• il y a 6 mois
La tête de liste La France insoumise Manon Aubry est l'invitée de la matinale spéciale sur France Inter, à moins de dix jours des élections européennes. Au programme : guerre à Gaza, lutte contre l'extrême droite et changement climatique. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-jeudi-30-mai-2024-9030435

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00:00 À dix jours maintenant des européennes, vous en connaissez le principe et le déroulé,
00:06 questions sur le programme et l'actualité avec Yael Ghos, puis trois zooms sur l'écologie,
00:12 l'international et l'économie.
00:14 Après neuf heures, deux jeunes électeurs nous rejoindront, ils votent pour la première
00:18 fois aux européennes et débattront avec la tête de liste.
00:22 Amis auditeurs, vous aurez la parole aussi bien sûr.
00:24 Je compte sur vous au 01 45 24 7000 et sur l'application de France Inter.
00:31 Manon Aubry, bonjour.
00:32 Bonjour.
00:33 Merci d'avoir accepté notre invitation, vous êtes tête de liste LFI, eurodéputée
00:38 sortante après l'entretien avec Yael Ghos.
00:41 Place donc aux spécialistes et aux éditorialistes de la matinale.
00:45 Célia Kyré vous interrogera sur la souveraineté écologique, Pierre Aschy sur l'Ukraine,
00:52 Dominique Seux sur les accords de libre-échange.
00:54 D'abord, question rituelle que nous posons à tous les invités de ces matinales spéciales
01:00 afin de situer l'enjeu de ces élections.
01:03 Réchauffement climatique, guerre en Ukraine, élection présidentielle incertaine aux Etats-Unis
01:10 en novembre prochain.
01:11 Les européennes du 9 juin sont-elles les plus importantes de l'histoire de ce scrutin ?
01:16 Elles sont sans doute une des plus importantes.
01:19 Vous savez, j'ai 34 ans, donc je n'ai pas forcément le recul de toute l'histoire
01:23 des élections européennes, ce d'autant plus que c'était mon premier mandat.
01:26 Mais j'observe quand même que c'était un mandat crucial.
01:30 On a fait face à plusieurs crises multidimensionnelles.
01:33 La crise du Covid, une crise énergétique, l'inflation, la guerre à nos portes.
01:38 Et il y a un certain nombre de dogmes aussi qui ont bougé sous ce mandat.
01:42 Pour la première fois, on a parlé de protectionnisme.
01:44 Les règles budgétaires qui organisent l'austérité ont été suspendues.
01:47 Et là, on est à cette croisée des chemins où on est en train de se le prendre comme
01:52 un immense retour de bâton.
01:53 On a sans doute la pire cure d'austérité face à nous, qui est la conséquence des
01:59 nouvelles règles budgétaires qui ont été votées par l'Union Européenne il y a à
02:03 peine quelques mois et qui se traduisent par des coûts budgétaires drastiques dans le
02:06 budget de la France.
02:07 C'est l'augmentation du reste à charge sur les médicaments, des coûts budgétaires
02:10 dans l'écologie, c'est nos hôpitaux, nos écoles, la réforme de l'assurance-chômage.
02:15 Et moi, je pense que ce scrutin, c'est aussi un grand référendum sur ce grand plan d'austérité
02:20 qui a des conséquences très concrètes dans nos vies, moins de soignants à l'hôpital,
02:24 moins de professeurs à l'école.
02:25 Donc, il y a énormément d'enjeux dans ce scrutin.
02:28 On est aussi dans un contexte politique national très particulier, d'un macronisme déclinant.
02:33 Il se pose la question de qui et comment construire l'après Macron.
02:36 Et conséquence de ces crises à répétition, l'extrême droite a un niveau inédit dans
02:41 les intentions de vote.
02:42 On parle de la France, à près de 40% si on additionne les listes de Jordan Bardella
02:46 et de Marion Maréchal.
02:47 Emmanuel Macron disait en Allemagne, à Dresde lundi, un « vent mauvais souffle en Europe
02:51 ». Regardons autour de nous la fascination pour les régimes autoritaires, regardons
02:55 autour de nous le moment illibéral que nous vivons.
02:57 Est-ce que vous partagez l'alarme du président de la République ?
03:01 Qui a fait souffler ce vent mauvais en Europe ? Qui a été le marche-pied de l'extrême
03:05 droite ? Qui a voté une loi immigration en France qui reprend les thèses de Jean-Marie
03:12 Le Pen sur la préférence nationale ? C'est précisément les macronistes.
03:16 Donc oui, on voit partout en Europe l'extrême droite progresser.
03:20 On voit qu'ils sont racistes, xénophobes, qui sont sexistes, qui s'attaquent systématiquement
03:27 aux droits des femmes.
03:28 Mais on voit aussi qu'en matière sociale, pardon, mais ils sont alignés avec les macronistes.
03:31 Quand il s'agit de voter contre l'ISF, contre la taxation des super-profits, contre
03:36 la hausse du salaire minimum, contre davantage de redistribution des richesses, contre des
03:40 écarts de salaire au sein des entreprises, ils votent systématiquement contre aux côtés
03:44 des macronistes.
03:45 Je le vois au quotidien au Parlement européen, on l'a vu à l'Assemblée nationale.
03:49 Donc ces espèces d'opposants, de confort, de ce petit duo entre les macronistes et l'extrême
03:55 droite… C'est un duo pour vous ?
03:56 Dans une certaine mesure, oui.
03:58 Les macronistes ont choisi leur opposition.
04:00 Parce qu'ils tentent de nous rejouer le truc de « c'est moi ou le chaos ». Personnellement,
04:05 je pense que ça ne fonctionne pas très bien en vue de leurs difficultés dans la campagne.
04:09 Mais surtout, c'est extrêmement dangereux parce que ça fait planer le danger de l'arrivée
04:14 de l'extrême droite au pouvoir.
04:15 On est à H-1 avant l'arrivée de l'extrême droite au pouvoir.
04:17 Et on l'a vu dans tous les autres pays européens ce que ça donne.
04:20 Et on a vu qu'à chaque fois que la gauche trahit son ambition sociale, trahit son ambition
04:26 écologique, elle installe l'extrême droite au pouvoir.
04:28 Donc, c'est aussi un de mes moteurs d'engagement en politique.
04:32 Je veux tout faire pour que le 9 juin, mais après aussi, on se donne les moyens de construire
04:39 autre chose, de tracer un horizon, un espoir.
04:41 On n'est pas condamnés à avoir l'extrême droite au pouvoir.
04:44 Après 9 juin, après !
04:46 Yael ?
04:47 D'abord, question sur la guerre à Gaza qui occupe une place prédominante dans la
04:51 campagne des insoumis, notamment à travers la figure de Rima Hassan, qui est 7ème sur
04:55 votre liste et omniprésente en meeting à vos côtés, aux côtés de Jean-Luc Mélenchon.
