Cette semaine, Alexandre Delpérier reçoit Assia Touati, championne d'Europe de natation en relais en 2018 et vice-championne de France du 200m nage libre en 2021. En deuxième, Malia Metella, vice-championne olympique de natation en 2004 nous parlera du défi Titicaca, un exploit qu'elle a réalisé avec Théo Curin et Mathieu Witvoet.
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00:00...
00:19-"Parce qu'il y a les femmes, parce qu'il y a le sport",
00:22bienvenue dans votre rendez-vous dédié aux femmes dans le sport.
00:26Je suis ravi de vous retrouver avec, encore aujourd'hui,
00:29une femme particulièrement inspirante
00:31des grandes championnes tricolores.
00:33Voici le sommet.
00:34La natation a l'honneur, aujourd'hui,
00:36avec Asia Touati, 26 ans, championne de France
00:39et d'Europe en relais. La nageuse de Toulouse, où elle vit,
00:42reviendra avec nous sur son expérience olympique
00:45et sur ses ambitions futures.
00:46Ensuite, Malia Metella, la légende française de la natation,
00:50sera également dans la victoire éternelle.
00:52Elle vient de réaliser un exploit retentissant
00:54en traversant le lac Titicaca, à plus de 3 200 m d'altitude,
00:58en autonomie totale,
00:59avec Théo Curin, handicapé, quadriamputé,
01:02et Mathieu Wittwoedt.
01:04Ca aussi, ce sera un rendez-vous exceptionnel.
01:06Direction Toulouse. Asia Touati est avec nous.
01:09Bonjour, Asia.
01:10Bonjour.
01:11Je suis ravi de t'accueillir. Tu as 26 ans.
01:14Tu fais partie des grands noms de natation française.
01:16Il me semblait qu'il y avait un jeune homme assis à côté de toi.
01:20Le voilà. Monsieur se fait désirer.
01:22Bonjour, cher ami. Comment vous appelez-vous ?
01:24Bonjour, je suis Joris Bouchot, majeur également.
01:27Que faites-vous ici, sur le canapé de Mademoiselle Touati ?
01:30Je suis avec elle depuis un an.
01:33Aujourd'hui, je viens l'accompagner.
01:35Donc, en gros, je suis chez vous, là.
01:37Oui.
01:38Soyez les bienvenus. Ca me fait très plaisir,
01:41Asia et Joris, de vous accueillir.
01:44Joris, tu vas confirmer ou infirmer
01:47toutes les questions que je vais poser
01:50pendant une petite demi-heure à Asia
01:52pour qu'on essaie de bien comprendre qui elle est
01:55et ce qui a fait qu'elle est la grande championne.
01:57Ton titre, Asia, tu as été vice-championne de France
02:00du 200 nages libres cette année, médaille aux bronzes
02:03au championnat d'Europe du 4 x 100 nages libres en 2021,
02:06aussi championne d'Europe du 4 x 100 nages libres en 2018
02:09et 8e au relais 4 x 200 nages libres
02:12aux Jeux de Tokyo l'été dernier.
02:14Tu as 26 ans. Aujourd'hui, tu es à Toulouse.
02:16Tu n'as pas toujours été à Toulouse. Tu es née en Moselle.
02:19C'est là où tu as débuté ta carrière.
02:22Tu étais dans une famille de sportifs, Asia ?
02:24Pas du tout. Alors, pas du tout.
02:27Même ma mère ne sait pas vraiment nager,
02:29donc il faut dire que je suis un peu l'exception dans la famille.
02:33Comment t'es arrivée au sport, alors ?
02:35Alors, tout bêtement, parce que je suis asthmatique,
02:39donc le médecin m'avait conseillé de faire de l'asthme
02:42pour apprendre à bien respirer...
02:45Non, à faire de la natation, pas de l'asthme.
02:47Pas de l'asthme.
02:48Non, faire de la natation.
02:50Faire de la natation pour bien gérer mes crises et mon souffle.
02:53Donc, au final, j'ai adoré ça
02:55et j'ai aimé cet esprit de compétition, donc j'ai continué.
02:59T'avais 8 ans à l'époque.
03:00Tu te souviens des premières fois...
03:03Tu savais nager ou t'as appris à nager à 8 ans ?
03:07C'était ma première fois, donc on m'avait fait un petit test.
03:10J'avais un 25 m à faire sur le ventre, le dos.
03:15Même si je n'avais jamais pris de cours de natation avant,
03:18j'ai tout de suite su le faire.
03:20Et c'est là que le coach m'a dit
03:23que je pensais être faite pour ça.
03:25Du coup, tu prends une licence dans le club ?
03:28Exact.
03:29Et là, les entraînements, 8, 9, 10, 11, 12 ans,
03:31c'est combien de fois par semaine ?
03:33Au départ, je faisais et de la danse moderne et de la natation
03:38jusqu'au jour où j'ai voulu un peu plus me spécialiser
03:41et augmenter les charges d'entraînement,
03:44nager un peu plus souvent.
03:45C'est là que j'ai choisi la natation,
03:47mais c'est vrai qu'après, je nageais...
03:49Attends, tu vas trop vite.
03:51Quand tu fais le choix de la natation et que t'arrêtes la danse,
03:53t'as quel âge ?
03:54J'ai 9, 10 ans.
03:56Ah ouais, donc t'es encore toute pitchoune.
03:58Donc 9, 10 ans, on est encore en CM1, CM2.
04:00Tu décides de te focus sur la natation.
04:03Et là, les entraînements, ça devient quoi ?
04:04Là, je commence à m'entraîner trois fois semaine
04:08avec les copines, donc c'est pareil,
04:11c'est quelque chose de ludique.
04:13On voit pas forcément le côté vraiment entraînement.
04:16C'est vraiment pour venir voir les copines, s'amuser dans l'eau.
04:19Donc là, c'était trois fois semaine.
04:22Et les compétitions, ça commence quand, à ce moment-là ?
04:26Ça commence déjà parce qu'on fait des confrontations entre clubs.
04:29Et ça a déjà commencé ma troisième année,
04:32deuxième, troisième année de natation.
04:35Donc t'as 10 ans, les premières compètes.
04:37Et tu gagnes rapidement.
04:39Ouais, ouais, ouais.
04:41En fait, encore au téléphone,
04:43ma mère, hier ou avant-hier, me l'a rappelé.
04:46C'était qu'on a...
04:47Sur une des compétitions, pareil,
04:50confrontation avec des petits clubs,
04:51j'ai le coach des plus grands qui m'a dit
04:54que je devrais pas faire de 400 m, de 200 m,
04:57c'est pas pour toi, c'est trop long, t'y arriveras pas.
05:00Et je l'ai fait.
05:01Mais j'ai pas gagné.
05:04Et il m'a dit, voilà, tu vois,
05:06t'es pas assez bonne, c'est pas fait pour toi.
05:09Et je suis rentrée à la maison, j'ai pleuré,
05:11et j'ai dit à mes parents...
05:13Bon, il m'a fait pleurer une fois, on m'a fait pleurer une fois,
05:16et c'est la dernière.
05:17Maintenant, à partir d'aujourd'hui, je vais gagner, et j'ai gagné.
05:20Joris, est-ce que tu reconnais ce trait de caractère ?
05:23Totalement.
05:25Vraiment, oui, ça lui ressemble totalement.
05:27Cet esprit un peu revanchard, ça lui ressemble totalement.
05:30Et elle n'avait que 10 ans, Joris, hein ?
05:32Ouais, ça s'est pas arrangé avec l'âge.
05:37Ça veut dire, par exemple...
05:38Je t'en prie, vas-y, développe, c'est le moment.
05:41Ah, j'en dirais pas trop,
05:42mais ça se ressent aussi dans la natation,
05:44surtout dans la natation.
05:46C'est une nageuse qui est déterminée,
05:48qui accepte de prendre du coup,
05:49mais qui va tout faire pour ne pas en prendre un deuxième.
05:52Donc, clairement, je la reconnais là-dessus.
05:55Assia, pour bien connaître la natation,
05:57c'est une des disciplines...
