
05:58Donc du côté des jeunes Palestiniens, d'ailleurs du côté des Arabes qui se veulent révolutionnaires, comme même ailleurs d'ailleurs,
06:06il va y avoir un impact sur toute une jeunesse européenne qui se sent d'ailleurs en symbiose avec l'anti-impérialisme dont se proclament et dont se réclament les Palestiniens.
06:18Donc tout ça va jouer. Il va y avoir un afflux considérable d'éléments qui vont s'enrôler auprès des organisations les plus radicales dont le FPLP est peut-être la plus importante.
06:39Attiré par la résistance palestinienne, Ilich Sanchez débarque à Amman en Jordanie en juillet 1970.
06:46Il a une recommandation pour Abou Charif, membre influent du FPLP, qu'il envoie dans un camp d'entraînement.
06:54C'est vers cette époque qu'Ilich prend son nom de guerre. Il s'appellera désormais Carlos.
06:59Il y avait des gens compétents au FPLP, l'entraînement militaire.
07:04En 1970, lorsque je suis arrivé au mois de janvier, j'ai été mené par un ancien de Saint-Cyr qui appartenait à une grande famille syrienne.
07:15Au début de septembre 1970, le FPLP détourne trois avions vers le désert jordanien de Zarqa.
07:21Les 400 passagers sont libérés avant la destruction des appareils.
07:27Lorsque le FPLP de M. Abbach détourne un avion d'une compagnie étrangère, le fait atterrir sur le territoire jordanien et commence à dicter ses desiderata à l'extérieur,
07:39alors à ce moment-là, le roi Hussein ne peut plus encaisser cette espèce d'imdiction chez lui.
07:45Et ça va amener le clash avec les Bédouins qui sont l'armée du roi de Jordanie.
08:16Pendant des semaines, les combats entre les troupes du roi et les Palestiniens font rage à Amman et dans les montagnes.
08:22Il y a des milliers de victimes.
08:25Pour les Palestiniens, ce sera septembre noir.
08:30Carlos, semble-t-il, combat aux côtés de ses camarades du FPLP.
08:35C'est là qu'il gagne ses galons de fédaillage.
08:46L'armée du roi de Hussein de Jordanie l'emporte de très loin.
08:51Les Palestiniens sont obligés de s'enfuir.
08:54Ils quittent le pays en direction du Liban qui est finalement le seul pays qui peut les accueillir.
09:03À Beyrouth, nouvelle capitale des Palestiniens, Carlos est recruté par Wadi Haddad, le grand patron des opérations spectaculaires du FPLP.
09:11Carlos, le militant, devient un terroriste.
09:15S'il était recruté et s'il a continué à travailler pendant près de dix ans pour le FPLP, de Georges Abbas, c'est par conviction idéologique.
09:24C'est-à-dire qu'il se considère comme un marxiste pur et dur et, je vous dis, un révolutionnaire même professionnel.
09:40Carlos part pour Londres où, officiellement, il donne des cours dans un collège.
09:44En fait, il jette les bases d'un réseau et recrute dans les milieux révolutionnaires sud-américains, par exemple Nidia Tobon, une jeune Colombienne.
10:14Je lui ai demandé quel genre de mouvement c'était et il m'a dit que c'était le palestinien.
10:19Je lui ai demandé pourquoi le palestinien, je ne comprends pas pourquoi, pourquoi pas le mouvement de l'Amérique latine ou du Venezuela ou de la Colombie.
10:29Mais en Amérique latine, il m'a dit qu'il y avait quelque chose de plus proche.
10:34Il m'a dit, ne sois pas folle, c'est parce que le palestinien est une partie du problème du Terreur.
10:39Le palestinien est créé et soutenu par l'impérialisme américain.
10:46Donc, si nous sommes convaincus que nous devons lutter contre l'impérialisme, nous pouvons lutter contre les palestiniens ou n'importe quel mouvement de libération.
11:00Les lignées de Scotland Yard sont en tuyauté sur Carlos. Il surveille ses planques, comme celle-ci, et le photographie à son insu.
11:30Je lui ai dit que c'était drôle de regarder cette pièce comme si c'était une femme, c'était ridicule.
11:42Il m'a dit, ne rigole pas, parce que c'est une extension de mon bras, donc je dois m'en occuper.
11:53Parce que tu sais ce qui se passe quand tu es impliqué dans ce genre de business et que tu as le mauvais bras, tu es en trouble.
12:01Et je lui ai dit pourquoi. Et il m'a dit, quand j'ai tiré sur la poignée, la pistole a tombé.
12:10Décembre 1973, Carlos signe son premier attentat. Sous prétexte d'antisionisme, il s'attaque à une personnalité juive.
12:17Ça s'est déroulé. La porte s'est ouverte, le bain s'est ouvert, et j'ai vu un fusil.
12:28Et la prochaine chose que tu te souviens, tu étais là.
12:47Après la mort du représentant du FPLP en Europe qui était Mohamed Boudia, un Algérien qui a travaillé pour l'FLN et ensuite qui a adhéré à la cause palestinienne,
12:58après sa mort lors d'un attentat d'une voiture piégée en plaqueur de Paris, Carlos a pris la succession de Boudia en compagnie d'un autre militant important du FPLP pour l'Europe qui était Michel Boucarban.
13:13Puis Carlos passe à l'action en organisant des attentats à l'explosif contre trois journaux qu'il juge très anti-palestiniens. L'Arche, l'Aurore, Minute.
13:23Un quatrième engin placé dans une voiture devant la maison de la radio n'explose pas. Ce n'est qu'un galop d'essai. Très vite, l'apprenti terroriste va se lancer dans des opérations d'envergure.
13:36Une des missions de Carlos en Europe était de jeter des ponts, d'entredire des relations avec tous les groupes révolutionnaires locaux, si j'ose dire.
13:45Donc en Allemagne, les Banda Bader, la Belgique, la France, l'Italie. Et puis également sont arrivés sur le marché du terrorisme international, si j'ose dire, l'armée rouge japonaise.
