François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, était l'invité de BFMTV-RMC ce mercredi.
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00:00Il est 8h32 et on va parler de la France et des perspectives économiques avec vous, François Villeroy de Gallo, bonjour.
00:06Bonjour.
00:06Vous êtes le gouverneur de la Banque de France. Le gouverneur de la Banque de France, c'est simple.
00:10C'est en quelque sorte la tour de contrôle de l'économie française et vous venez présenter ce matin sur RMC et BFMTV les perspectives.
00:18À quoi s'attendre ? À quoi s'attendre pour l'économie française en matière d'inflation, de pouvoir d'achat, d'emploi, du budget et peut-être même d'impôts
00:26puisque, évidemment, vous l'avez entendu, le Premier ministre envisage des hausses d'impôts, les augmenter. Pourquoi pas ?
00:32J'y reviendrai évidemment avec vous mais d'abord, je voudrais ce panneau général avec un mot, un mot qui traverse l'économie depuis trois ans,
00:40un mot qui est vu comme une menace, une souffrance pour les Français, c'est le mot inflation.
00:46Est-ce que l'inflation, c'est derrière nous ? Quels sont les chiffres que vous pouvez nous annoncer ce matin ?
00:52Alors d'abord, bien sûr, Pauline de Malherbe, l'inflation, c'est la première préoccupation des Français depuis trois ans.
00:58Il y a eu une bouffée d'inflation, on l'a senti sur l'essence, l'alimentation, dans la vie quotidienne des gens.
01:04Alors je crois que la bonne nouvelle, c'est que ça n'est pas tout à fait fini mais vraiment la victoire est en vue.
01:11L'inflation, elle est déjà revenue temporairement autour de 2% en France. 2% c'est notre objectif, à nous, Banque de France, Banque centrale européenne
01:21et ce que nous disons, c'est qu'elle va y revenir durablement l'an prochain.
01:26Ça, ça veut dire du pouvoir d'achat et ça veut dire aussi de la baisse des taux d'intérêt. Donc c'est une vraie bonne nouvelle.
01:31Vous la mettez à combien ? L'INSEE parle d'une inflation le mois dernier à 1,8.
01:36Vous pensez qu'elle va durablement s'installer sous la barre des 2% ? Autour de quoi ?
01:40Les choses sont toujours un tout petit peu compliquées en économie parce qu'il y a un indice national qui est à 1,8
01:47et puis il y a un indice européen qui est à 2,2. Mais vous voyez, on est autour de 2.
01:52Ça devrait bouger un peu avec des hausses, des baisses dans les mois qui viennent mais ce n'est pas très significatif.
01:57Et nous, nous disons 2% durablement, même en France, en dessous de 2% l'an prochain.
02:03Ça, ça veut dire que les prix maintenant augmentent moins vite que les salaires. Ça fait du pouvoir d'achat.
02:10L'écart positif va augmenter. Ça fait du pouvoir d'achat et ça devrait faire de la consommation ce qui soutient la croissance.
02:18Donc vous voyez, c'est un enchaînement positif. L'incertitude qui existe là-dessus, c'est pour ça que nous sommes un peu plus prudents sur la croissance.
02:26Nous sommes affirmatifs sur l'inflation et plus prudents sur la croissance.
02:30L'incertitude qui existe, c'est un certain attentisme peut-être des Français qui peuvent épargner plutôt que consommer
02:37ou des entreprises qui peuvent différer leurs investissements. Pourquoi cet attentisme ?
02:42Parce qu'il y a beaucoup de questions sur l'environnement politique en France et l'environnement international.
02:47L'incertitude, on va y revenir dans un instant, mais vous avez quand même d'abord prononcé le mot bonne nouvelle, vous avez prononcé le mot victoire.
02:54C'est quand même suffisamment rare depuis plusieurs années sur le front de l'économie, de l'inflation et du pouvoir d'achat.
