• il y a 2 mois
Pierre-Marie Sève, directeur de l’Institut pour la Justice, sur la sécurité, un «sentiment» étrange : «Lorsqu’il n’y a pas de délinquants, il n’y a pas de délinquance».

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Transcription
00:00Pour autant, la situation est loin d'être parfaite, à Paris et ailleurs.
00:04Et surtout, elle ne devrait pas durer.
00:06D'abord parce que tout n'est pas rose à Paris, je vous le disais.
00:08Il y a plusieurs affaires qui concernaient des visiteurs parfois célèbres à Paris,
00:11qui ont fait la lune des journaux ces derniers jours.
00:13Vous avez peut-être vu passer le vol de la légende du football brésilien Zico,
00:17qui s'est fait voler une valise avec 500 000 euros de bijoux.
00:19On se demandait quand même pourquoi est-ce qu'il se baladait avec ça,
00:21mais visiblement, c'était sa valise et il était mécontent de son hôtel.
00:25Il a décidé d'aller dans un taxi et le taxi s'est fait embrouiller,
00:29je ne pensais pas d'autres mots, par deux passants,
00:31dont un a subtilisé les bagages,
00:33dont il y avait une rivière de diamants et sa montre Rolex.
00:35Enfin bref, donc c'était Zico.
00:37Plus grave, il y a une femme de 71 ans qui a été violée hier ou avant-hier,
00:40ces derniers jours, par le propriétaire de son logement Airbnb.
00:43Vous avez dû le voir passer.
00:45Une autre femme a été violée pareil, il y a deux ou trois jours,
00:47en rentrant des Jeux Olympiques par un chauffeur Uber.
00:50Il y a eu un athlète japonais à l'intérieur du village olympique
00:52qui s'est fait voler aussi 3 000 euros d'affaires, etc.
00:56Donc, tout n'est pas rose.
00:57Et puis à Paris, je note aussi que les outrages et violences
00:59contre les forces de l'ordre, là je vous sors une statistique,
01:01ont augmenté de 20 % entre la première semaine de juillet
01:04et la dernière semaine de juillet,
01:05c'est-à-dire au moment où les Jeux Olympiques se mettaient en place.
01:09Mais depuis plusieurs mois, c'est la situation à l'extérieur de Paris
01:12qui inquiète le plus.
01:14Parce que les policiers réquisitionnés
01:16qui font toute cette présence bleue dans Paris en ce moment,
01:18ils viennent essentiellement de provinces.
01:20Bon, il y a 2 000 policiers étrangers,
01:22mais les policiers et gendarmes viennent essentiellement de provinces.
01:25Est-ce qu'ils créent un trou dans la raquette ?
01:27On ne sait pas.
01:28Mathématiquement, forcément.
01:29Mathématiquement, oui.
01:30Alors, normalement, cet effet de décompression
01:34est supposé être contrebalancé par l'absence de vacances.
01:37Vous savez que les forces de l'ordre ont interdiction de prendre des vacances
01:39sur les mois de juin, juillet, août.
01:41Donc, on dit que c'est grâce à cette absence de vacances
01:44qu'on va permettre de résorber cette décompression.
01:47Mais c'est assez difficile de savoir à quel point ce mécanisme est vraiment huilé.
01:50Et c'est Jean-Marc Leclerc, journaliste du Figaro,
01:53grande figure du journalisme Police Justice,
01:55qui nous a donné quelques éléments de réponse à cette question.
01:57À savoir, est-ce que ces vacances-là annulées
02:00permettaient de maintenir le calme en province ?
02:04Et donc, il commande ce matin les chiffres de la délinquance,
02:07semaine par semaine, que publie exceptionnellement, d'ailleurs,
02:09le service statistique du ministère de l'Intérieur.
02:11Pendant les JO, il publie semaine par semaine.
02:13Et donc, parmi ces chiffres, on voit plusieurs choses
02:15qui peuvent nous poser question.
02:17Les usages de stupéfiants ont baissé de 12% en Ile-de-France.
02:19Ce qui est assez logique.
02:20C'est assez cohérent avec ce que je vous disais
02:22entre la première et la dernière semaine de juillet, encore une fois.
02:24Mais en revanche, il a augmenté de 2% dans l'ensemble du pays.