05:58J'ai énormément de respect pour les autres disciplines,
06:01mais c'est une des disciplines les plus compliquées,
06:04les plus dures physiquement, avec un entraînement tous les jours,
06:07de plusieurs heures, plus de 10 km tous les jours.
06:09Et c'est pas comme si...
06:11Et une fois de plus, j'ai du respect pour Pauline Ferrand-Prévot,
06:14pour qui font du vélo, qui sont dehors.
06:16Vous, c'est des carreaux et des lignes.
06:18C'est ça.
06:19Oui, c'est vrai que c'est un sport assez ingrat,
06:22parce qu'on ne voit que ça depuis qu'on est tout jeunes.
06:25Donc, des carreaux, des carreaux et des lignes.
06:28En plus, on fait vraiment tous les deux de la natation en bassin,
06:31donc on ne fait pas de l'eau libre ou quoi.
06:34C'est... En fait, c'est toujours la même chose.
06:36Donc, on répète les choses,
06:38et c'est comme ça qu'on se perfectionne.
06:41Donc, c'est une habitude qu'on prend,
06:43mais au final, on aime ça.
06:45Bien sûr. Rassurez-moi, le soir,
06:47Joris, à la maison, vous ne parlez pas de natation.
06:51Ça arrive.
06:52C'est-à-dire que ça reste quand même une passion,
06:55quelque chose qu'on aime.
06:56Et quand on arrive à un certain niveau aussi,
06:58il y a une envie de perfection et de toujours progresser.
07:01Donc, des fois, ça nous arrive d'échanger sur l'entraînement,
07:05ça nous arrive d'échanger sur les compétitions.
07:07Mais on sait faire autre chose et on sait voir autre chose
07:10parce qu'effectivement, la natation, c'est pas le sport le plus ludique.
07:14C'est la réponse que j'imaginais et presque que j'espérais.
07:17Et quand je dis ça, c'est pas pour, une fois de plus,
07:20critiquer la natation, parce que je trouve que c'est fascinant.
07:23Et ce sport-là a...
07:25dépend évidemment des performances physiques des athlètes,
07:28que vous êtes tous les deux,
07:30mais également beaucoup de technique.
07:33C'est terriblement technique, la natation.
07:36C'est une orientation, un angle qui va tout changer.
07:40Oui. Après, ça varie encore selon les nages
07:44et les disciplines, donc le sprint ou le demi-fond.
07:48Mais c'est vrai que c'est assez technique,
07:50on gagne... Ça se joue à des centièmes de seconde, en fait.
07:54Donc, c'est sur des virages, des départs, un placement de main.
07:58C'est vrai que c'est très, très pointu.
08:01C'est là que je trouve ça fascinant, la natation.
08:03Et c'est peut-être aussi ce qui, probablement,
08:05vous fait tenir tous les jours,
08:06alors que vous avalez les kilomètres par dizaine,
08:09tous les jours, hein.
08:10Donc là, quand...
08:12Imaginez, là, je m'adresse à celles et ceux qui nous regardent,
08:15si déjà, vous, tiens, qui êtes tranquille devant votre télé,
08:17je vous juge pas et je critique pas,
08:19mais allez courir déjà 10 kilomètres tous les jours,
08:21eux, ils le nagent.
08:22Donc c'est encore plus difficile.
08:24C'est là où je voulais en venir.
08:25Mais en revanche, il y a une chose qui est merveilleuse,
08:27et c'est probablement ce qui vous fait tenir tous les jours,
08:29c'est là où je voulais en venir à SIA et Joris,
08:32c'est qu'il y a le chrono.
08:33Et le chrono, c'est tous les jours.
08:34Et tous les jours, tu sais et tu vois
08:36et tu vas aller chercher ses dixièmes, ses centièmes,
08:39ses millièmes ou ses secondes.
08:42C'est vrai. Après, moi, je fais...
08:44Il y a des fois où je fais vraiment pas attention, en fait, à ce chrono.
08:47Je vais plus me fier à mes sensations, à mon ressenti.
08:51Parce que oui, il y a des fois, il y a des jours,
08:53on va se réveiller, on va être un peu fatigué,
08:55les charges d'entraînement sont assez intenses.
08:57Donc il faut pas vraiment trop écouter le chrono.
09:01Certaines fois, mais plus à son ressenti et son corps.
09:05Donc voilà, des fois, on nage pas vite, mais on nage très bien.
09:10Ouais, sauf qu'en compète, si tu me dis
09:12« Waouh, j'ai super bien nagé, c'était très beau, mais je suis huitième. »
09:15Alors, je vais pas dire huitième, parce que c'est la place au jeu,
09:18mais si c'est pour pas être qualifié pour la finale, c'est emmerdant.
09:21C'est vrai. Non, non, il y a des moments, vraiment.
09:24C'est surtout sur les entraînements que je dis ça.
09:26Mais après, oui, sur les compétitions, c'est le chrono qui part.
09:30Là, il n'y a plus vraiment de copine à côté.
09:34On est vraiment face au chrono, face à soi-même.
09:37Et on essaye de faire la course parfaite.
09:39Le moment, c'est ça qui est surtout dur en natation, je trouve.
09:43C'est que les qualifications, les jeux,
09:46les grosses performances se font sur l'instant.
09:50Donc c'est pas cinq minutes avant, c'est pas cinq minutes après,
09:52c'est sur l'instant.
09:53Et c'est extrêmement difficile,
09:54et surtout quand on va nager à 50 mètres, 100 mètres, 200 mètres.
09:58100 mètres, c'est-à-dire que ça se joue à rien, quoi.
10:01100 mètres, c'est la moindre petite faute,
10:04mais quand je dis petite, c'est quasi rien,
10:06qui va faire que t'es champion ou un podium t'échappe
10:09ou t'es pas qualifié pour une finale.
10:10Joris, elle est comment assise à le matin quand il est 6 heures,
10:14qu'il fait pas très chaud du côté de Toulouse
10:16et qu'il faut prendre son sac et aller nager ?
10:20Elle aime beaucoup rester au lit.
10:22Elle aime beaucoup dormir.
10:24Donc c'est plus souvent moi qui me lève d'abord.
10:29Quand il faut y aller, elle y va,
10:30mais c'est vrai qu'elle aime bien prendre son temps
10:32et elle est pas très speed le matin.
10:36C'est vrai.
10:37Je le comprends, moi, ça.
10:38Et on a souvent vu des nageuses et des nageurs
10:40finalement former de très beaux couples ensemble
10:42parce qu'ils se comprennent.
10:43Je pense que c'est important, Ashiad, de se comprendre.
10:47C'est tellement difficile
10:49et c'est là où je suis émerveillé par ce que vous faites.
10:52C'est vrai, c'est vrai.
10:53On n'est pas forcément similaires dans notre façon de faire,
10:57mais on s'en rapproche et on se comprend,
11:00comme vous l'avez dit, et c'est super important.
11:05On sait qu'on a besoin de certaines choses l'un l'autre,
11:08que l'autre peut-être n'a pas besoin,
11:09mais on le comprend
11:11et même on va pouvoir céder sur certaines choses au final.
11:14Évidemment, bien sûr.
11:15Donc on a compris, huit ans, l'ASM,
11:18neuf ans, dix ans, les premières compètes.
11:19Tu vas intégrer un sport-études au collège.
11:21T'as quel âge quand t'intègres le sport-études ?
11:24C'est directement dès la sixième.
11:25En fait, je reçois une lettre du collège de Sargoumines,
11:29donc un village à 20-30 minutes de chez moi,
11:34qui me propose d'intégrer cette structure.
11:36Et c'est vrai qu'au départ, j'étais un peu sur la retenue
11:41parce que j'ai mes copines,
11:43je suis très avec mes copines et avec ma famille,
11:46donc devoir quitter tout ça, c'était un peu difficile pour moi.
11:50Les premiers jours m'ont été un peu compliquées,
11:52mais au final, on est jeune,
11:54on retrouve des copines assez facilement
11:55et j'ai refait ma routine assez vite.
11:59Oui, et puis probablement aussi qu'en intégrant un sport-études,
12:01t'as vu tes performances s'améliorer très rapidement
12:03parce qu'on change de rythme, on change de préparation,
12:06on change d'intensité, on change d'approche,
12:07on change d'ambition.