13:57A la fin de juillet 1974, un membre de l'armée rouge japonaise, Yukata Furuya, est intercepté par les policiers français, bien informés.
14:05On fait appel au service de Carlos pour faire libérer Furuya, qui est arrêté en juillet à Paris, parce que Carlos est un connaisseur du terrain européen.
14:17Et c'est tout à fait logique de s'entraider dans ce sens-là entre organisations dites révolutionnaires.
14:24Carlos, qui était en contact avec Furuya, monte une opération pour le faire libérer.
14:2913 septembre, Carlos est à La Haye. Il a choisi l'ambassade de France comme objectif. Il surveille les alentours du bâtiment lorsqu'une fusillade éclate.
14:3916h45, vendredi, trois hommes armés font irruption dans l'ambassade de France à La Haye.
14:44La police néerlandaise tente de s'interposer, deux policiers sont blessés, mais les terroristes réussissent à se retrancher dans le bureau de l'ambassadeur.
14:5218h, par une lettre lancée à l'extérieur, les trois hommes se font connaître.
14:56Ils sont japonais et appartiennent à l'armée rouge, une organisation de révolutionnaires fanatiques, tristement célèbre depuis le massacre de l'aéroport de Lod.
15:06Le commando réclame la libération de Yukata Furuya.
15:0920h15, le commando demande que Furuya soit transféré avant 3h du matin à l'ambassade de France à La Haye.
15:17Ils exigent en outre qu'un autocar soit mis à leur disposition pour gagner l'aéroport de Schiphol-Amsterdam, où un Boeing doit les attendre, prêt à décoller pour une destination inconnue.
15:26Dans la soirée, le gouvernement français accepte de transférer Furuya à Amsterdam.
15:3123h20, deux mistervains décollent de Villacoublay.
15:35Furuya est à bord de l'un des appareils, dans l'autre des membres de la brigade antiterroriste.
15:40Samedi, 0h45, les mistervains atterrissent à Schiphol-Amsterdam.
15:47A l'intérieur de la zone interdite, entourant l'ambassade de France et celle des Etats-Unis qui sert de quartier général au Néerlandais,
15:54les forces de police et l'armée s'installent en prévision d'une attente qui pourrait être longue.
15:59Derrière les fenêtres du 4e étage, le dramatique cuit-clos se poursuit.
16:03Cela fait maintenant plus de 42h que ces 11 otages, dont l'ambassadeur de France M. Jacques Sénard, sont retenus au 4e étage de l'ambassade de France à La Haye par le commando de l'armée rouge japonaise.
16:13Et ce matin, le ministre de l'Intérieur a passé une partie de la matinée à l'hôtel Matignon avec M. Chirac.
16:20Atmosphère un peu inhabituelle ce matin pour un dimanche dans la cour de l'hôtel Matignon.
16:24Le gouvernement se tient informé, heure par heure, de l'évolution des négociations avec les commandos japonais de La Haye.
16:31Le ministre de l'Intérieur, qui a passé une nuit blanche, a fait le point ce matin pendant plus de 2h avec le 1er ministre, M. Chirac.
16:39Carlos s'est replié à Paris. Une grenade est balancée dans le drugstore Saint-Germain. 2 morts, 30 blessés.
16:46Carlos revendique l'attentat au nom de l'armée rouge japonaise.
16:49Le gouvernement français, qui redoute d'autres actions, décide d'envoyer en Hollande le Boeing que les japonais réclament.
16:58Lundi, optimisme pendant la nuit, vers 4h du matin, plusieurs silhouettes se découpent dans l'obscurité devant l'ambassade de France.
17:05Les terroristes viennent de relâcher 2 de leurs otages, les 2 femmes employées de l'ambassade.
17:10Leur libération fait suite à l'arrivée sur l'aéroport d'Amsterdam d'un Boeing 707 d'Air France à bord duquel le commando japonais devrait s'échapper.
17:20À l'aé, après 3 longues journées d'attente, 3 longues journées d'angoisse, aujourd'hui c'est la journée de l'espoir.
17:25Vers 7h ce matin, le japonais Furuya sort du Mystère 20 où il se trouve depuis vendredi soir.
17:30En chemise, il me note aux mains qu'il est entouré de 3 policiers.
17:38Les preneurs d'otages acceptent d'être ravitaillés tandis que les négociations continuent.
17:44Le brouillard tombe sur la Hollande et avec lui revient l'anxiété, la tension.
17:48Les 9 otages s'apprêtent à passer une quatrième nuit d'affreuses incertitudes là-haut, au quatrième étage de l'ambassade de France,
17:55là où un mince ray de lumière filtre à travers des rideaux mal tirés.
18:03Mardi, le jour de la mort de Furuya.
18:06La lumière filtre à travers des rideaux mal tirés.
18:12Mardi, tout est prêt, le dénouement semble proche, des dizaines de journalistes attendent.
18:29Enfin, en début de soirée, les otages sortent par petits groupes.
18:34L'ambassadeur de France apparaît à son tour.
18:42Un car emmène les 3 membres du commando et les otages jusqu'à l'aéroport.
18:46La route est balisée par l'armée hollandaise.
18:52Après l'échange avec Furuya, l'avion s'envole avec les terroristes.
18:56Tout le monde est soulagé par ce dénouement sans drame.
18:59Mais personne n'a compris que l'auteur de l'attentat du drugstore est également le cerveau de l'opération de l'AE.
19:05Plus de 24 heures après la tragédie du drugstore de Saint-Germain-des-Prés,
19:09l'homme qui a jeté une grenade reste introuvable.
19:12Cheveux courts, cheveux longs, veste grise, complet bleu, les témoignages sont contradictoires.
19:19Nant d'identifier, Carlos peut poursuivre ses activités.
19:23Dans le contexte de l'époque, c'était les rivalités, la guerre entre Israéliens et Palestiniens.
19:29En tant que branche européenne du FPLP, Carlos devait accomplir cette mission,
19:35contre les intérêts bien sûr israéliens.