04:58 Est-ce que vous reconnaissez que la campagne LFI a et aura été dominée par Gaza ?
05:03 D'abord, ce n'est pas le seul sujet que l'on aborde dans nos meetings.
05:07 Je ne sais pas si Yael Ghos, vous avez eu l'occasion d'assister à un de nos meetings.
05:10 Non, mais nos reporters suivent votre campagne comme les autres candidats.
05:12 J'imagine que vos reporters ont pu témoigner du fait que c'est loin d'être le seul
05:17 sujet que l'on aborde dans cette question.
05:19 Dans cette campagne, on parle aussi, par exemple, beaucoup de la question de la vie chère,
05:23 comment bloquer les prix des produits de promo et de vie restaurée.
05:25 Oui, mais vous parlez beaucoup aussi de Gaza.
05:27 On a dit depuis le début, le moment où j'ai lancé ma campagne, c'était le 16
05:30 mars dernier, j'ai parlé de protectionnisme, comment mettre fin aux accords de libre-échange,
05:35 j'ai parlé de la vie chère et on a parlé de la paix.
05:37 Parce que oui, on ne détourne pas le regard sur le massacre qui est en cours dans la bande
05:41 de Gaza.
05:42 Vous les avez vus ces images ?
05:43 Massacre ou génocide ?
05:44 Oui, génocide.
05:45 Vous avez une rapporterie spéciale des Nations Unies, Francesca Albanès, qui a écrit un
05:49 rapport "Anatomie d'un génocide".
05:50 Mais on peut ergoter tant qu'on veut sur les mots.
05:53 Yael Ghos, vous les avez vus ces images, il y a trois jours, dans la nuit de dimanche
05:56 à lundi ? Un bébé décapité.
05:58 Des hommes et des femmes brûlés à vif.
06:01 Un camp de réfugiés pris pour cible par le gouvernement d'extrême droite de Benjamin
06:05 Netanyahou.
06:06 C'est un massacre sans précédent.
06:08 Et oui, l'Union Européenne a des leviers, devrait utiliser ces leviers.
06:12 Et nous n'avons eu de cesse de défendre pas seulement un cessez-le-feu, mais un embargo
06:16 sur l'envoi d'armes, la suspension de l'accord d'association entre l'Union Européenne et
06:20 l'Israël, la reconnaissance de l'État de Palestine.
06:21 C'est important parce que, je veux dire, la question qui nous est posée, c'est quelles
06:26 sont nos réponses politiques à apporter demain en tant que député européen, aujourd'hui
06:30 en tant que député actuel, parce que j'ai été bien seule à porter ces propositions
06:33 par le gouvernement européen.
06:34 Donc reconnaissance immédiate de l'État de Palestine ?
06:35 Oui, reconnaissance immédiate.
06:36 L'Espagne, l'Irlande, la Norvège, c'est important la Norvège dans l'histoire du Proche-Orient
06:41 avec les accords d'Oslo, le fond.
06:43 J'entends…
06:44 Emmanuel Macron dit pas sous le coup de l'émotion mais quand ce sera utile.
06:46 Pardon, deux choses.
06:47 La première, ça fait, moi, depuis que je suis née, que j'entends, François Hollande
06:52 devait le faire, Jacques Chirac devait le faire, Emmanuel Macron devait le faire.
06:55 Personne ne l'a fait.
06:56 Et puis je veux répondre à Emmanuel Macron.
06:57 Ce sera quand le bon moment ? Quand il n'y aura plus de peuple palestinien ? Quand ils
07:01 auront tous été tués sous les bombes israéliennes ? Quand ils auront tous fui ? Quand ils n'auront
07:06 plus d'Etat ? Vous allez reconnaître l'Etat de Palestine ?
07:08 On vous entend manombrer mais est-ce que ça justifie que votre 7ème de liste, Rima Hassan,
07:12 déclare dans un tweet le 26 mai, à la suite du bombardement Arafat, Israël, je cite,
07:17 est une monstruosité sans nom ? Est-ce que vous dites la même chose ?
07:21 Vous pouvez jouer sur les mots.
07:23 Non, non, non, mais est-ce que vous pensez qu'affamer une population, tuer sans discrimination
07:31 des civils, les priver d'eau, de médicaments, de nourriture, les priver d'aide humanitaire,
07:38 les faire fuir au sud de l'enclave Arafat, puis les bombarder Arafat, vous pensez que
07:43 ce n'est pas une monstruosité ? On peut dire Israël et Netanyahou, est-ce
07:45 que vous faites le distingueux ou pas ? Moi je n'associe pas l'ensemble de la population
07:50 israélienne au gouvernement israélien, ne serait-ce parce que, vous avez vu comme moi,
07:55 en Israël il y a aussi des mobilisations qui appellent à un cessez-le-feu, qui appellent
07:59 à la reconnaissance de l'état de Palestine, qui appellent à la libération des otages,
08:02 je pense que le meilleur moyen d'ailleurs pour libérer les otages, c'est d'avoir
08:06 un cessez-le-feu.
08:07 La dernière fois qu'il y a eu des otages libérés, c'est pendant un cessez-le-feu.
08:10 Mais vraiment, je vous appelle et je vous supplie à sortir du commentaire politique
08:16 pour essayer de se concentrer sur les réponses qu'on peut apporter.
08:20 C'est pas du commentaire politique, c'est une demande d'explication sur les mots.
08:23 Je crois avoir été très claire dans ma réponse.
08:26 Mais là, j'appelle vraiment toutes et tous, on ne peut pas voir un massacre à ciel ouvert
08:33 sans ne rien faire.
08:35 Et nous n'avons pas le droit international à géométrie variable.
08:38 Une vie israélienne vaut une vie palestinienne, vaut une vie ukrainienne.
08:42 Et en tant que députée européenne, on doit tout faire pour utiliser nos leviers.
08:46 Et je regrette d'avoir été si seule, y compris au Parlement européen, à demander
08:50 des sanctions à l'égard du gouvernement de Benjamin Netanyahou.
08:52 Marie Toussaint disait hier à ce micro, et je la cite, « la cause palestinienne est
08:57 juste, noble, elle ne peut pas faire l'objet d'une politique intérieure.
09:01 Je refuse d'importer ce conflit, c'est rendre la vie plus difficile à nos compatriotes
09:07 juifs et musulmans ».
09:09 Je ne vous demande pas là de faire du commentaire philosophique, mais de me dire ce que vous
09:14 pensez de cette position-là.
09:16 Je ne suis pas en désaccord avec ce que dit Marie Toussaint.
09:19 Vous savez, associer l'ensemble des juifs de France au gouvernement de Benjamin Netanyahou
09:29 est antisémite.
09:30 Et moi je n'associe pas l'ensemble des juifs de France, je ne pense pas que tout le monde
09:32 est d'accord avec ce que fait le gouvernement de Benjamin Netanyahou.
