Différents spécialistes en économie débattent de la manière dont l'alliance de la gauche compte financer son programme ambitieux, notamment en dépenses sociales.
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00:00Anaïs Bouton, RTL Bonsoir, édition spéciale.
00:04Bonsoir à toutes et à tous, bienvenue dans RTL Bonsoir, édition spéciale de l'information du débat.
00:09Vous le savez pour tout comprendre de cette campagne folle et de cette crise politique majeure qui secoue la France.
00:15Tensions grandissantes, incertitudes persistantes, un pays face à son destin.
00:20Quel scénario pour notre avenir ? Qui va prendre les rênes du pays ?
00:24Jeudi, Soudan, l'Assemblée Nationale.
00:27Mes chers compatriotes, la France est à l'heure des choix et dans quelques jours, votre vote peut tout changer.
00:32Si vous n'avez besoin de rien, appelez Jordan Bardella.
00:34La priorité aujourd'hui, c'est de se battre pour essayer de convaincre, de donner dans deux semaines maintenant,
00:39une majorité de députés au Nouveau Front Populaire.
00:41De l'autre côté, à l'extrême gauche, c'est quatre fois pire en termes de coûts.
00:45Et puis, il n'y a plus de laïcité, ils reviennent sur les lois d'immigration qu'on a faites,
00:48puis il y a des choses complètement UPS, comme par exemple les échanges de sexe en mairie.
00:53Allez, avec nous ce soir pour débattre de tout ça, Julia Cagé, vous êtes enseignante, chercheuse, économiste et proche du Front Populaire.
01:00Vous avez écrit une histoire du conflit politique, élection et inégalité sociale en France, 1789 ?
01:061789 !
01:071789, bien sûr !
01:08Ben bien sûr !
01:09Oui, ben oui !
01:10Et 2022, et non pas 2024, qui pourrait être une nouvelle révolution donc ?
01:15Martial You, vous êtes l'excellent, l'éminent, le merveilleux éditorialiste éco pour RTL et pour M6.
01:23Martial Foucault, vous êtes non moins éminent et vous êtes politologue, directeur du Cevipof.
01:28Et puis, Marc Vignoux, merci d'être là.
01:30Bonsoir.
01:31Vous êtes journaliste à l'Opinion, merci à tous les quatre d'être là pour cette édition spéciale.
01:36Alors, 577 députés élus le 7 juillet prochain, nous sommes à 11 jours du premier tour des législatives.
01:43On va parler un peu des programmes économiques, on se demandera si ce n'est pas un peu le retour de l'argent magique.
01:49On va parler d'une gauche unie, mais pas trop, on verra.
01:52C'est pas mal.
01:53Bon, ok.
01:54Et puis du Front Populaire, mais où sont passés les ouvriers ?
01:57Allez, on y va.
01:58L'une des premières mesures que nous prendrons, c'est d'annuler cette nouvelle réforme de l'assurance chômage.
02:03Nous abrangerons cette réforme des retraites.
02:05Nous déciderons de mesures de blocage des prix sur l'alimentation et sur l'énergie.
02:11Nous porterons le SMIC à 1 600 euros net.
02:16Voilà, alors ça, c'est les principales mesures du Front Populaire qui ont été annoncées par les différents ténors du regroupement.
02:23Marc Mignot, vous avez chiffré ces propositions.
02:26Et pour vous, c'est le retour de l'argent magique ?
02:29Il y a un petit côté comme ça, oui.
02:31Quand on voit, d'abord, la responsable du PS, Valérie Rabault, a chiffré depuis ce programme à 106 milliards de dépenses.
02:40Et aussitôt, LFI a répliqué dans un communiqué.
02:44Non, ça sera bien plus.
02:46En fait, tout dépend de l'horizon de temps qu'on regarde.
02:48Est-ce que c'est une législature ou est-ce que c'est quelques années ?
02:50Mais en tout cas, c'est un programme de dépenses extraordinaires, jamais vu depuis très longtemps.
