L'avocate Corinne Lepage lance une action collective sur les pesticides.
L'ancienne ministre vient de créer une plateforme pour rassembler toutes les personnes habitant à proximité de surface agricoles et qui auraient contracté une maladie en lien avec les produits phytosanitaires.
L'ancienne ministre vient de créer une plateforme pour rassembler toutes les personnes habitant à proximité de surface agricoles et qui auraient contracté une maladie en lien avec les produits phytosanitaires.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 - Le matin sur France Bleu Héro, la question du jour, l'épandage de pesticides sur les surfaces agricoles vous inquiète-t-il pour votre propre santé ?
00:06 Je vous cache pas Guillaume que lorsque j'ai vu la question, déjà je suis allé chercher le dictionnaire "épandage"
00:10 parce que là moi j'avais jamais utilisé ce mot, je l'avais jamais prononcé encore dans ma vie "épandage"
00:14 C'est le fait de diffuser quoi, c'est ça ?
00:17 Après j'ai compris une fois que j'ai lu dans le dictionnaire, mais sur le coup je me suis dit "les tendoirs, les tendages"
00:23 - L'épandage - Alors ça donne quoi les résultats ?
00:25 - Alors ça donne que vous êtes un peu plus de 200 à avoir voté, 207 très exactement et qu'à une très grosse majorité, on s'y attendait un petit peu
00:32 Vous répondez "oui" 78%, que vous êtes inquiet pour votre propre santé par rapport à cet épandage de produits de pesticides sur les surfaces agricoles
00:42 que vous soyez riverain ou pas, que vous les traversez en voiture, ça peut arriver aussi parfois on traverse en voiture un viticulteur ou un agriculteur
00:50 - Il faut avoir une voiture décapotable surtout pour que ce soit gênant non ?
00:52 - Bah même sans décapotable, si vous voulez les fenêtres ouvertes ça suffit
00:56 - Ah oui d'accord
00:57 - Enfin vous continuez à voter - Bien sûr
00:59 - Et puis surtout maintenant on attend vos appels
01:01 - Au 0467 58 6000, notre invité Maître Madeleine Babès, Montpellier-Rennes, avocat au sein du cabinet de Corine Lepage
01:08 - Bonjour Maître Babès - Bonjour
01:10 - Merci d'être venue nous rejoindre, vous travaillez avec Corine Lepage, avocate très engagée sur toutes les questions liées à l'environnement
01:18 elle a d'ailleurs été ministre de l'environnement dans le gouvernement Juppé, je crois, elle faisait partie de ce qu'on appelait à l'époque, c'était pas terrible comme formule, les Juppettes
01:27 et alors Corine Lepage lance une plateforme pour recenser, rassembler toutes les personnes qui habitent à proximité de surfaces agricoles
01:35 et qui auraient contracté une maladie ou une pathologie qu'ils estiment être en lien avec des produits phytosanitaires, c'est bien cela ?
01:43 - Oui c'est bien cela et pas uniquement en fait, c'est une plateforme d'action collective pour les victimes non professionnelles des pesticides
01:50 donc il y a trois typologies de dossiers en réalité, il y a les personnes qui sont malades, qui souffrent de pathologies
01:56 qui ont déjà été reconnues comme des pathologies pour les agriculteurs, donc des maladies pour lesquelles le lien de causalité si vous voulez entre la maladie et les pesticides a déjà été fait
02:06 ces maladies là c'est le cancer de la prostate, le lymphomaligno-neutrkinien et la maladie de Parkinson
02:12 - Trois pathologies bien précises - Trois pathologies bien précises
02:14 il y a également ensuite les personnes qui souffrent d'autres pathologies dont le lien cette fois-ci est à établir entre la dite pathologie et l'exposition aux pesticides
02:24 et une dernière typologie de dossier qui concerne les personnes qui souffrent de ce que l'on appelle un préjudice d'anxiété
02:33 c'est à dire des personnes qui ne sont pas malades mais qui ont peur parce qu'elles habitent à côté de lieux d'épandage
02:40 - Alors vous incitez ces personnes à se faire connaître parce que vous considérez précisément qu'elles ne le font pas suffisamment ?
02:49 Elles ne se font pas connaître, elles restent mûrées dans une certaine forme de silence en disant de toute façon ça sert à rien, j'arriverai jamais à prouver que...
02:58 C'est ça l'idée ?
03:00 - Alors nous l'idée si vous voulez c'est venue du fait, c'est une idée qui est mûrement réfléchie au cabinet depuis quelques années maintenant
03:05 en 2020 il y a eu la loi de financement de la sécurité sociale donc pour l'année 2020 qui a prévu la création d'un fonds d'indemnisation pour les agriculteurs
03:14 - Uniquement les agriculteurs ?