09:36 Et je pense que c'est notre responsabilité, moi je n'ai jamais confondu les deux, mais
09:41 je pense que c'est aussi notre devoir et notre responsabilité d'avoir des mots très
09:45 clairs à l'égard d'un gouvernement qui commet des massacres, avec la complicité
09:51 de l'Union Européenne, qui refuse d'agir par notre silence, par notre inaction.
09:55 On se rend complice, l'Union Européenne est le premier partenaire commercial d'Israël.
09:59 Pourquoi on ne suspend pas l'accord d'association ? Il y a des clauses de droits humains qui
10:03 sont manifestement violées.
10:04 La Cour pénale internationale, le procureur de la Cour pénale internationale, lance un
10:08 mandat d'arrêt.
10:09 La Cour internationale de justice a demandé l'arrêt de l'offensive à Rafa.
10:13 Je veux dire, c'est le droit international qui parle, on doit juste le respecter.
10:17 Revenons aux droits européens, la question de l'obéissance et de la désobéissance
10:22 aux traités européens.
10:23 En 2022, à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon prônait, je le cite, de « désobéir chaque
10:27 fois que c'est nécessaire pour mettre en œuvre le programme des insoumis ». Il évoquait
10:31 des sujets comme les normes environnementales, les travailleurs détachés, le budget, la
10:35 concurrence, la circulation des capitaux, qu'on comprenne.
10:38 Si ça vous plaît, on garde le traité, on le respecte.
10:41 Si ça vous plaît pas, on en sort.
10:42 On fait quoi ?
10:43 Je vais être très claire, on a posé un principe qu'on appelle un principe de non-régression
10:47 sociale et écologique.
10:49 Dit autrement, je vais vous donner des exemples précis.
10:51 Le marché européen de l'énergie, les règles du marché européen de l'énergie ont fait
10:54 exploser nos factures d'énergie, on l'a tous constaté, plus 45% en l'espace de deux
10:59 ans et la dernière réforme va encore empirer les choses en mettant fin aux tarifs réglementés
11:03 d'électricité.
11:04 On dit et on assume de dire qu'en toute hypothèse, on ne respectera pas ces règles si on veut
11:08 maintenir des tarifs réglementés qui ne feront pas exploser nos factures.
11:11 Deuxième exemple, je parlais de l'austérité budgétaire en début d'interview.
11:14 C'est des coupes drastiques dans nos services publics, notre protection sociale, dans notre
11:19 ambition écologique.
11:20 On dit en toute hypothèse qu'on ne respectera pas ces règles.
11:22 Et vous savez où est-ce qu'on a écrit ça ?
11:23 Là-dedans.
11:24 Alors je suis à la radio, je saisis le programme de la NUPES.
11:27 Et c'est précisément ce sur quoi on s'était mis d'accord.
11:31 Collectivement, il y a ici le petit logo du parti socialiste, des écologistes, du parti
11:34 communiste, de la France Insoumise, parce qu'on disait très clairement que notre ambition
11:38 sociale et écologique doit primer.
11:40 Et vous savez, Yael Goz, le premier à désobéir n'est pas celui que l'on croit.
11:43 C'est Emmanuel Macron lui-même qui en matière écologique, sur les normes en matière d'énergie
11:47 renouvelable ou de pollution de l'air, désobéit.
11:49 Et bien vous voyez, ces règles nous y obéiront et nous désobéirons à l'austérité budgétaire
11:54 au marché de l'énergie.
11:55 Restons sur vous et sur l'Europe.
11:56 Prenons un exemple concret.
11:57 La fin des véhicules thermiques neufs à partir de 2035.
12:00 C'est une mesure européenne que vous avez soutenue.
12:03 Si l'Italie, par exemple, de Meloni dit "moi j'ai pas envie de respecter l'échéance",
12:07 vous trouverez ça normal qu'elle ne respecte pas cette engagement ?
12:09 C'est pour ça qu'Yael Goz, j'ai précisé, compose un principe de non-régression sociale
12:13 et écologique.
12:14 A chaque fois que l'Union Européenne nous impose de revenir en arrière sur nos droits
12:18 sociaux avec, par exemple, le travail détaché, nous ne respecterons pas ces règles.
12:23 C'est un principe de non-régression.
12:24 Mais ça ne remet pas en cause, par exemple, c'est une autre comparaison qu'on nous fait
12:28 souvent, qui est l'état de droit qui est évidemment l'indépendance de la justice
12:32 qui n'a pas de rapport.
12:33 Et la directive sur, par exemple, les travailleurs des plateformes, qui est une grande victoire
12:38 qu'on a obtenue au Parlement Européen, on l'a obtenue contre Emmanuel Macron.
12:41 C'est une protection sociale pour des millions de travailleurs ubérisés sur le continent.
12:45 C'est la preuve que ça sert d'avoir des députés insoumis au Parlement Européen.
12:48 Eh bien, on l'a gagnée contre Emmanuel Macron et elle s'appliquera en France.
12:52 Rassurez-vous qu'Emmanuel Macron le veuille ou non.
12:53 Et c'est une matinale grand format, notre invité aujourd'hui, Emmanuel M'Henri, la
12:59 tête de liste La France Insoumise.
13:02 Il est 8h35 et on continue avec les spécialistes et les éditorialistes du 7-10.
13:08 C'est Célia Chiré qui ouvre le bal, spécialiste environnement à la rédaction de France Inter.
13:18 Célia, je vous interroge sur votre vision de l'écologie.
13:21 Bonjour, Manon Aubry.
13:22 Bonjour.
13:23 Alors, vous défendez une vision protectionniste, souverainiste de l'écologie, une planification
13:27 écologique européenne, mais il y a quelques contradictions.
13:30 Vous êtes pour l'interdiction de la vente des voitures neuves thermiques en 2035, ça
13:34 favorise l'électrique.
13:36 Mais derrière, il y a la question des mines, sujet sensible pour fabriquer les batteries.
13:41 Et là, vous êtes par exemple contre la mine de lithium dans l'Allier.
13:45 Pourquoi ? Alors, plusieurs choses.
13:47 D'abord, pourquoi je suis pour l'interdiction des véhicules à des voitures thermiques ?
13:52 Parce que les véhicules électriques produisent six fois moins de gaz à effet de serre que
13:58 des véhicules à voiture thermique.
14:01 Pour autant, vous avez raison, ça nécessite plus de métaux.
14:05 Il y a deux questions sous-jacentes au passage aux voitures électriques.
14:08 D'abord, il y a l'accessibilité financière.
14:10 Et moi, je refuse que ce soit les Françaises et les Français qui aient à payer le prix
14:14 de la transition écologique et notamment ceux qui sont le plus en difficulté.
14:17 C'est une des raisons pour lesquelles on s'était opposé à l'extension du marché
14:20 carbone.
14:21 Donc, je pense que la question de comment on aide les Français, je pense que cette
14:24 question n'est pas complètement résolue.
