Maïwenn et Maalouf à l’index : la guillotine s’emballe

  • le mois dernier

Chaque vendredi, Eugénie Bastié dévoile aux auditeurs sa «Revue de presse» hebdomadaire et ses idées.
Retrouvez "Eugénie Bastié - Les signatures d'Europe 1" sur : http://www.europe1.fr/emissions/eugenie-bastie-les-signatures-deurope-1

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00:00Eugénie Bastier, c'est à vous, on vous retrouve ce matin, vous souhaitez revenir sur une énième affaire Me Too qui secoue le cinéma français.
00:07Oui, c'est le trompettiste Ibrahim Malouf qui a été évincé du jury du festival de Deauville
00:12car sa présence provoquait, je cite, un malaise dans l'équipe.
00:16Rappelons que Malouf a été accusé d'agression sexuelle sur une jeune fille de 14 ans en 2017 mais relaxé en appel en 2020.
00:23La directrice du festival, Aude Hébert, qui a elle-même remplacé l'ancien directeur Évincé lui aussi pour des accusations d'agression sexuelle, a justifié son choix ainsi, je la cite
00:32« Ce n'est pas à moi de juger, punir ou condamner mais la présence d'Ibrahim Malouf devenait de plus en plus problématique. »
00:39Donc même jugé non coupable, on reste problématique, c'est le nouveau mot à la mode pour s'affranchir de la légalité au profit de la dictature des ressentis.
00:48« Je ne juge pas mais j'écarte, je ne punis pas mais j'annule. »
00:52Alors bien sûr, vous me direz, tout ne se règle pas dans les tribunaux en matière sexuelle. On l'a vu pendant les affaires Maznev, Duhamel ou Jacot,
01:00la revanche médiatique tient parfois lieu de procès quand celui-ci ne peut pas se tenir, notamment en matière à cause de la prescription.
01:07Mais quand le procès a eu lieu et qu'il a relaxé l'accusé, peut-on faire comme s'il n'avait pas existé ?
01:12Certes, oui, ça peut être frustrant mais le droit doit avoir le dernier mot en démocratie.
01:18On s'inquiète bien souvent de la remise en cause de l'état de droit par le populisme.
01:22Il faudrait aussi s'alarmer du mépris de la justice au nom du progressisme.
01:26Alors cette affaire Mahalouf traduit-elle un emballement génie du mouvement MeToo selon vous ?
01:32Vous savez ce que disait Hannah Arendt sur Staline ?
01:34Il a transformé l'adage révolutionnaire « on ne fait pas d'omelette sans casser des œufs » en véritable dogme « on ne casse pas d'œufs sans faire d'omelette ».
01:42Nous y sommes. Dans le cinéma français, c'est omelette matin, midi et soir.
01:45La guillotine s'emballe.
01:47Désormais, ce n'est plus le soupçon d'agression sexuelle mais la simple critique du mouvement MeToo qui peut valoir une ostracisation.
01:54C'est le cas de Maïwenn qui a été, elle aussi, écartée de la présidence du jury de Deauville pour « déviance antiféministe ».
02:01En effet, dans son magnifique film sur Jeanne Dubary, elle avait osé prendre Johnny Depp pour jouer Louis XV.
02:07L'acteur américain, souvenez-vous, était alors mis au banc du cinéma en raison de son procès avec son ex-compagne Amber Heard.
02:13Il était devenu la bête noire des féminismes, même si lui aussi a été relaxé.
02:17Maïwenn a encore aggravé son cas en tirant les cheveux du fondateur de Mediapart, Edwi Plenel, dans un restaurant parisien.
02:24Elle eut reproché notamment le traitement médiatique dans Mediapart de Luc Besson, le père de sa fille.
02:29Qu'incarne Maïwenn dans le cinéma français ?
02:31Maïwenn, pour moi, c'est une réalisatrice bourrée de talents qui sait faire transparaître l'ambiguïté du cœur humain et des relations hommes-femmes
02:38à milieu des jugements binaires du mitouisme.
02:41Dans son film « Mon roi », par exemple, elle avait fait de Vincent Cassel un tyran domestique.
02:45Mais elle s'était insurgée que les féministes reprennent son personnage comme une illustration du pervers narcissique patriarcal.
02:52Dans Jeanne Dubary, elle a fait le portrait d'une femme féministe et féminine à l'ascension fulgurante.
02:58Il y a quelques années, Maïwenn a refusé de participer à un reportage sur les femmes cinéastes, réalisé évidemment par Julie Gayet,
03:05en arguant qu'elle refusait d'être jugée en tant que femme pour son travail.
03:10Elle dit souvent « je suis féministe en aimant les hommes », un propos banal devenu, hélas, aujourd'hui, presque une provocation.
03:18Signature Europe 1, Eugénie Bastier. Merci beaucoup, Eugénie.

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