Les Conversations de Paul-Marie Coûteaux avec Boualem Sansal : L'Algérie est détruite (2ème partie)

  • le mois dernier
Voici la seconde partie de nos Conversations avec Boualem Sansal (pour mieux la saisir, il est conseillé de se reporter à la première, diffusée le 24 mai dernier). Entre temps, le célèbre écrivain algérien est devenu franco-algérien puisqu’il vient d’obtenir cette année la nationalité française. C’est d’ailleurs sur l'épineuse question des relations franco-algériennes que nous avons relancé la conversation : comment comprendre, 62 ans après la création de la République socialiste, que la symbiose avec la France, qui l’a créée de toutes pièces, symbiose tant voulue par Paris au prix d’innombrables concessions, ait échoué au point que les deux Etats que tout devrait pousser à s’entendre, soient désormais "face à face" ? Et cela alors même que, dans le monde nouveau où émergent les BRICS, les coopérations seraient si utiles aux deux parties, notamment grâce au cadre de la francophonie ? Boualem Sansal, né en 1949 et devenu ces vingt dernières années, l'un des écrivains de langue française les plus lus à travers le monde poursuit ici, avec un charme inimitable, le récit de sa vie, exprimant sans détour ses conceptions du monde, farouchement ans-islamistes et anti-totalitaires, ainsi que ses projets, ou ses rêves, politiques…

Category

📚
Learning
Transcript
00:00:00La vie de l'Algérie
00:00:05Le Réveil des Décennies
00:00:10L'Algérie, la vie de l'Algérie
00:00:15Le Réveil des Décennies
00:00:20L'Algérie, la vie de l'Algérie
00:00:24Venons-en à cette Algérie que vous avez connue. Vous avez presque 13 ans à l'indépendance.
00:00:36Et là se met en place, devant vous, au cours de votre jeunesse, un système que vous décrivez souvent dans vos ouvrages,
00:00:45le thème de vos premiers ouvrages, un peu moins maintenant, mais vos premiers ouvrages, post-restantes, etc.,
00:00:52décrivent un système bureaucratique, en réalité dictatorial, avec la couverture de Ben Bella d'abord,
00:01:01et puis Boum-Indienne qui sort de l'ombre en tant que chef des armées, et qui instaure une sorte de dictature de généraux
00:01:08qui touche à l'absurde, que vous décrivez avec un humour, une tristesse, une cruauté, très efficace.
00:01:17Les Algériens jusqu'à l'indépendance, ils étaient soit dans les Maquis, soit à l'étranger, au Caire, en Égypte, à droite en Asie, et même en France.
00:01:29Puisqu'on avait ouvert un front en France, ce qu'on appelait la septième oulaïa.
00:01:35La septième, qui a donné du fil à retordre à la police française.
00:01:41Qui a fait ce qu'elle a pu, bien qu'on l'ait accablée et qu'on l'accable encore aujourd'hui.
00:01:46Il y avait un front ouvert en plein Paris.
00:01:50Et donc ils ont accouru. Vite, vite, il faut rentrer à Alger, faire main basse sur le pouvoir. Qui va le prendre ?
00:01:59Donc, discussion.
00:02:03Le GPRA avait fonctionné pendant longtemps sur l'idée que de la primauté des civils sur les militaires.
00:02:11La révolution algérienne a fonctionné sur ce paradigme.
00:02:15GPRA, gouvernement provisoire de la République algérienne.
00:02:19La révolution algérienne.
00:02:21Et donc voilà.
00:02:23Alors il y a deux primautés.
00:02:25Primauté du civil sur les militaires.
00:02:29Et la primauté de l'intérieur sur l'extérieur.
00:02:34C'est-à-dire pour éviter ceux qui étaient dans les maquis, qui ont risqué leur vie.
00:02:38Pas ceux qui se la coulaient douce.
00:02:40Comme les gens de Hamas qui sont à Dubaï avec des étoiles à 40 étoiles, des nanas partout.
00:02:48Les chefs d'IAF vivaient comme ça à Tunis, au Caire, à Genève et à droite.
00:02:54Voilà, ils vivaient comme ça.
00:02:56Enfin ceux-là sont laissés à l'écart.
00:02:58Cette chose-là, normalement, ça aurait pu donner une République peut-être pas parfaitement démocratique.
00:03:07Mais c'est un gouvernement de civils.
00:03:10Et puis, à tout honneur, à tout seigneur, ceux qui se sont battus auraient un avantage.
00:03:16Tout en créant des coopérations avec la France.
00:03:19Oui, c'était ça l'idée.
00:03:21C'était ce que voulait le gouvernement français.
00:03:23On ne divorce pas de la France, sauf sur le plan de l'indépendance et tout ça.
00:03:28Sur les relations économiques et culturelles.
00:03:31Et là c'est cassé par le système médien.
00:03:35L'armée s'est rangée derrière un civil qui est Ben Bella.
00:03:40Et qui lui n'était ni de l'extérieur ni de l'intérieur puisqu'il était en prison.
00:03:46Il a fait partie des 6 chefs de la révolution algérienne qui avaient été arrêtés en 55.
00:03:54Au début de la guerre.
00:03:55En 54 même.
00:03:56C'était les 6 chefs du FLN.
00:04:00La chose venait de démarrer.
00:04:02Ça a commencé en novembre 54.
00:04:04On est début janvier.
00:04:06Ils vont chercher des aides.
00:04:08Les 6 chefs sont reçus par le roi du Maroc, Mohamed V, qui les reçoit.
00:04:13Il leur dit très bien.
00:04:14Moi je vous soutiens.
00:04:15Je vous donne même un territoire pour créer votre armée.
00:04:18Et même pour des réfugiés, etc.
00:04:22L'argent et tout.
00:04:24Et puis ok.
00:04:25Ils lui disent maintenant nous allons aller vers Auker.
00:04:31Pour voyager, pour des gens comme ça à rechercher tout ça.
00:04:35Aller de Rabat à Auker, il faut 3-4 mois.
00:04:37C'est la clandestinité.
00:04:40Le roi leur dit non il n'y a pas de problème.
00:04:42Je mets mon avion à votre disposition.
00:04:44Dans 3 heures vous êtes au cœur.
00:04:47Merci majesté.
00:04:49Et puis ils montent à l'avion.
00:04:52Le pilote français.
00:04:54Le roi avait un pilote français.
00:04:58Ce vol n'était pas prévu.
00:05:01La tour de contrôle dit...
00:05:03Le commandant demande l'autorisation de décoller.
00:05:05La tour de contrôle dit...
00:05:07Mais c'est quoi votre vol ?
00:05:09Ce n'est pas prévu.
00:05:11Et le gars leur dit...
00:05:12Oui oui c'est un truc qui vient de se décider.
00:05:14A l'instant moi-même je n'étais pas au courant.
00:05:16Je dois amener des gens au cœur des chefs du FLN.
00:05:22Et le message a été enregistré en Corse.
00:05:25Par un truc d'écoute de l'armée française.
00:05:29Le gars qui entend ça...
00:05:31Comment donc ?
00:05:33Je viens d'intercepter un message.
00:05:36Alors il paraît que c'est l'avion du roi.
00:05:38Matricule numéro 80.
00:05:40Et l'ordre remonte en vitesse.
00:05:44A l'Elysée.
00:05:46On hésite, on hésite, on hésite.
00:05:48Et ordre est donné, il faut intercepter l'avion.
00:05:51C'était le premier...
00:05:54Comment on appelle ça ?
00:05:56Quand on attaque un avion...
00:05:58Un détournement d'avion.
00:06:00C'est le premier attentat, détournement d'avion de l'histoire.
00:06:04Et commis par l'État.
00:06:06Sur ordre de l'Elysée s'il vous plaît.
00:06:08Et commis par l'État.
00:06:10Et donc des machins, des rafales ou je ne sais pas quoi...
00:06:14Ils atterrissent en Corse.
00:06:16Et là, entre temps, en haut lieu, on se concerte.
00:06:20Est-ce qu'on les relâche ?
00:06:22On les arrête au nom de quoi ?
00:06:24Et ils ont commis...
00:06:26Les voyageurs ont le droit d'aller dans Rabat.
00:06:29Ils n'étaient pas recherchés.
00:06:32Quand même la décision a été prise, on les intercède.
00:06:36Et donc c'était Bembela, Haïtamed, Massas, Kider...
00:06:42Ils étaient 6.
00:06:44Et ils ont été libérés en 62.
00:06:48En 62.
00:06:50Et voilà.
00:06:52Alors...
00:06:5462-65, l'Algérie c'était le paradis.
00:06:59Comme souvent je le raconte,
00:07:03on a vu partir les pieds noirs
00:07:05et on a vu arriver les pieds rouges.
00:07:07C'était de toute la gauche du monde
00:07:10qui est venue en Algérie
00:07:12participer au projet socialiste
00:07:16de l'Algérie Nouvelle
00:07:18qui s'était engagé à réaliser ce que les communistes et les socialistes
00:07:25rêvent depuis longtemps.
00:07:28L'auto-gestion.
00:07:30Le fameux projet de Tito
00:07:32qu'il n'a pas réussi à faire.
00:07:34Et donc on a déclaré l'auto-gestion.
00:07:37C'est-à-dire que les ouvriers, les exploitants
00:07:40prennent l'usine en main,
00:07:42l'exploitation en main.
00:07:44Celui qui est conducteur de bus,
00:07:46le bus c'est à lui, il y travaille.
00:07:48Et ça c'était leur rêve.
00:07:50Donc ils sont venus de partout, des grands philosophes, des machins...
00:07:54Et puis ils sont rentrés dans les ministères,
00:07:56au conseil.
00:07:57Et puis ils ont commencé à imprimer une vie
00:07:59très exaltante.
00:08:02Et parmi cette gauche-là,
00:08:04c'est des personnalités éminentes.
00:08:06Vous avez des exemples ?
00:08:10Par exemple, Pierre Le Pape
00:08:12qui était dans la...
00:08:14À la gauche, gauche-gauche.
00:08:16Voilà, etc.
00:08:18Beaucoup de gens comme ça.
00:08:20De...
00:08:22Comment s'appelle-t-il ? De...
00:08:24De Bertim.
00:08:26C'était le plus grand économiste français de l'époque.
00:08:29Qui est enseigné à tenir la chaire de Grenoble.
00:08:32Et qui arrive et qui a formé des générations
00:08:34d'économistes à Alger.
00:08:36Et l'Algérie a choisi...
00:08:39Et vous...
00:08:41Le modèle qu'il a inventé lui, qu'il a appelé
00:08:43l'industrie industrialisante.
00:08:45Un pays qui veut se développer,
00:08:47il faut d'abord qu'il crée
00:08:49une industrie de base.
00:08:51De l'acier, de la fonte.
00:08:53Il faut produire un peu le modèle chinois.
00:08:55De Mao.
00:08:57On produit des matériaux de base.
00:08:59De l'acier, de la fonte.
00:09:01Et à partir de là, on peut développer l'industrie.
00:09:03Et c'est comme ça qu'on a lancé
00:09:05de grandes...
00:09:07Et à ce moment-là, vous êtes étudiant.
00:09:09J'étais tout jeune à l'époque.
00:09:11Tout ça, j'ai appris plus tard, évidemment.
00:09:13C'est cette ambiance-là
00:09:15qui vous a décidé à faire
00:09:17le doctorat du Polytechnique.
00:09:19C'est venu plus tard.
00:09:21Là, vous êtes encore lycéen.
00:09:23C'est venu plus tard. C'est un ordre.
00:09:25Quand je suis arrivé au lycée,
00:09:27je voulais faire philo.
00:09:29Dès qu'il y a eu philo,
00:09:31je m'étais malade. La philo était interdite.
00:09:33On est un pays musulman.
00:09:35On a besoin d'ingénieurs, de médecins.
00:09:37Va faire médecine.
00:09:39J'ai pas le choix.
00:09:41J'ai dit, moi je vais faire philo.
00:09:43Non, non, non.
00:09:45Je suis devenu ingénieur.
00:09:47Ce système boumédien
00:09:49qui finit par prendre le pouvoir
00:09:51à l'ensemble.
00:09:53La fiction du pouvoir civil
00:09:55disparaît.
00:09:57Décrivez-nous un peu ce pouvoir
00:09:59effrayant
00:10:01vu de loin.
00:10:03Il y a la manne pétrolière.
00:10:05Il est riche.
00:10:07Tout le monde le sait.
00:10:09Il capte le bénéfice
00:10:11de la rente pétrolière.
00:10:13Avec une petite classe
00:10:15extrêmement autoritaire,
00:10:17extrêmement riche,
00:10:19qui domine
00:10:21par une dictature
00:10:23pas frassière
00:10:25dont vous racontez
00:10:27souvent des exemples.
00:10:29Les tampons à l'aéroport.
00:10:31Tampons sur tampons.
00:10:33Qui a perduré.
00:10:35Par exemple,
00:10:37chacun de vos passeports
00:10:39fait une année parce qu'il n'y a plus de place
00:10:41pour tamponner.
00:10:43Il faut des passeports
00:10:45à 50 pages.
00:10:49Cette bureaucratie-là
00:10:51étouffe complètement le pays.
00:10:53La jeunesse croit.
00:10:55Comment on n'avait pas de cadre ?
00:10:57On est en
00:10:5962,
00:11:0163,
00:11:03la présidente.
00:11:05C'est des discours, des meetings
00:11:07à longueur de journée.
00:11:09C'est du blablabla,
00:11:11l'impérialisme, bravo !
00:11:13L'Algérie vivait à ce rythme-là
00:11:15endiablée.
00:11:17Des danses dans la rue.