03:02Mais vous avez aussi utilisé le conditionnel, si je ne me trompe pas. Vous avez dit que ça devrait entraîner une croissance, une consommation, des ménages.
03:12Ce n'est pas le cas.
03:13Alors, si on faisait de la grammaire, ce qui serait austère, comme vous le disiez tout à l'heure...
03:17J'ai promis que ça ne le serait pas. Attention, François-Philippe Leroy-Gallon, ne me faites pas mentir.
03:20Essayons d'être très clairs. Je crois que sur l'inflation, on est à l'indicatif, l'affirmatif. C'est ça qui se passe.
03:28Ça y est, oui, l'inflation baisse et baisse durablement.
03:31Sur la croissance, ce que nous voyons, c'est une résilience. On a évité la récession, on est à 1,1% de croissance cette année.
03:38Mais c'est trop peu. Donc là, il y a un conditionnel pour l'accélération de la reprise. On l'espère, mais elle est soumise à cette aléa d'incertitude.
03:46Deux acteurs évidemment, les ménages, les foyers et les entreprises.
03:50Les derniers chiffres montrent que pour les ménages, la moitié des agences immobilières, par exemple, ont subi une baisse d'activité.
03:57Il y a 24% de moins cette année sur les immatriculations d'automobiles.
04:03Ça veut donc dire qu'en effet, les dépenses ont été moindres.
04:07Et il y a un autre indicateur, c'est qu'il y a des sommes beaucoup plus importantes que les autres étés.
04:12Là, si on parle des tout derniers mois qui ont été placées sur les livrets d'épargne.
04:16Ça veut donc dire que les familles, les foyers, les ménages épargnent plutôt que ne dépensent.
04:21Alors, je crois qu'aujourd'hui, l'épargne reste importante.
04:24Vous vous souvenez, il y a quelques années, elle a été très forte au moment du Covid parce que nous ne pouvions plus consommer.
04:29Et donc, il y a eu une épargne forcée et on n'a pas retrouvé aujourd'hui le niveau d'épargne pré-Covid.
04:35Donc ça, c'est une réserve de consommation et de croissance.
04:40Toute la question qui se pose, c'est est-ce que ces retards de consommation dont vous parlez, c'est temporaire ?
04:46Nous pensons que c'est le cas pour la plus grosse partie.
04:48Ou est-ce qu'il peut y avoir des changements de comportement plus durables ?
04:52Je vais prendre un signe positif sur l'immobilier.
04:55Nous mesurons, nous, à la Banque de France, la production de crédit immobilier chaque mois.
04:59Au mois de juillet, le dernier chiffre que nous connaissons, elle est nettement repartie à la hausse avec plus de 11 milliards.
05:04Elle partait de quasi zéro.
05:06Ce n'était pas quasi zéro.
05:08On était entre 6 et 7 milliards au printemps et là, on est à 11 milliards.
05:14Tout ceci correspondant à l'autre conséquence de la victoire contre l'inflation, c'est-à-dire que les taux d'intérêt ont baissé.
05:22Et ils vont continuer à baisser ?
05:24La moyenne des crédits immobiliers est à 3,6%.
05:28C'est 0,5% de moins qu'au début de l'année.
05:31Ça devrait continuer à baisser un peu, mais là, ce n'est pas nous qui fixons les taux du crédit immobilier.
05:36Les taux que nous fixons, nous, les taux à court terme de la Banque de France et de la Banque Centrale Européenne,
05:41nous les avons déjà baissés deux fois.
05:43Et oui, nous devrions continuer à les baisser.
05:46Je suis très attentive au temps que vous employez.
05:52Donc vous devriez, mais on entend bien que ça devrait se prolonger.
05:56Il y a les entreprises également qui investissent beaucoup moins.
06:0036% des patrons qui anticipaient un investissement ont décidé de les reporter.
06:06Et 20% ont décidé carrément de les annuler.