02:57Donc, on se demande comment il peut être financé, en fait.
03:01Julia Cagé ?
03:02Il va être extrêmement bien financé, puisque certes, il y a des dépenses qui ont été très bien chiffrées par Valérie Rabault.
03:08Mais il y a aussi un certain nombre de recettes extrêmement ambitieuses qui sont annoncées dans ce programme.
03:12En fait, il se trouve que depuis le début du septemna Emmanuel Macron, on a eu tout un allègement d'impôts
03:19qui n'ont pas du tout permis de rendre la France plus compétitive.
03:22Il faut regarder quand même le degré de déficit commercial aujourd'hui de la France,
03:25qui, en fait, ont consisté à faire des cadeaux fiscaux aux plus riches.
03:28Emmanuel Macron, parmi ses premières mesures dès 2017, il supprime l'impôt sur la fortune,
03:33il supprime la progressivité de la taxation du capital, il supprime l'exit tax.
03:38Donc déjà, dans ce programme du Nouveau Front Populaire, il y a une idée de réintroduire de la justice fiscale,
03:43de réintroduire un impôt sur la fortune qui soit véritablement ambitieux,
03:47de réintroduire aussi une exit tax afin que les plus riches ne fuient pas la France simplement pour des raisons fiscales,
03:53de réintroduire de la progressivité de la taxation du capital.
03:56Et ça, je pense que tous nos auditeurs vont comprendre extrêmement bien que ce n'est pas juste que sur les revenus du travail,
04:02on soit taxé de manière progressive alors qu'il y a juste un taux de taxation à 30% aujourd'hui sur le revenu du capital.
04:09Et puis aussi parce qu'on est très attaché au fait de réindustrialiser la France, de recréer de l'emploi.
04:15Il y a un certain nombre de mesures en termes de protectionnisme social, fiscal et environnemental aux frontières
04:20pour à la fois rapporter des recettes et permettre justement une meilleure compétitivité de l'économie française.
04:28Oui, c'est surtout un programme de dépense sociale très très importante.
04:32Après la taxation du capital qui ne serait plus la même que celle qui serait mise au niveau de celle du travail.
04:38Vous savez que le capital est déjà taxé d'abord et que quand Emmanuel Macron a passé la flat tax à 30%,
04:44ça a augmenté les recettes puisque ça a permis de distribuer plus de revenus.
04:50Donc en fait, il n'y a pas eu de gain, il n'y a pas eu de perte pour le budget.
04:54Donc si vous faites l'opération inverse, il n'y aura pas de gain pour le budget.
04:58Mais par ailleurs, effectivement, quand on chiffre sur la taxation des très riches, il y en a pour 88 milliards d'euros.
05:09Donc on peut se dire à la limite, pourquoi pas taxons les très riches à hauteur de 88 milliards d'euros.
05:15Le problème, c'est qu'en face, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de dépenses,
05:19dont énormément de dépenses sociales, dans une situation où l'économie française, on ne peut pas constamment dire,
05:25on va relancer l'économie française, on est en période de bad cycle.
05:30Les économistes keynésiens, que j'ai appelés des gens tout à fait pas du tout de droit, disent,
05:37mais attendez, on relance en permanence.
05:40C'est des gens pour l'instant qui ne souhaitent pas forcément engager leur institution,
05:43mais qui sont très, très étonnés et très énervés en off par ce programme.
05:48Parce que, si vous voulez, il n'y a plus aucune limite.
05:50Par exemple, revenir à la retraite à 60 ans, ça coûte, de l'aveu même d'Éric Coquerel, ça coûte 50 milliards d'euros.
05:5750 milliards d'euros, c'est la moitié de vos hausses d'impôts.
06:00D'autant, pardon, Julia Cagé, je donne un petit...
06:03Le conseil d'orientation des retraites a publié cette semaine son rapport annuel,
06:06et il dit que le système des retraites reste en déficit cette année,
06:08et que le déficit va monter encore de 14 milliards d'euros, je parle sous votre contrôle martial, d'ici 2030.