14:25 Et la deuxième question, c'est sur la production de lithium.
14:29 L'enjeu, c'est la protection des populations, de la santé, de l'eau et de l'environnement.
14:35 Et pas juste pour faire du fric, pardon de le dire comme ça.
14:38 Et c'est la question qui est posée dans la mine de lithium dans l'Allier, spécifiquement
14:43 qui ne remplit pas ces conditions.
14:45 Mais je vais plus loin que ça.
14:46 Moi, j'assume de défendre aussi une certaine forme de sobriété.
14:49 Je pense qu'il va falloir, de manière générale, diminuer nos usages de lithium.
14:53 Ce qui veut dire derrière aussi un impensé de la transition écologique et le développement
14:57 des transports.
14:58 Tiens, on parlait de désobéissance.
14:59 Mais je reviens à ma question.
15:00 Le droit de la concurrence impose une mise en concurrence de fret SNCF et de la SNCF.
15:05 C'est aussi une des raisons pour lesquelles je m'y oppose.
15:06 Il faut développer les transports.
15:07 C'est liable.
15:08 Mais je reviens à ma question.
15:09 Est-ce qu'il vaut mieux aller chercher du lithium en Chine, en Australie, en Amérique
15:12 du Sud en attendant ?
15:13 Non, je vous le dis, on a vocation 1.
15:16 Diminuer notre usage total de lithium.
15:18 2.
15:19 Pouvoir relocaliser notre production de lithium.
15:20 Mais c'est normal qu'il y a un certain nombre de conditions à remplir.
15:23 Et que ces conditions, à ce stade, ne sont pas réunies.
15:26 Une mine propre, c'est impossible ? Une mine respectueuse de l'environnement, c'est impossible ?
15:29 C'est pour ça que je vous dis que ça vaut de manière énergétique.
15:33 La meilleure énergie, c'est celle qu'on ne consomme pas.
15:34 C'est pour ça que j'assume de défendre aussi une dimension de sobriété si on veut
15:38 être cohérent dans notre ambition écologique.
15:40 Et en matière énergétique, vous parliez des voitures thermiques.
15:43 Mais la question qui se pose aussi de manière générale, c'est comment on produit notre
15:46 énergie.
15:47 Et j'assume de défendre 100% d'énergie renouvelable.
15:49 Et ça doit être notre cap.
15:50 Et là aussi se pose la question de la relocalisation de notre production de panneaux solaires,
15:55 d'éoliennes dont on en produit quasiment plus en France.
15:57 On est en train de fermer les deux dernières usines de panneaux solaires.
16:01 Donc oui, pour répondre à votre question, je suis en faveur de la relocalisation.
16:04 Mais il faut penser aussi à la transformation de nos usages.
16:07 Parce qu'on ne pourra pas de manière indéfinie consommer du lithium pendant les décennies
16:12 à venir.
16:13 Il faut un moratoire, par exemple, sur les mines.
16:14 Y compris dans les dom-toms.
16:15 On peut parler aussi de l'or, du coltan.
16:17 Vous voulez, au niveau européen, vous défendre un moratoire ?
16:19 Je pense qu'il y a un certain nombre de conditions qui doivent être respectées.
16:22 Et ces conditions ne sont pas toujours respectées.
16:24 Je vous donne d'autres exemples de mines.
16:26 Moi, j'ai beaucoup travaillé sur la documentation de violation des droits humains sur les mines
16:30 de cuivre et de cobalt en République démocratique du Congo.
16:33 Cuivre et cobalt, on ne le sait pas, mais on en a tous dans nos téléphones, nos appareils
16:36 électroniques, etc.
16:37 Et moi, je suis fière au Parlement européen d'avoir obtenu une autre victoire, qui est
16:40 le devoir de vigilance des multinationales, qui est un texte central, qui rend responsables
16:45 les entreprises multinationales pour leur violation des droits humains et dommage à
16:48 l'environnement dans leur chaîne de production.
16:49 Donc, il faut remettre des règles dans la mondialisation, y compris dans l'extraction
16:53 de minerais.
16:54 Autre question de souveraineté, l'alimentation.
16:56 Aujourd'hui, notre modèle agricole repose sur les pesticides en majorité pour avoir
16:59 des rendements.
17:00 Or, vous voulez à la fois dans votre programme sortir des pesticides, ce qui est bien pour
17:04 la santé et l'environnement, et baisser les prix.
17:06 Est-ce que c'est possible ?
17:07 Oui, c'est possible parce que les prix des denrées alimentaires ont augmenté environ
17:11 de 20%.
17:12 A l'autre bout de la chaîne, les agriculteurs ont vu leur revenu baisser.
17:15 C'est qu'au milieu, il y a un acteur central qui s'appelle les industries agroalimentaires,
17:19 qui ont augmenté leur profit et leur marge de 70%.
17:22 Donc nous, ce qu'on propose, c'est très simple.
17:23 C'est d'un côté pour le consommateur de bloquer les prix des produits de première
17:27 nécessité, les pâtes, le riz, le lait, etc., les fruits, les légumes.
17:31 Au milieu, de bloquer les marges des entreprises agroalimentaires.
17:35 Et à l'autre bout de la chaîne, pour les agriculteurs, leur garantir des prix minimum
17:40 garantis, des prix planchers.
17:41 On constate qu'à la fois les macronistes et l'extrême droite s'y opposent, après
17:44 l'avoir promis respectivement à Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
17:48 En France et en Europe.
17:49 On l'a proposé à l'Assemblée Nationale et je l'ai proposé aussi au Parlement
17:54 Européen dans le cadre de la politique agricole commune.
17:56 Et s'agissant des pesticides, oui bien sûr, on a 80% des insectes qui ont disparu à
18:01 cause des pesticides.
18:02 On a le glyphosate qui est considéré comme un pesticide cancérigène probable par l'Organisation
18:08 Mondiale de la Santé.
18:09 Emmanuel Macron lui-même avait promis d'en finir avec le glyphosate.
18:13 Et puis comme d'habitude, il est revenu sur sa promesse en matière environnementale.
18:16 Ça doit être la fameuse pause sur les normes environnementales.
18:18 Moi j'assume de dire qu'on peut sortir des pesticides, on peut garantir des prix
18:22 décents pour le consommateur et une rémunération décente pour les agriculteurs.
18:26 Mais ça suppose de s'attaquer aux marges des entreprises agroalimentaires.
18:30 Et je suis la seule à proposer le blocage des marges.
18:32 Il faut dire les choses telles quelles.
18:33 Et il faut un complément de revenu pour les agriculteurs.
18:35 Qu'est-ce que vous leur répondez après l'hiver qu'on a vécu ? La colère agricole ?
18:38 L'Europe a renoncé à diviser par deux l'utilisation des pesticides.
18:42 Pour cette raison-là, comment vous résolvez ce problème ?