03:15 - Uniquement les agriculteurs
03:16 - Sans qu'ils aient approuvé le lien de causalité d'ailleurs
03:20 - Alors pour certaines maladies effectivement qui sont listées, tout ceci est très encadré évidemment
03:24 mais on a trouvé ça profondément injuste que des riverains qui sont dans les mêmes conditions que ces agriculteurs
03:30 ce qui ce n'est pire parfois parce que le riverain lui n'est pas protégé par exemple quand il y a un épandage ou n'est même pas informé parfois de l'épandage
03:35 on a trouvé ça profondément injuste qu'il n'y ait pas de fonds d'indemnisation pour ces victimes, c'est comme ça qu'est née l'action
03:41 et c'est vrai que des témoignages que l'on reçoit depuis quelques jours
03:46 on a beaucoup de personnes qui nous expliquent qu'effectivement elles n'ont pas beaucoup d'informations
03:50 qu'elles ont peur et que cette action leur permet d'avoir cet effet de groupe
03:54 qui les rassure aussi quelque part mais qui va permettre aussi de parler d'une seule voix
03:59 - Oui vous parlez même de rupture d'égalité entre d'un côté les exploitants qui n'ont pas besoin pour certaines pathologies
04:05 dont vous avez évoqué de prouver cette causalité
04:08 et les riverains, les personnes qui habitent à proximité de ces surfaces agricoles
04:13 qui ne sont pas logés à la même enseigne
04:15 - C'est une réalité - Un principe d'inégalité dit-on
04:17 - Exactement, c'est exactement cela parce que si vous êtes riverain et que vous souffrez d'une des trois pathologies que j'ai énoncées
04:23 vous n'avez pas effectivement de lien de causalité qui est prouvé
04:26 vous n'avez pas de fonds d'indemnisation pour vous, en revanche il en existe un pour les agriculteurs
04:29 - Alors l'objectif c'est quoi ? Alors c'est pas de porter plainte contre les agriculteurs
04:34 - Non du tout - C'est important de le dire, mais contre l'État en fait
04:36 - Exactement - Qui a laissé faire, c'est ça en fait l'idée
04:38 - Oui l'idée c'est de faire une action contre l'État pour sa carence en fait
04:43 l'État qui n'a pas pris de mesures adaptées, alors il existe vous savez des distances
04:48 qui doivent être respectées entre les lieux d'habitation par exemple et les lieux d'épandage
04:53 ces distances sont bien évidemment insuffisantes, ça va jusqu'à 20 mètres maximum
04:56 pour les produits les plus dangereux, mais 20 mètres c'est très largement insuffisant
04:59 c'est très documenté scientifiquement, au delà de 20 mètres bien évidemment il y a des résultats stigmatiques
05:04 - Un peu de vent, des choses comme ça - Bien sûr, ça va bien au delà des 20 mètres
05:07 donc c'est très insuffisant déjà comme réglementation et en plus de cela
05:10 une réglementation sans vérification, sans contrôle et sans sanction, c'est pas une réglementation
05:15 voilà donc on estime que l'État est en situation de carence et que cette faute
05:19 est de nature à engager sa responsabilité, c'est l'objet de cette action, vous avez bien fait de le rappeler
05:24 effectivement c'est aucunement dirigé contre les agriculteurs qui sont les premières victimes
05:28 d'ailleurs de ces pesticides, c'est effectivement une action indemnitaire engagée contre l'État
05:32 - L'épandage de pesticides sur les surfaces agricoles vous inquiète-t-il pour votre propre santé ?
05:37 c'est la question qu'on vous pose ce matin pour intervenir sur France Bleu Héros 04 67 58 6000
05:41 Magali de Montpellier est avec nous, bonjour Magali !
05:44 - Oui bonjour bonjour maître, je comprends votre démarche, elle est tout à fait légitime
05:51 maintenant quand je me mets à la place d'un viticulteur qui a eu ce produit entre les mains dans les années 70
05:56 et qui était magique, on lui dit maintenant tu vas arrêter de l'utiliser
06:02 et il ne peut pas parce qu'il a trop de surface, il ne peut pas repasser au lavour
06:07 enfin au travail du sol comme c'était avant donc il se retrouve coincé
06:12 et moi ce qui me fait peur c'est qu'on utilise de l'écologie pour monter les gens les uns contre les autres
06:18 je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait qu'il faut prendre des mesures
06:22 mais il faut accompagner les viticulteurs pour qu'ils aient un revenu suffisant pour revenir à l'agriculture sans le chimique
06:28 - Merci Magali, c'était tout le débat qui était au centre d'ailleurs du dernier mouvement de colère
06:35 des agriculteurs notamment qui réclamaient un assouplissement des normes environnementales
06:40 il y a un risque de reprendre la formule de Magali de monter les gens les uns contre les autres ?