19:40J'ai vu l'avion d'El Al qui venait, où est actuellement l'avion Oka,
19:44mais il était en sens contraire, c'est-à-dire qu'il venait vers nous,
19:49et ensuite il se dirigeait vers là.
19:53Et je ne sais pas s'ils ont tiré dans l'avion d'El Al ou bien dans l'avion de l'Ayat.
19:59La roquette a raté sa cible et a touché un DC-9 yougoslave qu'elle a traversé de part en part.
20:12Nous nous sommes retournés à la première explosion,
20:14et ensuite la deuxième explosion a été très nette,
20:16et là j'ai bien vu qu'il y avait un type qui avait à l'épaule un long tube Kati,
20:22et qui a donné un coup, qui reculait dans une voiture blanche, une 504 blanche.
20:31Le véhicule qui a servi pour l'attentat, une 504 Peugeot, est retrouvé.
20:35A l'intérieur, sur la banquette arrière, le bazooka.
20:39Cet avion venait de Tel Aviv pour continuer pour Montréal et Yoyol.
20:44Monsieur le chef d'escale, selon toute probabilité, l'avion roulait sur la piste,
20:47c'est cet avion que l'on voulait atteindre, c'est l'avion d'El Al.
20:50Ah oui, en forme de probabilité, oui, c'était ça.
20:53Est-ce que vous pouvez dire que vous êtes au trois quarts sûrs qu'on voulait atteindre cet avion ?
20:57Trois quarts, je crois un peu plus que trois quarts.
21:01L'attentat provoque une vive émotion.
21:03La presse s'interroge sur l'identité des auteurs.
21:05Carlos, lui, dépité par le fiasco de l'opération, décide de recommencer.
21:11Huit jours plus tard, un tireur muni d'un autre bazooka gagne la terrasse de l'aéroport.
21:20C'est sur cette terrasse, exactement à cet endroit où je me trouve que les fédaïnes se sont installées
21:24pour tirer sur l'avion d'El Al qui va passer ici, juste en dessous sur la piste, en dessous de la terrasse.
21:30Au moment où ils s'apprêtent à tirer, un CRS qui se trouve sur la terrasse,
21:34alors qu'il se trouve ici derrière moi, tout à fait en haut, au troisième étage, les aperçoit.
21:39Il dégaine, il tire sur eux. Affolé, les fédaïnes se retournent.
21:44Ici, il faut imaginer que c'est dimanche et qu'il y a la foule du dimanche justement sur cette terrasse.
21:49Affolé donc, ils s'en vont par là, vers la porte de la salle du haut qui se trouve là.
21:54Pour couvrir leur retraite, ils dégoupillent plusieurs grenades et les lancent.
21:58Il y a plusieurs blessés. Il y a le CRS plus des blessés légers parmi la foule.
22:02Ensuite, en continuant leur course, ils se réfugient un peu plus à gauche, au fond du hall,
22:07là où il y a des toilettes et où ils vont s'enfermer avec dix otages.
22:11...
22:17En quelques minutes, Orly est cerné.
22:20D'importants renforts arrivent sur les lieux.
22:23En début de soirée, le ministre de l'Intérieur, Michel Poniatowski, est sur place.
22:28Par un papier passé sous la porte des toilettes, les membres du commando font connaître leurs exigences.
22:34Un avion pour le lendemain matin, 8 heures.
22:37On a eu un peu peur aux alentours de minuit, une heure du matin,
22:40parce que les policiers creusaient des trous dans la paroi pour voir ce qu'on faisait.
22:46Et ils se sont énervés.
22:49C'est à ce moment-là qu'ils ont tiré deux coups de feu.
22:51Ils ont tiré deux coups de feu qui ont atterri dans les portes.
22:55Et à ce moment-là, avez-vous eu très peur ?
22:58Oui, ils se sont vraiment énervés. On a cru vraiment qu'ils allaient tout faire sauter.
23:02Il y en a un qui a commencé à prendre une grenade, il l'a dégoupillée.
23:05Il l'a tenue dégoupillée pendant 2 heures dans sa main.
23:12Pendant toute la nuit, les négociations se poursuivent.
23:15Au matin, elles aboutissent.
23:18Ils ont été beaucoup plus confiants une fois qu'ils ont eu l'avion.
23:21Une fois qu'ils ont parlementé avec l'ambassadeur.
23:25Une femme et sa fille sont d'abord libérées.
23:28Les autres otages seront relâchés à leur tour.
23:31La situation emmène les terroristes.
23:34Ils nous ont dit que certainement se reproduiraient des nouveaux attentats en France.
23:37Ça, vous pouvez le signaler.
23:39Ils ont été très fermes là-dessus et ils sont prêts à recommencer.
23:43Carlos, que personne ne soupçonne, court toujours.
23:47Mais la DST est sur les traces de son camarade du FPLP, Michel Moucarbal.
23:54Notre attention avait été attirée par un Libanais nommé Moucarbal.
24:00Qui devait venir en France pour préparer des attentats terroristes.
24:06Et tout ça a été donné par un autre service de renseignement.
24:09Lorsque cet homme est arrivé à Paris, nous l'avons pris en surveillance.
24:13Et nous avons essayé de contrôler ses faits et ses gestes.
24:17Nous avons effectivement pu photographier Moucarbal en compagnie de deux personnes.
24:24Et l'une d'elles s'est avérée être Carlos, mais nous ne le savions pas.
24:29Pour éviter qu'il ne s'échappe, parce qu'il voyageait beaucoup, nous l'avons interpellé.
24:35Ce monsieur a été, je dirais, muet ou en tout cas très laconique pendant plusieurs jours.
24:44Un vendredi soir, il nous dit, écoutez, je suis en mesure de vous dire où vous pouvez trouver l'homme que vous cherchez à identifier.
24:51Et effectivement, il conduit donc un commissaire de chez nous et deux inspecteurs rouliers.
24:58Mais c'est là qu'il y a eu malheureusement, peut-être ce que les autres appelleront une bavure,
25:04mais c'est seulement après qu'on sait que c'est une bavure.