00:11:19Et puis on n'avait pas de cadre.
00:11:21On a fait appel à
00:11:23ceux qui pouvaient
00:11:25aux yougoslaves.
00:11:27Ce qu'on appelait les pieds rouges.
00:11:29Les socialistes français, américains,
00:11:31allemands.
00:11:33Les soviétiques étaient seulement dans l'armée.
00:11:35Pour nous,
00:11:37on n'était pas censé posséder ce savoir
00:11:39en matière d'industrie.
00:11:41Pour nous, c'est l'Europe, c'est l'Occident
00:11:43qui maîtrise ces choses-là.
00:11:45Donc on a fait appel aux pieds rouges
00:11:47français, allemands, italiens,
00:11:49espagnols, yougoslaves.
00:11:53La coopération avec Moscou,
00:11:55c'est l'armée, l'ministère de la Défense.
00:11:57Vous ne les voyez jamais, ils avaient leurs trucs.
00:12:01Et donc là, c'était du bricolage.
00:12:03On bricole.
00:12:05C'est une bureaucratie cafouilleuse.
00:12:09Et le décollage ne se fait pas.
00:12:11Il n'y avait rien.
00:12:13Les magasins étaient vides.
00:12:15Les usines étaient toutes à l'arrêt.
00:12:17Pas d'argent pour acheter de la matière première.
00:12:21Et puis ceux qui dirigeaient ces machines
00:12:23et ces usines sont partis.
00:12:25C'est les pieds noirs.
00:12:29Pendant trois années, c'était la fête.
00:12:31La fête, on danse, on chante.
00:12:33Racontez-nous après Boumediene.
00:12:35Boumediene un jour fait un coup d'état
00:12:37et le lendemain fait un discours.
00:12:39La récréation est terminée.
00:12:41Voilà son discours.
00:12:45La récréation est terminée.
00:12:47C'est le militaire.
00:12:49Et on entre dans une période terrible.
00:12:51On a à se chanter,
00:12:53le culte de la personnalité,
00:12:55et blablabla, c'est fini.
00:12:57On va se mettre au travail.
00:12:59Et là, tout est fermé.
00:13:01Il y a eu une révolution.
00:13:03Il a supprimé,
00:13:05retiré les passeports.
00:13:07Plus de passeports.
00:13:09Interdit de quitter le territoire national.
00:13:11Ça revient à boucler tout le monde.
00:13:13Aujourd'hui on ferme là, le lendemain on ferme là.
00:13:15Prisonnier.
00:13:17Nationalisation. Ils ont tout nationalisé.
00:13:21Machin de coiffure,
00:13:23un salon de coiffure nationalisé.
00:13:25Il n'y a plus rien de marche.
00:13:27Dans son esprit, c'est que si
00:13:29l'Etat prend la chose en main
00:13:31avec des fonctionnaires,
00:13:33ça va fonctionner. Ça a été pire que tout.
00:13:35Et donc, arrêt de l'autogestion.
00:13:37L'Algérie
00:13:39est gouvernée par des fonctionnaires
00:13:41dirigés par des militaires.
00:13:43Et une représentation terrible.
00:13:45Tous ceux qui étaient dans l'opposition
00:13:47ont été arrêtés.
00:13:49Beaucoup ont disparu. On ne sait pas où.
00:13:51On ne les a plus jamais revus.
00:13:53Et la chope de plomb.
00:13:55Six mois après,
00:13:57c'était l'Algérie était un cimetière.
00:13:59Silence.
00:14:01Mais il a mis en place une mécanique
00:14:03à la chinoise.
00:14:05On produit de l'acier.
00:14:07On produit ceci.
00:14:09Sur le papier ?
00:14:11Oui, on a construit
00:14:13des usines
00:14:15avec nos partenaires
00:14:17russes, allemands de l'Est,
00:14:19qui tournaient mal,
00:14:21qui ne tournaient pas.
00:14:23Et à l'époque,
00:14:25on produisait très peu de pétrole.
00:14:27Très, très, très peu.
00:14:29Et ça coûtait,
00:14:31le pétrole à l'époque, on le vendait
00:14:331,5$ le baril.
00:14:35C'est tout
00:14:37ce qui coûtait. C'était une période
00:14:39de sur-sur-sur-production.
00:14:41Ça ne coûtait rien du tout.
00:14:43Et donc,
00:14:45il y a eu beaucoup
00:14:47de réflexions.
00:14:49L'Algérie a rejoint l'OPEP.
00:14:51Donc ils se sont dit
00:14:53que c'était quand même pas normal que cette ressource
00:14:55si extraordinaire
00:14:57se vende comme ça,
00:14:591,5$ sur le marché international.
00:15:01C'est ce qui arrive l'année 73, où tout à coup
00:15:03le prix du pétrole s'envole.
00:15:05Donc ils ont créé les conditions
00:15:07dont voulaient les prix.
00:15:09Et donc du coup, l'argent a commencé
00:15:11à couler un flot.
00:15:13Mais sans traduction industrielle.
00:15:15Pas grand-chose.
00:15:17Même quand on faisait
00:15:19et construisait des usines,
00:15:21ça ne coûtait rien.
00:15:23En fait, elles produisaient.
00:15:25Mais c'était du maquillage.
00:15:27Par exemple, on a demandé à Renault
00:15:29de construire
00:15:31une usine
00:15:33de fabrication
00:15:35de camions et de bus.
00:15:37Elle est construite.
00:15:39Là où j'habite est Alger,
00:15:41à 30 kilomètres.
00:15:43Une usine sur 15 hectares, extraordinaire.
00:15:45RVI, Renault,
00:15:47véhicule industriel.
00:15:49Ils ne produisaient rien.
00:15:51On importait les camions.
00:15:53Et on disait, ah oui, ils sortent de l'usine.
00:15:55Et quand on regarde, ils disent, attendez,
00:15:57vous me dites qu'ils sortent de l'usine,
00:15:59là on voit les références.
00:16:01Donc c'était une économie
00:16:03du maquillage.
00:16:05C'est du maquillage.
00:16:07On importe ça,
00:16:09puis on inscrit là-dessus,
00:16:11Made in Algeria.
00:16:13Et le pays s'appauvrit.
00:16:15Le pays s'appauvrit.
00:16:17Ça n'a pas de sens démographique.
00:16:19Ça explose, parce que Boumediene,
00:16:21son idée, c'est de dire,
00:16:23il faut vite atteindre 100 millions d'habitants.
00:16:25Alors qu'on était, à l'indépendance,
00:16:278.
00:16:29C'est dément.
00:16:31Et donc, encouragement à la natalité,
00:16:33etc.
00:16:35Mais est-ce que ça peut être qualifié
00:16:37de revanche des berceaux ?
00:16:39Revanche des berceaux ?
00:16:41Oui, c'est...
00:16:43Ça avait un but caché
00:16:47de domination et de conquête.
00:16:49Mais comment ?
00:16:51Il l'a dit officiellement.
00:16:53Cette fameuse phrase maintenant
00:16:55qui circule partout.
00:16:57Qui l'a dit en premier ?
00:16:59C'est par le ventre de nos femmes
00:17:01que nous allons...
00:17:03Il s'adressait à Giscard et lui dit
00:17:05aujourd'hui,
00:17:07vous craignez ceci, ça,
00:17:09mais je vous prédis le moment
00:17:11où nous arriverons chez vous
00:17:13et nous allons vous conquérir
00:17:15par le ventre de nos femmes.
00:17:17Et puis ensuite,
00:17:19elle a été reprise par Arafat,
00:17:21face aux Israéliens.
00:17:23À l'époque,
00:17:25les Palestiniens en Israël,
00:17:27ils étaient quoi ?
00:17:29Ils représentaient 2, 3, 4%.
00:17:31Maintenant, ils sont 20%.
00:17:33Ils sont 20%.
00:17:35Encore aux 10 ans, aux 15 ans,
00:17:37ils vont être 40%.
00:17:39Et donc,
00:17:41il l'a dit officiellement.
00:17:43C'était encourager
00:17:45les naissances, les mariages,
00:17:47avec tout un discours.
00:17:49On participe à la révolution
00:17:51avec le ventre de nos femmes.
00:17:53Et en même temps,
00:17:55la population s'appauvrit.
00:17:57Elle est mal nourrie.
00:17:59On n'avait pas de quoi manger.
00:18:01On mangeait des patates pourries,
00:18:03des carottes pourries.
00:18:05On m'a souvent dit quelque chose,
00:18:07je me demande si c'est exagéré ou pas,
00:18:09je ne suis jamais allé à Alger.
00:18:11On décrit une Alger que vous avez connue,
00:18:13dans le quartier Belcourt,
00:18:15qui n'était pas le quartier le plus riche,
00:18:17populaire.
00:18:19Mais un Alger,
00:18:21magnifique,
00:18:23ville magnifique, blanche,
00:18:25des façades,
00:18:27j'ai vu des façades,
00:18:29des plus belles villes du monde.
00:18:31Une beauté extraordinaire.
00:18:33Et riche.
00:18:35Et qui tombe.
00:18:37Ceux qui sont retournés à Alger
00:18:3920 ans plus tard,
00:18:41en 80-90,
00:18:43j'ai vu un pied-noir qui était retourné
00:18:45pour son malheur en Algérie,
00:18:47parce qu'il avait gardé
00:18:49l'idée d'un pays de cocagne.
00:18:51C'est un membre éloigné de ma famille
00:18:53qui m'a raconté
00:18:55Alger, qu'il avait tant aimé,
00:18:5720 ans plus tard, je crois que c'était
00:18:5985-90, il pleurait.
00:19:01Oui, c'est le cas de tous les...
00:19:03Il pleurait. Cette ville s'est détruite.
00:19:05C'est le cas des pieds-noirs.
00:19:07Notamment parce qu'il y a la fibre
00:19:09sentimentale. Mais c'est le cas aussi
00:19:11d'un Américain qui n'a jamais entendu parler
00:19:13de l'Algérie, et qui vient et se dit
00:19:15je ne comprends pas, des immeubles aussi beaux
00:19:17qui sont en train de saleter
00:19:19l'électricité qui ne marche plus.
00:19:21Ils détruisent. Et puis avant vous avez dit
00:19:23que l'Algérie c'est riche, ils ont du pétrole,
00:19:25ils ont tout ce qu'il faut.
00:19:27L'eau qui manque.
00:19:29L'éditeur Jean-Marie Laclaftine,
00:19:31c'est mon éditeur.
00:19:33C'est un grand homme.
00:19:35C'est un formidable bonhomme.
00:19:37Un grand homme qui rêvait d'aller en Algérie,
00:19:39à chaque fois il me disait voilà, voilà.
00:19:41Je lui dis un jour, écoute,
00:19:43mes amis de l'ambassade, notamment
00:19:45de l'Institut culturel, je lui ai demandé
00:19:47de t'inviter. Et ils l'ont invité.
00:19:49Malheureusement,
00:19:51je ne sais pas ce qu'il s'est passé, mauvaise coordination.
00:19:53Le jour où il est arrivé, moi je partais.
00:19:55Mais j'ai averti mes copains
00:19:57de l'Institut français.
00:19:59J'ai fait une conférence sur moi à l'Institut français.
00:20:01C'était pas mal.
00:20:03Et donc,
00:20:05je leur ai dit, faites-lui visiter.
00:20:07Donc elle a visité.
00:20:09Et ensuite il m'a dit,
00:20:11j'aurais pas dû aller.
00:20:13C'est accablant.
00:20:15Il me dit, parce qu'à travers tes romans,
00:20:17je voyais
00:20:19comme,
00:20:21si tu veux, comme beaucoup de gens voient Cuba.
00:20:23La Havane.
00:20:25Le rêve.
00:20:27C'est le rêve.
00:20:29Ils ont ce rêve d'une Havana.
00:20:31La fête,
00:20:33leur émotion.
00:20:35Et puis quand ils y vont,
00:20:37des égouts machins,
00:20:39et ventrés.
00:20:41Et puis des gens complètement
00:20:43drogués,
00:20:45qui n'ont plus de repères, plus de trucs.
00:20:47Ça c'est les rêves de la gauche.
00:20:49Et il m'a dit, voilà, à travers tes livres,
00:20:51parce que je sais,
00:20:53j'étais amoureux d'Alger.
00:20:55Belle ville,
00:20:57le truc, etc.
00:20:59Et puis il me dit,
00:21:01j'ai vu, c'est affreux.
00:21:03Ça c'est dans les années 2000.
00:21:05Comment ? Il y a à peine
00:21:074 ans, 4-5 ans.
00:21:092000-2010, plus récemment encore.
00:21:11Ça c'est récent.
00:21:13On va dire que ça date de
00:21:154 ans.
00:21:17Vous avez du chagrin vous aussi,
00:21:19parce que vous avez dû les déshabiller.
00:21:21Les Algériens ne voient plus,
00:21:23tu t'habitues au
00:21:25cloaque, au désordre.
00:21:27Tu t'habitues.
00:21:29Tu vois une flaque,
00:21:31mais le lendemain, tu ne vas pas redire
00:21:33cette flaque.
00:21:35Tu l'enjambes.
00:21:37Le troisième jour, tu ne la vois même pas.
00:21:39Le quatrième jour, tu mets le pied dessus.
00:21:41Et avec une flicaille.
00:21:43Avec une flicaille permanente.
00:21:45La police.
00:21:47Boutrika, c'est ça ?
00:21:49Boutrika était
00:21:51ministre des affaires étrangères
00:21:53pendant 20 ans,
00:21:55de Boumédienne.
00:21:57Sous Bembela, il était ministre de la jeunesse et des sports.
00:21:59Il avait 22 ans.