12:09Mais c'est surtout que j'ai eu la chance
12:11d'avoir une excellente coach, à qui peut-être je fais un coucou,
12:14Sabrina Vérin, qui était un peu comme une maman pour nous
12:18et nous a vraiment bien accompagnées.
12:21La 6e, c'est quand même, même pour un élève normal,
12:24c'est quelque chose de brutal, on change beaucoup de choses
12:28et on apprend beaucoup.
12:30Elle nous a bien accompagnées sur ce changement
12:33et elle m'a donné l'envie de connaître le sport de haut niveau
12:36parce qu'avant, pour moi, la natation, c'était bon, je viens,
12:38je nage, j'aime ça, mais je ne connaissais pas
12:41les équipes de France Junior, tout ça, je ne connaissais pas.
12:43C'est grâce à elle que j'ai connu la Comène et tout ce qui s'ensuit.
12:46Tu n'as pas eu d'idole ou d'exemple française ?
12:50Coralie Balmy.
12:51Coralie Balmy, pour moi, ça a été mon exemple.
12:54Elle était venue à une cérémonie des trophées à Saint-Gumine
12:58une fois et j'avais adoré la personne qu'elle était,
13:01ce qu'elle dégageait, cette sérénité qu'elle dégageait,
13:04cette aisance dans l'eau qu'elle avait.
13:07Ça a été vraiment un idole.
13:09Et puis après, il y avait Lormano Diou,
13:11un grand nom de la natation française.
13:13Ces deux femmes-là m'ont vraiment donné l'envie d'aller plus loin.
13:18Et pour en revenir à Coralie, une très belle personne en plus,
13:22humainement formidable.
13:232009, ça s'accélère, tu intègres l'équipe de France,
13:26tu franchis encore un palier.
13:28Tu te dis quoi à ce moment-là et quelles sont tes envies et tes rêves ?
13:32Alors déjà, ça a été très étonnant
13:35parce que moi, comme je l'ai dit, je nageais vraiment comme ça.
13:38Donc quand ma coach m'a dit
13:39« Assieds, je viens de recevoir une lettre, tu es qualifiée pour la Comène. »
13:42J'ai fait « C'est quoi la Comène ?
13:44L'équipe de France ne m'entraîne pas pour ça. »
13:46Mais donc ça a été assez étonnant.
13:49Et c'est là que je me suis dit
13:50« Bon, on peut essayer de faire quelque chose au final de mieux. »
13:54Et en fait, dès la Comène, dès cette première expérience,
13:58j'ai découvert un autre monde.
14:02Et ça m'a tout de suite attirée.
14:04Là aussi, Joris, tu n'es pas surpris par sa réaction ?
14:08Non, pas du tout. Pas du tout, pas du tout.
14:10Quand il s'agit de performances de haut niveau,
14:12quand il s'agit de découvrir un nouveau monde
14:14qui l'emmène à quelque chose de plus haut que ce qu'elle a connu,
14:18forcément, il y a cette curiosité.
14:21Et je la reconnais encore une fois de plus là-dessus.
14:25En 2011, tu as 16 ans, on va dire, Assia.
14:28Tu participes au championnat du monde junior à Belgrade.
14:30Tu remportes deux médailles d'or, le 4 x 100 en âge libre en relais
14:34et en relais encore le 4 x 200 en âge libre.
14:37Il se passe quelque chose à ce moment-là ? Il y a un déclic ?
14:40Cette compétition, elle m'a vraiment donné...
14:45Je ne saurais même pas encore vraiment le dire,
14:47mais cette envie de ne jamais quitter l'équipe.
14:50J'ai appris à connaître une équipe de France
14:54et je n'ai jamais voulu la quitter à ce moment-là.
14:56La confrontation avec des filles qui s'entraînent au bout du monde,
15:01ça a été...
15:03Aussi les découvrir, parce qu'on parle aussi en dehors des bassins,
15:06on ne fait pas que se confronter.
15:08Et ça, j'ai tout de suite adhéré.
15:12J'ai fait une quatrième place sur le 100 m, il me semble,
15:17et ça m'a donné envie de connaître des podiums en individuel.
15:23Pour le moment, ce n'est pas encore fait,
15:26mais ça m'a vraiment donné l'envie d'aller plus loin.
15:30Joris, là aussi, ce collectif, et vous en êtes un exemple,
15:36même si vous ne nagez pas ensemble,
15:39c'est quelque chose où tu reconnais la personnalité de ta chérie, d'Assia ?
15:46Oui, Assia aime beaucoup le collectif et aime faire partie de l'équipe.
15:50C'est stimulant pour elle.
15:52Elle aime donner pour l'équipe
15:55et je pense que c'est un trait de caractère qui lui correspond bien.
15:59Je pense que c'est pour ça aussi qu'elle arrive à se transcender en relais.
16:03Je pense qu'elle aime beaucoup faire les choses pour les autres,
16:07en plus qu'elle pourrait.
16:09Ça veut dire qu'à la fois, elle prend et à la fois, elle donne ?
16:13Oui, on peut dire ça comme ça.
16:15Tu dois être heureux avec elle.
16:18C'est le cas.
16:21En 2014, à 19 ans,
16:25tu vas quitter ta région, tu vas quitter Sargoumine
16:29et tu vas aller à Toulouse.
16:31Pourquoi ce choix ? Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là ?
16:36J'avais vraiment l'envie de découvrir autre chose,
16:39de voir plus grand,
16:43de m'entraîner avec des gens qui étaient plus forts que moi.
16:46Ça faisait quelques années que j'étais un peu la vitrine de mon club
16:52et j'avais besoin de ne pas être la meilleure,
16:55d'avoir plus haut et de me servir des autres
16:58pour devenir encore plus forte.
17:01J'avais besoin d'un collectif,
17:04ce que j'ai vraiment trouvé au Dauphin du Touhec.
17:08Il y avait beaucoup de filles à Sargoumine.
17:11J'avais besoin de me confronter aux garçons
17:14qui sont beaucoup plus forts que nous
17:17et essayer de les titiller à l'entraînement
17:21et de m'amuser aussi sur ces aspects-là.
17:24C'est comme s'il fallait casser une routine,
17:27pour aller se mettre en danger.
17:29C'est ça. J'avais 19 ans à cette époque.
17:33J'avais besoin de me trouver, de me connaître,
17:36de prendre aussi mon indépendance en tant que femme,
17:40puisque j'ai toujours été chez mes parents.
17:43Connaître autre chose, en fait.
17:46J'ai totalement adhéré à la ville aussi, Toulouse.
17:50Je n'ai jamais voulu repartir.
17:53On est bien dans le sud-ouest.
17:56Joris, t'es originaire d'où, d'ailleurs ?
17:59Je suis originaire de la Guadeloupe.
18:01T'es arrivé en France à quel âge ?
18:03À l'âge de 17 ans.
18:05Et à Toulouse ?
18:06Et à Toulouse.
18:07Tu t'es pas gouré, mon gars.
18:10T'as raison, on se comprend bien.
18:112017 est une année charnière à SIA.
18:14Tu deviens championne d'Europe du relais 4 x 200, nage libre.
18:162018, tu pars au Jeu Méditerranéen.
18:20Là, tu gagnes deux médailles d'argent sur relais.
18:22Et puis, ça s'enchaîne.
18:24La même année, direction les championnats d'Europe à Glasgow,
18:27avec notamment Marie Vattel, Charlotte Bonnet,
18:29avec Béride, Margot, Anoushka.
18:32Et là, vous remportez l'or sur le relais 4 x 200 nage libre.
18:35Tu nages les séries, pas la finale.
18:37Néanmoins, j'imagine que...
18:38Il y a peut-être la frustration de ne pas nager la finale,
18:41mais j'y suis, quoi.
18:43Oui, ça a été ma première équipe de France senior.
18:47Donc déjà, vivre une finale...
18:51Déjà, une équipe, ça a été très satisfaisant pour moi.
18:55Je n'ai pas...
18:58Je n'ai pas eu cette pression négative de la grosse échéance.