25:07Ces gens venaient pour faire un contrôle d'identité.
25:10Lorsqu'ils ont tapé à la porte, ils ont entendu du bruit, des gens qui discutaient, des gens qui parlaient, et ils ne se sont pas méfiés.
25:17Bon, ils ont interpellé les gens et lorsque Carlos a vu mon carbale avec les inspecteurs, il a compris qu'il avait été donné.
25:28Il est allé, alors sous prétexte d'aller chercher ses papiers, puisque les fonctionnaires de notre service lui demandaient de prouver son identité,
25:35il est allé chercher un vêtement dans lequel il y avait un pistolet.
25:38La réunion des terroristes rouliers est particulièrement animée hier soir vers 22h.
25:42Les locataires le remarquent quand les hommes de la DST pénètrent dans la maison accompagnés de celui qui a donné la bande.
25:48Ils présentent leur carte de policier à la concierge, sonnent à l'appartement, la porte s'ouvre et c'est la fusillade instantanée.
25:55Les Vénézuéliens ont reconnu leur ancien complice encadré par les inspecteurs.
25:59Ce sont 5, 6, 7, 8 détonations, une balle traverse même la cloison d'un voisin.
26:03Les inspecteurs Douce et Donatini sont tués sur le coup.
26:06Le commissaire est grièvement blessé.
26:08A 2h du matin, il était toujours en salle d'opération.
26:12Dans la confusion, Carlos réussit à s'enfuir sans encombre.
26:16Dans la rue, les policiers ne font pas attention à lui.
26:19Son signalement n'est toujours pas connu.
26:21Pourtant, quelques jours plus tard, la police française réussit à mettre un nom sur l'auteur de la fusillade.
26:27Dizaines de jours après, quand nous avons pu comparer effectivement les empreintes trouvées rue Toussier
26:32avec celles qui nous avaient été envoyées par la police vénézuélienne,
26:35nous avons pu identifier Carlos.
26:38C'était naturellement l'homme à battre.
26:40Nous avons à ce moment-là alerté effectivement d'abord tous nos correspondants étrangers.
26:45Nous leur avons demandé de nous donner la main pour le capturer.
26:49Nous avons essayé de dresser toutes sortes de souricières.
26:54Nous avons essayé d'obtenir de nombreux renseignements.
26:57Et vous savez, nous avons exploité des montagnes de renseignements pour essayer de le retrouver.
27:03Carlos a été un bon professionnel.
27:05D'abord parce qu'il a réussi à obtenir beaucoup de concours.
27:08C'est déjà important.
27:10Et ensuite parce qu'il a monté des opérations qui ont presque toutes réussi.
27:16Organisé par Carlos, la plus spectaculaire prise d'otage de l'histoire commence.
27:20Des militants de l'ultra-gauche allemande, comme Hans-Joachim Klein, participent à l'opération.
27:27C'est Wadi Haddad, chef militaire du FPLP, qui a conçu cette folle aventure.
27:31Il s'agit de s'emparer des ministres du pétrole de l'OPEP, réunis en conclave à Vienne.
27:38Comme vous pouvez le voir, il y a en ce moment quatre terroristes,
27:42dont une femme, qui s'est trompée dans le salle de conférence du ministère de l'OPEP.
27:49Elle a emprisonné environ 50 personnes, dont 12 ministres de l'OPEP.
27:53Les fenêtres et les portes du salle de conférence de l'OPEP ont été minées par les terroristes.
28:01En gravissant l'escalier, on a sorti nos armes,
28:04on a mis les gens qui étaient là le dos au mur, et chacun a fait ce qui était prévu.
28:23J'ai tenu l'instant d'Ardis en joue, mais sans dire un mot,
28:27parce que je ne voulais pas qu'il sache que je parle allemand.
28:32Donc, sans rien dire, j'ai essayé de faire signe à la standardiste d'arrêter de téléphoner.
28:39Comme elle ne réagissait pas, j'ai commencé à tirer sur les appareils.
28:45Mais c'était une sacrée bonne femme, c'était incroyable.
28:51Chaque fois que je tirais sur un appareil avec mon Beretta, une arme de type parabellum,
28:58ça fait un boucan incroyable.
29:02Elle, elle décrochait un autre combiné.
29:06Alors j'ai décidé d'en finir, j'ai vidé mon chargeur sur le standard.
29:16Et puis j'ai été demandée d'entrer dans le salle de conférence.
29:19Combien d'hommes étaient là ?
29:20Je ne l'ai pas vu, ils étaient tous sur le sol.
29:22Et comment avez-vous continué ?
29:24Toutes les personnes qui étaient là sont entrées dans le salle de conférence.
29:28Et chacun a dit qu'il devait rester sur le sol.
29:30Et ils ont parlé en arabe et en espagnol.
29:32Je n'ai pas entendu rien.
29:55Un homme de la délégation libyenne s'est précipité sur lui
29:59et a essayé de lui arracher son pistolet mitrailleur.
30:03Il a presque réussi.
30:05Là, Carlos a laissé tomber son pistolet mitrailleur.
30:09Et il a dégainé son pistolet.
30:15Il a d'abord visé l'homme à l'épaule.
30:18Ça fait très mal.
30:20Ça fait très mal.
30:22Alors que l'homme était donc hors combat,
30:24Carlos lui a vidé tout son chargeur dans le corps.
30:27C'était un massacre.
30:31De la pure frime.
30:33Un acte purement gratuit.
30:42A l'intérieur, des policiers surgissent, des coups de feu éclatent.
30:46Deux policiers sont blessés et évacués.
30:50Klein est atteint au ventre.
30:52Carlos accepte son transfert à l'hôpital.
30:55Ensuite, j'ai été évacué du bâtiment de l'OPEP
30:58sous la protection de l'ambassadeur d'Algérie à Vienne.
31:01Dans un premier temps, la police ne savait pas qui j'étais.
31:05Ils m'ont demandé en allemand si j'étais un otage ou un terroriste.