06:08Ça, pour le coup, c'est une très mauvaise nouvelle.
06:10Alors, je crois qu'un des grands ennemis de la croissance et de la reprise, c'est l'incertitude.
06:15C'est même l'inquiétude.
06:17Et donc, une des grandes réponses qu'on peut apporter, c'est de clarifier la politique économique et la politique budgétaire.
06:25Ça va être une tâche prioritaire du prochain gouvernement avec le Parlement.
06:29Mais il faut effectivement donner des repères.
06:33Au passage, la Banque de France est là pour ça.
06:35La Banque de France est réductrice d'incertitudes.
06:37Et nous, quand nous luttons contre l'inflation, nous protégeons la valeur de la monnaie et nous nourrissons la confiance.
06:43Mais il faut arriver à faire ça, non seulement pour la monnaie, mais pour le budget.
06:47Et puis, pour la croissance, la musculation de l'économie française.
06:53C'est quoi la musculation de l'économie française ?
06:55Je vais peut-être le dire un peu d'une autre manière, mais avec une image presque physique.
06:59Allez-y.
07:00Nous sortons d'une maladie aiguë, celle dont vous avez parlé, c'est l'inflation.
07:03Ça, c'est la bonne nouvelle.
07:05Alors maintenant, il est temps de s'occuper activement de nos deux maladies chroniques, un peu dans la durée.
07:11En France, nous avons trop de dettes et nous n'avons pas assez de croissance.
07:15Et muscler l'économie française, la capacité de production de nos entreprises, c'est la façon de répondre à pas assez de croissance.
07:22Ça veut dire l'école et les compétences.
07:24Ça veut dire les simplifications qu'attendent les entrepreneurs et les Français.
07:28Ça veut dire, bien sûr, l'innovation et l'intelligence artificielle.
07:32Ou pour prendre un dernier exemple, la transition climatique et énergétique.
07:36Tout ça, on le trouve dans le rapport que M. Draghi...
07:39C'est ce que j'allais vous dire.
07:41C'est à peu près ce que dit la note de M. Draghi, qui est au fond assez alarmiste,
07:46qui parle d'une Europe fragile et menacée,
07:49et qui insiste sur deux points.
07:51Il y a trop de normes, honnêtement, ça on peut l'appliquer à la France,
07:54et pas assez d'investissements.
07:56Je suis totalement d'accord.
07:58Je crois que ce que M. Draghi dit pour l'Europe vaut aussi pour la France.
08:01Il y a d'autres propositions aussi dans le rapport Draghi,
08:04mais moi j'insiste beaucoup effectivement sur cette prolifération des normes,
08:07la lutte contre la bureaucratie.
08:09Ça, j'ai l'impression que ça fait dix ans que tout le monde en parle, de simplifier.
08:12Si vous me permettez quelque chose, Apolline de Malherbe,
08:14sur notre scène publique, il faudrait qu'on parle un peu moins
08:18et qu'on agisse un peu plus.
08:20Et en matière de simplification, je ne dis pas que c'est facile à faire,
08:23mais il y a une énorme attente de nos concitoyens ou des PME.
08:28Alors chaque norme prise individuellement, elle est justifiée,
08:31elle correspond à des bonnes intentions.
08:33Mais ce qui ne va pas, c'est leur accumulation, c'est insupportable.
08:37Le débat politique actuel est-il à la hauteur de ce que vous êtes en train de me décrire ?
08:41Là-dessus, non.
08:42Soyons clairs, sur tout ce dont on parle, ces réformes de long terme,
08:46pour muscler l'économie française,
08:48l'application à la France du rapport Draghi dont vous parliez,
08:51on n'en a pas parlé du tout dans le débat électoral en mai ou en juin,
08:56et on n'en parle pas du tout aujourd'hui.
08:59Et je crois que c'est d'autant plus dommage, c'est très important,
09:02mais en plus là-dessus, il y a probablement un consensus qui est possible.