00:22:01Il avait 22 ans.
00:22:03Il a été très longtemps
00:22:05ministre des affaires étrangères.
00:22:07De
00:22:091965 jusqu'à la mort de Boumédienne,
00:22:11en
00:22:131979.
00:22:15Faites le compte.
00:22:17Il passait
00:22:19son temps à voyager
00:22:21parce qu'on n'avait pas de diplomatie.
00:22:25On n'a pas de relation commerciale.
00:22:27Il y avait des grandes parties impérialistes
00:22:29à la tribune de l'ONU chaque année.
00:22:31Il passait son temps à voyager.
00:22:33Paris, Rome.
00:22:35La Bamboula.
00:22:37La Bamboula, matin et soir, les filles.
00:22:39De plus en plus,
00:22:41parce que c'est des gens qui ont besoin
00:22:43tout le temps de se réévaluer,
00:22:45ils ne veulent fréquenter que les
00:22:47grands artistes,
00:22:49etc. Son aventure
00:22:51avec Jeanne Seberg,
00:22:53c'était sa grande...
00:22:55Elle était folle de lui.
00:22:57Jeanne Seberg, oui.
00:22:59C'est un
00:23:01bel homme avec de beaux yeux verts
00:23:03et ce verbe blablabla.
00:23:07En plus, ministre des affaires étrangères,
00:23:09il était comme ça.
00:23:11C'était un petit nain.
00:23:13Les femmes sont comme ça.
00:23:17Jeanne Seberg,
00:23:21tu verras, vous verrez si vous
00:23:23mettrez ça dans le truc.
00:23:25Jeanne Seberg,
00:23:27elle tombe follement amoureuse de lui.
00:23:29Mais lui, c'est un truc,
00:23:31c'est pour la soirée, pour la journée.
00:23:33Il la balance.
00:23:35Et elle, scotchée, elle le suit partout.
00:23:37Donc, à travers les infos,
00:23:39le ministre algérien
00:23:41va aller
00:23:43à Paris.
00:23:45Au Ritz, au machin.
00:23:47Elle l'attend.
00:23:49Et donc, évidemment,
00:23:51les gardes corps de Bouddhika,
00:23:53ils l'écartaient.
00:23:55Et un jour, elle décide de venir à Alger.
00:23:57Elle est tellement folle de lui.
00:23:59Elle débarque à Alger.
00:24:01À l'aéroport, elle n'avait ni visa,
00:24:03ni rien du tout.
00:24:05Elle dit, mais madame, qu'est-ce que c'est que ça ?
00:24:07Elle dit, non,
00:24:09je viens voir mon ami Bouddhika.
00:24:11Bouddhika, vous avez...
00:24:13Bouddhika,
00:24:15c'est quand même le numéro 2.
00:24:17On fait attention.
00:24:19Donc, l'information monte.
00:24:21Des officiers arrivent en courant.
00:24:23Et compte rendu à Boulmediene,
00:24:25monsieur le président,
00:24:27il dit, foutez-la dehors.
00:24:29Dans le premier avion, en partance,
00:24:31elle part.
00:24:33Et puis, quelques temps après,
00:24:35à Paris,
00:24:37un jour,
00:24:39sur les Champs-Elysées,
00:24:41un café, je ne me souviens plus lequel,
00:24:43elle rentre et elle voit le sourcil de Bouddhika.
00:24:45Elle pensait que c'était lui.
00:24:47Abdelaziz ! Abdelaziz !
00:24:49Elle se jette sur les pieds de Boulmediene.
00:24:51Qu'est-ce que c'est que ça ?
00:24:53Et ce monsieur-là, c'était un gigolo.
00:24:55Donc, il saute sur l'affaire.
00:24:57Il la met dans son lit. Elle, elle est riche.
00:24:59Lui, il n'a pas trois sous.
00:25:01Et donc, ils sont amants.
00:25:03Abdelaziz !
00:25:05Et ça dure un certain temps.
00:25:07Et comme elle se droguait,
00:25:09un soir,
00:25:11ils sont au lit.
00:25:13Une nuit, il se réveille.
00:25:15Il voit qu'elle ne bouge pas.
00:25:17Elle est morte. Overdose.
00:25:19Qu'est-ce qu'il fait ? Il avait peur.
00:25:21Parce que lui, c'était un voyou, un gigolo.
00:25:23Il a un dossier comme ça, de vol, de truc.
00:25:25Il la met dans le coffre
00:25:27de la voiture.
00:25:29Il la jette à Fontainebleau,
00:25:31dans la forêt.
00:25:33Et puis, Paris, on est mort.
00:25:35Pendant quinze jours,
00:25:37Jean Seberg a disparu.
00:25:39C'est-à-dire que c'était une personnalité,
00:25:41la femme de Romain Gary ?
00:25:43Oui, exactement.
00:25:45La police enquête apprend que
00:25:47elle sortait avec un bonhomme
00:25:49qui s'appelle Abdelaziz Boutfika.
00:25:51Elle lance un mandat d'arrêt.
00:25:53Interpellation.
00:25:55Ça arrive à Alger.
00:25:57Boumediene,
00:25:59il le convoque.
00:26:01Abdelaziz, qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
00:26:05C'est une femme.
00:26:07J'ai fréquenté 3-4 jours.
00:26:09Il y a 5-6 ans.
00:26:11C'est vrai, elle me poursuit.
00:26:13L'enquête se poursuit.
00:26:15Jean se dit Abdelaziz Boutfika.
00:26:17Des gens disent que c'était
00:26:19quelqu'un qui l'a appelé.
00:26:21On a vu les photos.
00:26:23C'est pas vraiment...
00:26:25Le bonhomme a été arrêté.
00:26:27Il a avoué. Il a été condamné à 4-5 ans de prison.
00:26:29Puis relâché.
00:26:31Au bout d'une année.
00:26:33Il a été jugé juste pour le fait
00:26:35d'avoir dissimulé un cadavre.
00:26:39C'est amusant. Je ne pensais pas qu'on parlerait
00:26:41d'une cyber.
00:26:43Qu'est-ce que je veux dire ?
00:26:45Mort lente, on peut dire,
00:26:47de Boumediene.
00:26:49Mais du temps à mourir.
00:26:51Une période de flottement
00:26:53dans les années 80.
00:26:57Et puis,
00:26:59surgit un nouveau phénomène.
00:27:03La radicalisation des frères musulmans
00:27:05qui profitent de la misère
00:27:07engendrée par ce fameux
00:27:09système socialiste,
00:27:11industrialiste raté,
00:27:13dictatorial,
00:27:15pour mettre la main sur la société,
00:27:17ce qu'on appelle maintenant la société civile,
00:27:19c'est-à-dire le peuple algérien,
00:27:21le petit peuple algérien,
00:27:23qui finit par conduire
00:27:25une tentative de
00:27:27prise de pouvoir.
00:27:29Alors, une lutte terrible
00:27:31entre ces généraux
00:27:33et puis
00:27:35les islamistes,
00:27:37le fils,
00:27:39qui eux aussi,
00:27:41terrible, sort de l'Algérie
00:27:43en réalité. L'Algérie a toujours été
00:27:45triste. On peut dire qu'on n'a pas fait l'histoire
00:27:47de ces terres qui n'ont pas été
00:27:49algériennes, mais ont toujours été
00:27:51colonisées, des empires
00:27:53qui les détruisent, rien n'en surgit.
00:27:55Et là, nouvel épisode
00:27:57terroriste,
00:27:59quel âge vous avez là ?
00:28:01Vous êtes...
00:28:03Vous disiez tout à l'heure en commençant notre conversation
00:28:05que vous faisiez
00:28:07semblant de...
00:28:09Oui, j'étais dans mon laboratoire,
00:28:11dans mes recherches,
00:28:13dans mes études. J'ai été à l'ombre d'études,
00:28:15tout le temps dans les bouquins,
00:28:17le monde ne m'intéressait pas.
00:28:19J'étais tellement triste,
00:28:21je ne vois pas ce qui aurait pu m'intéresser.
00:28:23Ça ne m'intéressait pas du tout.
00:28:25Le pays a beaucoup souffert.
00:28:27Boumediene, en tant que dictateur
00:28:29et tout ça, a quand même
00:28:31protégé l'Algérie de ces choses-là.
00:28:35Il a
00:28:37expulsé tous les témoins de Jouva
00:28:39qui étaient très installés en Algérie.
00:28:41Oui, vous nous racontiez ça
00:28:43à la table.
00:28:45Nous avons été touchés dans notre famille.
00:28:47Un de mes frères est devenu témoin de Jouva.
00:28:49Il est parti avec eux,
00:28:51on ne l'a plus jamais revu.
00:28:53Les évangélistes
00:28:55et puis tous les gens qui recrutent
00:28:57les miséreux, la drogue,
00:28:59les réseaux de toutes sortes.
00:29:01Et donc ça,
00:29:03Boumediene a instauré un ordre de fer.
00:29:05Les exécutions capitales,
00:29:07c'était comme l'Iran aujourd'hui.
00:29:09C'est quasiment tous les jours, on l'exécute.
00:29:11Un voleur,
00:29:13un homme a détourné trois sous,
00:29:15la prison, la torture.
00:29:17Et donc du coup,
00:29:19la paix des cimetières.
00:29:21Et il meurt.
00:29:23Et son successeur,
00:29:27le colonel Chedli,
00:29:29bon enfant, croyons bien faire,
00:29:31il arrive avec un slogan.
00:29:33Il dit,
00:29:35il était dans l'équipe
00:29:37de Boumediene évidemment,
00:29:39chef d'état-major de l'armée.
00:29:41Mais il s'est démarqué
00:29:43de Boumediene en disant,
00:29:45il est temps quand même maintenant
00:29:47qu'on vive un peu.
00:29:49Et son slogan c'était,
00:29:51pour une vie meilleure.
00:29:53Je vais gouverner.
00:29:55Les Algériens ont répondu,
00:29:57pour une vie meilleure,
00:29:59ailleurs.
00:30:01Laisse-nous partir, on ne veut pas de ta vie.
00:30:03Rendez-nous nos passeports.
00:30:05Il n'était pas question de développer l'Algérie.
00:30:07Rendez-nous nos passeports qu'on parte.
00:30:09Vous avez pris le pays, gardez-le.
00:30:11Rendez-moi mon passeport, c'est tout.
00:30:13C'est tout ce que je vous demande.
00:30:15Et on a affaire à des millions et des millions.
00:30:17Et il l'a fait.
00:30:19Il dit, ah bon, d'accord.
00:30:21Vous pouvez sortir, et voilà vos passeports.
00:30:23Des millions d'Algériens.
00:30:25Le lendemain, on sortait dans les avions.
00:30:27Alors ça a été la France.
00:30:29Et puis la France, ils ont commencé un peu à le verrouiller.
00:30:31Ensuite c'était le Canada.
00:30:33Ensuite c'était l'Australie.
00:30:35Ensuite c'était les pays nordiques.
00:30:37Et l'Algérie s'est vidée.
00:30:39Les médecins, les ingénieurs d'abord.
00:30:41Que faire d'un pays
00:30:43dont les trois quarts des jeunes veulent partir ?
00:30:45N'ont pas d'autre projet que de partir ?
00:30:47Ah oui, quasiment 100%.
00:30:49Et donc du coup, ils étaient très intéressés.
00:30:51Comme ça, on n'a pas à partager...
00:30:53Ils achètent zènes de millions.
00:30:55On n'a pas à partager la rente.
00:30:57Parce qu'entre temps, le pétrole est monté à 40$.
00:30:59Et on se le garde.
00:31:01Et on se le garde. Mais ils veulent partir, qu'ils partent.
00:31:03Ça fera moins de logements à construire.
00:31:05Moins de trucs.
00:31:07L'Algérie s'est vidée de sa population.
00:31:09Et notamment formée.
00:31:11Et formée à...
00:31:13à des coûts énormes.
00:31:15Parce qu'on les a tous formées à l'étranger.
00:31:17Aux Etats-Unis, en France, en Allemagne.
00:31:19Pas dans les trucs de 3 sous.
00:31:21Les grandes écoles.
00:31:23Les grandes écoles françaises.
00:31:25Les grandes universités.
00:31:27On était, soi-disant,
00:31:29on n'en voit pas nos enfants, n'importe où.
00:31:31Et...
00:31:33Et puis...
00:31:35Ce vide...
00:31:37Ensuite, il y a eu cette folie.
00:31:39Cette folie de dire...
00:31:41Ils ont sorti 3 mots
00:31:43qui ont achevé l'Algérie.
00:31:451.
00:31:47Algérianisation.
00:31:49Là où il y a un étranger, je l'enlève, je mets un Algérien.
00:31:51Ouais mais attends, celui-là c'est un bon médecin.
00:31:53Et ton truc, il est étudiant en première année.
00:31:55Ben, c'est pas grave.
00:31:57Il apprendra sur le terrain.
00:31:59Puis la longueur.
00:32:01Alors, donc, algérianisation.
00:32:032. Arabisation.
00:32:053. Islamisation.
00:32:07Alors, arabisation, arrêtons-nous là-dessus,
00:32:09parce que vous avez beaucoup écrit là-dessus.
00:32:11Je crois que vous allez réécrire sur la question de la langue.
00:32:13Comment arabiser ?
00:32:15On a recruté n'importe quoi.
00:32:17En Égypte, au Yémen, à droite, à gauche,
00:32:19l'Irak, la Syrie.
00:32:21Et qui ont profité de cette situation.
00:32:23L'Algérie recrute.
00:32:25Des enseignants.
00:32:27Alors, ils ont envoyé de leurs islamistes, ils se sont débarrassés
00:32:29de leurs islamistes.
