• il y a 3 mois
Près de quatre mois après le début des émeutes, la Nouvelle-Calédonie reste un territoire meurtri. Quelle est aujourd'hui la situation sanitaire et économique de l'île ? Le calme est-il revenu, la sécurité est elle rétablie sur le territoire ? Sonia Backès, présidente de la province Sud de Nouvelle-Calédonie et cheffe de file des Loyalistes sera reçue à à la mi-journée par Emmanuel Macron à l'Elysée. Elle est l'invitée de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 03 septembre 2024.

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Transcription
00:00RTL Matin, Thomas Soto et Amandine Bégaud.
00:04Il est 8h19, l'interview d'Amandine Bégaud, alors que la situation reste très compliquée à bien des égards en Nouvelle-Calédonie.
00:10Amandine, vous avez choisi ce matin de recevoir Sonia Baques, présidente de la province sud et chef de file des loyalistes sur l'archipel.
00:17Bonjour et bienvenue à vous.
00:19Bonjour Sonia Baques, merci beaucoup d'être ici avec nous en studio ce matin.
00:22Vous serez reçue, je le disais tout à l'heure, à l'Élysée par Emmanuel Macron.
00:26Pour faire le point, 3 mois et demi après ces très très violentes émeutes qui ont secoué la Nouvelle-Calédonie,
00:31on rappelle le bilan, 11 morts, des dégâts colossaux.
00:35Et ce couvre-feu, qui est toujours en place, qui a même été prolongé il y a quelques jours au moins jusqu'au 16 septembre,
00:41ça veut dire quoi ? Que la sécurité n'est toujours pas assurée sur place ?
00:44Globalement, la situation au niveau sécuritaire va beaucoup mieux parce qu'il y a énormément de forces mobiles sur le territoire.
00:50C'est-à-dire que concrètement, c'est tenu par les forces qui sont présentes, mais ce n'est pas stabilisé.
00:54Il y a encore des endroits, il y a un endroit où on a 15 000 personnes qui sont en fait prises en otage de l'autre côté de la route,
00:59qui ne peuvent pas passer, qui sont obligées de passer par bateau, avec des barges.
01:0315 000 personnes sur 270 000 habitants ?
01:06Avec une tribu en fait qui bloque la route avec des carjackings extrêmement violents,
01:10pistolets sur la temple, les gens sont déshabillés, voitures volées, etc.
01:14Et cette situation-là, c'est 35 personnes concrètement dans la tribu qui terrorisent la population qui passe
01:20et pour l'instant qui n'est pas sous contrôle.
01:2235 personnes qui terrorisent 15 000 personnes ?
01:26En fait, c'est 35 terroristes concrètement qui sont formés, qui ont été à l'armée, qui sont là pour tuer du gendarme.
01:33Donc il y a des opérations qui ont été engagées, mais qui à chaque fois sont extrêmement périlleuses pour les gendarmes.
01:39Et puis donc c'est cette route en fait qui passe au milieu de la tribu,
01:43qui permet cette prise d'otage en fait de 15 000 personnes.
01:46Et les autorités françaises ne sont pas capables de reprendre la main ?
01:49Sans vouloir accalmer quelque chose ?
01:51Non, non, mais il y a beaucoup, beaucoup de force.
01:53Mais concrètement, il y a des endroits dans lesquels ils n'y arrivent pas pour des raisons de configuration de la zone, etc.
01:57Mais concrètement, il y a des endroits sur lesquels on n'a pas repris la main.
01:59C'est le cas à cet endroit-là.
02:01C'est le cas sur toute la côte est de la province nord, dans lequel concrètement, on ne peut pas aller.
02:05Alors il y a l'aspect sécuritaire et puis il y a l'aspect économique et social.
02:10On entendait tout à l'heure dans le journal de 7h le témoignage de la banque alimentaire sur place avec cet afflux de demandes.
02:19Certains redoutent désormais des émeutes de la faim. On en est là, Sonia Macless ?
02:22Oui, on en est là. On est passé en trois mois de moins de 10% de chômage à plus de 50% de l'emploi salarié qui est au chômage ou au chômage partiel.
02:31Concrètement, le ministre de l'économie nous a accompagnés pendant tout l'été.
02:35Il a fait des visios toutes les semaines pour essayer de gérer les urgences.
02:38Donc les urgences sont gérées.
02:40Mais concrètement, on est au bord de l'effondrement parce qu'en fait,
02:43les entreprises qui n'ont pas encore brûlé ou qui n'ont pas été pillées sont à moins 50% ou moins 70% de perte de chiffre d'affaires.