09:06La droite et la gauche sont globalement d'accord pour simplifier,
09:10pour réduire les normes et pour se mettre autour de la table pour le faire ensemble ?
09:14Si vous me permettez une remarque qui n'est pas économique,
09:17Apolline de Malherbe, sur le climat post-élection.
09:19Je crois qu'au fond, il y a deux attitudes possibles.
09:22Et nous avons vu deux attitudes depuis début juillet.
09:25Il y a une attitude gagnante, c'est que nous, Français,
09:27on a su s'unir pour étonner le monde avec les Jeux Olympiques.
09:30Formidable succès à l'étranger.
09:33Et puis il y a une attitude qui est perdante,
09:35c'est que les divers camps politiques sont tentés aujourd'hui de nous rejouer Astérix.
09:39Je ne sais pas si vous vous souvenez d'un album culte,
09:431970, Astérix et la Zizanie.
09:46Jules César n'arrive pas à vaincre les Gaulois,
09:49et donc il envoie un diviseur très intelligent,
09:52Tullius Détritus, pour diviser les Gaulois.
09:55C'est qui Tullius Détritus aujourd'hui ?
09:57Je ne vise personne en particulier,
10:00mais je crois que ce que les Français attendent aujourd'hui,
10:03c'est des compromis pour l'action, pour des résultats concrets.
10:07On n'a pas besoin de lignes rouges qu'on se jette à la figure.
10:11On n'a pas besoin de posture personnelle.
10:13On n'a pas besoin de remède simpliste en disant,
10:15il n'y a qu'à faire ça et je refuse absolument.
10:18Regardez ce qui se passe dans les autres pays.
10:20Vous savez, mon métier me met beaucoup en contact avec mes collègues européens.
10:23Ils sont un peu étonnés de ce qui se passe en France aujourd'hui.
10:26Pourquoi dans les autres pays, quand il n'y a pas de majorité au Parlement,
10:29ce qui arrive, on se met autour d'une table au lendemain des élections
10:32et on discute du fond et on discute du programme
10:36avant de s'attribuer les postes.
10:38Vous parlez à l'instant de la question des lignes rouges, des conditions.
10:42Et là, depuis 24 heures, autour de la question
10:44de la hausse ou de la baisse des impôts,
10:46chacun y va de ses conditions et de ses lignes rouges.
10:49Mais avant de m'intéresser aux politiques,
10:51je voudrais savoir, vous, gouverneur de la Banque de France,
10:53les impôts, la hausse des impôts, pourquoi pas ?
10:56Ça, c'est l'autre maladie de l'économie française.
10:59On a parlé de pas assez de croissance,
11:01muscler notre capacité de production des entreprises.
11:03Par contre, on a trop de déficits et de dettes.
11:06Là aussi, je crois qu'il faut savoir faire des compromis.
11:09Je vais évoquer deux pistes de compromis très simples.
11:12La Banque de France est indépendante.
11:14Elle n'est pas liée au moindre mouvement politique.
11:16Elle essaye de servir l'intérêt général.
11:18Au passage, ce n'est pas la Banque de France qui décide sur le budget,
11:20mais elle peut donner son expertise.
11:22Le premier élément de compromis,
11:24d'abord, je vais dire très clairement,
11:26il faut revenir sous 3% de déficit.
11:28Pas seulement à cause des règles européennes,
11:31mais parce que c'est notre intérêt national.
11:33On s'oriente vers 6%.
11:35On s'oriente en tout cas vers plus de 5%.
11:38C'est beaucoup trop.
11:40Les 3% de déficit, c'est ça qui nous permettra
11:42de commencer à stabiliser notre fameuse dette publique.
11:44Simplement, on ne peut pas le faire en trois ans.
11:47D'ici 2027, ça n'est pas réaliste.