00:32:31Pour enseigner, non plus en français, mais en arabe.
00:32:33Avec quel genre d'arabe ?
00:32:35Un arabe créé de toute pièce ?
00:32:37Oui, oui, de toute pièce.
00:32:39Ou un Syrien arrive en Algérie,
00:32:41il a peut-être son bac
00:32:43chez lui, ou même pas.
00:32:45Il est enseignant.
00:32:47Il a une classe de 40 élèves.
00:32:49Ben, il peut peut-être la reprendre
00:32:51de l'alphabet, mais ça va pas plus loin.
00:32:55Et le langage technique manque.
00:32:57En plus.
00:32:59Parce que l'arabisation a commencé,
00:33:01première étape, l'école primaire.
00:33:03Oui.
00:33:05Ensuite, cela arrivait au secondaire.
00:33:07Donc, on faisait le secondaire.
00:33:09Et puis, le troisième cycle,
00:33:11la troisième étape,
00:33:13l'université.
00:33:15Donc, on a arabisé nos enfants. Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?
00:33:17C'est qu'on a coupé les enfants de leurs parents.
00:33:21Les Algériens sont francophones.
00:33:23Ou berbérophones.
00:33:25Leur fils parle l'arabe et il récite
00:33:27du Coran à longueur de journée.
00:33:29Comment il peut communiquer avec son fils ?
00:33:31C'est incroyable.
00:33:33C'est incroyable.
00:33:35C'est l'idéologie.
00:33:37C'est au galop.
00:33:39Et puis, bon,
00:33:41la corruption,
00:33:43les oligarques,
00:33:45les machins, les trucs,
00:33:47l'accaparement.
00:33:49L'Algérie est détruite.
00:33:51Que va-t-il se passer ?
00:33:53Tout le monde se pose la question.
00:33:55Quel est l'avenir possible ?
00:33:57Si je voulais
00:33:59vous donner mon avis sincère,
00:34:01il n'y en a pas.
00:34:03Mais je suis obligé de dire
00:34:05peut-être que si.
00:34:07Pour ne pas être foncièrement
00:34:09négatif et dire
00:34:11peut-être,
00:34:13mais je ne vois pas comment.
00:34:15Moi, mon idée à l'époque,
00:34:17j'avais d'ailleurs écrit beaucoup de papiers là-dedans
00:34:19qui avaient à un moment ou à un autre intéressé,
00:34:21c'est dire
00:34:23pas que l'Algérie,
00:34:25c'était le cas de la Tunisie,
00:34:27c'était le cas de l'Egypte, c'était le cas du Mali,
00:34:29de tous ces pays-là.
00:34:31Vous avez essayé
00:34:33le socialisme communiste, ça n'a pas marché.
00:34:35Vous avez essayé
00:34:39le libéralisme débridé,
00:34:41ça n'a pas marché.
00:34:43Vous avez essayé la dictature militaire,
00:34:45ça n'a pas marché.
00:34:47Revenez à la situation d'au départ.
00:34:49Vous, les Algériens,
00:34:51rétablissez votre rapport
00:34:53à la France.
00:34:55Vous, les Camerounais,
00:34:57avec l'Allemagne,
00:34:59repartons à zéro.
00:35:01Effaçons tout ce que nous avons fait.
00:35:03À un moment donné, elle a été
00:35:05entendue cette théorie.
00:35:07Repartons...
00:35:09À quelle époque alors ?
00:35:11Ça a commencé
00:35:13dans les années...
00:35:1590 ?
00:35:17On va dire la fin des années 80.
00:35:19La fin des années 80
00:35:21ou la...
00:35:23Revenons à cela.
00:35:25Repartons d'un bon pied avec la France.
00:35:27Et puis l'Europe.
00:35:29Dans un cadre nouveau, nous en parlions.
00:35:31Nous promenions dans le jardin tout à l'heure.
00:35:33Il y a eu beaucoup de choses.
00:35:35Et c'est là qu'est née l'idée
00:35:37des contrats
00:35:41d'amitié.
00:35:43Oui.
00:35:45Dont on a beaucoup parlé à l'époque.
00:35:47Qui finalement a failli
00:35:49être signé en 2004.
00:35:51Le processus de Barcelone.
00:35:53Et ce traité d'amitié
00:35:55qui était rédigé
00:35:57et qui allait être signé.
00:35:59Et qu'est-ce qui s'est passé ? Je ne sais pas si vous vous souvenez.
00:36:01C'est qu'à l'Assemblée nationale
00:36:03qui l'avait voté,
00:36:05quelqu'un, le soir, a dit
00:36:07il faut ajouter un article.
00:36:09C'est quoi cet article 4 ?
00:36:11Ils l'ont nommé article 4. Qu'est-ce qu'il dit ?
00:36:13Il faut aussi mettre
00:36:15en valeur
00:36:17le côté civilisationnel
00:36:19de la colonisation. Vous vous souvenez ?
00:36:21Je me souviens de ça.
00:36:23C'est dit. Et alors du coup,
00:36:25à Alger, ils se sont cabrés.
00:36:27Pas question.
00:36:29On peut le penser, mais pas le dire.
00:36:31Pas en faire une loi.
00:36:33Demander à ce que
00:36:35faire...
00:36:37reconnaître.
00:36:39C'est ça le terme.
00:36:41C'est reconnaître l'apport civilisationnel
00:36:43de la colonisation.
00:36:45Et du coup, c'était fini.
00:36:47Ça s'est arrêté.
00:36:49Je voudrais d'abord
00:36:51que vous nous parliez un peu de
00:36:53votre vie d'écrivain
00:36:55à grand succès depuis 20 ans.
00:36:57Vous habitez en Algérie.
00:36:59Vous n'avez pas peur
00:37:01malgré la rudesse.
00:37:03Vous avez peur ?
00:37:05La rudesse de vos propos
00:37:07contre ces puissances
00:37:09d'établissement.
00:37:11C'est-à-dire les généraux d'un côté
00:37:13et les imams de l'autre
00:37:15que vous défiez.
00:37:17La religion, vous n'aimez pas du tout.
00:37:19C'est-à-dire que moi...
00:37:21Pas du tout, non.
00:37:23C'est un thème des livres...
00:37:25L'islam nous a causé assez de dégâts quand même.
00:37:27On va continuer.
00:37:29Il faut ressortir.
00:37:31Je ne dis pas il faut ressortir. Il y a deux voies.
00:37:33Ou on en sort et puis...
00:37:35C'est clair que c'est une voie de garage
00:37:37qui ne peut mener qu'à
00:37:39des guerres religieuses, civiles.
00:37:41Ou alors
00:37:43avoir ce courage de le réformer.
00:37:45Faire ce que les chrétiens ont fait.
00:37:47La laïcité ou la séparation
00:37:49des pouvoirs.
00:37:51Moi je ne dis pas...
00:37:53Moi je suis contre la religion
00:37:55mais je n'empêche pas les autres.
00:37:57Vous dites que vous êtes contre la religion.
00:37:59Regardez où ça vous a mené.
00:38:01Des millions de morts.
00:38:03On a chiffré les morts
00:38:05causées par l'islam sur les
00:38:07cinq derniers siècles
00:38:09180 millions
00:38:11de personnes
00:38:13assassinées au nom d'eux.
00:38:15En Afghanistan, à droite, à gauche,
00:38:17au Pakistan, etc.
00:38:19Et comment peut-on chiffrer ?
00:38:21C'est chiffré
00:38:23très documenté.
00:38:25C'est des traits d'histoire qui sont connus.
00:38:27En Algérie, la décennie
00:38:29noire a fait 300 000 morts.
00:38:31Donc le chiffre est là.
00:38:33On peut discuter le chiffre.
00:38:35C'est peut-être 400 000, 500 000.
00:38:37Il y a aussi les victimes indirectes.
00:38:39C'est surtout la misère.
00:38:43On parle des attentats
00:38:45par crime de sang.
00:38:47On ne parle pas de ceux qui sont morts de misère.
00:38:49Et l'appauvrissement intellectuel.
00:38:51C'est terrible.
00:38:53Moi c'est ce que je leur dis.
00:38:55Prenez d'abord acte de cela.
00:38:57Ils vont mieux
00:38:59arrêter, ils vont mieux en sortir.
00:39:01Mais si vous aimez votre religion,
00:39:03je ne suis pas contre, réformez-la.
00:39:05Pour que nous, qui ne sommes pas croyants,
00:39:07on trouve quand même notre place.
00:39:09Je ne l'ai jamais trouvée.
00:39:11Depuis 1962, je n'ai pas cette place.
00:39:13Dans ce pays, je suis resté.
00:39:15J'étais mineur,
00:39:17mais je ne me sentais pas bien.
00:39:19Ma mère est là, donc on vit comme on peut.
00:39:21Tous vos frères et sœurs sont partis.
00:39:23Vous serrez beaucoup.
00:39:25Il y a ce thème qui revient toujours.
00:39:27La famille éclatée.
00:39:29Les frères et sœurs qui finissent par devenir des étrangers.
00:39:31Oui, vraiment.
00:39:33C'est vrai.
00:39:35Je ne suis pas le seul.
00:39:37C'est toujours
00:39:39comme ça dans l'histoire.
00:39:41C'est comme quand
00:39:43la France est passée de la royauté
00:39:45à la république.
00:39:47Il y a une partie de la population qui n'était ni là,
00:39:49ni là.
00:39:51Ça a été très dur pour beaucoup.
00:39:53On a fini sur l'échafaud, évidemment.
00:39:55Les nobles.
00:39:57Ceux qui avaient les moyens,
00:39:59ils sont partis en Angleterre.
00:40:01Ils ont fui.
00:40:03Ceux qui sont restés
00:40:05parce qu'attachés à leur terroir,
00:40:07à leur château,
00:40:09ils ont rejoint la république.
00:40:11Ils ont été probablement
00:40:13de grands commis de la république.
00:40:15Des militaires.
00:40:17Napoléon a fait la sacré.
00:40:19C'est que du cas particulier.
00:40:21Moi dans ma famille,
00:40:23c'est un cas particulier.
00:40:25Mes frères
00:40:27sont tous partis.
00:40:29Les cousins.
00:40:31Votre mère déchirée de ne plus avoir ses enfants.
00:40:33Moi je suis resté.
00:40:35Mais l'idée de partir
00:40:37ne m'a jamais quitté jusqu'à présent.
00:40:39Mais à chaque fois
00:40:41je suis resté.
00:40:43Chaque fois vous revenez surtout.
00:40:45Après ça devenait de plus en plus difficile.
00:40:47Ceux qui ont émigré à la belle époque,
00:40:49c'était tellement facile.
00:40:51Est-ce que les gens ne le savent pas
00:40:53mais de 1962
00:40:55jusqu'à la fin des années
00:40:571975,
00:40:59les Algériens
00:41:01dans le cadre de cette loi
00:41:03de coopération,
00:41:05voyageaient avec une carte d'identité.
00:41:07Ils n'avaient pas besoin de passeport.
00:41:09On est là, on se balade.
00:41:11Tiens le bateau, allez on va prendre le bateau
00:41:13pour Marseille.
00:41:15Parlez-nous de vous un peu.
00:41:17Votre cas est devenu particulier.
00:41:19Beaucoup de succès dès vos premiers livres.
00:41:21Un nombre de prix que je ne commence pas
00:41:23à citer parce qu'il est très grand.
00:41:25L'Académie française, sans parler du prix
00:41:27allemand, du grand prix allemand que vous avez eu.
00:41:29Aux Etats-Unis,
00:41:31le prix
00:41:33du roman francophone, du roman arabe.
00:41:35C'est une histoire ces romans.
00:41:37Le roman arabe, ça ne s'est pas fait facilement
00:41:39parce que les financiers
00:41:41du prix
00:41:43le voulaient retirer.
00:41:45On a un petit moment pour raconter l'histoire.
00:41:47Allez-y.
00:41:49J'étais à Jérusalem
00:41:51et je reçois un e-mail
00:41:53attaché de
00:41:55Madame Machin,
00:41:57de l'ambassadeur
00:41:59de Jordanie à Alger.
00:42:01C'est ça,
00:42:03ça fonctionne.
00:42:05Secrétaire du prix
00:42:07arabe, du roman arabe.
00:42:09Un mail très gentil.
00:42:11Cher monsieur François, j'ai le plaisir
00:42:13et l'honneur de vous informer que le jury
00:42:15du Machin vous a remis
00:42:17le prix du roman arabe.
00:42:19J'ai dit
00:42:21ils ne savent pas que je suis en Jérusalem.
00:42:25J'ai dit merci.
00:42:27J'ai répondu par e-mail.
00:42:29Je termine
00:42:31mon séjour en Machin.
00:42:33Je rentre.
00:42:35J'avais peur d'être arrêté à Alger
00:42:37mais je ne l'ai pas été.
00:42:39Trois ou quatre jours après, je reçois un e-mail.
00:42:41Monsieur,
00:42:43en raison d'un coup
00:42:45de force majeure,
00:42:47la cérémonie de remise du prix qui devait se tenir
00:42:49à Lima, en présence de la moitié
00:42:51du gouvernement de tous les ambassadeurs
00:42:53du monde arabe,
00:42:55est reportée à une date ultérieure.
00:42:57J'ai compris.
00:42:59Ils savent que j'étais en Israël,
00:43:01mais ils ne savent pas comment me retirer le prix.
00:43:03C'est tout.
00:43:05Trois jours après, j'ai reçu un coup de téléphone
00:43:07d'Olivier
00:43:11Poivre d'Arvent,
00:43:13qui est le frère de Patrick,
00:43:15et qui est le président du jury.