31:09Je leur ai répondu, du mieux que je pouvais en anglais,
31:12que mon nom de guerre est Engie.
31:21...
31:29N'oublie pas que nous avions 11 ministres de l'OPEP à notre merci.
31:34Une fois la nouvelle connue,
31:36les gouvernements de leurs pays respectifs ont commencé à téléphoner,
31:40à dire de ne pas donner l'assaut,
31:42d'accorder tout ce que nous demandions.
31:45Ils jouaient sur du velours.
31:47Les autres ne pouvaient plus rien faire.
31:50Comme l'a dit Carlos à la fin,
31:52on aurait pu faire danser Kraïski sur la table.
32:18...
32:27Les négociations avec les autorités autrichiennes durent toute la nuit.
32:31Pour tromper l'attente, Carlos, très détendu,
32:34discute avec les ministres otages.
32:48On a passé 26 heures ensemble.
32:50Dès le début, il a tenu à se faire connaître.
32:53Il s'est identifié comme vénézuélien.
32:55Nous avons parlé espagnol tout le temps.
32:57Il nous a dit que Carlos était son pseudonyme
33:00et que son vrai nom était Ilich Ramirez Sanchez.
33:05A l'aube, les exigences du commando sont acceptées.
33:08Un accord est trouvé.
33:11A 7h du matin, le commando embarque dans un car avec une partie des otages.
33:16Carlos salue avec effusion ceux qui sont libérés.
33:27Enfin, l'autobus s'ébranle.
33:40Sur l'aéroport, le DC-9 attend, immobilisé en bout de piste.
33:45Klein, blessé, est tissé dans l'appareil.
33:52Un peu plus tard, le bus arrive avec les otages.
33:55Carlos monte d'abord seul à bord pour voir si Klein est bien là.
33:59Puis, il donne le signal et tout le monde embarque.
34:15Pendant le vol, Carlos poursuit ses conversations avec ses prisonniers ministres.
34:46Il est un homme très ambitieux.
34:49Je pense qu'il veut beaucoup, mais qu'il veut être un héros.
35:01Oui, je devrais dire oui.
35:04Selon ses propres informations, il a dit qu'il collaborait avec les Libyens et avec les Irakis.
35:14Vous le croyez ?
35:17Je n'ai pas de raisons de le croire.
35:24Après un périple entre Algiers, Tripoli, Tunis, l'avion dont personne ne veut, se pose finalement de nouveau à Algiers.
35:34Carlos négocie avec les autorités algériennes, en particulier avec Bouteflika, le ministre des affaires étrangères.
35:42Les Algériens réussissent à convaincre Carlos de libérer les derniers otages.
35:46Carlos séjourne dans un grand hôtel d'Algiers, tandis que Klein est soigné à l'hôpital.
35:53Tous les membres du commando me rendaient visite.
35:56Un point qu'on peut révéler, entre temps, un soir, ils ont tous dîné avec Bouteflika, qui était alors ministre algérien des affaires étrangères.
36:04Il a dîné avec tout le commando. Il y avait Bouteflika, le chef des services secrets algériens, le chef de la police d'Algiers, et quelques autres personnalités.
36:13En tout cas, à l'issue de tout ça, Carlos est devenu très riche.
36:17Il a dû passer un accord moyennant contre partie financière, en particulier avec l'Arabie Saoudite et l'Iran.
36:25Pour mettre fin à l'opération ?
36:27Oui, pour arrêter.
36:28C'est-à-dire qu'il a encaissé beaucoup d'argent pour le commando ?
36:31Beaucoup d'argent. Il l'a voué presque ouvertement.
36:38Il te l'a dit, à toi ?
36:40Oui, oui. Et il a mis tout cet argent à l'abri en Algérie.
36:43Pour l'ensemble du groupe ?
36:45Pour lui, pas pour le groupe.
36:47Disons qu'il a servi de vitrine, il s'est promené pas mal, il était reçu par la police.
36:51Disons qu'il a servi de vitrine, il s'est promené pas mal, il était reçu un peu partout, par des chefs d'État,
36:56Arabes notamment, comme une vedette, je veux dire, c'était Carlos.
36:59Le mythe de Carlos est né quand même avec l'OPEP.
37:01À partir d'un certain moment, où il a peut-être fini par excéder un petit peu les services de renseignement du monde arabe,
37:09c'est devenu un mercenaire.
37:11L'un des membres influents de l'organisation palestinienne, Abou Charif,
37:16affirme qu'il y a eu une discussion très violente entre Walia Haddad et Carlos,
37:22qu'il l'a viré, qu'il l'a traité de mégalo,
37:25de type qui recherche absolument le végétariat,
37:28qu'il avait passé à côté des consignes,
37:32et dans ce sens-là, qu'il n'avait plus sa place au sein de son organisation.
37:35Effectivement, Carlos aurait été viré à ce moment-là, donc c'était en début 1976.
37:40Disons qu'au début, il avait certes des motivations politiques.
37:44Mais avec le temps, elles étaient devenues pratiquement inexistantes.
37:47Il ne s'agissait plus que de se forger une image de marque qui s'attachait au nom de Carlos,
37:53comme le chacal ou d'autres expressions reprises par la presse.
37:57Il travaillait beaucoup plus sur cette image-là que sur son image politique.
38:01Et il y a cette dérive qu'on peut constater par rapport aux idéaux de sa jeunesse,
38:04qu'il est devenu à ce moment-là un prestataire de service,
38:08dirigeant une multinationale du terrorisme.
38:11Carlos décide en 1978-1979 de créer son propre groupe,
38:15qui deviendra d'ailleurs baptisé par la police secrète allemande le groupe Separat.
38:20C'est à partir de là qu'il s'installe derrière le rideau de fer, etc.
38:27Au printemps 1979, Carlos installe son groupe derrière le rideau de fer, d'abord à Budapest.
38:33Dans la capitale hongroise, Carlos a auprès de lui Johann Weinrich,
38:37un extrémiste allemand qui devient son lieutenant,
38:40et Magdalena Kopp, l'ex-femme de Weinrich, qui est désormais la compagne de Carlos.