19:02Après, on a fait ex aequo, pour la petite histoire,
19:05avec Margot, qui, elle, est passée en finale.
19:08On a fait ex aequo, le même temps, 54-55.
19:11Mais j'ai été plus rapide qu'elle sur le départ,
19:14donc le temps de réaction,
19:15donc c'est elle qui est partie pour la finale.
19:18Et donc, je ne m'en voulais pas.
19:20Je savais que j'avais tout donné pour l'équipe.
19:22J'avais fait ce qu'il fallait faire.
19:25Je les avais mis dans les meilleures conditions possibles
19:27pour la finale.
19:28Donc, j'ai pu vivre vraiment pleinement cette finale
19:33et je pense que j'ai été encore plus stressée
19:36dans les gradins que derrière le plot.
19:38C'est merveilleux, ces courses de relais.
19:40On vous entend crier, on voit les témoins,
19:43les passages de relais, c'est assez merveilleux.
19:45Les Championnats d'Europe de Budapest en 2021,
19:47c'était avant les Jeux.
19:48Tu remportes la médaille de bronze au relais 4 x 100,
19:50nage libre.
19:51Tu réalises le record de France avec tes copines.
19:54Et puis, tu deviens un nouveau vice-championne de France
19:57du 200 mètres nage libre, toujours en 2021,
20:00lors des Championnats de France.
20:01Tu gagnes ta qualif, ainsi pour Rio.
20:03Raconte-moi tes Jeux olympiques de Rio
20:05où tu vas avec Charlotte, avec Margot, avec Lucille.
20:08Vous allez vous hisser en finale.
20:10Pas de médaille, une huitième place au Jeux, c'est quoi ?
20:14Déjà, on est partis,
20:16on n'était vraiment pas dans les meilleurs...
20:20Dans les favoris.
20:21Dans les favoris, c'est ça.
20:24On ne croyait pas vraiment en nous, même niveau français.
20:27Et on avait cette envie de montrer qu'on était là.
20:32On s'était entraînés des années pour intégrer une finale.
20:37Et on l'a fait.
20:38Déjà, le passage en finale, ça a été grandiose pour nous.
20:42Et là, on s'est dit que tout est possible.
20:44On était dans des conditions spéciales
20:46parce qu'avec le décalage, on nageait les finales le matin,
20:50ce qui est assez bizarre.
20:52Malheureusement, on a nagé plus vite en série qu'en finale.
20:56Et ça a donné une huitième place.
20:58Mais franchement, on l'a vécue à 100 %.
21:01Derrière le plot, j'ai emmagasiné toutes les émotions possibles,
21:08les souvenirs et l'envie d'aller à Paris.
21:12Vraiment, avoir ces anneaux en face de soi,
21:16c'est quelque chose de très marquant.
21:19Attends, Assia, elle est à Paris en week-end
21:21ou elle est à Paris pour les Jeux de 2024 ?
21:23Elle est à Paris pour les Jeux, oui.
21:25J'avais bien compris.
21:26Joris, elle est comment avant une grande échéance,
21:29avant d'être qualifiée pour les Jeux ou avant une course ?
21:32Elle est comment, Assia, avant ?
21:33Beaucoup de stress, mais c'est commun à tous les sportifs.
21:37Je pense qu'on a l'ambition de bien faire
21:38et forcément, il y a beaucoup de pression.
21:42Je pense que j'ai réussi à trouver quelques petites choses
21:44pour lui permettre de mieux appréhender les choses.
21:47Quoi ?
21:49Quelques mots, quelques rituels.
21:53Il y a des choses qu'elle a pu faire par le passé
21:56et je pense qu'il faut s'appuyer là-dessus
21:57pour la convaincre qu'elle est capable de faire de grandes choses.
21:59Ce sont plein de choses qui me permettent, après,
22:03de pouvoir l'aider à ce niveau-là.
22:05Et il n'y a pas que moi, il y a les entraîneurs aussi.
22:07Son entraîneur, Walter Monberger, qui est là pour l'aider.
22:10Et le collectif, le collectif des dauphins du Tourec,
22:12quand c'est une compétition nationale.
22:13Le collectif Équipe de France,
22:15quand c'est une compétition internationale.
22:17Il y a beaucoup de gens qui sont autour
22:18pour nous aider à performer de façon générale,
22:21et Assia aussi.
22:22Disons, Assia, il prend des cours de communication, ton chéri, ou pas ?
22:26Oui, il est fort.
22:27Il est fort, hein ?
22:29Vous êtes bien tous les deux.
22:30Alors, sans divulguer de secrets ni d'intimité,
22:33néanmoins, c'est quoi les petites choses du quotidien
22:35qui vont faire qu'elle va être moins dans le stress
22:37avant une compétition de jury ?
22:39C'est des choses qu'elle a pu faire en entraînement,
22:40c'est des choses qu'elle a pu faire en compétition.
22:42C'est sa façon d'être, son caractère.
22:45C'est une battante, c'est quelqu'un qui en veut.
22:47Et il faut réussir parfois à jouer sur ce côté-là
22:50et parfois à jouer sur un autre côté qui est un peu la piquée.
22:53Parce que quand on la pique,
22:54généralement, elle répond de façon assez virulente.
22:57Et ça donne des belles choses dans l'eau.
22:59Très bien. J'ai maintenant, pour savoir qui connaît mieux sa discipline,
23:02de toi, Joris, ou de toi, Assia, quelques questions à vous soumettre.
23:06Attention, il faut répondre.
23:08Oui.
23:09Comment ?
23:11Il y a juste un petit souci de batterie.
23:12Il faudrait juste qu'on essaie de...
23:13J'en ai pour une minute. On va hyper vite.
23:15J'en ai une minute. Ça va ?
23:16Ça va. Il y a sept secondes.
23:18Cinq questions. Allez vite.
23:19On parle de la natation aux Jeux olympiques.
23:22Natation aux Jeux olympiques.
23:24Combien de médailles compte la France en tout ? Vite.
23:28Cette année ? Enfin, cette dernière.
23:30L'histoire des Jeux.
23:33Douze.
23:34Assia ?
23:36Attendez. Toutes médailles confondues.
23:38Garçon, fille, toutes Olympiades confondues.
23:42Tu as le droit de donner autre chose, Joris, parce que là, t'es ridicule.
23:44200.
23:45200. Joris, tu dis ?
23:47Attends, la natation ? On est d'accord ?
23:49Oui, natation aux Jeux olympiques.
23:51Française.
23:53Moi, j'irais 30.
23:55Bon, Assia, tu as le droit de changer aussi, du coup.
24:0160.
24:0243.
24:03C'est un point pour Joris, qui est le plus près.
24:06Même s'il est quand même loin.
24:07On n'était pas bons, là.
24:09Quel pays a remporté le plus de médailles aux Jeux olympiques ?
24:12Garçon, fille, confondues. Vite.
24:14L'Amérique.
24:15Oui, États-Unis.
24:16T'as une idée ? À combien, à peu près ?
24:19Ouais, 700, 800, peut-être.
24:22578 médailles pour nos Américains.
24:25Un partout. Question.
24:26Quelle nageuse a remporté le plus de médailles aux Jeux olympiques ?
24:33Quelle nageuse ?
24:34Toute nation confondue ?
24:36Les Dekis.
24:37Ouais, les Dekis.
24:38Comment ?
24:40Les Dekis.
24:41Non. Pas encore.
24:42Non.
24:44Les Dekis est deuxième actuellement.
24:46Je l'ai pas. Là, franchement, j'ai...
24:49C'est une Américaine. 12 médailles.
24:50Elle s'appelle Jenny Thompson.
24:52Ah, oui.
24:53Je pense que les Dekis vont rapidement la dépasser.
24:56Toujours un partout. Quatrième question.
24:58Qui sont les nageurs français les plus médaillés ?
25:02Il y en a trois.
25:03Lord Manoudou.
25:05Attends, les nageurs.
25:06Garçons.
25:08Ils ont remporté quatre médailles olympiques.
25:10Il y a trois noms.
25:11Yannick Agnel.
25:13Non.
25:15Il n'y a pas quatre médailles.
25:17Fabien Gillot.