02:50Donc concrètement, vont couler dans les prochains mois.
02:52Donc les gens qui ne sont pas encore au chômage vont l'être incessamment sous peu.
02:56Et concrètement, les collectivités, on a notre propre fiscalité, donc on n'a plus de recettes fiscales qui rentrent.
03:01Donc en fait, on ne paye plus les associations.
03:03La banque alimentaire, par exemple, avant, on payait le secours catholique, toutes les associations.
03:07Donc les associations ne sont plus aidées, les aides ne sont plus versées.
03:09On ne peut plus aider.
03:10Nous, on ne paye plus la sécurité sociale.
03:11On ne rembourse plus la sécurité sociale, concrètement, parce que la collectivité que je préside, concrètement,
03:16je ne sais pas si je pourrais payer les salaires des agents du mois d'octobre parce qu'on n'a plus d'argent.
03:20Et en fait, c'est un espèce de jeu de domino qui s'effondre petit à petit.
03:24Et concrètement, si dans 15 jours, 3 semaines, on n'a pas une action extrêmement forte de l'État,
03:30et pour ça, il faut un gouvernement parce qu'il faut une loi de finances,
03:33eh bien, ce sera l'effondrement total de la Nouvelle-Calédonie sur le plan économique,
03:38avec, évidemment, ce que vous disiez, c'est-à-dire des émeutes de la faim,
03:41des gens qui n'ont plus aucune solution pour manger, concrètement.
03:44Aujourd'hui, c'est déjà le cas.
03:46On avait évoqué ces pénuries alimentaires aussi.
03:51C'est difficile aujourd'hui de se nourrir en Nouvelle-Calédonie ?
03:52Les pénuries sont réglées, c'est-à-dire que, concrètement, il y a des aliments dans les magasins.
03:56Le problème, c'est que les gens n'ont plus d'argent.
03:59Ils n'ont plus de travail et on n'a plus de moyens de donner des aides.
04:01Donc, à un moment donné, il faut avoir de l'argent dans la main pour aller acheter de quoi manger.
04:07Compliqué aussi de se soigner, vous disiez qu'on ne rembourse plus la sécurité sociale.
04:12Les soignants, eux aussi, s'en vont ?
04:13Oui. 40% du personnel médical qui est parti de l'hôpital.
04:1640% ? 1 sur 2, presque.
04:18Voilà, c'est extraordinaire. On n'a plus de cardiologues, plus de dermatologues, plus d'ophtalmo,
04:22plus d'oncologues. C'est la pénurie totale.
04:24Donc, quelqu'un qui a un cancer aujourd'hui en Nouvelle-Calédonie, il n'est plus suivi ?
04:26Il ne peut plus être suivi. Les médecins libéraux sont partis par dizaines, en fait.
04:31Ce sont les premiers à être partis parce que les gens qui sont partis en premier,
04:34ce sont les gens qui n'avaient pas de gros engagements, pas acheté leur maison, etc.
04:37Ceux-là sont partis. Donc, des dizaines de médecins libéraux qui sont partis,
04:42concrètement pour se faire soigner. Il y a des zones entières, il y a des communes.
04:45Il y a une commune, j'y ai été avant de partir.
04:47Il y a 5 fois plus de morts par mois, non pas par balle ou par les émeutes,
04:51mais simplement parce que les gens ne sont plus soignés.
04:52Pour 2 000 habitants, il y a une visioconsultation par semaine.
04:56Pour 2 000 habitants, les gens ne peuvent pas être soignés.
04:58Ce que vous nous racontez est complètement fou.
05:00Certes, on est à des milliers de kilomètres de Paris, mais c'est la France, la Nouvelle-Galédonie.
05:04On meurt parce qu'on n'y est plus soigné.
05:06Bientôt, vous nous dites que les gens ne pourront plus se nourrir.
05:09Vous allez voir Emmanuel Macron tout à l'heure.
05:11Qu'est-ce que vous lui demandez concrètement au Président ?
05:13Je lui demande de venir nous sauver parce que, concrètement...
05:16Mais ça veut dire quoi ? Il y a eu de l'argent de donner...
05:18Il y a de l'argent qui a été débloqué.
05:19Concrètement, c'est 400 millions d'euros, ce qui est gigantesque depuis le début de la crise.
05:24Mais on a non seulement 2 milliards de dégâts immédiats,
05:27mais en plus, tout ce qui va avec, c'est-à-dire toute la perte de recettes fiscales.