06:15Donc, est-ce que c'est raisonnable ?
06:18On va reprendre point par point.
06:19Premier point, la taxation du capital et la flat tax.
06:22Il se trouve que le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, c'est France Stratégie,
06:27c'est un comité qui avait été mis en place par Emmanuel Macron lui-même,
06:30pour évaluer l'efficacité de la suppression de l'ISF et de l'introduction de la flat tax,
06:35a écrit un rapport en 2020, un rapport en 2021, un rapport en 2022,
06:39qui ont démontré que la suppression de l'ISF et l'introduction de la flat tax n'avaient eu aucun effet positif sur l'économie.
06:44Par contre, ça a eu un effet qui a été l'explosion des dividendes.
06:48En France aujourd'hui, vous avez 0,1% des foyers fiscaux, 0,1%, qui perçoivent les deux tiers des dividendes.
06:56Donc en fait, vous avez une mesure qui ne crée pas de croissance, pas d'investissement, pas de gain de productivité,
07:01et qui crée une augmentation des inégalités.
07:04Donc oui, j'assume, et le Nouveau Front Populaire assume concrètement,
07:09le fait d'avoir davantage de justice fiscale dans la taxation du capital.
07:13Maintenant, parlons des retraites.
07:15Qu'est-ce qu'il y a écrit ?
07:17Si vous augmentez la flat tax, ça peut rapporter entre 10 et 30 milliards d'euros,
07:23en fonction de la nouvelle fourchette qu'il sera à introduire.
07:27Ensuite, vous aviez un ISF qui était complètement troué,
07:33et qui n'était pas progressif.
07:37Nous, on propose un barème qui est assez simple.
07:39On propose un barème à 1% de taux marginal au-dessus de 1 million,
07:432% au-dessus de 10 millions,
07:453% au-dessus de 100 millions d'euros.
07:47Il y a aussi quand même une différence,
07:49c'est qu'au cours des 10 dernières années,
07:51c'est le magazine Challenge,
07:53si vous prenez les 500 plus grandes fortunes,
07:55il y a encore 10 ans, elles représentaient, et c'était déjà pas mal, 10% du PIB.
07:59Aujourd'hui, elles représentent plus de la moitié du PIB.
08:01Donc en fait, il y a eu un gonflement des plus grandes fortunes.
08:04Donc même avec une même assiette de l'ISF,
08:06qu'au moment de sa suppression par Emmanuel Macron,
08:08ça rapporterait davantage.
08:10Je veux quand même dire un mot sur la réforme des retraites.
08:12Qu'est-ce qui est prévu dans le programme du Nouveau Front Populaire ?
08:14C'est d'abroger la réforme Macron.
08:16Abroger la réforme Macron, ça veut dire qu'on revient à 62 ans.
08:19Pas 60 ans. 60 ans, c'est prévu peut-être comme une mesure de très long terme.
08:23Ce qui est prévu dans les 15 premiers jours,
08:26ce qui est écrit dans les 15 premiers jours,
08:28c'est l'abrogation de la réforme à 62 ans.
08:31Voilà, c'est ça qui va se passer.
08:33Et ça, ça coûte combien ?
08:34Ça coûte 13 milliards d'euros.
08:3613 milliards d'euros.
08:37Il y a une augmentation de la population active
08:39qui va augmenter les taux d'emploi
08:43et qui va donc générer, c'est le chiffrage,
08:45c'est 17 milliards au total.
08:47Martial Foucault, qu'est-ce que ça vous inspire,
08:50ce programme du Fonds Populaire ?
08:52Et on va parler tout à l'heure,
08:54juste après la coupure pub du programme du RN,
08:57c'est-à-dire ces chiffres incroyables
08:59qui semblent quand même terroriser le patronat,
09:03enfin, le patron des patrons s'est exprimé aujourd'hui.