25:18Non plus.
25:20Jérémie Stradus.
25:21Non.
25:22Il y a Camille Muffat.
25:24Non, les garçons, on a dit.
25:25Les garçons ? Pardon.
25:26On n'est pas bons.
25:28Non, vous n'êtes pas bons.
25:29Rires
25:32Alors, Amoury Leveau.
25:33Oui.
25:35Amoury.
25:36Fabien.
25:37Une médaille en or.
25:38Florent Manoudou.
25:39Lui aussi, quatre médailles olympiques.
25:41Alain Bernard.
25:42J'ai oublié.
25:44Un partout.
25:45Dernière question.
25:46Qui va remporter le trophée exceptionnel de l'émission
25:49La victoire est en elle ?
25:50Qui est la première française championne olympique ?
25:53Lord Manoudou.
25:55En 2004.
25:56C'est une victoire pour Asia.
25:57Elle était plus rapide.
25:59Elle était plus rapide.
26:00Comme dans l'eau, non ?
26:01Pas encore.
26:03Rires
26:04Je vous embrasse.
26:05Merci beaucoup.
26:06Merci, Asia.
26:07Merci, Joris.
26:08Bravo à vous deux.
26:10Continuez.
26:11C'était un super moment.
26:12Merci à vous.
26:13A bientôt.
26:14Ciao.
26:16Une grande nageuse française va nous rejoindre.
26:18Elle rentre du lac Titicaca.
26:20C'est assez génial, ce qui a été réalisé.
26:22...
26:28C'est une légende de la natation française
26:31que nous accueillons avec mon camarade Salim.
26:33C'est Malia Mettella.
26:35Bonsoir, ma chère Malia.
26:37Bonsoir.
26:39Bonsoir, Malia.
26:40Bonsoir, Alexandre.
26:41Bonsoir, Salim.
26:42Salim est resté du côté de Bordeaux.
26:45Tu as une petite écharpe.
26:46Qu'est-ce qui s'est passé, Salim ?
26:48Tout à fait.
26:49Une petite chute de cheval qui me prive de votre présence,
26:52de votre compagnie aujourd'hui, les amis.
26:55Ce n'est que partie remise.
26:56C'est une chose qui arrive. Le sport, c'est aussi ça.
26:59Exactement.
27:00Y a quoi ? La clavicule qui est touchée ? L'épaule ?
27:03Non, je me suis démis l'épaule.
27:05Une luxation de l'épaule, mais dans une ou deux semaines.
27:08C'est douloureux. Courage, mon ami.
27:10Malia Mettella est avec nous, cette grande nageuse française
27:13qui a aujourd'hui 39 ans.
27:15C'est une jeune femme.
27:16Malia, qui maintenant travaille avec des partenaires du CIO,
27:19qui sera donc acteur des Jeux olympiques de Paris 2024
27:22à sa façon.
27:23C'est un titre de vice-championne du 50 nages libres en 2004,
27:27un titre de vice-championne du 100 mètres nages libres en 2005,
27:303 fois championne d'Europe grand bassin,
27:322 fois championne d'Europe petit bassin.
27:34Bref, une femme qui nous inspire, comme toutes ces grandes nageuses,
27:38mais y en a peu, et c'est pour ça qu'on les aime.
27:41C'est gentil, c'est adorable. Merci.
27:43Malia, t'as mis fin à ta carrière en 2009,
27:46et tu rentres, et c'est pour ça que tu es là aujourd'hui,
27:49du lac Titicaca.
27:50Pour info, c'est à 3 812 mètres d'altitude.
27:553 812 mètres d'altitude.
27:57Juste comme ça qu'on mesure bien le truc.
27:59C'est dans la cordillère des Andes, à peu près 100 km de La Paz.
28:02C'est la capitale bolivienne, évidemment.
28:05C'est traversé, ce lac, par la frontière entre la Bolivie et le Pérou.
28:10C'est considéré comme le plus haut lac navigable du monde.
28:14Et là, comme notre amie Malia,
28:17elle nage bien, elle a gardé 2-3 petits restes,
28:20elle a encore 25 ans dans sa tête.
28:22Elle s'est dit qu'elle allait faire un petit challenge
28:25au mois de novembre-décembre, là où il fait à peu près 12 degrés,
28:29où l'eau est à peu près à 12 degrés aussi,
28:31mais la nuit, il fait entre 0 et 5 degrés,
28:34donc un truc assez compliqué.
28:35Et comme si ça ne suffisait pas juste de se jeter à l'eau,
28:39elle a décidé de se jeter à l'eau avec deux camarades,
28:42qui sont juste incroyables.
28:45Il y a tout d'abord Mathieu, on dit comment ? Villevoëtte ?
28:48-"Videvoûte".
28:50-"Videvoûte", qui est un éco-aventurier
28:52et un garçon juste génial, Théo Curin,
28:55qui est un athlète paralympique, quadriamputé,
28:58donc cela veut dire qu'il n'a ni pieds ni bras,
29:01amputé à l'âge de 6 ans à cause d'une méningite foudroyante.
29:05Il a terminé 4e du 200 m de nage libre
29:07aux Jeux paralympiques de Rio en 2016.
29:10Et vous avez décidé, en relais,
29:13de faire cette traversée du lac Titicaca.
29:16C'est combien de kilomètres ? C'est combien de temps ?
29:20On a fait exactement 108 km en 11 jours.
29:24108 km sur une eau, Salim, je te présente le truc,
29:28à à peu près 10 degrés.
29:30Et comme ça ne suffisait pas, ils étaient à 3 sur un radeau,
29:34qui faisait 2,30 m de long et 2 m de large,
29:37qui pèse 500 kg.
29:39Et celui qui nage tracte le radeau
29:41sur lequel il y a les affaires de tout le monde,
29:43plus les deux autres.
29:45Les deux autres. Exactement.
29:47Malia, d'où vient ce projet ?
29:50C'est de la tête de Théo.
29:54C'est venu de la tête de Théo.
29:56Et en fait, Théo, malheureusement,
29:58il fait face à des changements de classification
30:01pour les paralympiques et pour les mondiaux,
30:04donc ils ont changé sa catégorie de côté handicap,
30:07parce qu'ils sont classés par handicap,
30:09je pense que Salim doit connaître.
30:11Et en fait, il se retrouvait avec des nageurs
30:14qui avaient des bras ou des jambes.
30:16Théo n'a pas de bras, même pas de jambes.
30:18En natation, dès que t'as un moyen de propulsion
30:21supérieur à un autre nageur, c'est sûr que tu vas plus vite.
30:24Il s'est dit, je vais pas faire une année paralympique,
30:27une année olympique, m'entraîner tous les jours,
30:3125 à 30 heures dans la semaine,
30:33pendant 12 mois,
30:34et je vais pas pouvoir aller chercher le Graal,
30:37une médaille paralympique.
30:39Il a dit, je vais créer mon défi.
30:41Et il s'est dit, pourquoi pas Titi Kaka ?
30:43Il aimait bien ce nom, ça le faisait rigoler.
30:46C'est pour ça qu'il a pris Titi Kaka.
30:49Il voulait un défi que personne n'avait fait.
30:51La traversée de la Manche, il y en a beaucoup qui le font.
30:55Et en plus, il s'est dit, il y aura des difficultés.
30:58L'altitude, l'eau froide,
31:00tracter un radeau de 500 kg,
31:02tout ça, c'était des conditions
31:04qui ont fait que le lac Titi Kaka regroupait tout ce qu'il fallait
31:07et il a dit, Titi Kaka, mais je vais pas le faire seul.
31:10Je vais faire avec un éco-aventurier, un aventurier
31:14et avec une nana.
31:15Donc, il m'a choisi en tant que nana.
31:17C'est top.
31:18Puisqu'on abordait les difficultés de tout ce défi,
31:21je crois avoir lu, j'ai un peu suivi tout ça,
31:24dès qu'il y a une folie de ce genre, je suis d'assez près tout ça.
31:28Ça aurait dû être 120 km, si je ne me trompe pas.
31:31Et je crois que vous avez eu
31:34quelques surprises, quelques difficultés.
