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Bruno Cautrès, chercheur au CNRS, au CEVIPOF et enseignant à Sciences Po est l'invité de Télématin. Il revient sur la prise de parole d'Emmanuel Macron du lundi 23 juillet.
Bruno Cautrès, chercheur au CNRS, au CEVIPOF et enseignant à Sciences Po est l'invité de Télématin. Il revient sur la prise de parole d'Emmanuel Macron du lundi 23 juillet.
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00:00C'est l'heure de l'interview d'actualité de 8h15
00:02et on va revenir sur cette première prise de parole d'Emmanuel Macron hier soir.
00:05Depuis les élections législatives,
00:07ça s'est passé sur le nouveau plateau de France Télévisions,
00:09inauguré pour l'occasion des Jeux Olympiques sur le toit du Trocadéro,
00:13interviewé par notre Thomas Soto national
00:15et Nathalie Iannetta dans le 20h de France 2.
00:17– Pour en parler, le politologue nôtre,
00:20– Ah oui !
00:21– Je m'approprie, Bruno Cotteres.
00:23Bonjour Bruno, vous l'avez trouvé comment le Président hier soir ?
00:27Rassuré ?
00:29– Rassurant.
00:30– Il voulait faire passer, en tout cas c'est le message qu'il voulait faire passer,
00:33que tout va bien, on est très bon pour l'organisation des Jeux Olympiques,
00:37il n'y a pas de confusion dans la vie politique,
00:40il attend des partis politiques qui fassent preuve de sens des responsabilités
00:44et donc je l'ai trouvé effectivement dans son couloir, si je puis dire,
00:48mais je ne suis pas sûr que tout ça parlait à tout le corps électoral.
00:52– D'abord il est revenu sur les raisons de cette dissolution
00:55que comme Thomas Soto l'a dit, que les Français n'ont toujours pas compris,
00:58il a dit que la situation de l'Assemblée précédente
01:00ne correspondait plus à la société française.
01:03On a envie de lui répondre, actuellement non plus.
01:06– Tout le monde n'est pas d'accord en tout cas.
01:07– Oui d'ailleurs il l'a dit deux fois hier soir effectivement,
01:09cette déclaration du chef de l'État, au fond le chef de l'État hier,
01:13il nous a proposé au fond, comme si on pincait des triangulaires,
01:17un autre triangle et le triangle qu'il nous a proposé hier soir,
01:20c'était lui au sommet du triangle, lui qui a fait preuve de sens des responsabilités,
01:25c'est en responsabilité, en conscience qu'il a fait la dissolution
01:29pour correspondre au pays.
01:31Il y a les Françaises et les Français qui sont une autre pointe du triangle,
01:35qui eux aussi ont fait preuve de sens des responsabilités en participant,
01:38en passant un message aux partis politiques,
01:40en leur disant mais entendez-vous, travaillez ensemble.
01:43Et puis il y a l'autre extrémité du triangle qui est les partis politiques
01:47qui eux n'ont pas le sens des responsabilités entre les lignes,
01:50ne savent pas travailler ensemble, ne savent pas dépasser leur clivage,
01:55leur confort idéologique.
01:57– C'est ça, il a beaucoup montré du doigt les autres,
02:00lui il est au sommet comme vous dites de ce triangle,
02:03est-ce que c'est un président qui a reconnu, compris sa défaite aussi à lui ?
02:08– Alors il a explicitement dit que son camp avait perdu,
02:12tout en disant une seconde après que personne n'avait gagné,
02:15ce qui était un des éléments les plus étranges effectivement
02:18et donc au fond c'est la matrice d'interprétation que le chef de l'État nous donne,
02:21si personne n'a gagné, à ce moment-là,
02:24on ne peut pas dire qu'un camp a vocation à gouverner lui tout seul,
02:28donc il en appelle à faire des compromis
02:31et à former une sorte de gouvernement de grande coalition.
02:34– Une interview qui est intervenue quelques heures seulement
02:37après l'annonce enfin par le Nouveau Front Populaire,
02:39ça y est d'un nom, ils se sont mis d'accord sur quelqu'un,
02:42cet économiste de 37 ans, Lucie Casté au fonctionnaire,
02:46elle a été révélée notamment dans l'émission de France 5, c'est ce soir,
02:50lui il a tout de suite dit Emmanuel Macron, un nom ce n'est pas la question.
02:54– Ce n'est pas le sujet.
02:55– Ce n'est pas le sujet.
02:56– Effectivement le sujet c'est réunir une majorité,
03:00entre les lignes, une majorité absolue et nous dit-il,
03:03pour faire passer des textes et voter un budget,
03:05au fond comme si le chef de l'État ne disait que gouverner,
03:08faire passer des textes, voter un budget,
03:10c'était sans dimension idéologique,
03:12qu'il n'y avait pas de clivage fondamental entre les partis politiques
03:15pour voter le prochain budget,
03:16alors on sait que le prochain budget, il va gravement traduire des choix.
03:19– Vous avez vu la Une de Libération, un nom mais non,
03:23lui il a dit ça, ce n'est pas le sujet, le nom du Premier ministre,
03:26alors que ça fait quand même quelques jours, quelques semaines qu'on l'attendait,
03:30est-ce que ce n'est pas justement ne pas respecter le choix des électeurs,
03:36que de balayer comme ça d'un coup de main le nom du Premier ministre,
03:40donné par le Nouveau Front Populaire,
03:43qui est quand même le mouvement qui a réuni le plus de voix ?