09:06Qu'est-ce que ça dit ?
09:07Ça dit que les Français,
09:09enfin, qu'est-ce qu'ils peuvent comprendre,
09:11les Français, de tout ça ?
09:13Je ne sais pas si les Français prennent forcément la mesure.
09:16D'ailleurs, quels que soient les chiffres,
09:17les montants, les ampleurs,
09:19pour deux raisons.
09:20La première, et c'est la plus récente,
09:22suite à la période pandémique,
09:25il y a eu, d'une certaine manière, en Europe,
09:28un, j'allais dire, un effort historique.
09:32Massif.
09:33Avec un plan de relance européen.
09:35Redistribué pour assurer toute forme de protection.
09:39Donc, d'une certaine manière, les montants,
09:41je ne sais pas si les montants effraient tant que ça
09:43les citoyens électeurs.
09:45Ils effraient, par exemple, Jacques Attali,
09:47qui parle de propositions irréalistes,
09:49d'un concours du Père Noël.
09:51Tout le monde ment aux électeurs.
09:53Ce patrimoine fait peut-être qu'il sera plus taxé
09:55que celui d'un Français moyen,
09:57qui aujourd'hui a un patrimoine qui est inférieur à 150 ou 100 000 euros.
10:00Donc, il ne sera pas du tout taxé,
10:01mais gagnant de la réduction de l'impôt sur le revenu
10:03et de la réduction de l'introduction d'une CSG progressive.
10:05Ensuite, il y a peut-être, moi, ce qui me frappe,
10:07et ce n'est pas propre à 2024,
10:09on l'avait déjà vu un petit peu en 2022,
10:11c'est qu'au cours de ces 40 dernières années,
10:13lorsqu'il y a des débats économiques
10:15portant sur une répartition des richesses,
10:18la question de la fiscalité,
10:20pendant près de 35 ans,
10:22toute l'économie et tous les programmes
10:24des partis ou des candidats
10:26portaient sur la bonne solution
10:28pour traiter la question du chômage.
10:30Et puis, cela a commencé un petit peu à disparaître,
10:32et aujourd'hui, on le voit dans différentes enquêtes,
10:34la première question attendue des citoyens
10:37et sur laquelle ils forgent leur jugement électoral,
10:40c'est la question du pouvoir d'achat.
10:42Et ça, on le retrouve, je dirais, presque dans toutes les catégories,
10:45sauf peut-être l'électorat d'Emmanuel Macron,
10:47où ce n'est pas la première des priorités.
10:49Donc, au fond, il y a quand même une attente des électeurs
10:52sur des choix économiques
10:54qui auront des répercussions
10:57en termes de pouvoir d'achat.
10:59Et on sait, parce que pour moi, c'est aussi le point important,
11:01c'est peut-être ça la difficulté pour l'électorat,
11:03c'est qu'il y a cette confrontation de chiffres, de dépenses,
11:06il faut aussi effectivement penser aux recettes,
11:08mais je crois qu'il y a un effort considérable à faire
11:11qui est de dire, attention,
11:13ce ne sont pas des dépenses le premier jour
11:15de l'arrivée au pouvoir de quelques partis ou familles politiques.
11:19On voit bien qu'un certain nombre de propositions
11:21ont des effets dans le temps,
11:23y compris pour les recettes.
11:25Donc, il ne faudrait pas voir les dépenses
11:27comme étant simplement une dépense nette.
11:29Et c'est là la grande difficulté, c'est convaincre les électeurs
11:31que certaines dépenses,
11:33on pense notamment des dépenses publiques,
11:35ce n'est pas la même chose de faire des dépenses d'investissement public
11:37et de dépenses de fonctionnement.
11:39Là, c'est énormément de dépenses sociales
11:41dont on sait que pour un tiers,
11:43elles partent en importation
11:45et donc il y a un tiers
11:47de ces dépenses qui vont stimuler
11:49des économies à l'extérieur.
11:51On en parle dans une seconde après la pause.