18:44 Malheureusement, comme souvent, les lobbys ont gagné.
18:46 Et c'est une des batailles aussi centrales que je mène au Parlement européen.
18:49 Contre les lobbys qui font la loi, qui payent des députés.
18:52 Finalement, on a à la fin un député sur quatre qui reçoit des rémunérations annexes.
18:57 Parmi eux, qui touche de l'argent directement de lobby.
19:00 Et ces députés ne rendent plus des comptes aux élus.
19:02 Pardon, ces députés ne rendent plus des comptes aux citoyens qui les élisent.
19:06 Mais derrière, aux lobbys qui les payent.
19:09 Donc l'enjeu, c'est en effet qu'on puisse réduire l'utilisation de pesticides en Europe.
19:15 C'est largement faisable.
19:17 Et les agriculteurs, c'est une erreur de dire que le problème c'est les normes environnementales.
19:20 Ce qu'ils demandent, c'est vivre dignement de leur travail.
19:22 Et ça, on le garantit à la fois par des prix planchers et minérateurs, des prix minimum garantis.
19:27 Et ils disent qu'on ne peut pas être soumis à une concurrence déloyale.
19:30 On va parler ensuite des accords de libre-échange.
19:32 Et c'est la raison pour laquelle je m'oppose fermement aux accords de libre-échange.
19:35 On parlera avec Dominique Seux.
19:36 Avec grand plaisir avec Dominique Seux.
19:37 Vous voyez, je fais même les transitions.
19:38 Merci Célia.
19:39 Tout le monde fait les transitions.
19:40 C'est comme ça.
19:41 Merci beaucoup Célia Kigré.
19:42 Pierre, on vous retrouve.
19:43 Pierre Haski.
19:44 Il vous interroge Manon Aubry.
19:45 Pour commencer, sur l'Ukraine.
19:46 Emmanuel Macron s'est dit prêt à laisser l'Ukraine utiliser les armes livrées par
19:47 la France pour frapper des cibles militaires en territoire russe.
19:48 Est-ce que vous y êtes favorable ?
19:49 D'abord, ce n'est pas le premier changement de doctrine de la part du président de la
19:50 République.
19:51 On est un peu perdu.
19:52 Un jour, on envoie des troupes.
19:53 L'autre jour, non.
20:04 Un jour, on frappe le territoire russe.
20:07 L'autre jour, non.
20:08 Je pense qu'un minimum, il faut un débat.
20:11 Et moi, je demande si c'est le cas.
20:12 Est-ce qu'il y a un débat et un vote à l'Assemblée nationale si on change de pied
20:16 et qu'on change de doctrine dans notre stratégie vis-à-vis de la Russie ?
20:22 Dans ce cas, vous y serez favorable ?
20:24 J'y arrive.
20:25 D'abord, ça c'est sur la méthode.
20:27 Et sur le fond, j'ai écouté avec attention votre chronique, moi je suis assez prudente
20:31 à l'escalade militaire.
20:32 Je ne suis pas défavorable à l'envoi d'armes en Ukraine, notamment pour qu'ils puissent
20:37 se défendre, pour que Vladimir Poutine ne gagne pas la guerre.
20:39 Je dis au passage que l'Union européenne a délivré moins du tiers des armes qui ont
20:43 été promis à l'Ukraine.
20:45 Que parmi ces armes et ces outils qui n'ont pas été livrés de manière suffisante,
20:50 il y a des véhicules avant-blindés, des systèmes de défense anti-aériens, qui sont
20:55 des éléments que l'on doit livrer bien davantage à l'Ukraine.
20:59 Maintenant, il faut être prudent sur l'engrenage d'escalade militaire dans lequel on peut
21:03 s'engager.
21:04 Et où est la limite ?
21:05 C'est la question qu'il faut se poser.
21:07 Et c'est pour ça que nous, on avait posé plusieurs conditions à l'envoi d'armes,
21:10 et notamment le fait de toucher en profondeur le territoire russe.
21:13 De facto, ça nous fera entrer dans un nouveau seuil dans l'affrontement entre la Russie
21:18 et la France.
21:19 La Russie et la France, ce sont deux puissances nucléaires, et on a réussi à éviter un
21:24 affrontement entre deux puissances nucléaires, même pendant la guerre froide.
21:28 Donc oui, il faut être vigilant.
21:29 Ce qui ne veut pas dire qu'on ne doit pas aider l'Ukraine, y compris militairement,
21:34 y compris financièrement.
21:35 Par exemple, je suis la seule à proposer l'annulation de la dette de l'Ukraine, qui
21:38 se rend dépendante des marchés financiers par cela.
21:41 On a l'impression d'entendre Jordane Bardella parler de la situation en Ukraine.
21:45 Arrêtez, franchement, non.
21:46 Arrêtez, non.
21:47 Non, soyez…
21:48 - Je suis en escalade.
21:49 - Pardon, pardon.
21:50 Soyez sérieux cinq minutes et regardez nos votes au Parlement européen.
21:52 Les parallèles qui sont faits entre nous et l'extrême droite sont insupportables.
21:55 Jordane Bardella a sur sa liste un poutinophile, Thierry Mariani.
21:59 Jordane Bardella n'a pas voté un euro d'aide à l'Ukraine, je l'ai fait.
22:03 Jordane Bardella n'a voté aucune sanction à l'Ukraine, je l'ai fait.
22:06 Donc stop.
22:07 Maintenant, vous voyez, ça ne fait pas honneur au métier de journaliste que de faire des
22:09 parallèles entre nous et l'extrême droite.
22:12 Je suis très précise sur ce que je propose, et vous voyez, je viens de vous faire la démonstration
22:16 que nous n'avons rien à voir avec ces poutinophiles.
22:18 Et pour finir, juste à notre meeting samedi dernier, mais si vous y étiez, vous sauriez
22:22 non seulement de quoi on parle, mais aussi qu'on a invité un opposant à Vladimir
22:25 Poutine, un opposant à la guerre en Russie.
22:28 Donc, vous voyez, les poutinophiles sont du côté de l'extrême droite, pas de notre
22:31 côté.
22:32 - Cela dit, Mme Aubry, vous vous êtes opposée par exemple à l'importation du poulet ukrainien.
22:37 On en a parlé beaucoup ces derniers temps.
22:38 Est-ce que vous n'avez pas l'impression de rejouer le plombier polonais comme les
22:42 partis nationalistes il y a quelques années ?
22:44 - Je vous le répète, il n'y a pas besoin que l'Ukraine soit dans l'Union européenne
22:48 pour l'aider.
22:49 La preuve est, on a voté, j'ai voté il y a à peine quelques semaines, un programme
22:52 d'aide de 50 milliards d'euros à l'Ukraine.
22:54 Et je le referai autant de fois que c'est nécessaire, M.
22:57 Leski.
22:58 Première chose.
22:59 Deuxième chose, ce n'est pas en affaiblissant notre industrie et singulièrement notre agriculture
23:03 qu'on va aider l'Ukraine.