38:46Bénéficiant d'un pied-à-terre dans la capitale hongroise,
38:49le trio franchit les frontières avec de faux passeports diplomatiques.
38:52Au bout de quelques mois, les services hongrois s'aperçoivent de cette présence encombrante.
38:59Ils prennent le contact avec lui, naturellement avec l'autorisation de plus haut niveau de politique.
39:04C'est à l'encadre qu'ils l'entendent, qu'ils luent le rapport qu'ils sont là.
39:10Avec sa geste, ils disent qu'il faut qu'il se dégage plus rapidement que possible.
39:15Ça commence l'épopée de groupe Carlos, parce que finalement ça dure pendant 5 ans qu'il quitte la Hongrie,
39:21malgré la décision du premier secrétaire du Parti Socialiste, ou du Parti Communiste hongrois à l'époque.
39:27Même s'ils le nient, les Hongrois, ils ont soutenu, parce qu'ils ont donné une base, ils l'ont protégé.
39:34Ils ont laissé travailler.
39:36Naturellement, ils ont passé un accord tacite en disant que vous ne pouvez pas faire des opérations partant de la base de Budapest.
39:44Ils savent très bien que derrière le groupe Carlos, il y a des pays du Moyen-Orient, la Syrie, l'Irak, la Libye,
39:52qui sont des pays très importants économiquement pour les pays de l'Est, et notamment pour la Hongrie,
39:58qui vendent une grande partie de l'exportation de la Hongrie vers ces pays.
40:04Et ce sera trop difficile pour la Hongrie de trancher, ou l'expulser, ou les arrêter, ou les extrader.
40:11Jusqu'au jour où, lassé de la présence de Carlos à Budapest, les services hongrois se décident à lui demander fermement de partir.
40:18L'entrevue est filmée secrètement.
40:22Il y a un rendez-vous qui était filmé par le service secret à l'époque.
40:28Dans un bureau du ministère de l'Intérieur, ils étaient convoqués Carlos et Weindrich.
40:33C'est un film qui était le mur qui était percé.
40:36Et il y avait la caméra.
40:38D'un côté, il y a deux agents du service secret hongrois.
40:42En face, il y avait l'interprète.
40:44Et Carlos et Weindrich qui sont là-bas.
40:55Le service secret invente une histoire que l'Interpol est au courant qu'ils sont à Budapest.
41:01Il falsifie un document de l'Interpol et il le montre.
41:05Et on voit très bien sur le film que Weindrich qui surveille tout le temps, il prend des notes.
41:10Et ils ont fait une photocopie, c'était en noir.
41:13Déjà à la fin, Carlos et Weindrich savaient très bien que c'était un faux papier bidon.
41:17Mais ils ont très bien compris qu'il faut partir parce que maintenant c'est gênant.
41:22Ils sont partis.
41:26Après Budapest, en même temps qu'à Bucarest ou à Prague, Carlos et Weindrich partent à Budapest.
41:34Après Budapest, en même temps qu'à Bucarest ou à Prague, Carlos et son groupe installent une base à Berlin.
41:45Dans l'ex-RDA, le ministère pour la sécurité d'État, plus connu sous le nom de Stasi, un véritable État dans l'État, fiche des millions d'Allemands.
41:56À sa tête, le général Milke, filmé ici au cours de son procès dans les années 90.
42:01C'est Milke en personne qui s'occupe du groupe Carlos, comme le montrent les documents retrouvés dans les archives de la Stasi.
42:08Les rapports de la Stasi avec un certain nombre de services secrets, en particulier syriens et yéménites, étaient si denses
42:14que de toute façon une communication avec le groupe Carlos était extrêmement aisée à établir.
42:18Et pratiquement dès le début 80, un espèce de pré-protocole d'accord est passé entre la Stasi et le groupe Carlos.
42:25La décision définitive est prise le 26 juin 1980.
42:29C'est un protocole ultra secret signé personnellement par Elrich Milke.
42:33Et au sein de ce document, on lit que le protocole d'accord comprend un soutien au groupe Carlos,
42:40c'est-à-dire on lui offre un appartement ou une maison, on lui donne une voiture avec un numéro de l'RDA,
42:46on lui promet des fonds, on lui promet un téléphone spécial, on lui promet aussi un soutien complet,
42:54en particulier pour l'acquisition et la pénétration d'un certain nombre d'objectifs extérieurs,
43:00c'est-à-dire d'objectifs qu'on peut frapper avec une action terroriste, et évidemment un soutien en armes et en matériel.
43:06L'objectif premier de la Stasi était d'obtenir un maximum d'informations possibles sur la scène terroriste au niveau mondial.
43:13Carlos dans son comportement est un terroriste en goguette, c'est un homme qui est extrêmement peu prudent,
43:18et lorsqu'il se déplace par exemple dans les gros hôtels de Berlin, il fait la fête, il va boire, il fréquente les prostituées à Berlin-Est,
43:25ce qui met en rage Milke, parce qu'évidemment les observateurs des services secrets occidentaux repèrent très rapidement le groupe Carlos.
43:34De Berlin-Est, Wenrich prépare des actions en Europe de l'Ouest, comme l'indique cette lettre à Carlos.
43:39En particulier, un attentat contre la Maison de France, centre culturel situé à Berlin-Ouest.
43:46Pour des raisons politico-stratégiques, la RDA n'a rien contre une opération terroriste.
43:56L'attentat fera deux morts et des dizaines de blessés. Dans la presse, il n'y fait aucune mention de Carlos.
44:04Mais d'après les documents justement de cette époque, il y a d'autres objectifs français qui étaient préparés, qui étaient visés,
44:12en particulier le Méridien à Nice, l'université de Nice, l'ambassade de France en Italie étaient des objectifs qui étaient acceptés pratiquement par la RDA et par Milke,
44:22qui savaient fort bien ce qui se passait.