06:47 - Effectivement c'est le risque et c'est justement ce que nous on ne veut pas faire avec notre action
06:50 c'est pour ça qu'on insiste bien sur le fait que ce n'est pas dirigé contre les agriculteurs
06:54 je comprends tout à fait la remarque qui est faite par Magali et elle a raison
06:59 c'est une peur légitime des agriculteurs, il faut évidemment que ça s'accompagne d'une vraie politique publique
07:04 d'agriculture avec une vraie réforme sur les modes de culture avec tout ce qui va avec si je puis dire
07:10 mais voilà l'objet de l'action effectivement c'est de ne pas monter, surtout pas, la société civile contre les agriculteurs
07:15 - Mais alors les personnes qui se manifestent auprès de vous, qui vont s'inscrire, en fait ça se passe comme ça ?
07:20 On s'inscrit sur la plateforme ?
07:21 - Tout à fait, elle s'appelle Agir collectivement, on s'inscrit sur la plateforme
07:26 - Qu'est-ce qu'elles peuvent en inspirer alors ?
07:28 Adhéminisation, on ne sait pas trop, le fait que l'État soit reconnu comme responsable
07:32 et que la réglementation change, c'est ça le premier des objectifs ?
07:36 - C'est effectivement l'objectif, l'aspect indéminitaire, j'ai discuté avec chaque victime qui s'est inscrite sur la plateforme
07:42 et l'aspect indéminitaire pour le moment est presque je dirais secondaire pour ces victimes-là
07:48 ce qui est très important pour elles c'est d'abord d'être reconnue dans leur statut de victime, ça c'est une première chose
07:52 la deuxième chose c'est que ça puisse faire effectivement évoluer les règles, c'est l'objectif pour l'avenir
07:57 c'est pour ça que l'action collective est intéressante, c'est parce que le poids, le nombre peut faire peser dans la balance
08:03 et peut, on l'espère, faire bouger les lignes en matière de réglementation
08:06 - Oui mais ça risque quand même d'être très impactant pour les exploitants aussi
08:10 parce que cette fameuse bande des 20 mètres, si demain elle est remise en question, on l'élargit, je ne sais pas, je vais dire 50-100 mètres
08:15 c'est beaucoup de surface agricole qui risque d'être concernée, comment vont-ils faire ces viticulteurs ?
08:21 - Il va bien évidemment falloir que là, c'est ce que je disais tout à l'heure, que ça s'accompagne d'une réelle politique publique
08:25 et qu'il y ait effectivement un accompagnement des agriculteurs, notamment sur l'aspect financier
08:28 - Dernier mot Maître Madeleine Babès, cette plateforme est ouverte depuis quelques jours
08:34 dans notre département, des personnes concernées, potentiellement concernées, se sont déjà fait connaître ?
08:40 - Oui tout à fait, j'ai échangé avec des personnes de l'Occitanie au sens très large, de l'Ero plus particulièrement
08:45 il n'y a pas de dossier enregistré pour le moment pour ces personnes-là, elles sont en train de constituer leur dossier
08:49 mais effectivement j'ai reçu plusieurs appels
08:51 - C'est une procédure qui risque de prendre un petit peu de temps non ?
08:54 - Oui ça va prendre du temps
08:55 - Quelques années c'est quoi ? Vous pensez que...
08:58 - Au minimum entre 18 mois et 2 ans je pense
09:01 en tous les cas il y a les premières requêtes qui seront déposées au mois de juin
09:06 et pour les personnes qui auraient besoin de davantage de temps pour constituer leur dossier
09:09 une deuxième série de requêtes si je puis dire sera déposée au mois de septembre
09:13 - Merci Maître Madeleine Babès, avocate au sein du cabinet de Corinne Lepage
09:18 qui lance donc cette action collective sur les pesticides ces jours-ci
09:22 et pour une durée de quelques semaines et quelques mois en tout cas pour se faire connaître
09:27 on rappelle le nom de la plateforme ?
09:29 - Agir collectivement et vous pouvez nous retrouver sur le site du cabinet Huglot Lepage, avocat
09:33 - Merci à vous, bonne journée - Merci beaucoup de votre accueil
09:35 - Vous pouvez réécouter cette interview, vous allez sur le site internet francebleu.fr
09:39 il est 7h55, dans 5 minutes les infos de 8h, petit Julien Clerc
09:43 ça fait de mal à personne, elle voulait qu'on l'appelle Venise
09:46 c'est sur France Bleu Euro ce matin, ce lundi
09:48 merci d'être là, on se réveille ensemble