02:27Même les vols ont stagné à Paris,
02:28mais ils ont augmenté de 10% dans le reste du pays.
02:31Donc, c'est difficile d'en tirer des conclusions à ce stade.
02:33C'est encore très tôt.
02:33Il va falloir comparer les chiffres de juillet 2024
02:36aux années précédentes.
02:37Mais tout de même, on peut se poser des questions.
02:38Et puis, même s'il n'y avait pas de surmobilisation de la police,
02:41si cette surmobilisation ne créait pas de surdélinquance à Paris,
02:44on pourrait se demander ce qui va se passer
02:46au mois de septembre, octobre, novembre,
02:48quand la police va partir.
02:49Et d'un point de vue sécuritaire,
02:51restera-t-il quelque chose de cette expérience JO à Paris ?
02:54Eh bien, malheureusement, cette situation exceptionnelle
02:57a toutes les chances de ne pas durer.
02:58La France organise son événement le plus important
03:00depuis la Coupe du Monde 98.
03:01Il n'y a pas grand-chose à en dire.
03:02C'est un dispositif exceptionnel dans tous les sens du terme.
03:05Donc, ça ne sera pas le principe de la sécurité à Paris.
03:07C'est l'avis d'ailleurs d'un policier dans le Figaro
03:09qui dit que les joueurs de bonne taux et les pickpockets
03:11reviendront après les JO.
03:12Mais il y a deux leçons...
03:13Parenthèse enchantée.
03:14Voilà, parenthèse enchantée.
03:15Mais je pense qu'il y a deux leçons
03:16qui doivent être conservées et entendues.
03:18C'est d'abord l'impact positif de la présence des policiers.
03:20Ça, on ne le dit pas assez.
03:21J'irai même plus loin.
03:22C'est l'impact de la présence des policiers dans nos rues,
03:25des patrouilles.
03:26On ne le sait pas vraiment,
03:27mais depuis plusieurs années,
03:28les policiers patrouillent de moins en moins.
03:30Ils sont moins sur le terrain.
03:31En 2021, la Cour des comptes avait fait un rapport
03:33très intéressant là-dessus, assez critique,
03:34qui critiquait l'augmentation de la masse salariale des policiers,
03:37mais qui disait que, paradoxalement,
03:38ils étaient moins sur le terrain.
03:39Ça baisse tous les ans.
03:40Alors certes, ils sont des cibles.
03:42Certes, ils ont des horaires et des calendriers difficiles.
03:44Certes, ils ont beaucoup de paperasses.
03:46Vous connaissez la phrase de Gérard Collomb,
03:47une heure sur le terrain, c'est sept heures de paperasse.
03:49C'était peut-être un peu exagéré,
03:50mais il y a quand même du vrai.
03:51Mais il va falloir régler ces problèmes
03:53pour inverser la tendance.
03:54Et l'autre leçon basique de la criminologie
03:56que nous rappelle cette expérience,
03:57c'est que lorsqu'il n'y a pas de délinquants,
03:59il n'y a pas de délinquance.
04:00Depuis des mois, des populations considérées criminogènes
04:03par l'État ont été virées.
04:04Vous savez qu'on ne libère plus les déséquilibrés mentaux
04:08qui ont été mis sous contrainte.
04:10Il y a eu des instructions des préfectures
04:11pour ne plus les libérer.
04:12La surpopulation, la suroccupation carcérale
04:15qui atteint des records,
04:16c'est aussi une conséquence de ça.
04:17C'est qu'on fait en sorte que les délinquants
04:19restent en prison, neutralisés.
04:22Et beaucoup de maires avaient dénoncé ça.
04:23Alors la sécurité momentanément retrouvée à Paris,
04:25pour moi, n'est pas une victoire contre la délinquance.
04:27Elle peut avoir des effets bénéfiques
04:28si on en tire des leçons,
04:30pour en faire notamment un objectif futur.
04:32Mais si on n'en tire pas de leçons,
04:34alors ça ne sera qu'une trêve obtenue d'ailleurs au prix fort.
04:36C'est une trêve qui fait du bien,
04:37mais autant de bien qu'avaler du sable dans le désert
04:39quand on est assoiffé.
04:40Ça ne dure que le temps que le mirage ne se dissolve.
04:43Merci beaucoup Pierre Maraiset.

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