00:43:17Il m'a dit
00:43:19qu'il était directeur
00:43:21des relations culturelles
00:43:23au Quai d'Orsay.
00:43:25Il me dit que c'est une rumeur qui circule
00:43:27à Paris que
00:43:29les ambassadeurs
00:43:31arabes à Paris ont créé une association.
00:43:33L'association des ambassadeurs.
00:43:35Ils ont créé un prix.
00:43:37Il me dit
00:43:39qu'ils auraient retiré le prix.
00:43:41J'ai dit non, officiellement non.
00:43:43Ils m'ont juste dit que c'est reporté.
00:43:45Alors là,
00:43:47il fait sa petite enquête.
00:43:49Il me dit
00:43:51que ces salauds n'osent même pas reconnaître.
00:43:53De toute façon,
00:43:55nous, on est un jury. On est autonome.
00:43:57Ils ne peuvent pas. Notre décision est finale.
00:43:59C'est pour ça qu'ils ne donnent pas l'argent.
00:44:01On s'en fiche.
00:44:03Ils peuvent nous prétexter n'importe quoi.
00:44:05On n'a pas d'argent. Le pétrole ne se vend pas.
00:44:07Peu importe.
00:44:09Mais ils ne peuvent pas
00:44:11se retirer le prix.
00:44:13J'ai dit oui.
00:44:15Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Ça ne m'intéresse pas.
00:44:17Il me dit qu'on va démissionner en bloc.
00:44:19Avec lettres dans le journal.
00:44:21Et tous les membres du jury ?
00:44:23Les ambassadeurs. Je ne crée que des problèmes
00:44:25aux arabes.
00:44:29Un taulet.
00:44:31Un taulet de partout.
00:44:33Finalement, Olivier me dit
00:44:35ne t'inquiète pas.
00:44:37Olivier parle d'abord.
00:44:39Ils se sont rapprochés
00:44:41de Gallimard qui a organisé
00:44:43la cérémonie chez lui.
00:44:45Donc,
00:44:47c'était juste une poliède.
00:44:49Ils n'avaient pas l'argent.
00:44:51Et ça s'est fait là-bas.
00:44:53Olivier m'a remis un papier.
00:44:55Ensuite,
00:44:57un cocktail. La soirée, impeccable.
00:44:59Ce n'est pas tout.
00:45:01La suite est extraordinaire.
00:45:03Quinze,
00:45:05vingt jours après, je reçois
00:45:07un téléphone d'un ami
00:45:09qui est français
00:45:11et israélien.
00:45:13Il me dit, il y a
00:45:15un richissime
00:45:17suisse qui veut
00:45:19te donner les 15 000 euros du prix.
00:45:21Je dis, ton copain il est fou.
00:45:23À quel titre il va me donner
00:45:2515 000 euros ? Je refuse.
00:45:27Tu déconnes.
00:45:29Je ne vais pas la vendre.
00:45:31Il me dit, je t'assure,
00:45:33ce sont des gens sérieux. Il n'y a rien de caché.
00:45:35Je lui dis, ce n'est pas leur
00:45:37principal, c'est mes principales.
00:45:39Je ne peux pas accepter un prix de quelqu'un
00:45:41qui me le donne par pitié.
00:45:43Moi, je me donne un prix
00:45:45par injurie sur la base d'eux.
00:45:47Il insiste tellement
00:45:49qu'à un moment donné,
00:45:51il me dit,
00:45:53écoute, ce mécène
00:45:55te dit,
00:45:57donnez-nous
00:45:59le nom d'une association
00:46:01et on va leur donner les 15 000 euros
00:46:03de notre place.
00:46:05J'ai dit, ça d'accord.
00:46:07J'ai bien
00:46:09cherché et j'ai essayé de me montrer malin.
00:46:11J'ai choisi
00:46:13une association
00:46:15franco-israélienne
00:46:17de médecins
00:46:19et de chirurgiens spécialisés
00:46:21dans le cœur.
00:46:23Ils soignent
00:46:25les petits Palestiniens
00:46:27ayant des cardiopathies.
00:46:29Un Palestinien de Gaza
00:46:31qui est malade du cœur,
00:46:33il l'amène à l'hôpital
00:46:35de Jérusalem.
00:46:37Le diagnostic, il le soigne, il l'opère,
00:46:39il forme ses parents,
00:46:41il fait un petit stage pour s'occuper de lui,
00:46:43etc.
00:46:45J'ai dit, on va donner ça.
00:46:47J'appelle la présidente et je lui dis,
00:46:49voilà,
00:46:51elle était vraiment avec plaisir
00:46:53parce qu'elle me dit, 15 000 euros,
00:46:55on va sauver
00:46:57peut-être sept, huit
00:46:59petits Palestiniens.
00:47:01C'est formidable, etc.
00:47:03Mais il se trouve que,
00:47:05qui est président d'honneur de cette
00:47:07association ?
00:47:09Michel Rocard.
00:47:11Du coup, l'affaire est devenue
00:47:13Michel Rocard.
00:47:15Je fais court,
00:47:17le jour J,
00:47:19ça se passe à l'Assemblée nationale,
00:47:21Michel Rocard,
00:47:23avec machin et truc,
00:47:25l'ambassadeur d'Israël,
00:47:27Olivier,
00:47:29pauvre d'Arvoire,
00:47:31et des intellectuels,
00:47:33et des tas d'ambassadeurs,
00:47:35donc on est là.
00:47:37Ce copain-là qui
00:47:39m'avait dit
00:47:41qu'il m'avait parlé de ce mécène.
00:47:43Donc finalement, la cérémonie
00:47:45s'est terminée, le prix a été remis.
00:47:47Remis du chèque, donc la présidente
00:47:49de l'association était à ma droite.
00:47:51Ce copain poète franco-israélien
00:47:53m'a remis l'enveloppe
00:47:55et je l'ai donné.
00:47:57Je n'ai pas voulu intervenir,
00:47:59pas de discours, pas de...
00:48:01Au passage, on apprend que
00:48:03vous cherchez des verges pour vous faire battre,
00:48:05vous vous êtes mêlé de la question
00:48:07palestinienne.
00:48:09Enfin...
00:48:13J'y suis mêlé parce que l'Algérie
00:48:15s'est mêlée de la question palestinienne
00:48:17depuis l'indépendance, et de plus en plus.
00:48:19À fond, c'est devenu un faire-valoir,
00:48:21c'est devenu une politique
00:48:23du gouvernement,
00:48:25recherche de je-ne-sais-pas-quoi,
00:48:27de légitimité,
00:48:31et donc...
00:48:33Le journal télévisé en Algérie
00:48:35parle de deux choses.
00:48:37Les activités du président
00:48:39pendant 20 minutes,
00:48:41les activités du gouvernement
00:48:43ministre et sous-ministre
00:48:455 minutes,
00:48:47et puis il termine
00:48:4910 minutes pour la Palestine.
00:48:51Pour dire, voilà,
00:48:53tu es manifestant.
00:48:55Alors que vous avez une théorie
00:48:57qui est très sage, vous considérez que
00:48:59la question pourrait être
00:49:01réglée si les autres ne s'en mêlaient pas.
00:49:03D'ailleurs,
00:49:05vous savez, quand on voit des gens se battre
00:49:07dans la rue, il vaut mieux les laisser tranquilles.
00:49:09Parce que s'il y a 50 personnes
00:49:11qui arrivent autour, plus personne
00:49:13ne va céder la dignité
00:49:15de chacun, et ils vont monter aux extrêmes.
00:49:17Alors si on les laisse tranquilles,
00:49:19on envoie un autre, ils t'entendront,
00:49:21ou il n'y en aura qu'un qui mettra les pouces.
00:49:23Moi je l'ai dit à beaucoup de Palestiniens,
00:49:25y compris des gens qui étaient importants.
00:49:27Je l'ai dit un jour
00:49:29à un Palestinien
00:49:31que j'ai connu,
00:49:33qui a fait ses études aux Etats-Unis.
00:49:35D'abord je l'avais connu aux Etats-Unis,
00:49:37il n'était pas
00:49:39dans la politique.
00:49:41C'était un informaticien
00:49:43qui est venu en Algérie,
00:49:45que j'ai fait recruter dans un
00:49:47ministère comme informaticien.
00:49:49Ensuite il est parti,
00:49:51il a rejoint
00:49:53l'OLP,
00:49:55il est devenu
00:49:57vice-ministre, ministre
00:49:59de l'industrie, ministre des Affaires étrangères
00:50:01et chef du gouvernement.
00:50:03Et qu'est-ce que vous lui dites ? Qui est-ce alors ?
00:50:05Il s'appelle Nabil Chahat,
00:50:07qui a été ministre et premier ministre.
00:50:09Et nous sommes
00:50:11des amis.
00:50:13Donc je lui ai dit,
00:50:15c'est pas normal,
00:50:17vous avez vendu votre cause.
00:50:19Vous n'êtes plus crédible.
00:50:21Si c'est ma cause, je la défends avec ma vie,
00:50:23avec mon énergie.
00:50:25Je ne veux pas emprunter des mercenaires.
00:50:27Rameter la terre entière.
00:50:29Donc au lieu de vous mobiliser,
00:50:31vous, entre Palestiniens,
00:50:33et vous organiser pour vous battre,
00:50:35pas pour faire du terrorisme,
00:50:37pour vous battre politiquement, diplomatiquement,
00:50:39ce que vous voulez.
00:50:41Alors là vous avez vendu votre cause
00:50:43aux Algériens, aux Libyens,
00:50:45aux Égyptiens,
00:50:47des aventuriers, des voyous
00:50:49qui vous ont utilisé,
00:50:51qui utilisent votre cause pour des
00:50:53besoins internes, de politique intérieure.
00:50:55Reprenez
00:50:57votre révolution en main.
00:50:59Faites comme Israël.
00:51:01Israël ne souhaitera de ça à personne.
00:51:03Elle achète des armes, bien sûr, aux États-Unis.
00:51:05La nation le plus importante que l'ouma.
00:51:07Absolument.
00:51:09Ils sont effectivement d'accord.
00:51:11Comme ça entre intellectuels quand on discute.
00:51:13Mais le train
00:51:15est sur ses rails.
00:51:17Et on verra que vous avez pris une initiative
00:51:19qui deviendra
00:51:23l'appel de Strasbourg dont nous avons parlé
00:51:25en nous promenant.
00:51:27Comment avez-vous fait, Boilem, pour
00:51:29rameuter tous les intellectuels pour la paix ?
00:51:31Les écrivains s'étaient pour la paix, non ?
00:51:33Oui.
00:51:35C'est un peu le hasard.
00:51:37Parce que je suis parti en Israël
00:51:39et que là-bas j'ai été accueilli
00:51:41par toute l'intelligentsia
00:51:43israélienne et notamment
00:51:45les grands écrivains que sont Amos Horst
00:51:47et David Grossman.
00:51:49Et au cours de nos discussions
00:51:51on s'est dit
00:51:53qu'il faut faire quelque chose. Parce que les Israéliens
00:51:55font des choses de leur côté.
00:51:57Les musulmans, les arabes font...
00:51:59Vous êtes arrivé à 200 signatures.
00:52:01Et donc on s'est dit, qu'est-ce qu'on fait ?
00:52:03On va en Bolivie. Mais comment, concrètement ?
00:52:05Donc je
00:52:07ne sais pas dans quel article
00:52:09j'en ai parlé. Et finalement,
00:52:11comme je vous l'ai dit, je crois déjà,
00:52:13j'ai reçu un coup de téléphone. Il y a un certain Denis Hubert
00:52:15qui est directeur au Conseil
00:52:17de l'Europe, qui me dit, écoutez,
00:52:19j'ai lu ça, est-ce que c'est vrai ? Si c'est vrai,
00:52:21nous vous offrons le cadre.
00:52:23Il m'a parlé de la tenue prochaine
00:52:25du premier forum international
00:52:27de la démocratie
00:52:29qui se tiendrait le 8 octobre
00:52:31au Conseil de l'Europe
00:52:33en Strasbourg, au Sison, Malé.
00:52:358 octobre, ça c'est 2010-2011 ?
00:52:37Oui, voilà.
00:52:39Plutôt 2012.
00:52:41Et voilà, donc on a pondu
00:52:43une déclaration
00:52:45qu'on a appelée, que la presse
00:52:47et les gens, les observateurs
00:52:49ont appelé, ont qualifié
00:52:51l'appel de Strasbourg
00:52:53dans laquelle on appelle
00:52:55Israéliens et Palestiniens
00:52:57pour les adjurent.
00:52:59Essayer de trouver un terrain
00:53:01d'autant qu'on ne peut pas rester...
00:53:03Il n'y a pas deux parties.
00:53:05Il y en a quatre.
00:53:07Il y a les extrémistes des deux camps
00:53:09et les modérés des deux camps.
00:53:11Et ce qu'il faut faire, ça devrait être le travail
00:53:13de la France, ça, quand même.
00:53:15C'est de faire en sorte que les modérés des deux camps
00:53:17peut-être sous l'égide des intellectuels, c'est votre initiative,
00:53:19s'entendent
00:53:21parce qu'ils ne demandent que ça.
00:53:23Mais loin des extrémistes
00:53:25des deux camps, que jouent les Américains
00:53:27à mon avis, que les Etats-Unis.
00:53:29Ils jouent l'extrémisme des deux camps.
00:53:31Ils ont besoin de contenir ce foyer.
00:53:33Exactement.
00:53:35Pour justifier leur présence
00:53:37au Moyen-Orient.
00:53:39Et la chose a fonctionné.
00:53:41Effectivement, beaucoup
00:53:43des intellectuels les plus
00:53:45grands de la planète nous ont rejoints.