05:31Puisque là, il n'y a plus de...
05:32Mais il faudrait combien ?
05:33Le Congrès a voté une demande de 4,2 milliards sur 5 ans, ce qui paraît gigantesque.
05:40Mais surtout, il faut qu'il y ait une prise de conscience pour nous accompagner.
05:44Concrètement, il nous faut des médecins.
05:45Là, ce n'est pas de l'argent.
05:47Concrètement, il faut nous envoyer des médecins.
05:49Il faut que les Calédoniens puissent être soignés.
05:51Il faut qu'on puisse repayer la Sécurité sociale.
05:55C'est des choses qui paraissent évidentes ici.
05:57Et c'est vrai qu'il s'est passé beaucoup de choses en métropole.
06:00Je comprends que la Nouvelle-Calédonie soit passée en arrière-plan.
06:03Mais heureusement, encore une fois,
06:05heureusement, le ministre de l'Économie nous a accompagnés pour gérer l'urgence.
06:08Sinon, l'effondrement serait déjà effectif.
06:11Mais concrètement, là, s'il y a 15 jours, 3 semaines,
06:13il n'y a pas de grosses décisions budgétaires pour nous accompagner, c'est fini.
06:17Donc des décisions, un gouvernement.
06:19Quel est le sentiment sur place ?
06:21Un sentiment d'abandon ?
06:22On a l'impression que la métropole s'en fiche ?
06:24En fait, il y a une résilience assez extraordinaire.
06:27C'est-à-dire qu'en fait, on a l'impression d'être un peu...
06:29On n'est pas abandonnés parce qu'encore une fois,
06:31il y a beaucoup de forces de l'ordre.
06:32Gérald Darmanin a mis les forces.
06:34Bruno Le Maire nous aide.
06:35Mais en fait, il n'y a aucune visibilité, aucune perspective.
06:39En fait, il y a une résilience.
06:41Les gens continuent à se débrouiller pour trouver à manger,
06:44pour se soigner comme ils peuvent.
06:47Et ils staisent et ils essayent juste de s'en sortir en silence.
06:52Et ils espèrent, ils attendent.
06:54Là, je suis partie en métropole.
06:56Ils le savent tous.
06:57Tous les jours, j'ai des messages pour me dire
06:58alors, est-ce qu'on s'occupe de nous ?
07:00Alors, ça a donné quoi ?
07:02Il faut qu'Emmanuel Macron retourne sur place ?
07:04Pas forcément.
07:06Ce qu'il faut, c'est des décisions.
07:07Ce qu'il faut, c'est qu'on puisse avoir
07:09concrètement un plan de sauvetage de la Nouvelle-Calédonie.
07:11Et pour la suite politique,
07:13le président avait dit que les discussions reprendraient en octobre.
07:16Est-ce que ça vous semble possible ? Avec qui ?
07:18On a l'impression que c'était réconciliable, ces deux camps.
07:22Oui, c'est très compliqué parce qu'en plus,
07:23le FLNKS, qui est le front de libération,
07:26donc le front indépendantiste, en fait,
07:28s'est divisé en deux.
07:29Il y a normalement quatre parties.
07:30Il y en a deux qui sont sorties
07:32et deux qui ont élu le chef des terroristes comme président.
07:35Donc, en fait, ça va être très compliqué.
07:37On a les modérés qui, en fait, sont sortis de ce front,
07:40n'ont pas accepté l'élection de Christian Théun,
07:44qui est aujourd'hui en détention provisoire en métropole
07:46parce que chef de l'organisation, la CCAT,
07:49qui a organisé l'insurrection.
07:51Donc, le camp indépendantiste est très divisé.
07:53Donc, je ne sais pas très bien avec qui on va pouvoir discuter.
07:56Il faut que tout le monde se remette autour de la table ?
07:58Je ne sais pas quelle est la solution immédiate.
08:00Ce que je sais, c'est que...
08:02Alors, en plus, on doit avoir des élections
08:04qu'on ne peut absolument pas avoir dans ces conditions-là.
08:06Ce que je sais, c'est qu'il y a une urgence économique, sociale immédiate
08:10et que le reste pourra attendre un peu.
08:12Mais pour l'instant, il faut nous sauver.
08:14Merci beaucoup, Sonia Bakess.
08:16Donc, vous avez ce rendez-vous à l'Elysée, sans doute à la mi-journée.
08:19Enfin, c'est convenu comme ça, en tout cas, pour l'instant.

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