31:37Euh...
31:38J'ai cru comprendre qu'il y avait eu un idyllique en arrivant,
31:41où vous vous êtes dit, c'est super, c'est génial.
31:44Tu me racontes, tu embrayes un peu,
31:46qu'est-ce qui s'est passé une fois que vous vous êtes mis à l'eau ?
31:50Quels signes vous ont donné les éléments ?
31:53Alors, on s'est pris d'abord...
31:55On va dire, deux ou trois jours avant le départ,
31:58on a commencé à nager dans le lac pour prendre un peu nos repères,
32:02savoir si l'eau n'était pas trop froide, comment ça se passait.
32:05Et ensuite, le grand jour, le jour du départ à Copacabana,
32:09il y avait une foule, des nageurs qui sont venus de La Paz
32:13spécialement pour faire le départ avec nous.
32:16Ça s'est très bien passé.
32:18Un moment, le radeau partait de droite à gauche,
32:20parce qu'il faut souvent le barrer, il est lourd, il y a du vent.
32:24Donc, je suis sortie de l'eau.
32:26Et on n'a pas nagé beaucoup.
32:29On n'a fait que neuf kilomètres, pas beaucoup.
32:33En fait, dans notre programme, c'est 12 kilomètres par jour
32:36pour pouvoir le faire en dix jours.
32:38On s'est dit, neuf kilomètres le premier jour, c'est dur, déjà.
32:42Première nuit, c'est sympa, on a trouvé un endroit, une petite baie,
32:46tranquille, il y avait des pêcheurs pas très loin
32:49qui nous regardaient, qui posaient des questions.
32:52Et on s'est dit, le lendemain, on repart.
32:54Le lendemain, on n'a pas pu repartir direct.
32:57Les éléments ont été plus forts que nous.
33:00Et ça, c'était un premier signe,
33:02parce que la deuxième nuit, elle a été terrible pour nous.
33:05On s'est retrouvés face aux éclairs, les orages, la grêle.
33:08Et là, ça a été une catastrophe.
33:11On n'a pas dormi de la nuit.
33:13On s'est dit, comment on va faire ?
33:15On est seulement au deuxième jour, deuxième nuit.
33:18On a 122 kilomètres à faire.
33:20Et la veille, on venait de faire 17 kilomètres,
33:23le plus gros kilométrage.
33:25Donc, on était un peu dans la folie.
33:27En fait, les éléments nous ont complètement cassés le moral.
33:31Et on s'est dit, on ne va pas se laisser faire.
33:34On va essayer d'apprivoiser un peu les éléments,
33:39parce qu'on n'est pas chez nous.
33:40Le lac Titicaca, en fait,
33:42ce n'est pas un lac tranquille, tout calme.
33:45C'est un lac qui te fait comprendre
33:47que tu ne décides pas quand tu dois avancer.
33:50Conserve, tu avais eu de...
33:52Salim, pardon, permets-moi de t'interrompre.
33:54La présence de Salim, elle est importante.
33:56Elle est intéressante parce que, Salim, tu es non-voyant.
33:59Tu comprends et tu sais ce que c'est que vivre avec un handicap.
34:03Toi, non-voyant,
34:05tu concours en équitation avec les valides, les voyants.
34:08D'ailleurs, ça t'a joué un tour,
34:10puisque t'as l'épaule en l'air aujourd'hui.
34:12Quand tu imagines, et tu ne vois donc pas ces images,
34:16de Théo, quadriamputé, qui nage comme ça dans cette eau
34:20et qui va devoir enquiller les kilomètres...
34:22Alors, une petite précision, quand même.
34:24On a accroché, comment ça s'appelle, Léa ?
34:26Pardon, Malias, qu'on a accroché à ses mains et ses pieds ?
34:30Enfin, c'est...
34:31Il a des plaquettes dans les mains.
34:33Il nage avec des plaquettes.
34:35Ce sont des plaquettes.
34:36En fait, oui, pour te décrire un peu notre radeau,
34:40ce sont deux coques de petits catas, on va dire,
34:43sur lesquelles on a mis une coque, une tente avec une coque,
34:46dans laquelle on dormait tous les trois.
34:49Et on a une plateforme à l'arrière du radeau,
34:51là où il y a notre nourriture,
34:53le réchaud, nos affaires.
34:55Donc, en fait, on était...
34:57La plupart du temps, on était dehors,
35:00sur cette plateforme,
35:01pour pouvoir, en même temps, barrer le radeau.
35:04Et à l'avant, il y avait toujours un autre nageur
35:07pour pouvoir ravitailler et encourager en même temps
35:10celui qui est devant et qui fait l'effort.
35:13C'était pour te décrire comment était notre radeau.
35:16Les images qu'on montre, c'est l'arrivée,
35:18c'est notre arrivée aux îles Uros.
35:20Cette population qui vit sur le lac
35:23sur de la paille qu'ils ont complètement coupée
35:26et mis des couches et des couches pour pouvoir vivre dessus.
35:29Et on a eu un accueil festif.
35:32Là, on voit Théo, qui est en train de danser.
35:34Rires
35:36On est... On a été...
35:39Pour eux, en fait, c'était de revoir des étrangers,
35:42des touristes, en fait, revenir après deux ans de Covid.
35:47Ça a été très symbolique pour eux.
35:50Donc, toute la population nous disait
35:52qu'ils allaient sur le lac, les pêcheurs.
35:55Ils nous disaient que ça leur faisait plaisir
35:57de voir du monde de l'extérieur,
35:59parce que ça faisait deux ans qu'on ne voyait personne.
36:02Et là, on voit les enfants qui chantent.
36:04Ils ont chanté en français aussi.
36:06Ils ont chanté en français pour nous.
36:09C'était assez marrant,
36:11parce que c'était un peu une petite cantine
36:13qu'on chante à l'école.
36:15Donc, ça nous a fait rire,
36:16parce que je sais pas s'ils comprenaient exactement
36:19ce qu'ils disaient.
36:20C'est des souvenirs qui restent très gravés dans la mémoire,
36:24parce que, pour moi, l'arrivée,
36:28je l'ai vécue comme mon arrivée olympique.
36:30J'ai eu les mêmes frissons,
36:32les mêmes sentiments à l'intérieur,
36:35comme si c'était une arrivée olympique.
36:37On avait certes vécu des éléments,
36:39un ascenseur émotionnel pendant 11 jours,
36:42alors que ma course avait duré 24 secondes.
36:45J'ai ressenti la même chose quand on nous a dit
36:48que c'était une arrivée. C'était très, très fort.
36:50Quand vous avez eu les pires périodes,
36:53quand les éléments se sont déchaînés,
36:55quand vous avez eu des creux sur le lac,
36:58une eau agitée, etc.,
36:59est-ce que vous avez eu ce moment
37:01où, collectivement, vous vous êtes dit
37:04qu'on n'y arrivera pas, on va devoir laisser tomber,
37:06on va devoir décaler ?
37:08Est-ce que vous avez cru devoir...
37:11En fait, c'est vrai que...
37:13En fait, c'était la 5e nuit et le 6e jour.
37:16On a eu une tempête énorme.
37:18On était dans des creux de 1,50 m sur ce radeau.
37:22Oh là là !
37:23Et ça peut faire très, très peur.
37:25Je pense qu'on ne se rend pas compte,
37:27mais quand on le dit,
37:28les gens qui naviguent se disent assez souvent
37:31que sur un petit radeau, être dans des creux de 1,50 m,
37:34c'est quand même assez fort.
37:36On était avec nos gilets de sauvetage
37:38et on dormait avec nos gilets de sauvetage.
37:41En fait, on avait élu...
37:43Mathieu avait décidé d'être le capitaine,
37:45on l'a respecté.
37:46Donc, toutes les décisions qu'il prenait, on respectait.
37:49On avait pris toutes les sangles.
37:51Je pense qu'il y en a qui doivent le voir sur les images,
37:54les sangles auxquelles on est accrochés au radeau.
37:57On s'était accrochés notre gilet de sauvetage au radeau.
38:00On s'est dit, s'il y a quelqu'un qui tombe,
38:02au moins, on peut le tracter avec la laisse,
38:07avec la corde.