00:53:47Ils ont signé
00:53:49notre appel
00:53:51dit de Strasbourg.
00:53:53Et puis ensuite,
00:53:55évidemment, on s'est mis à travailler.
00:53:57Comment traduire ça en programme, en acte ?
00:53:59Par exemple, on avait une idée
00:54:01on n'en a pas parlé, mais c'était
00:54:03très intéressant et j'en ai parlé avec
00:54:05notamment, et ça
00:54:07l'avait surpris, le chancelier
00:54:09de l'université,
00:54:11l'immense université
00:54:13de San Francisco.
00:54:15Et c'était dire
00:54:17dans le monde entier, on enseigne
00:54:19à la guerre, les écoles de guerre, il y en a partout.
00:54:21Est-ce qu'il y a des écoles de paix ?
00:54:23Et le chancelier
00:54:25m'a dit non.
00:54:27J'ai dit que vous devriez.
00:54:29Alors il m'a dit, c'est très simple, je vous
00:54:31embauche. Vous, avec
00:54:33David Grossman, vous venez, vous
00:54:35vous montez un cours. En Californie ? Oui.
00:54:37Vous montez un programme
00:54:39de PhD
00:54:41de la paix. Il fermait
00:54:43des gens. C'était un peu
00:54:45l'ONU, ça ? Oui, c'était un peu...
00:54:47C'était intéressant. C'est l'agenda
00:54:49de la paix de Boutros-Galli.
00:54:51Mais comme tous les Américains,
00:54:53ils vont trop vite.
00:54:55Il a dit, voilà, moi je peux
00:54:57vous donner un budget de 500 000 $
00:54:59mais je veux le programme en 3 mois.
00:55:01J'ai dit, enfin, vous rigolez.
00:55:03On n'est pas...
00:55:05On n'est pas pressé. Un programme,
00:55:07on fait la guerre depuis 70 ans, on peut attendre
00:55:096 mois peut-être,
00:55:11etc.
00:55:13Mais beaucoup de choses se sont faites
00:55:15pendant toute cette année. Obama vous rencontre
00:55:17je crois ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
00:55:19Le président Obama a voulu vous rencontrer.
00:55:21Oui, donc Obama
00:55:23une année ou deux années après était venu
00:55:25en Israël. Grossman
00:55:27y est allé mais pas vous. Voilà, donc
00:55:29il a rencontré
00:55:31David Grossman. Il lui a dit, je vous invite.
00:55:33Vous et Bolam Sansal, vous venez
00:55:35à la Maison Blanche. On va mettre à disposition
00:55:37des moyens. On va, on va, on va.
00:55:39On a attendu
00:55:416 mois qu'un rendez-vous soit fixé.
00:55:43La Maison Blanche
00:55:45nous a offert, proposé 2 ou 3 dates.
00:55:47Aucune ne convenait. Mais il y en avait
00:55:49une qui convenait à David.
00:55:51Je lui ai dit, vas-y.
00:55:53C'est mieux que toi et toi parce que
00:55:55il parle très très bien anglais,
00:55:57ce qui n'est pas mon cas. Je le parle.
00:55:59Comme un Français.
00:56:01Ça aurait été laborieux.
00:56:03Vous avez remarqué comme les grands
00:56:05de ce monde cherchent votre compagnie,
00:56:07vous recherchent, ils vous font venir,
00:56:09ils vous consultent. Parce que oui,
00:56:11parce qu'on parle de paix, parce qu'on parle
00:56:13de choses, voilà, comme
00:56:15des gens de bien.
00:56:17Et ça fonctionne
00:56:19parce que c'est dirigé.
00:56:21Il ne faut pas croire que leur vie est facile.
00:56:23Ils sont quand même accusés de tout
00:56:25et puis ils ont envie de se reprocher,
00:56:27de se...
00:56:29concilier. Non, non, de se représenter,
00:56:31de faire un mandat supplémentaire,
00:56:33d'avoir un prix Nobel.
00:56:35Mais ça c'est le problème de la démocratie.
00:56:37Pourquoi pas ?
00:56:39Bon, mais...
00:56:4120 ans plus, quoi, 12 ans
00:56:43plus tard, vous avez vu
00:56:45où on en est ? 7 octobre.
00:56:47C'est terrible.
00:56:49Ça c'est le 7 octobre
00:56:51bien visible, mais il y en a plein
00:56:53des 7 petits octobres par-ci, par-là,
00:56:55on dit tuerie,
00:56:57tout le temps.
00:56:59Qu'est-ce qui s'est passé ces dernières semaines ?
00:57:01C'est...
00:57:03Ces élèves qui sont tués,
00:57:05c'est fou.
00:57:07J'ai dédémunis octobre,
00:57:09mais c'est de grands, octobre.
00:57:11Vous faites penser à votre ami Camus,
00:57:13Sisyphe. Oui, voilà.
00:57:15Sans cesse reprendre le travail.
00:57:17Sans cesse, sans cesse.
00:57:19Quand on a la chance d'avoir un peu
00:57:21de notoriété pour pouvoir
00:57:23parler, il faut en profiter.
00:57:25Vous n'êtes pas fatigué ?
00:57:27Je suis très fatigué, mais bon.
00:57:29Mettez-vous à l'abri, il pleut, mon cher ami.
00:57:31Rentrons.
00:57:33Alors, ce faisant,
00:57:35vous avez
00:57:37acquis une connaissance
00:57:39du milieu politique français,
00:57:41hors pair.
00:57:43Ah oui, oui.
00:57:45Chirac, Sarkozy,
00:57:47Hollande,
00:57:49même l'actuel président Macron.
00:57:51Ah oui, absolument.
00:57:53Vous pouvez lui demander un peu ce que vous voulez.
00:57:55En fait, les contacts se sont faits
00:57:57souvent,
00:57:59notamment avec Chirac,
00:58:01Hollande, et avec Macron.
00:58:03C'est quand ils viennent
00:58:05à Alger,
00:58:07en général... On veut voir Boilem Sanssane.
00:58:09Voilà. Dîner d'adieu
00:58:11ou de truc.
00:58:13Le président a fait son travail officiel,
00:58:15il est reçu par le chef de l'État, ils font leur truc.
00:58:17Et puis avant de partir, ils font le dîner
00:58:19à la réception avec
00:58:21les intellectuels.
00:58:27Je suis toujours dans cette shortlist.
00:58:31Souvent, c'était
00:58:33moi avec
00:58:35l'archevêque
00:58:37d'Alger.
00:58:41Qui apprenne la société algérienne
00:58:43et qui, effectivement,
00:58:45exprime...
00:58:47Il représente les chrétiens d'Algérie,
00:58:49il représente l'église d'Algérie.
00:58:53Il y a l'ambassade du Vatican.
00:58:57On l'explique.
00:58:59La première fois que j'avais vu Chirac,
00:59:01je lui ai dit, le point faible,
00:59:03c'est la francophonie.
00:59:05Il faut absolument faire rentrer l'Algérie
00:59:07dans la francophonie.
00:59:09Il faut faire un effort, parce que
00:59:11la politique d'arabisation, d'islamisation
00:59:13va nous fracasser tous.
00:59:15C'est vous qui paierez les conséquences.
00:59:17Parce que nous, à la limite, on est en Afrique,
00:59:19on n'a rien à...
00:59:21Ça pulvérise le système d'enseignement.
00:59:23Nous, ils ont tout cassé.
00:59:25On n'a plus d'école, on n'a plus d'université, on n'a plus rien.
00:59:27Le même phénomène
00:59:29va arriver chez vous.
00:59:31Les écoles
00:59:33vont tomber les unes après les autres,
00:59:35les lycées, l'université.
00:59:37C'est le cas maintenant.
00:59:39Ils font des conférences,
00:59:41ils disent, on ne veut pas des juifs là-dedans,
00:59:43on ne veut pas ceux-ci.
00:59:45Ils dictent l'ordre du jour, quasiment.
00:59:49Il m'a écouté, mais sans m'écouter.
00:59:53Est-ce que les hommes politiques français...
00:59:55À chaque fois, je dis à l'ambassadeur, j'espère qu'il va noter,
00:59:57tu vas faire ton rapport,
00:59:59tu rappelleras ça.
01:00:01Quel ambassadeur ?
01:00:03Réussir les fonctionnaires là-bas, je ne sais pas ce qu'ils font avec.
01:00:05Des ambassadeurs de France à Angers ?
01:00:07Oui, oui.
01:00:09Avec tous.
01:00:11J'ai eu des relations très amicales.
01:00:13Gouillette ?
01:00:15Oui, Gouillette,
01:00:17qui était il y a deux ans encore.
01:00:19Driancourt ?
01:00:21Le nouveau, qui est absolument formidable,
01:00:23Stéphane Romaté.
01:00:25Il est extraordinaire.
01:00:27Avant, c'était Driancourt.
01:00:29Driancourt,
01:00:31nous sommes inséparables depuis dix ans.
01:00:33Il n'a pas la langue et la plume dans sa poche.
01:00:35L'ambassadeur Driancourt.
01:00:37Très pessimiste.
01:00:39C'était l'objet de nos conversations quand on se voyait à l'ambassade,
01:00:41on dînait ensemble.
01:00:43Et on se plaignait.
01:00:45On croit lire sans salle,
01:00:47et quand on lit sans salle, on croit entendre Driancourt.
01:00:49Vous savez que...
01:00:51Qui était le directeur du cabinet.
01:00:53De Gaulle disait, le meilleur de tous les diplomates,
01:00:55il faut le mettre à Alger.
01:00:57C'est le poste presque le plus important pour la France.
01:01:01Il faut choisir avec soin.
01:01:03C'est tous mes copains.
01:01:05La grande solution, vous avez prononcé le mot,
01:01:07il faut qu'on en parle 30 secondes quand même,
01:01:09d'autant que c'est le thème de votre prochain livre,
01:01:11en septembre prochain,
01:01:13la question de la langue
01:01:15et la question de la francophonie.
01:01:17Est-ce que la classe politique française
01:01:19est assez sérieuse
01:01:21pour prendre en sérieux
01:01:23cette magnifique affaire
01:01:25où la révolution a de multiples problèmes
01:01:27et personne ne veut le voir,
01:01:29qui est la francophonie.
01:01:31Que les élites françaises
01:01:33traitent par-dessus la jambe quand elles ne le méprisent pas.
01:01:35Je suis en colère
01:01:37quand je vois comment
01:01:39l'Algérie, puis ensuite le Mali,
01:01:41ensuite le Niger,
01:01:43la Côte de Machin, Demel-Sénégal...
01:01:45C'est fait.
01:01:47Le nouveau président est un frère musulman.
01:01:49Il n'a pas tardé
01:01:51à sortir les calons.
01:01:53Parce que la France
01:01:55n'a pas pris au sérieux la francophonie.
01:01:57Personne ne bouge.
01:01:59Elle le paye très cher.
01:02:01Macron ne sait pas y faire.
01:02:03Il est violent dans son propos.
01:02:05Il est moqueur.
01:02:07Il s'est moqué d'eux.
01:02:09Il va réparer l'ascenseur.
01:02:11Alors il faut laisser les diplomates
01:02:13à ce stade. Quand on ne sait pas faire de la politique,
01:02:15il faut renvoyer ça aux diplomates.
01:02:17Ils connaissent leur métier.
01:02:19Vous avez dit ça à Emmanuel Macron.
01:02:21Vous lui parlez franchement comme ça ?
01:02:23Oui, je parle franchement
01:02:25avec tout le monde.
01:02:27On peut vous faire confiance.
01:02:29Quand on ne sait pas,
01:02:31il vaut mieux passer à la patate chaude
01:02:33aux diplomates. Ils savent y faire.
01:02:35Ils ont leurs raisons.
01:02:37Ce n'est pas du tout ce qu'il fait.
01:02:39Oui, parce que lui il vient comme ça sur le coup
01:02:41de l'émotion.
01:02:43Sur la francophonie, il torpille.
01:02:45Avoir mis la tête de la francophonie
01:02:47une ministre qui avait fait fermer
01:02:49au Rwanda.
01:02:51Comment on peut se développer sans un accès
01:02:53au savoir international ?
01:02:55Nous ne connaissons même pas l'arabe
01:02:57comme le connaissent les égyptiens.
01:02:59Oui, c'est superficiel.
01:03:01On peut à peine lire le journal.
01:03:05Est-ce qu'il y a une élite
01:03:07française suffisante
01:03:09pour appuyer
01:03:11un projet de coopération qui serait sérieux ?
01:03:13Il y a eu une grande voix,
01:03:15parlons de Jean-Pierre Chevènement,
01:03:17qui a payé de sa personne
01:03:19pour repartir
01:03:21sur une nouvelle base.
01:03:23Mais on ne les a toujours pas ces bases.
01:03:25Oui, maintenant on n'a
01:03:27aucune base.
01:03:29Il y avait plusieurs.
01:03:31Il y avait des ponts
01:03:33entre les universités,
01:03:35des ponts entre les patrons,
01:03:37des ponts sur
01:03:39les artistes.
01:03:41Il y avait des coopérations comme ça.
01:03:43C'est un clavier.
01:03:45Les scientifiques,
01:03:47les industriels.
01:03:49Il y avait des courants,
01:03:51des échanges scientifiques
01:03:53entre les universités.
01:03:55Beaucoup de profs français
01:03:57venaient enseigner des semaines bloquées
01:03:59parce qu'ils ne font pas l'aller-retour.
01:04:01Ils condensent ce truc.
01:04:03Des algériens qui allaient
01:04:05en tant qu'assistant de tel professeur
01:04:07à telle université 15-20 jours.