11:49Ce n'est pas réaliste, cette promesse de certains,
11:53on va passer sous les 3% dans les trois ans.
11:55Là, encore une fois, évitons les lignes rouges
11:57et les remèdes simplistes.
11:59Par contre, je crois qu'en cinq ans, c'est jouable.
12:01C'est jouable, ça veut dire un effort
12:03d'à peu près 20 milliards par an de redressement.
12:06Et puis, le deuxième compromis possible,
12:09c'est comment on fait ces 20 milliards.
12:11Je ne dis pas que c'est facile, mais c'est possible.
12:13Et là aussi, il y a ceux qui disent
12:15qu'il faut tout faire par des économies de dépenses
12:17et ceux qui disent qu'il faut faire essentiellement
12:19par des hausses d'impôts.
12:22Je crois qu'il faut les deux.
12:24Il faut les deux dans la bonne proportion.
12:26Il faut principalement des économies de dépenses.
12:29Pourquoi ? Parce que notre problème principal,
12:31pourquoi est-ce que nous avons tous ces déficits
12:33et cette dette ?
12:35C'est parce que nous dépensons nettement plus
12:37que nos voisins.
12:39Nous avons à peu près le même modèle social
12:41que nos voisins européens.
12:43Quand je dis l'ensemble des dépenses,
12:45c'est l'État, mais c'est aussi les dépenses locales
12:48pour certaines d'entre elles
12:50Je crois qu'il faut être plus efficace
12:52sur les dépenses de fonctionnement
12:54et on peut faire des progrès là-dessus.
12:56Et puis, il faut préserver
12:58les dépenses d'avenir, l'éducation,
13:00le climat, etc.
13:02Donc la bonne proportion, probablement,
13:04c'est que trois quarts de l'effort
13:06soit fait par des économies de dépenses.
13:08Mais un effort juste et partagé,
13:10là aussi, tout le monde se met autour d'une table
13:12et tout le monde prend sa part de l'effort.
13:14En gagnant notamment en efficacité,
13:16mais ça veut dire qu'il reste un quart
13:19On ne peut probablement pas tout faire
13:21par les économies de dépenses,
13:23même si c'est le remède prioritaire.
13:25Et exclure complètement les hausses d'impôts,
13:27je crois que ce n'est pas sage,
13:29ce n'est pas réaliste.
13:31Si on doit faire un effort fiscal,
13:33je le dis pour probablement environ
13:35un quart de l'effort,
13:37un quart seulement.
13:39J'insiste sur les proportions
13:41parce que le débat est parti très fortement
13:43depuis hier sur les hausses d'impôts.
13:45Si j'ai bien compris, ça veut dire 5 milliards par an.
13:47Ce sera au futur gouvernement
13:49et au Parlement de l'apprécier.
13:51Et là, je crois qu'il serait très souhaitable
13:53de ne pas toucher aux classes moyennes
13:55et aux PME parce que
13:57ça augmenterait leur attentisme
13:59ou l'incertitude dont nous parlions tout à l'heure.
14:01Par contre, il ne faut pas exclure un effort
14:03exceptionnel et raisonnable
14:05de certaines grandes entreprises
14:07ou de certains gros contribuables
14:09par exemple tant qu'on n'est pas revenu
14:11sous les 3% de déficit.
14:13Ça peut être un effort temporaire.
14:15Je crois que ces impôts-là seraient supprimés.
14:17Ces impôts supplémentaires seraient supprimés
14:19quand on repasse sous les 3%.
14:21Ça veut dire pendant encore quelques années.
14:23Je crois qu'en tout cas, c'est une piste possible.
14:25La décision appartient aux dirigeants politiques
14:27et moi, j'invite vraiment à ce qu'on dépasse
14:29la zizanie actuelle
14:31pour se mettre au travail
14:33pour des résultats concrets pour les Français.
14:35Je crois que les Français, ils se sont mobilisés
14:37en masse au moment de l'élection. Ils attendent
14:39des solutions et des résultats.