03:46– Le chef de l'État conteste cette analyse en disant,
03:48d'abord le Front Populaire n'a pas gagné,
03:51puisque c'est le Rassemblement National
03:53qui est arrivé premier parti politique à l'Assemblée,
03:55les autres ont formé une coalition ensuite,
03:58et lui réfute l'argument du déni de démocratie.
04:01– Déni de démocratie, c'est l'argument d'ailleurs de Jean-Luc Mélenchon,
04:04dès hier soir et de beaucoup de membres du Nouveau Front Populaire.
04:07– Mais lui il se situe hors de ce champ, en disant,
04:10il est lui dans sa position, il est le garant de l'unité nationale,
04:13et pour lui la démocratie c'est d'écouter, d'après lui,
04:17le message qu'auraient passé les Françaises et les Français,
04:20mais la campagne du deuxième tour n'a pas dit
04:23barrage pour le Rassemblement National, pour ensuite gouverner ensemble.
04:27Le chef de l'État nous explique que barrage contre le Rassemblement National,
04:31c'était derrière avec vocation de gouverner ensemble,
04:34et donc on voit qu'il y a une sorte de gigantesque malentendu dans le pays
04:37à propos de l'interprétation que donne le chef de l'État.
04:39– Justement c'est ça qui est étonnant Bruno Cotteres,
04:41c'est que le chef de l'État il dit en gros, c'est au parti de se mettre d'accord
04:44pour tenter de trouver une coalition entre la gauche, la droite, le centre,
04:48mais c'est pourtant lui, le Président de la République,
04:50qui est chargé de nommer un Premier ministre,
04:52et peut-être ensuite le Premier ministre de former une coalition.
04:54En fait on a l'impression d'être dans une espèce de flou en ce moment.
04:57– Oui, en plus c'est lui qui a fait la dissolution,
04:59donc il veut passer le mystigri, on va dire, au parti politique.
05:03– Il passe la patate chaude quand même.
05:04– Voilà, au parti politique, en leur disant,
05:06il a fait preuve de sens des responsabilités,
05:08il a utilisé plusieurs fois l'expression,
05:10il faut être à la hauteur de la situation,
05:12comme si les partis politiques étaient un petit peu, au fond, en bas,
05:16se disputant, essayant de faire chacun triompher son programme,
05:21refusant d'être à la hauteur de la situation,
05:24d'incarner l'intérêt général, le dépassement, on va dire, des clivages.
05:28Et de ce point de vue-là, on retrouve un Emmanuel Macron,
05:30au fond, dans son couloir depuis son premier mandat.
05:33Il a d'ailleurs réutilisé hier soir le triptyque
05:36« Libérer, Protéger, Unir »,
05:39qui est au fond le triptyque présidentiel depuis 2017.
05:41– Mais un Emmanuel Macron qui s'éloigne des électeurs,
05:44est-ce que c'est audible de dire des choses pareilles ?
05:46– Certainement pas pour le moment,
05:48parce qu'on voit que la popularité du chef d'État est en dessous des 30%,
05:52il est quelque part entre 25 et 30% de popularité,
05:55incontestablement il ressort extrêmement fragilisé de toute cette séquence,
05:59il a provoqué cette dissolution qui a raté,
06:02lui nous dit qu'il a provoqué la dissolution, qu'il a dissous le Parlement,
06:06au fond parce que ça ne correspondait plus,
06:08on le disait tout à l'heure, à l'image du pays,
06:10mais aussi parce qu'une motion de censure allait lui arriver à l'automne,
06:13rien n'est clair, on sait qu'il y aurait eu une motion de censure,
06:15donc on voit que pour le moment,
06:17on est dans une situation d'une très grande confusion pour le pays,
06:20le sentiment au fond d'une impasse,
06:22et que personne ne détient la clé de cette impasse,
06:25pas même le chef de l'État.
06:26– Donc il temporise, il dit on verra ça après les Jeux Olympiques,
06:29est-ce que les JO, justement, ça peut changer quelque chose ?
06:31– Après lui, c'était vraiment intéressant hier soir,
06:34parce qu'il s'est servi de l'exemple des JO pour dire,
06:37mais regardez au fond, lorsque Anne Hidalgo à gauche,
06:40Valérie Pécresse à droite, moi au centre,
06:43on y est arrivé à faire triompher,
06:45au fond à dépasser nos clivages politiques pour que la France gagne.
06:49– Mais il compte sur l'engouement, il compte sur les médailles,
06:52peut-être aussi pour changer l'ambiance, avoir de la communion ?
06:55– Oui sans doute, sans doute, il compte là-dessus,
06:57et sur les faits aussi, mois d'août,
06:59où les Françaises et les Français vont partir en vacances,
07:02en espérant que ça permette, au fond, de faire décanter les choses.
07:06Le chef de l'État mise clairement, effectivement,
07:09sur l'académie du mois d'août, pour reprendre la main.
07:12– Merci beaucoup Bruno Cotteres d'être venu nous voir dans Télématin.