44:24D'après des rapports de la Stasi que j'ai là, Carlos effectuait de nombreux voyages à Moscou, qu'il avait des conversations,
44:32il entretenait des relations avec des gens haut placés au sein du gouvernement soviétique. Ça s'est établi.
44:40Pratiquement jusqu'en 87-88, il y a un centre qui est Moscou, d'où part absolument les ordres opérationnels, et il y a les autres services.
44:49La seule curiosité, c'est la problématique roumaine. Les Roumains sont véritablement le service secret qui va soutenir le plus activement Carlos pendant des années,
44:59en lui fournissant des armes, du matériel, des explosifs, en lui fournissant une base arrière, en accueillant ses partenaires,
45:06en les protégeant lorsque des informations parviennent aux services secrets roumains sur le repérage par un service, par exemple le service secret français de Carlos,
45:14dans telle ou telle région que les Roumains le savent.
45:16Immédiatement, une nouvelle est diffusée pour que Carlos puisse replier ses hommes, son matériel et son infrastructure.
45:22À cette époque, le groupe Carlos participe ou facilite la liquidation d'un certain nombre d'oppositionnels roumains.
45:29C'est l'attentat de Radio Free Europe. Radio Free Europe est frappée justement parce que c'est là où est constituée la principale base opérationnelle anti-Cheochescu,
45:38et c'est la fonction du groupe Carlos. En fait, il sert d'homme de main, de porte-pistolet pour un certain nombre de services.
45:46Carlos est à l'est, ses amis sont à l'ouest.
45:50Dans un parking de l'avenue Georges V, un couple qui s'apprête à monter dans une 504 Peugeot attire l'attention des vigiles.
45:57L'homme et la femme s'enfuient, mais ils sont rattrapés. Dans le véhicule, on retrouve 4 kilos d'explosifs.
46:10Le lendemain, le couple est identifié. Il s'agit de Magdalena Kopp et de Bruno Breguet.
46:16Breguet, qui a fait 7 ans de prison en Israël pour transport d'explosifs, n'est pas inconnu des services de police.
46:22Nous avions, nous, en charge Breguet depuis quelques temps, puisqu'on savait qu'il était là, et nous le surveillions de près.
46:29Nous savions que Breguet faisait partie de l'appouvance de l'équipe qui était en relation avec Carlos.
46:38Carlos est à Bucarest lorsqu'il apprend l'arrestation de sa compagne Magdalena Kopp et de Bruno Breguet.
46:44Quelques jours plus tard, le 25 février 1982, Carlos envoie une lettre de menace à Gaston Deferre, ministre de l'Intérieur du gouvernement français.
46:52Il demande la libération de ses amis avant 30 jours.
46:57Gaston Deferre avait demandé que cette lettre ne soit pas publiée, en tout cas qu'elle ne soit pas portée à la connaissance sur toute la presse.
47:04Bon, vous savez que dans cette lettre, on demandait la libération de Breguet et de Kopp avec une date limite.
47:12Faute de quoi, naturellement, Carlos menaçait de commettre de nombreux attentats en France.
47:19Il a authentifié cette lettre en mettant ses empreintes, et puis son écriture, nous l'avons identifiée également comme étant la sienne.
47:27Je prends très au sérieux cette menace qui pèse, je ne sais pas comment ni exactement quand, sur un certain nombre de personnages que j'ai le devoir de protéger.
47:41Hier soir, vers 20h40, le Capitole, lancé à 140 km à l'heure, est secoué par une énorme déflagration.
47:47Il se trouve alors à 18 km de Limoges, des tôles broyées, les pompiers, les services de gendarmerie, les sauveteurs bénévoles vont retirer 5 corps, pour la plupart mutilés, et 29 blessés, plus ou moins gravement atteints.
48:02Bonjour, il était un peu plus de 9h ce matin, en plein centre de Paris, rue Marbeuf, à côté des Champs-Élysées.
48:10C'est la panique dans la rue, où toutes les vitres des magasins ont été cassées par la violence de l'explosion.
48:18La bombe placée dans la voiture, une voiture Opel, qui avait été louée à Vienne, en Autriche, a explosé devant les locaux de l'hebdomadaire La Nation Arabe, à Luatan el Arabi.
48:34Un mort, plusieurs dizaines de blessés, aucun communiqué de revendication de l'attentat n'a été diffusé.
48:44Sans lien direct avec cet attentat, mais il s'agit tout de même d'une affaire de terrorisme, un autre sujet, le procès en correctionnel qui s'est déroulé ce matin à Paris, procès de trois amis du trop célèbre Carlos.
48:56Breguet et Coop n'ont rien voulu révéler, ils se sont contentés de dire nous sommes des soldats de l'Organisation Internationale Révolutionnaire, puis ils se sont ensuite totalement désintéressés de leur procès.
49:06Il y a trop de coïncidences pour qu'on puisse se permettre d'éliminer l'hypothèse Illich Ramirez Sanchez, alias Carlos.
49:13Première coïncidence, le 29 mars, à la fin de son premier ultimatum, c'est le capitol qui sautait.
49:18Deuxième coïncidence, le 15 avril, date initialement prévue pour le début du procès Breguet-Coop, un couple de fonctionnaires français est assassiné à Beyrouth.
49:28Ce jour-là, le procès a été reporté en raison de la grève des gardiens de prison.
49:32Troisième coïncidence, hier, la voiture piégée de la rue Marboeuf est immatriculée en Autriche, et il faut rappeler les différents attentats récents commis à Vienne contre des intérêts français, en particulier l'ambassade de France et les locaux d'Air France.
49:46Vienne est un fièvre du terrorisme et Carlos y a sévi déjà, mais ce faisceau de coïncidences n'exclut pas pour autant la piste syrienne.
49:55On peut imaginer sans peine que Carlos et les services secrets syriens aient pu mener une action conjointe.
50:01Alors que les Syriens aient voulu corriger ce journal qui les embêtait un peu, est-ce que Carlos en a profité pour faire pression sur la justice française ? C'est possible.