23:04 En Ukraine, le kilo de production de poulet se produit à 3 euros quand il est 7 euros
23:09 en France.
23:10 Le salaire minimum en Ukraine, il est de moins de 200 euros.
23:12 En Ukraine, 60% des exploitations agricoles servent un oligarque et un oligarque, il
23:18 se fait une tonne d'argent.
23:19 Donc non, pardon, on ne va pas aider l'Ukraine de cette manière-là.
23:22 Et moi, j'assume de dire que pour l'entrée de nouveaux pays, mais je suis constante,
23:25 ça vaut pour tous les pays, il faut une harmonisation sociale, fiscale et environnementale
23:30 avant l'entrée de nouveaux États.
23:31 - Mais regardez comment ça s'est passé avec l'Espagne et le Portugal, par exemple.
23:32 On n'aurait jamais laissé rentrer l'Espagne et le Portugal si on avait raisonné comme
23:35 ça.
23:36 C'est dans l'autre sens que ça s'est passé.
23:38 C'est l'entrée dans l'Europe qui a permis l'harmonisation fiscale.
23:40 - Vous connaissez le salaire minimum en Bulgarie ?
23:42 - Mais c'est encore très faible.
23:43 - Vous le connaissez ? 330 euros par mois.
23:45 Donc on est très loin de l'harmonisation en matière sociale.
23:49 - Mais certains pays de l'Est qui sont rentrés à ce moment-là sont aujourd'hui à 80%
23:53 du point moyen.
23:54 - Je termine ma réponse.
23:55 Après le dernier élargissement, la moitié des usines qui ont fermé ont été délocalisées
23:58 au sein même de l'Union Européenne.
24:00 Allez dire aux ouvriers de Whirlpool qui a été délocalisée en Pologne, allez dire
24:04 aux ouvriers de Denlop à Amiens qui sont menacés de délocalisation en Slovénie que
24:08 l'harmonisation sociale a marché en Europe.
24:11 C'est faux.
24:12 Les faits le prouvent.
24:13 Malheureusement.
24:14 Et c'est pour ça que moi je me bats pour un salaire minimum en Europe qui est équivalent
24:17 à 75% du salaire médian de chaque Etat.
24:19 C'est pour ça que moi je me bats pour des normes et pour abolir le statut du travail
24:23 détaché, pour des normes pour les travailleurs ubérisés.
24:25 C'est pour ça que je me bats pour tout ça.
24:26 Mais on ne peut pas dire que l'harmonisation sociale a fonctionné en Europe.
24:29 - Pierre, une dernière question sur l'Ukraine.
24:31 Est-ce que pour avoir la paix, l'Ukraine doit renoncer à une partie de son territoire ?
24:35 - C'est à l'Ukraine de définir ses conditions.
24:37 Et moi ce que je sais en revanche, c'est que le rôle de la France et de l'Union Européenne,
24:43 c'est d'essayer d'ouvrir des canaux diplomatiques parce qu'il n'y a pas d'issue militaire à
24:46 cette guerre.
24:47 Bien entendu qu'il faut soutenir de toutes nos forces l'Ukraine, et je l'ai dit, militairement,
24:51 logistiquement et financièrement.
24:52 Mais au bout d'un moment, il faudra ouvrir des canaux diplomatiques.
24:55 J'observe que l'Allemagne a pris une initiative, les 15 et 16 juin, on pourrait aussi commencer
24:58 par essayer de sécuriser les centrales nucléaires.
25:01 Cette guerre se déroule au milieu de 13 centrales nucléaires qui composent un risque
25:05 pour le continent européen.
25:06 - Vous voyez du côté de Vladimir Poutine le moindre signe qu'il est prêt à ne serait-ce
25:10 que se retirer d'une partie de ce qu'il a conquis depuis le février ?
25:14 - Quelle est l'autre issue que des négociations diplomatiques ? Vous savez, on fait toujours
25:18 la paix avec ses ennemis.
25:20 Et si on ouvre les négociations, mais c'est pas à moi de définir le prix.
25:24 Moi je souhaite que l'armée russe se retire du territoire ukrainien.
25:29 Je pense que le meilleur moyen, la meilleure chance, la meilleure chance pour l'Ukraine
25:35 de conserver son intégrité territoriale, c'est d'ouvrir des négociations.
25:39 Sinon, on part dans une guerre qui est sans fin, qui a déjà fait 100 000 morts, qui
25:44 a duré depuis 2 ans.
25:45 Et moi je souhaite que cette guerre s'arrête le plus rapidement possible.
25:48 Et pour cela, il faut que la France et l'Union Européenne prennent une initiative diplomatique
25:51 dans la lignée de ce qu'a fait l'Allemagne.
25:53 - Merci Pierre Asky.
25:54 Et à vous Dominique Seux.
25:56 Dominique, c'est le mot « dénonciation » qui vous a intéressé dans le programme
26:01 de notre invité, Manon Aubry.
26:03 - Oui, bonjour Madame Aubry.
26:05 - Votre projet européen propose de dénoncer les traités budgétaires européens, c'est-à-dire
26:09 les règles de plafonnement du déficit et de la dette publique.
26:12 Ça, c'est connu.
26:13 Mais vous souhaitez aussi annuler les dettes publiques.
26:17 Et ça se passerait comme ça.
26:18 Il y aurait des audits de citoyens un peu dans toute l'Europe, j'imagine dans des tas
26:22 de villes.
26:23 C'est vrai qu'on attend un peu avec gourmandise la façon dont un audit de citoyens pour annuler
26:28 la dette se passerait en Allemagne.
26:30 Mais surtout, si vous annulez les dettes, qui prête de l'argent aux États après ?
26:35 - Dominique Seux, vous êtes un journaliste économique que je respecte beaucoup et j'imagine
26:41 que…
26:42 - Ça commence extrêmement mal !
26:43 - Non, je vous écoute tous les matins, j'ai des désaccords avec vous, j'aime beaucoup
26:50 vos débats du vendredi matin singulièrement.
26:52 - Avec Thomas Porcher.
26:54 - Mais vous n'êtes pas sans savoir qu'une partie de la dette est détenue dans les coffres
26:58 de la Banque Centrale Européenne.
27:00 - Bien sûr, une partie.
27:01 - Et c'est pour ça que nous ne disons pas que nous allons annuler toute la dette.
27:05 Nous disons que la dette fait peser une épée de Damoclès sur les États européens et
27:11 est utilisée comme un outil au chantage pour faire des coupes budgétaires qui ont des
27:15 conséquences très concrètes.
27:16 Je le redis, la réforme de l'assurance chômage, c'est 4 milliards d'euros d'économie.
27:20 Le gouvernement va faire la poche des chômeurs, va encore plus les précariser, pourquoi ? Pour
27:23 faire des économies.
27:24 Je ne suis pas d'accord avec ça.