01:04:09Il y avait des coopérations
01:04:11dans tous les domaines.
01:04:13Les journalistes
01:04:15algériens, les journalistes français,
01:04:17des échanges, l'institut français
01:04:19de presse, le machin.
01:04:21Tout ça a fonctionné pendant
01:04:23un certain temps et a créé quelque chose.
01:04:25Mais pas au niveau
01:04:27stratégique, c'est-à-dire les militaires.
01:04:29Mais vous savez le problème.
01:04:31C'est aussi que la France s'enferme dans un autre univers.
01:04:33Je me répète beaucoup
01:04:35dans l'univers atlantique.
01:04:37La France ne joue pas son jeu
01:04:39au fond multipolaire.
01:04:41Et donc,
01:04:43une grande arme serait la francophonie
01:04:45en s'appuyant sur l'Algérie
01:04:47qui serait le pivot de cette francophonie.
01:04:49C'était mon rêve.
01:04:51Mais vraiment, je l'ai dit à Chirac.
01:04:53Franchement, je l'ai presque
01:04:55supplié.
01:04:57Ah oui, quasiment.
01:04:59Franchement, M. le Président,
01:05:01je vous adjure
01:05:03de faire quelque chose.
01:05:05On a beaucoup travaillé.
01:05:07Des choses ont commencé
01:05:09à apparaître.
01:05:11Les premiers résultats. Et puis tout d'un coup,
01:05:13quand
01:05:17Abdou Diouf et puis ensuite
01:05:19Boutros est parti,
01:05:21tout s'est effondré.
01:05:23Il n'y a plus de machin.
01:05:25Maintenant, la francophonie,
01:05:27ça devient une activité
01:05:29un peu résiduelle.
01:05:31Les instituts français, ici et là,
01:05:33ils réalisent la semaine de la francophonie.
01:05:35C'est tellement beau.
01:05:37Ne m'en parlez pas.
01:05:39Ils font ce qu'ils peuvent à leur niveau.
01:05:41Mais en plus, ils n'ont pas d'argent.
01:05:45Les premières mesures
01:05:47de Sarkozy,
01:05:49ça a été de couper
01:05:51le budget de la culture.
01:05:53Mais c'est tout le contraire.
01:05:55Il y a 2-3 secteurs auxquels on ne peut pas toucher.
01:05:57On ne touche pas à l'éducation,
01:05:59on ne touche pas à l'armée,
01:06:01on ne touche pas à la culture.
01:06:03Ces deux pays sont en train de se dissoudre ensemble.
01:06:05Il n'y a plus que l'argent.
01:06:09D'ailleurs, j'ai observé que dans votre dernier livre,
01:06:11notamment celui qui est paru en janvier dernier,
01:06:13« Vivre », je le montre à la caméra.
01:06:17Il faut aussi signaler, avant que l'on se quitte,
01:06:19les nombreux romans.
01:06:21J'en ai quelques-uns.
01:06:23On a plusieurs fois parlé de Rud Arvin,
01:06:25qui est un peu votre autobiographie,
01:06:27qui est tellement touchante, avec ce style.
01:06:29J'insiste, il y a le contenu chez vous
01:06:31qui est pour nous le bouleversant.
01:06:33Mais on ne peut pas rendre dans une conversation
01:06:35l'espèce de nervosité
01:06:37étincelante
01:06:39de votre plume,
01:06:41qui bouleverse le cœur et qui va au-delà de votre sujet,
01:06:43qui rend compte
01:06:45à chaque page de la misère humaine.
01:06:47Il y a quelque chose d'assez désespéré chez vous,
01:06:49il faut dire.
01:06:51Le village de l'Allemand, drôle d'histoire.
01:06:53Un Allemand.
01:06:55Je crois que votre femme est allemande.
01:06:57Vous avez une petite pente allemande.
01:06:59Tchéco-allemande.
01:07:01Tchéco-allemande, sudette.
01:07:03Alors,
01:07:05c'est un dignitaire nazi
01:07:07qui finit par épouser la cause
01:07:09islamique.
01:07:11L'histoire a existé.
01:07:13C'était un SS qui était recherché
01:07:15et qui s'est converti
01:07:17avec à l'époque le réseau Ossessar,
01:07:19qui a exfiltré
01:07:21les nazis
01:07:23qui étaient
01:07:25recherchés évidemment.
01:07:27Ils avaient choisi deux directions.
01:07:29C'était l'Amérique du Sud
01:07:31où ils sont partis et ils ont monté...
01:07:33Le monde arabe.
01:07:35Ils sont partis avec beaucoup d'argent des juifs.
01:07:37Donc ils ont créé des banques, des grandes industries.
01:07:39Et ils sont arrivés au pouvoir.
01:07:41Et puis le courant
01:07:43militaire s'est allé
01:07:45comme conseiller technique
01:07:47dans les armées arabes
01:07:49en Syrie, en Irak,
01:07:51en Égypte.
01:07:53Et donc ce Schiller-là,
01:07:55exfiltré par le réseau Odessa,
01:07:57se retrouve en Égypte
01:07:59récupéré par les services secrets.
01:08:01Donc il travaille pour les services secrets normalement.
01:08:03Pour espionner les européens
01:08:05qui sont là-bas.
01:08:07Et à un moment donné, il est expédié
01:08:09auprès de Boumediene,
01:08:11notre base au Maroc.
01:08:13Et il est professeur.
01:08:15Il enseigne.
01:08:17Donc c'est à peine romancé le village.
01:08:19Ah oui, à peine.
01:08:21Les petits officiers
01:08:23que Boumediene préparait pour l'indépendance
01:08:25Voilà.
01:08:27L'indépendance arrive.
01:08:29Il est versé
01:08:31à l'académie militaire interarmes
01:08:33à Cherchelle,
01:08:35pas loin d'Alger.
01:08:37Il est enseignant. Et un jour, on découvre son passé.
01:08:39Des choses ont circulé.
01:08:41Algérie
01:08:43recherche de l'autorité,
01:08:45de machin,
01:08:47de respectabilité plutôt.
01:08:49On se débarrasse de lui.
01:08:51Mais lui, il est recherché, donc il peut aller nulle part.
01:08:53Il se réfugie en Tbilisi
01:08:55chez un de ses jeunes
01:08:57qui était son élève
01:08:59là-bas au Maroc.
01:09:01Et puis,
01:09:03il se réfugie dans un autre village.
01:09:05Il se marie avec la fille du village.
01:09:07Quand le chef du village
01:09:09meurt, il lui-même devient
01:09:11chef du village.
01:09:13Et c'est à cette époque-là
01:09:15que moi, je...
01:09:17Vous le connaissez ?
01:09:19Je suis passé dans ce village
01:09:21et on me l'a raconté.
01:09:23Pourquoi on vous l'appelait le village de l'Allemand ?
01:09:25On m'a raconté tout cela.
01:09:27Ça a été mal pris par les islamistes
01:09:29parce que vous faites une sorte d'assimilation
01:09:31entre nazisme et islamisme.
01:09:33C'est dur.
01:09:35Oui, absolument.
01:09:37C'est ça.
01:09:39L'islamisme,
01:09:41c'est vraiment du nazisme.
01:09:43Sa structure mentale
01:09:45et militaire, c'est vraiment...
01:09:47Il a un projet génocideur.
01:09:49On ne se bat pas pour...
01:09:51On se bat pour son indépendance.
01:09:53On peut comprendre et on peut même soutenir.
01:09:55Mais non, c'est venir avec l'idée
01:09:57de tuer les juifs et les chrétiens
01:09:59parce que Dieu l'a voulu.
01:10:01C'est du génocide.
01:10:03Des gens comme ça, on doit vite les arrêter
01:10:05parce qu'ils sont porteurs de...
01:10:07Mais vous savez qu'il y en a partout.
01:10:09Il y en a partout.
01:10:11Y compris en France.
01:10:13Surtout en France maintenant.
01:10:15Deux pays au moins, la Belgique et la France.
01:10:17Ils sont...
01:10:19Maintenant ils ont leur réseau, ils travaillent.
01:10:21Donc ils ont récupéré
01:10:23tout le marché du halal
01:10:25qui représente 10 milliards d'euros par an.
01:10:27Ils ont infiltré
01:10:29les écoles. Ils ont infiltré
01:10:31toutes les salles de sport.
01:10:33Ils font tous du judo, close combat.
01:10:37Et ainsi de suite.
01:10:39Des petits réseaux nazis partout.
01:10:41Ils ont récupéré tout ce qui tourne autour de la religion.
01:10:43Le hajj, le pèlerinage, le truc.
01:10:45Des écoles, des instituts,
01:10:47des télévisions.
01:10:49Ils se sont connectés
01:10:51avec
01:10:53l'international, les islamistes,
01:10:55les djihadistes.
01:10:57Et puis ils créent des leurres.
01:10:59Le leurre principal, c'est quoi ?
01:11:01Ils jouent l'islam, le gentillet, tout ça.
01:11:03Pour que les gens disent
01:11:05l'islamisme, c'est pas l'islam.
01:11:07C'est pour les détourner.
01:11:09Et du coup,
01:11:11c'est quand même marrant, les français maintenant adorent l'islam.
01:11:13Parce qu'on a tellement
01:11:15su jouer sur la noirceur
01:11:17de l'islamisme et de ce qu'il a fait
01:11:19en Algérie,
01:11:21en Afghanistan,
01:11:23que du coup, l'islam apparaît
01:11:25comme adorable.
01:11:27Ça marche.
01:11:29Et puis on a peur.
01:11:31Et puis en plus, les français évidemment,
01:11:33attachés à leur confort, à leur tranquillité.
01:11:35Ils ont peur.
01:11:37Ça fait peur, bien sûr.
01:11:39Mettre la tête dans le sable.
01:11:41Alors,
01:11:43à un moment donné,
01:11:45nous avons connu ce même problème.
01:11:47On est face à un cancer.
01:11:49Et comment on le soigne,
01:11:51ce cancer-là ?
01:11:53Est-ce qu'on va les tuer tous ?
01:11:55Est-ce qu'on va tuer les cancéreux avant
01:11:57qu'ils contaminent les autres ?
01:11:59On n'a pas de médicament
01:12:01pour soigner le cancer.
01:12:03Ou le sida.
01:12:05On n'a pas encore
01:12:07inventé le remède.
01:12:09Alors on bricole.
01:12:11Et là, chacun...
01:12:13C'est comme la Covid.
01:12:15Chacun est venu avec son explication.
01:12:17On ne comprenait pas d'où vient ce truc-là.
01:12:19C'est chinois, bon d'accord.
01:12:21Mais c'est quoi ? On ne sait pas.
01:12:23Et comment on soigne ?
01:12:25On ne sait pas.
01:12:27On invente, on essaie ça, on essaie ça,
01:12:29et puis peut-être que dans le coup,
01:12:31il y a un machin qui a fonctionné.
01:12:33Un vaccin ?
01:12:35Non, sûrement pas.
01:12:37Je vais bien vous prêcher à couverture.
01:12:39Surtout pas le vaccin.
01:12:41L'injection miraculeuse.
01:12:43Oui, chacun
01:12:45a pris ses propres précautions.
01:12:49Et puis voilà.
01:12:51Les virus ne sont pas éternels.
01:12:53Le virus arrive,
01:12:55puis il disparaît.
01:12:59Il est mort de lui-même.
01:13:01Alors on a pensé
01:13:03que l'islamisme...
01:13:05A l'époque, on a dit
01:13:07que l'islamisme
01:13:09et l'islam sont solubles
01:13:11dans la démocratie. Comme on disait chez nous,
01:13:13il est soluble dans la dictature.
01:13:15Parce que là, il va poser genou à terre.
01:13:17Et bien pas du tout.
01:13:19Il gagne à tous les coups.
01:13:21Parce qu'il nous devance.
01:13:23Et ils ne font que ça.
01:13:25Vous croyez un scénario à la Welbeck ?
01:13:27Soumission ? Que voyez-vous ?
01:13:29Je ne sais pas trop.
01:13:31Je ne pense pas que vous ayez une boule de cristal.
01:13:33Déjà, je me dis
01:13:35qu'il faut
01:13:37accorder le plus d'attention possible
01:13:39aux maillons faibles, c'est-à-dire les enfants.
01:13:41Mettons à l'abri les enfants.
01:13:43L'école ?
01:13:45Il faut faire...
01:13:47Il faut faire le tri.
01:13:49Les enfants, c'est important.
01:13:51Si j'ai le moindre doute...
01:13:53Moi, si j'étais en France et que j'habite en banlieue,
01:13:55je vais mettre mon fils...
01:13:57Je vais me saigner à blanc,
01:13:59mais je vais le mettre dans une école privée.
01:14:01Les catholiques.
01:14:03Il faut mettre les catholiques.
01:14:05Parce que là, je me dis
01:14:07très probablement,
01:14:09les choses vont bien se passer.
01:14:11Mais je ne veux pas le laisser dans cette école
01:14:13où demain, il peut y avoir un copain
01:14:15ou une copine,
01:14:17ou l'inverse.
01:14:19Après, je ne peux plus contrôler la situation.
01:14:21Les enfants.
01:14:23Donc mettre le paquet sur l'école publique,
01:14:25c'est ce qu'il faudrait.
01:14:27L'école, mon Dieu !
01:14:29Mais pas simplement français.
01:14:31Si vous étiez président de la République française, vous diriez...
01:14:33Quelle est la juge à mettre ?
01:14:35C'est la priorité des priorités.
01:14:37C'est les contre-feux.
01:14:39Il faut surveiller l'école.
01:14:41Les profs,
01:14:43il faut s'assurer que c'est des profs républicains,
01:14:45laïcs.