38:08Euh...
38:09Et on s'était...
38:10On était restés très soudés.
38:13En fait, au lieu de dormir dans la position
38:15dans laquelle on dormait, en longueur,
38:18on s'était mis en largeur, tous les trois,
38:20et on restait collés et on se racontait des histoires
38:24pour oublier ce fait qu'on soit dans un moment de...
38:27En fait, de peur, presque.
38:29Les garçons, à chaque fois, tous les 10 ou les 15 minutes,
38:32ils disent, quand même, ça secoue pas mal.
38:35Donc, on essayait de relativiser un peu,
38:39en se racontant des histoires.
38:41C'était assez...
38:42J'ai une question, Salim.
38:44Face aux difficultés de ce challenge,
38:48est-ce que, toi, tu comprends,
38:50et on le voit bien dans la voie de Malia,
38:52qu'il n'y a plus de handicap, de différence,
38:55il n'y a pas de filles, de valides et de pas valides ?
38:57Tu sais, quand t'es face à une bataille comme ça,
39:00je crois qu'il y a quelque chose de primordial.
39:04C'est que, en fait, on se...
39:06Enfin, moi, pour ceux que j'ai connus, en tout cas,
39:09quelques défis, aussi, d'autre nature,
39:11mais quand tu es dans la bataille,
39:15tu te poses plus la question de ce qui te manque
39:18que de ce que tu as pour arriver au bout.
39:20Et je pense que...
39:22Alors, ce qui a mis du piquant, du sel
39:24et ce qui fait vibrer la voix de Malia,
39:26qui nous raconte tout ça aujourd'hui,
39:28c'est tous les imprévus qu'il y a eu derrière tout ça.
39:31Tout ce à quoi on ne s'attendait pas.
39:33Mais quand on arrive au bout,
39:35enfin, je suis très envieux de ce sentiment-là,
39:38que l'équipe a pu avoir en arrivant.
39:40C'est formidable.
39:42Et là, effectivement, va parler du handicap.
39:44Quand t'es arrivé, t'as trois aventuriers, c'est tout.
39:47C'est formidable de voir à quel point ça peut souder.
39:52Malia, tu nous en parlerais mieux que ce que je dis là,
39:55mais en termes de cohésion d'équipe,
39:57je pense que ça a un sens exceptionnel.
39:59Complètement.
40:01Très, très exceptionnel.
40:02C'est vrai qu'on ne voyait pas le handicap de Théo.
40:08Théo faisait pas mal de choses sur le radeau, quand même.
40:11Il nous aidait sur le côté.
40:13On lui donnait des tâches auxquelles on savait qu'il pouvait faire.
40:17C'était de s'occuper du moteur,
40:18parce qu'on avait un petit moteur électrique
40:21qui nous permettait de revenir au point où on s'était arrêté.
40:24Il s'occupait du réchaud.
40:26Donc, après, il n'y avait pas énormément de choses
40:29à faire sur ce radeau.
40:30Il faut dire qu'il est très petit, il n'est pas très grand,
40:33donc il n'y a pas beaucoup de déplacements.
40:35Ce qu'on faisait en plus, c'était les encres flottantes,
40:39qui nous permettaient d'éviter de dériver avec Mathieu.
40:43Toutes les deux, on s'occupait de ça, en fait.
40:46Le ravitaillement, Théo le faisait très bien.
40:49Il y a des moments où on faisait des grosses journées,
40:51où on a nagé 25 km,
40:53où on tournait et on se reposait à tour de rôle.
40:57Il y a des moments où Théo était à la barre et il était au ravitaux.
41:01Il faisait les deux. Il s'est débrouillé très bien.
41:05Donc, voilà.
41:06Il y a des choses qui ont fait que sur le radeau,
41:09Théo se déplaçait normalement comme nous.
41:11Maria, tu as oublié son handicap, toi ?
41:14Ah, moi, oui, complètement. Oui, oui.
41:16Après, j'ai pris des habitudes où Théo avait besoin de moi,
41:20mais sinon, oui, moi, il y a des moments où,
41:23même avant le défi, pendant la préparation,
41:26j'oubliais complètement que Théo avait un handicap.
41:28À chaque fois, je lui faisais des réflexions,
41:31et en fait, il me dit que ça ne fait rien.
41:35Au contraire.
41:36C'est aussi ça, d'oublier qu'il a le handicap.
41:39Il y a juste des petits trucs où il a besoin de fermer sa doudoune,
41:43il a besoin de mon aide.
41:44Comme Théo était responsable média sur les GoPros,
41:48toutes les images qu'on a faites en backstage,
41:50c'était lui, pour les cartes SD.
41:53Théo ne pouvait pas le faire, je le faisais.
41:55Donc, il y a vraiment...
41:56C'est des petits détails qui font qu'on oublie...
42:00On est là, on est tous les trois.
42:02Franchement, à part nager et dormir,
42:04on n'avait pas grand-chose à faire.
42:06Donc, c'est sûr que les seuls moments
42:09où les garçons, ils ont pu beaucoup lire,
42:12c'est les jours où on nageait pas,
42:14parce qu'il y avait trop de vent.
42:16Donc, c'est là que ça fait
42:18qu'on était beaucoup plus en cohésion,
42:22on apprenait à se connaître,
42:23parce qu'on ne se connaissait pas avant que Théo nous propose ce défi.
42:27Donc, on a vraiment appris à se connaître.
42:29On a eu des confidences entre nous, forcément,
42:32parce qu'en ce jour, on se parle beaucoup,
42:35on apprend à pas mal communiquer,
42:38et c'est vrai que ça fait qu'on est sortis de là
42:41beaucoup plus soudés qu'on a commencé, quand même.
42:45Salut.
42:46C'est génial.
42:48Pour revenir sur la question de tout à l'heure
42:51et sur la merveilleuse réponse que vient de nous faire Malga,
42:54là où je voulais en venir, c'est que Théo, en l'occurrence,
42:57était un membre à part entière de l'équipe,
43:00et je dis ça pas par hasard,
43:02c'est que beaucoup de gens ne voient pas forcément
43:05toute la logistique qu'il peut y avoir derrière un défi comme celui-là,
43:08et c'est pas simplement Théo qui a envie de le faire
43:10et deux fous furieux qui viennent lui faire faire la chose,
43:15c'est justement trois aventuriers,
43:18enfin, deux qui viennent se joindre à lui,
43:20mais lui, à sa pleine part dans l'équipe,
43:21et c'est ça que je trouve formidable,
43:23et formidablement raconté par Malia.
43:24Moi, je trouve ça topissier.
43:27Merci.
43:28Non, mais c'est vrai, Malia, et c'est pour ça que je suis ravi
43:31qu'à la fois on ait Salim aujourd'hui
43:34et que tu sois avec nous pour nous raconter ça,
43:36et d'entendre Salim nous dire...
43:39En gros, t'aurais aimé y être aussi, quoi, Salim.
43:42Oui, carrément.
43:43Alors, je nage très mal, mais sinon, dans l'idée, oui.
43:48Je voudrais qu'on écoute la réaction de Théo,
43:50c'était à l'arrivée, juste après ce formidable défi.
43:53Écoutons-le.
43:55Je ne pensais pas qu'on allait autant chier pendant le jour.
43:59Franchement, je ne croyais pas que j'allais mettre ma vie en jeu aussi.
44:02Franchement, juste deux fois, j'ai cru qu'on allait crever,
44:04mais on est là, les gens sont là, on l'a fait,
44:08et franchement, merci à tous,
44:10parce que c'est ça, réaliser ses rêves, quoi.
44:14Et sans les cinq de là-haut, je n'aurais pas réussi,
44:17donc merci à vous deux, et putain, on l'a fait, quoi.
44:21Bravo à tous les trois.
44:23Bravo à tous les trois, vraiment.
44:24Malia, Mathieu, Théo.
44:25Mais que c'est beau, Malia.
44:27Ces larmes, et je vois tes yeux qui commencent un peu,
44:31et je vois les larmes qui montent.
44:32C'est tellement fort.
44:35Oui, ça a été très, très fort.
44:38Oui, c'est arrivé...