27:26 Le gouvernement coupe 2 milliards d'euros dans le budget de l'écologie, notamment
27:29 dans la rénovation thermique du rhum.
27:30 - Je reviens sur la question de l'annulation de la dette.
27:34 - Comment on le fait ? Il y a 20% de la dette française qui est détenue par la Banque
27:38 Centrale Européenne.
27:39 Ce que nous proposons, c'est de les transformer en titre de dette perpétuelle.
27:43 Dit autrement, vous les renouelez tous les 50 ans, 90 ans et avec l'inflation, la dette
27:49 se fait grignoter.
27:50 - Si je comprends bien, il n'est pas question d'annuler la dette qui est détenue par des
27:54 porteurs d'obligations dans tous les pays européens.
27:57 - Je vous rassure, monsieur, ceci… - Non mais c'est précisément important qu'il
27:59 ne figure pas dans votre programme, vous parlez uniquement de la Banque Centrale Européenne.
28:02 - Si vous détenez de la dette, vous ne serez pas floué et les gens qui nous écoutent
28:04 ne seront pas floués.
28:05 Par contre, grâce à notre proposition, nos services publics, notre protection sociale
28:09 seront gagnants.
28:10 Tous ceux qui ont des professeurs qui manquent dans les écoles, ceux qui ont fait la queue
28:15 des heures aux urgences, tout le monde sera gagnant avec notre proposition et on sortira
28:19 de l'austérité budgétaire à perpétuité qui fait tant de mal.
28:20 - Puisque vous parlez de la Banque Centrale Européenne, est-ce que vous saluez le travail
28:25 de la Banque Centrale Européenne depuis 25 ans qui a été au début décrite comme
28:29 le temple de l'ordolibéralisme ? Vous vous diriez sans doute néolibéralisme, je ne
28:33 sais pas très bien la différence, mais bon, c'est des termes qu'on emploie beaucoup.
28:37 Est-ce que vous dites que la Banque Centrale Européenne depuis 25 ans, elle fait le job
28:41 même si elle n'est pas complètement sur la ligne que vous défendez ?
28:45 - Déjà depuis 5 ans que je suis députée européenne et singulièrement depuis l'inflation
28:49 record en Europe.
28:50 - Elle a beaucoup changé.
28:51 - Qu'a fait la Banque Centrale Européenne ? Elle a augmenté les taux d'intérêt.
28:54 En augmentant les taux d'intérêt, elle part d'une erreur d'analyse.
28:57 Celle qui voudrait que l'inflation serait due à une augmentation de la consommation.
29:01 Alors que l'inflation, la Banque Centrale Européenne l'a reconnue elle-même et même
29:05 le Fonds Monétaire International.
29:06 Vous voyez, ça n'arrive pas souvent qu'un insoumis cite le Fonds Monétaire International.
29:09 L'ABCE et le FMI ont fini par reconnaître que l'inflation était surtout due à l'augmentation
29:13 des marges des entreprises.
29:14 Et ce faisant, en augmentant les taux d'intérêt, ils ont arrêté l'économie et singulièrement
29:20 ils ont créé une crise du logement.
29:22 - D'accord, mais attendez, sur la Banque Centrale Européenne, je reviens sur...
29:24 - Donc, c'est un désaccord avec la politique qui est menée par la Banque Centrale Européenne.
29:27 Et il y a un problème démocratique surtout parce que, vous savez, moi je siège dans
29:30 la Commission des Affaires Économiques et Monétaires.
29:32 J'ai le droit d'interroger 4 fois par an Mme Lagarde.
29:35 Juste, je lui pose une question, elle me répond.
29:36 Mais on n'a aucun contrôle démocratique, on n'a aucun débat.
29:38 D'ailleurs, ce débat est intéressant, on pourrait l'avoir tout réglé à nous.
29:40 - Mais est-ce que vous dites que sur la Banque Centrale Européenne, au fond, depuis 2 ans,
29:45 elle a réussi à lutter contre l'inflation ?
29:47 - Non !
29:48 - Les causes, on pourrait en débattre effectivement à l'infini.
29:51 Mais depuis 2 ans, l'inflation était à plus de 10%, elle est revenue à 2%.
29:56 Vous dites "Ah, c'est quand même pas mal ce qu'elle a fait !"
29:58 - Précisément, elle a fait cette erreur de diagnostic.
30:00 Elle n'a pas jugulé l'inflation.
30:02 Parce que pendant 2 ans, on a eu des taux d'inflation records.
30:05 Et puisque, de nouveau, vous êtes un journaliste économique très précis, quand on a un
30:11 taux d'inflation à 2%, ça veut dire que les prix continuent d'augmenter.
30:15 Ce qui est différent de la déflation où les prix baissent.
30:16 Ce qui veut dire qu'au jour où on se parle aujourd'hui, les prix des denrées alimentaires
30:20 par exemple sont plus de 20% plus élevés qu'il y a 2 ans.
30:23 Donc je le dis, il y a eu un échec de la politique monétaire et c'est pour ça que
30:26 dans notre programme, on propose aussi de changer le statut et les modalités.
30:29 Pour reprendre le contrôle démocratique de la BCE et mettre aussi des objectifs climatiques.
30:34 - Alors on va faire un virage sur l'aile.
30:35 Un autre type de dénonciation, il y a juste le mot en commun, c'est que vous voulez dénoncer
30:39 l'ensemble, et le mot est important, l'ensemble des traités commerciaux conclus par l'Union
30:44 Européenne.
30:45 Vous parlez même, je crois, dans votre projet de 79 traités commerciaux.
30:50 - Il y a 42 traités qui touchent 79 états.
30:53 J'aime bien la précision de M. Seuf.
30:54 - Alors vous avez raison.
30:55 Pourquoi tous les traités ? Vous le savez sans doute aussi bien que moi, l'Union Européenne
31:00 est en excédent commercial.
31:01 En 2023, elle est en excédent commercial avec le reste du monde.
31:05 Donc ça veut dire qu'elle ne souffre pas tant que ça du commerce international.
31:08 En revanche, la France, c'est vrai, souffre.
31:11 Elle est le pays qui est le plus en déficit relativement à la taille de son économie.
31:17 Le problème, c'est le commerce ou c'est la France ?
31:19 - Le problème, c'est le libre-échange M. Seuf.
31:21 Parce que les accords de libre-échange, pour moi…
31:23 - Les autres pays n'ont pas l'air d'en souffrir.
31:24 - J'arrive, je réponds à votre question.
31:25 Pourquoi pour moi, le libre-échange, c'est une folie ? Je vais même vous dire, c'est
31:28 une triple folie.
31:29 C'est d'abord une folie sanitaire, parce qu'on importe des produits des quatre coins
31:33 du monde qui ne respectent pas les mêmes normes sanitaires.
31:35 Au Brésil, 30% des pesticides qui sont autorisés là-bas sont interdits dans l'Union Européenne.