01:14:47Et qui n'ont pas peur.
01:14:49Ils cèdent.
01:14:51Il faut qu'ils sentent que la direction soit...
01:14:53Mais les proviseurs cèdent aussi.
01:14:55Ils cèdent aussi.
01:14:57Quand il y en a un qui cède,
01:14:59il faut le...
01:15:01Je veux dire,
01:15:03il faut aller en justice.
01:15:05C'est une désertion.
01:15:07C'est un devoir absolu.
01:15:09Vous confiez nos enfants.
01:15:11Langage de guerre.
01:15:13Vous confiez vos enfants
01:15:15et vous désertez à la première menace.
01:15:17Vous savez, si vous achetez
01:15:19un kilo de patates,
01:15:21vous trouverez peut-être une patate qui est pourrie.
01:15:23Mais si vous achetez une tonne de patates,
01:15:25vous trouverez 40 kilos de pourries.
01:15:27Et ça suffit.
01:15:29Donc on a la masse
01:15:31qui permet de pourrir tout le reste.
01:15:33Même s'il y a des assimilables,
01:15:35il suffit qu'il y ait une propagation suffisante.
01:15:37Il faut faire attention.
01:15:39Il faut retrouver les réflexes
01:15:41de la prudence.
01:15:43Et dès qu'on voit
01:15:45dans un lycée un garçon
01:15:47qui peut être...
01:15:49Il faut observer et
01:15:51agir en ce moment.
01:15:53Convoquer les parents.
01:15:57Et même cet enfant,
01:15:59le mettre sous surveillance.
01:16:01Mais là,
01:16:03on ne fait pas.
01:16:05Quand le président
01:16:07ou les socialistes
01:16:09dissoudent
01:16:11Mélenchon,
01:16:13ils disent
01:16:15qu'est-ce qu'il est en train de dire ? Ouvrez toutes les portes.
01:16:17Arrêtez vos conneries.
01:16:19Laissez les gens rentrer et vivre.
01:16:21L'islam fait partie
01:16:23de la France.
01:16:27S'il était né en France,
01:16:29il serait comme...
01:16:31C'est un produit
01:16:33exotique.
01:16:35Est-ce que la situation
01:16:37des Français est telle aujourd'hui,
01:16:39telle que vous les voyez,
01:16:41qu'ils sont disposés à se défendre ?
01:16:43Qu'ils veulent un avenir français ?
01:16:45Je ne crois pas trop.
01:16:47Il y a quand même des gens
01:16:49qui parlent, des gens comme Zemmour et d'autres.
01:16:51Ah, notre ami Zemmour.
01:16:53Oui, il parle et disent.
01:16:55Mais on se pose la question.
01:16:57Est-ce qu'il est en mesure de changer les choses ?
01:16:59Il avait démarré
01:17:01à 18%
01:17:03la campagne et il a fini
01:17:05à 7%.
01:17:07Maintenant, il est à 5%
01:17:09aux législatives.
01:17:11L'esprit de défense.
01:17:13J'ai loin à vous en dire,
01:17:15mais ce n'est pas le sujet.
01:17:17L'esprit de défense
01:17:19s'est évaporé pour toujours en France,
01:17:21vous pensez ?
01:17:23Si l'esprit de défense a disparu,
01:17:25si la volonté d'un avenir français
01:17:27a disparu dans la majorité
01:17:29du peuple français,
01:17:31si la rébellion...
01:17:33Elle a disparu déjà avec l'Europe.
01:17:35On a perdu
01:17:37la souveraineté sur des
01:17:39serveurs clés.
01:17:41Pourtant,
01:17:43que ce soit géré par des politiques,
01:17:45à la limite, ça me va.
01:17:47Mais ils sont gérés par des fonctionnaires.
01:17:49Et c'est des fonctionnaires qui ont 25 ans.
01:17:51Ils sont tout jeunes, ils sortent de l'école.
01:17:53Ils sont autour des commissaires
01:17:55qui, eux, sont des
01:17:57super ministres.
01:17:59À ce stade-là, on ne travaille pas.
01:18:01C'était au début
01:18:03de notre conversation,
01:18:05ça m'a beaucoup plu.
01:18:07Vous accordez beaucoup d'importance
01:18:09au thème de la souveraineté.
01:18:11En comparant ce qu'a été l'État souverain
01:18:13au début de la Vème République
01:18:15et les conséquences de l'abandon de la souveraineté
01:18:17et la dilution du pouvoir.
01:18:19Un peuple qui n'en est plus,
01:18:21une volonté de survie
01:18:23qui n'existe plus.
01:18:25On le voit sur sa personne.
01:18:27Si je suis dans une voiture, je vais aller à gauche
01:18:29et la voiture va à droite.
01:18:31Ce n'est pas possible.
01:18:33Je ne rentre pas dans une voiture si je n'ai pas
01:18:35la maîtrise de la
01:18:37direction, de la vitesse
01:18:39et de la destination.
01:18:41Je ne vais même pas aux Européennes me dire
01:18:43où je vais aller.
01:18:45Vous voilà souverainiste.
01:18:47Non, moi je vais aller là,
01:18:49toi tu vas aller là, on peut trouver
01:18:51moyenné.
01:18:53Non, ça ce n'est pas possible.
01:18:55Surtout que les décisions
01:18:57de plus en plus se prennent par des fonctionnaires.
01:18:59Et puis elles se prennent à l'étranger.
01:19:01Oui, sans expérience,
01:19:03sans truc.
01:19:05Les récits des Brevières ont pris...
01:19:07Les grandes décisions se prennent à l'étranger.
01:19:09Même en France.
01:19:11Un état d'où la souveraineté, c'est précieux,
01:19:13précieux, précieux, précieux.
01:19:15A vous prêcher un converti.
01:19:17Alors, dans vos derniers livres,
01:19:19j'observe quelque chose.
01:19:21Vous avez sonné
01:19:23le toxin, vous avez dit les choses
01:19:25telles qu'elles sont. C'est la première
01:19:27chose
01:19:29d'un écrivain. Oser voir ce qu'il voit,
01:19:31dire ce qu'il dit
01:19:33et le dire avec une force.
01:19:35Encore une fois, je rends hommage à la force
01:19:37de votre plume. Je demande vraiment à tout le monde
01:19:39de lire un de ces livres
01:19:41faciles à trouver,
01:19:43très faciles à lire.
01:19:45On est toujours très secoués
01:19:47par la force de votre plume.
01:19:49C'est ça le miracle, à mon avis.
01:19:51J'ai appris il y a quelque temps, je ne sais pas si vous le savez,
01:19:53moi je suis tombé par terre,
01:19:55il y a des chirurgiens qui sont spécialisés
01:19:57dans les paupières.
01:19:59Ils ne connaissent que la paupière.
01:20:01Je ne savais pas que c'est...
01:20:03que des...
01:20:05C'est absurde.
01:20:07Si on peut comprendre.
01:20:09Mais seulement la paupière.
01:20:11Et donc, en fait,
01:20:13on voit comme ça,
01:20:15au bout il n'y a rien,
01:20:17il y a une paupière.
01:20:19Et l'inculture, et tout autour l'inculture.
01:20:21Voilà, et donc il faut...
01:20:23Peut-être que c'est pour ça
01:20:25que les religions
01:20:27fanatiques progressent.
01:20:29C'est parce que devant tant d'inconnus,
01:20:31on va au plus pressé,
01:20:33c'est comme si on savait tout,
01:20:35faute d'avoir le courage
01:20:37de savoir chaque chose, de se pencher.
01:20:39C'est vrai que ça couvre un large spectre,
01:20:41ça explique tout.
01:20:43Avec notre adversaire,
01:20:45on est censé tout expliquer.
01:20:47Il faut beaucoup de langues,
01:20:49il faut sortir du livre magique
01:20:51pour lire tous les livres.
01:20:53C'est incroyable,
01:20:55parce qu'à cette époque-là,
01:20:57les gens cultivés, les gentils hommes,
01:20:59savaient des choses.
01:21:01Un peu de mathématiques, un peu de politique,
01:21:03un peu d'économie,
01:21:05et souvent même, ils étaient
01:21:07pas un peu, beaucoup.
01:21:09C'est pour ça que vous avez appris ce livre
01:21:11« Vivre ».
01:21:13D'abord,
01:21:15il faut un titre.
01:21:17Il faut qu'on
01:21:19réapprenne à vivre.
01:21:21Parce qu'on a vécu
01:21:23dans un schéma,
01:21:25je veux dire.
01:21:27Et puis,
01:21:29le système s'est effondré
01:21:31et là, on vit sans schéma.
01:21:33On n'a pas de boussole,
01:21:35on n'a pas de carte.
01:21:37On vit simplement.
01:21:41Il faut qu'on apprenne à vivre pour quelque chose.
01:21:45Là, on vit, on consomme,
01:21:47on traite, on voyage, on est malade,
01:21:49on se soigne et puis on meurt.
01:21:51Je reviens à ce que nous disions pour finir
01:21:53le début de notre conversation.
01:21:55Ce qui a fait de vous ce que vous êtes,
01:21:57c'est cette boulimie de livres.
01:21:59Et ce que vous avez aimé en France,
01:22:01parce que vous aimez la France
01:22:03et la cosmogonie française,
01:22:05que vous trouvez très précieuse pour le monde entier,
01:22:09c'est cette capacité
01:22:11que mettent les livres
01:22:13à disposition de chacun
01:22:15pour se faire son propre
01:22:17jugement, à la montagne justement.
01:22:19On peut dire que la France
01:22:21n'a pas de religion.
01:22:23Enfin, le catholicisme...
01:22:25Elle a un trésor, c'est sa littérature.
01:22:27Et puis, qui n'est pas incompatible
01:22:29d'ailleurs parce que
01:22:31il y a dans le catholicisme une liberté humaine
01:22:33qui enjoint l'homme à chercher
01:22:35selon ses voies,
01:22:37sa propre connaissance. Et les livres
01:22:39est l'expression de cela.
01:22:41Il faut sortir du...
01:22:43Il faut relire.
01:22:45De la grégarité.
01:22:47Ressortir les grands livres français, les lire.
01:22:49Et puis chercher ce qui correspond
01:22:51le plus à sa...
01:22:55La bibliothèque.
01:22:57La bibliothèque française est immense.
01:22:59La bibliothèque.
01:23:01Elle est immense.
01:23:03On dirait la bibliothèque idéale.
01:23:05Hommage
01:23:07pour finir à deux personnes.
01:23:09Madame Votre-Mère,
01:23:11qui lisait, qui lisait, qui lisait.
01:23:13C'est un modèle à proposer.
01:23:15Elle avait tout ça à faire. Lisez, lisez.
01:23:17Elle a fini sur Agatha Christie.
01:23:19Elle a lu toute l'oeuvre d'Agatha Christie.
01:23:21À mesure que les machines
01:23:23libèrent du temps libre,
01:23:25avant que les machines nous bouffent,
01:23:27elle commence par nous donner du temps.
01:23:29Profitons-en pour travailler.
01:23:31Travailler intérieurement.
01:23:33Et rendons hommage aussi
01:23:35à celui qui nous a permis de nous rencontrer hier soir.
01:23:37Chez qui nous sommes ?
01:23:39Notre ami Eric Médieux.
01:23:41Que vous avez rencontré à Alger.
01:23:43Que j'ai connu à Alger.
01:23:45Il était représentant de
01:23:47Peugeot.
01:23:49Peugeot, Peugeot.
01:23:51C'était un homme vraiment merveilleux.
01:23:53Il m'avait invité chez lui.
01:23:55Dans une soirée comme celle-ci,
01:23:57il a invité ses connaissances.
01:23:59Dans une belle maison d'élan.
01:24:01Dans une belle maison
01:24:03cartouchique d'Alger.
01:24:05On a parlé littérature,
01:24:07deux choses et d'autres. C'était super.
01:24:09Et puis on est resté en contact.
01:24:11On n'a jamais pu se revoir parce qu'il est parti au Nigeria.
01:24:13Il voulait absolument
01:24:15m'inviter,
01:24:17mais on n'a pas pu faire cela.
01:24:19Et puis quand il est rentré là aussi,
01:24:21ça a été un peu difficile.
01:24:23Mais là, je l'ai appelé, j'ai dit
01:24:25Eric, je vais t'informer que je viens à Bordeaux.
01:24:27Pour un salon de cuisine.
01:24:29Voilà.
01:24:31Gallimard m'a fait un programme
01:24:33un jour une ville,
01:24:35un jour une ville, comme ça.
01:24:37Jusqu'à le
01:24:395 mai.
01:24:41J'ai dit à Gallimard,
01:24:43réservez-moi, je viens à Bordeaux,
01:24:45mais réservez-moi le 8, 9,
01:24:4710.
01:24:49Je vais chez mon ami Eric.
01:24:51Et donc il m'a dit,
01:24:53on s'est rencontré.
01:24:55Nous avons saisi cette occasion.
01:24:57On a passé une journée super.
01:24:59Conversation, merci beaucoup.
01:25:01Elle n'est pas finie.
01:25:03Merci à Le Conservateur,
01:25:05la revue.
01:25:07Ah, si vous écrivez un jour.
01:25:09Ah bah, volontiers.
01:25:11Nous serons très fiers.
01:25:13Vous m'avez offert un exemplaire.
01:25:15C'est celui-ci, je crois.
01:25:17Je vais vous envoyer des nouveaux conservateurs
01:25:19jusqu'à ma soif.
01:25:21Merci beaucoup Boilem Sansalle.
01:25:23Je vous ai de la peine à vous quitter,
01:25:25mais tout simplement, ne nous quittons pas.

Recommandée