44:40En fait, je peux dire que le dernier jour,
44:44on s'était dit que ça allait être facile,
44:47et en fait, pas du tout.
44:48Pas du tout.
44:50On a galéré, mais j'ai presque envie de vous dire
44:52que c'était le jour où on a le plus galéré,
44:54parce qu'on a pris la mauvaise direction, en fait, aujourd'hui.
44:58C'était Théo et moi qui avant commencé.
45:02Théo a fait la première heure, moi, j'ai fait la deuxième heure,
45:04et on avait pris la mauvaise direction.
45:07On voyait, en fait, des montagnes de l'autre côté,
45:10et on s'est dit que les îles Uros sont juste devant.
45:13Et après un moment, on s'est dit que normalement,
45:15les îles Uros, on peut voir de la paille ou quelque chose,
45:18on peut le voir quand même de loin.
45:20Et en fait, on voyait rien.
45:22Et à un moment, on s'est dit que le GPS ne nous montre pas ça,
45:25c'est de l'autre côté.
45:26Et en fait, c'est Mathieu qui a complètement...
45:29Qui a dit que non, en fait, Malia, c'est pas dans cette direction,
45:34c'est complètement à droite.
45:35Et là, à ce moment-là, le vent s'est levé
45:39et on avait les vagues de côté.
45:41Donc, on avançait plus.
45:43On avançait plus du tout.
45:46Et là, c'est là que commence à monter un peu la frustration.
45:50En fait, quand tu nages, tu te dis...
45:53Mais j'avançais très bien, c'était tout plat, c'était tout calme.
45:56Et en fait, d'un coup, tu n'avances plus.
45:59Tu n'avances plus, tu n'avances plus.
46:01Et à un moment, je me suis énervée, je suis sortie de l'eau.
46:04J'ai dit, j'en peux plus, il faut que je rentre chez moi.
46:09Et c'est Mathieu qui devait nager derrière.
46:11Il s'est habillé rapidement, il a mis sa combi,
46:13il a repris la nage.
46:16Et en fait, c'était avant l'arrivée dans le canal
46:20qu'on a pu voir.
46:21Et en fait, tout commençait à monter et on s'est dit,
46:25heureusement que ça se finit parce que cet ascenseur émotionnel
46:30commençait vraiment à prendre sur notre patience.
46:33Déjà, Théo, au huitième jour, il n'avait plus de patience.
46:35On l'a repris, on a discuté avec lui
46:39parce qu'il voulait vraiment arrêter.
46:41Et donc là, oui, tout a été relâché, en fait,
46:46au moment où on le voit sur le radeau en train de parler,
46:49en fois qu'on voit Théo parler,
46:52et dire que merci, merci à la population,
46:54merci à notre équipe, merci aux Français de nous avoir soutenus
46:58parce qu'on avait besoin de ça aussi pour pouvoir finir ce défi,
47:01en tout cas.
47:02Très rapidement, mais il dit quelque chose de très fort
47:05dans le message qu'on vient d'entendre.
47:06À un moment, il dit, quand même, c'est passé à la trappe et il dit,
47:09j'ai cru qu'on allait crever deux fois.
47:11Est-ce qu'à ce point-là, vous avez eu ce sentiment-là ?
47:13Trois fois.
47:14Trois fois, oui.
47:15À ce point-là ?
47:17Oui, parce que la deuxième nuit où on la passe,
47:22en fait, c'est moi qui les réveille, grâce à mes ronflements.
47:25Je les réveille.
47:27Et en fait, c'est là qu'ils se rendent compte
47:29qu'on a dérivé de deux kilomètres.
47:31Ils se disent, il faut que tu te lèves, il faut qu'on bouge le radeau.
47:35Et donc, on bouge le radeau,
47:37on se remet au même point où on s'était posé,
47:40mais on l'accroche de deux côtés.
47:42On le met sur la plage avec l'encre
47:44et on l'accroche à un vieux ponton qu'on a vu.
47:46On s'est dit, bon, ça va peut-être nous sauver,
47:48on accroche une corde et tout.
47:50Et en fait, dix minutes après, la grêle, les orages,
47:54tout nous tombe dessus.
47:55Et là, quand on voit la coque s'aligner,
47:59il y a une coque sur laquelle on dort,
48:00sur laquelle il y a nos panneaux solaires souples,
48:03on entend la grêle tomber, tomber, tomber dessus.
48:06On s'est dit, est-ce que ça va tenir ?
48:08Et ça a duré presque toute la nuit.
48:11C'était le radeau, je crois qu'en plus, si je ne me trompe pas,
48:14c'était de la récup, non ? C'était pas du recyclé ?
48:17Exactement, mais c'était la très bonne récup.
48:20On a félicité ceux qui nous ont fabriqué le radeau.
48:23Et ensuite, la cinquième nuit,
48:25c'est là les vagues, on a eu les vagues d'un mètre cinquante,
48:27on a tous les trois, on a cru qu'on allait mourir.
48:29On s'est dit, mais moi, je m'étais préparée mentalement
48:32et physiquement en me disant,
48:33s'il faut nager jusqu'à la côte,
48:35je suis capable de tenir en maillot de bain
48:38et de nager jusqu'en maillot jusqu'à la côte.
48:41Et la seule chose que j'avais comme consigne,
48:43c'était de préparer Théo, mettre sa combinaison
48:46et que Mathieu puisse appeler les secours
48:49le temps qu'on commence à nager.
48:50Incroyable, c'est merveilleux.
48:52Ah ouais, c'était...
48:53On avait préparé la trousse de survie.
48:55On avait préparé la trousse de survie et tout.
48:57Et ensuite, la troisième, c'était quand on s'était réfugiés
49:00chez des habitants, parce qu'ils nous ont prévenus
49:02que ça allait taper très, très fort ce soir.
49:05Oh là là.
49:06Pour terminer, et bravo, c'est très émouvant
49:08et on l'a vu dans tes yeux, Malia,
49:10je voudrais te montrer une image.
49:12Il y a une immense championne italienne,
49:14une multimédaillée olympique, championne olympique,
49:17Federica Pellegrini,
49:18qui a fait son jubilé cette semaine.
49:20Et il y a cette image que je trouve bouleversante.
49:23Il y avait huit plots dans cette piscine
49:25et elle avait décidé, il n'y aura que sept concurrentes.
49:28Et je vais laisser l'huitième plot pour...
49:29Et je te laisse commenter.
49:31Pour Camille Muffat.
49:32Oh, je vais me faire pleurer encore.
49:36Pour Camille, ouais.
49:37Pour Camille, parce que Camille, c'était une des nageuses
49:40qui nageait aussi du 200 et du 400, comme Federica.
49:44Et c'était un beau signe de la part de Federica.
49:48Il faut dire que Federica, c'est une...
49:50C'est une queen.
49:51La queen, qu'on peut dire, de la chanson, c'est Beyoncé,
49:54mais chez nous, la queen, c'est Federica,
49:56parce que moi, je l'ai connue depuis 2004.
49:59Elle était là et elle avait fait podium olympique
50:02et elle était encore là jusqu'en...
50:04Il faut dire, jusqu'en 2021.
50:06Donc, elle a une carrière magnifique.
50:09Je pense qu'on peut vraiment plus que lui tirer le chapeau.
50:12Et qu'elle n'oublie pas. C'est ça qui est formidable.
50:15Ouais, de penser à Camille
50:17et de se dire que Camille est encore là
50:21à travers elle, à travers ce plot qui était là
50:23et que personne n'a nagé et c'était la place de Camille.
50:27Une formidable championne, une grande dame de la natation.
50:31Et ces images nous bouleversent tous et toutes, évidemment.
50:34Merci d'avoir été avec nous et bravo.
50:37Merci à vous.
50:38J'espère à bientôt. Salut, Salim.
50:40Remets-toi bien et de ton épaule.
50:43Merci beaucoup.
50:44A bientôt, Salim.
50:45Que d'émotions, les amis. Cette émission se termine.
50:48Merci à toutes et à tous pour votre fidélité.
50:50Je vous dis à très bientôt. Merci, salut.
50:57Sous-titrage ST' 501