31:39 C'est une folie, ensuite, environnementale.
31:41 Parce qu'on fait venir, par exemple, du lait de la Nouvelle-Zélande à 20 000 km d'ici,
31:45 à l'heure où les gens prennent leur télège…
31:47 - Que tel ou tel traité, pardon ?
31:48 - Ça n'a aucun sens.
31:49 - Que tel ou tel traité mérite d'être négocié ?
31:50 - Pardon, je suis précise, M. Seuf.
31:51 C'est pour ça que je vous donne des exemples.
31:52 - Vous dites l'ensemble des traités ?
31:53 - Oui, l'ensemble des exemples.
31:54 Parce que, d'un point de vue environnemental, quel sens y a-t-il à importer du lait de
31:58 la Nouvelle-Zélande, des haricots verts du Kenya, de la viande du Brésil ? On n'en
32:01 produit pas en France, on n'en produit pas de bonne qualité.
32:03 Et enfin, c'est une folie sociale.
32:05 C'est ma troisième folie.
32:06 - Mais les entreprises françaises exportent beaucoup de choses.
32:09 - Si je peux répondre, c'est une dernière folie.
32:11 Parce que c'est une folie sociale, ça fait peser une concurrence déloyale sur nos agriculteurs,
32:18 sur nos éleveurs, qui produisent aujourd'hui largement de quoi nous nourrir.
32:21 La moitié des fruits et légumes en France qui sont consommés sont importés.
32:25 Ce n'est pas normal.
32:26 Alors oui, j'assume, et je suis fière même, je vais vous dire, d'être au Parlement
32:30 européen, la seule présidente de groupe qui n'a jamais donné aucune voix à aucun
32:34 accord de libre-échange.
32:35 Et le 9 juin prochain, si vous ne voulez pas importer des quatre coins du monde ce
32:40 que vous consommez dans votre assiette, dans vos industries, alors votez pour la France
32:44 Insoumise, c'est protéger notre industrie et notre agriculture.
32:46 - C'était la fin du débat écho du jeudi.
32:48 - On ne se mettra pas tout de suite d'accord, mais on en rediscutera.
32:50 - Le débat écho du jeudi se termine.
32:52 Merci Dominique.
32:53 8h55, la parole maintenant aux auditeurs de France Inter.
32:58 Et bonjour Yves.
33:00 - Oui bonjour.
33:01 - Vous nous appelez de Paris, on vous écoute.
33:04 - Bonjour, j'ai une question pour Manon Ombry, pour savoir quel était le projet de la France
33:10 Insoumise de réforme des institutions européennes, afin d'améliorer la participation des citoyens
33:15 à ces décisions, et sur un point peut-être plus personnel en tant qu'ancien militant
33:18 du Parti de Gauche et de la France Insoumise, trouver assez déplorable qu'on tolère
33:23 des insultes antisémites dans ces rangs, vu l'esclande entre M. Girault et M. Habib hier.
33:28 - C'était à l'Assemblée Nationale.
33:31 Merci Yves pour cette question, Manon Ombry vous répond.
33:34 - Bon d'abord, moi je vais être très claire, l'antisémitisme est un sujet suffisamment
33:38 sérieux, je n'accepte aucune insulte antisémite, j'ai toujours été très claire sur le sujet
33:44 et je le serai.
33:45 Pour le fond du sujet, sur la réforme des institutions européennes, c'est un point
33:49 très important que vous posez, parce que moi je fais partie de cette génération qui
33:53 a commencé à découvrir la politique en 2005.
33:55 Et en 2005, la France vote massivement contre le traité constitutionnel européen, 55%
34:01 quand même, et il a ensuite été imposé par la force via le traité de Lisbonne.
34:06 Et ce faisant, on éloigne les citoyens des institutions européennes parce qu'on leur
34:10 dit "on veut que vous consultiez" et on fait tout l'inverse.
34:12 Donc il est temps de remettre les citoyens au cœur de la décision européenne.
34:16 - Comment ?
34:17 - C'est une bataille très sérieuse, une forme de RIC européen, un référendum d'initiative
34:21 européenne, parce que la vérité c'est qu'à l'heure actuelle, il existe des initiatives
34:25 citoyennes européennes, notamment contre les pesticides, pour la défense du droit à
34:28 l'avortement, etc. qui ne débouchent sur rien parce qu'il n'y a pas d'obligation
34:32 pour la commission européenne.
34:34 Deuxième niveau, c'est pour ça que j'ai fait de la bataille pour l'éthique en politique
34:39 contre les lobbies, une bataille si importante, parce qu'il y a une règle que j'ai découverte
34:45 en arrivant au Parlement européen, qui est l'opacité.
34:47 Tout se négocie à huis clos.
34:49 Donc imaginez, on n'est pas à l'antenne, on ferme la porte ici, vous êtes les représentants
34:53 des différents groupes politiques ici autour de la table, je suis sûre que monsieur Seux
34:56 que vous serez un excellent représentant de monsieur Macron, peu importe, et on en débat
35:05 entre nous, et promis vous pourrez me répondre.
35:06 - Mais peut-être ne sommes-nous pas diffusés, allez savoir !
35:10 - Mais c'est tout le sujet en fait, pardon pour la blague monsieur Seux, mais pour qu'on
35:14 comprenne bien le cœur du sujet, c'est qu'à l'Assemblée nationale, les délibérations
35:20 sont publiques, au Parlement européen, toutes les négociations se déroulent à huis clos.
35:23 Et vous savez, les lobbies sont comme les vampires, ils détestent la lumière.
35:28 Et bien moi je suis pour jeter un immense vent de transparence sur ces négociations.
35:31 - Quitte à jeter l'opprobre sur vos camarades de la lupesse ?
35:33 - Non, pas jeter l'opprobre monsieur Gosse.
35:35 Non, j'ai dit une chose très juste, un député sur quatre au Parlement européen reçoit
35:39 des rémunérations annexes.
35:41 Vous trouvez ça normal ? Pas moi.
35:42 Moi je suis pour interdire toutes les rémunérations annexes qui posent des conflits d'intérêts.
35:46 J'ai écrit une lettre ouverte dans Libération en demandant à toutes les têtes de liste
35:49 de s'y engager, je n'ai pas vraiment eu beaucoup de réponses.
35:51 C'est dommage, mais je continuerai à porter cette proposition et je pense que c'est la
35:55 meilleure manière de faire irruption dans le jeu démocratique européen, même s'il
36:00 faudrait une refonte totale des traités, pour sortir des traités de libre-échange,
36:04 pour sortir du droit de la concurrence, pour protéger notre fret SNCF, pour sortir de l'austérité.
36:08 - Merci Manon Aubry, vous restez avec nous évidemment, dans un instant nous serons rejoints
36:14 par deux jeunes électeurs qui vont débattre avec vous, qui ont des questions à vous poser.

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