50:13Les autorités politiques ont par force voulu que la responsabilité de cet attentat soit attribuée aux Syriens, mais pour nous, il ne fait pas de doute, c'était Carlos.
50:28Je vous dirais que personnellement, d'ailleurs, j'ai fait l'objet d'une injonction formelle pour me dire de continuer à enquêter dans les milieux syriens et pas dans d'autres milieux.
50:39Est-ce que c'était lié à des négociations qui avaient lieu à l'époque par l'intermédiaire d'un avocat célèbre ?
50:50Maître Jacques Vergès, vous avez défendu ceux qu'on appelle les amis de Carlos hier, et ces trois coïncidences mentionnées par notre consœur vous font-elles réagir d'une façon ou d'une autre ?
51:02D'abord, je dirais qu'on parle de coïncidences, on parle de suppositions. Moi, j'ai défendu hier les deux amis de Carlos, comme vous dites, et je dois dire que je les ai défendus dans un climat exécrable.
51:16Je les ai défendus devant un tribunal qui avait sur lui, devant lui, un dossier, et ce dossier était rempli de mensonges, et dans ce dossier, l'argument principal contre mes clients était un document provenant d'Israël,
51:30document provenant d'Israël, d'une soi-disant personnalité israélienne entendue à Paris par des officiers de police judiciaire qui ont caché le nom de cette personnalité israélienne.
51:40Autrement, elles auraient dû avouer que cette personnalité israélienne était un agent secret !
51:44Un agent secret que la police française aurait dû arrêter, et quand elle avait son confident !
51:49Maître Vergès, je vous prie de vous calmer.
51:51Je n'ai pas à me calmer quand il s'agit de choses aussi tragiques et d'accusations que vous portez !
51:55Je n'ai porté aucune accusation, ni aucun de mes confrères, nous avons simplement énoncé...
51:58Eh bien, moi j'en porte ! Je porte ces accusations sur ce qui s'est passé hier !
52:01Vous permettez, Maître Vergès, vous n'êtes pas dans une cour, vous êtes dans un journal, nous vous avons demandé poliment de venir vous exprimer...
52:07Mais je suis poli !
52:08Nous vous avons posé des questions...
52:09Vous m'avez posé une question, je vous ai répondu.
52:11Bon, je vous prierai de répondre sur un ton qui n'est pas celui d'une cour d'assises.
52:16Selon le rapport de l'Astasie, effectivement, Jacques Vergès aurait servi d'émissaire entre le groupe Carlos et des hauts fonctionnaires de l'État français, du gouvernement socialiste de l'époque, dirigés par Pierre Montroy.
52:31On détaille ces relations à travers les rapports que fait Carlos auprès des membres du groupe Carlos, dont Weinrich à Berlin notamment.
52:40Personne, pour l'instant, n'a contesté l'authenticité de ce document.
52:44Bien entendu, alors Vergès, interrogé après la capture de Carlos, a affirmé qu'effectivement des négociations avaient eu lieu avec ces deux hauts personnages, ces deux hauts fonctionnaires de l'État français,
52:53deux hauts fonctionnaires qui, eux, nient farouchement avoir entamé une quelconque négociation avec l'émissaire du groupe Carlos.
53:01Je suis sûr qu'il y a eu une négociation pour faire cesser les attentats.
53:05C'est vrai que le juge d'instruction n'était pas d'appropriation de juge d'instruction à l'époque, qu'il aurait pu très bien envoyer les deux prévenus en assise, qu'il a préféré le correctionnel, qui, forcément, limitait les peines.
53:15Bon, ce juge d'instruction était Jean-Luc Debray, l'actuel ministre de l'Intérieur.
53:20On n'avait pas envie de fâcher, je veux dire, soit des pays comme la Syrie, enfin des pays arabes, ou le groupe Carlos, pour se retrouver avec une série d'attentats.
53:30De toute façon, je dirais que les négociations de ce genre surprennent un peu le profane, mais je pense qu'elles se pratiquent couramment.
53:39Magdalena Kopp purge ses trois ans de prison. A sa libération, elle retrouve Carlos, photographié ici à l'aéroport de Prague en 1986.
53:49Le couple s'installe à Damas, en Syrie.
53:54Mais la chute du mur de Berlin, les négociations pour la paix au Proche-Orient font de Carlos un terroriste à la retraite. Il s'est fait oublier, et on oublie.
54:04On a pensé que, devenu gênant, on s'était débarrassé de lui. Puis vous savez, avec l'âge, ça devenait un vieux terroriste.
54:13Au début des années 90, on demande à Carlos de partir de la Syrie, ensuite de la Jordanie. Il essaie de s'installer en Iran, ça ne marche pas, et c'est comme ça qu'il se retrouve en 1993 au Soudan.
54:27À Khartoum, Carlos mène la belle vie, comme le montrent ses images étonnantes prises par un cinéaste amateur.
54:43...
55:08Mais les services secrets du monde entier n'ont pas dit leur dernier mot.
55:13Depuis plusieurs mois, les Français étaient au parfum des activités de Carlos, de la présence de Carlos à Khartoum, de ses activités, des moyens de l'approcher et de capturer.
55:24C'est la déestée qui l'a repéré, et Rondo travaille pour la déestée.
55:27Philippe Rondo, homme secret, arabisan distingué, spécialiste du terrorisme, traque Carlos depuis 20 ans. C'est lui qui le retrouve à Khartoum, le file et le photographie à son insu.
55:39Hier matin, les autorités soudanaises nous ont fait savoir qu'elles avaient elles-mêmes identifié Carlos de façon certaine et qu'elles étaient disposées à répondre immédiatement au mandat d'arrêt émis par les autorités judiciaires françaises.
55:58...
56:05Pour récupérer Carlos, le gouvernement français a envoyé une équipe de spécialistes qui l'enlève littéralement et le ramène en France à bord d'un avion spécial.
56:13...
56:19Après 20 ans de cavale, le terroriste le plus célèbre du monde, qui a changé tant de fois de visage et d'identité, doit rendre des comptes à la justice française.
56:28...
56:35...

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