14:41François Villeroy de Gallo, si on parle aussi
14:43de perspectives, il y a dans la politique
14:45aujourd'hui deux marqueurs très forts, la question des impôts
14:47et la question des retraites, de la fameuse réforme
14:49des retraites. Faut-il ou non abroger ?
14:51Mettre sur pause ?
14:53Est-ce que là aussi, dans la question des incertitudes
14:55vous parliez de l'épargne, il semble qu'une partie
14:57des Français soient mis à épargner aussi parce qu'ils ne sont pas
14:59complètement sûrs qu'ils vont toucher la retraite
15:01à laquelle ils imaginaient avoir un droit ?
15:03Est-ce que le gouvernement
15:05peut, doit,
15:07toucher à la question des retraites ?
15:09Je crois que c'est vraiment une question très politique
15:11qui sera au gouvernement et j'ajoute à chaque fois
15:13et au Parlement.
15:15Parce que nous avons une démocratie qui est devenue
15:17davantage parlementaire.
15:19Et là on entend, il y a diverses
15:21pistes sur la table. La seule chose que
15:23je suis obligé de dire, c'est que
15:25si on revenait en arrière
15:27partiellement sur la réforme des retraites
15:29et il y a un certain nombre d'aspirations
15:31qu'il faut prendre au sérieux
15:33là-dessus, mais si on revient en arrière
15:35on augmente les dépenses
15:37et donc on augmente la taille de l'effort
15:39les 20 milliards deviennent davantage.
15:41Pourquoi ? Parce que les 20 milliards, ils sont avant
15:43d'éventuelles dépenses nouvelles.
15:45Et donc si on faisait certaines dépenses nouvelles
15:47pour les retraites ou pour d'autres choses,
15:49il faudra faire plus que 20 milliards
15:51d'économies de dépenses et d'éventuelles hausses d'impôts.
15:53Il n'y a pas
15:55de remède magique
15:57en économie. Chacun d'entre nous,
15:59tous ceux qui nous écoutent gèrent leur budget.
16:01La France, c'est la même chose.
16:03Sur la question des taxes sur les super-profits,
16:05est-ce que vous, gouverneur de la Banque de France,
16:07vous êtes capable
16:09de donner une définition de ce que pourrait être
16:11un super-profit ?
16:13Ce n'est pas très facile.
16:15Parce que c'est normal que les entreprises
16:17fassent des profits, c'est d'ailleurs ça qui leur permet
16:19de s'imposer dans la compétition internationale,
16:21d'investir, d'innover.
16:23Les super-profits,
16:25est-ce que c'est plus de profits que d'habitude ?
16:27Ça, c'est constaté dans certains secteurs
16:29certaines années, mais en général
16:31c'est temporaire.
16:33Par contre, je le dis,
16:35pour certaines grandes entreprises,
16:37on pourrait imaginer un effort exceptionnel
16:39tant qu'on n'est pas revenu sur les 3 %.
16:41Je dis aussi qu'il doit être raisonnable,
16:43c'est-à-dire qu'il doit être proportionné
16:45pour ne pas peser sur la croissance économique.
16:47Est-ce que vous avez des regrets ?
16:49Sur la question, notamment,
16:51vous le disiez tout à l'heure,
16:53des taux, les taux de court terme dont vous
16:55tenez pour le coup les manettes,
16:57pour lutter absolument contre
16:59l'inflation, vous les avez
17:01très nettement augmentés.
17:03Est-ce qu'a posteriori,
17:05vous ne vous dites pas quand vous voyez que l'inflation baisse,
17:07elle baisse, mais elle baisse aussi, parce que tout simplement
17:09la conjoncture internationale, les prix de l'essence,
17:11les prix d'électricité baissent,
17:13c'est pas tant par
17:15ce coup de volant d'un côté ou de l'autre.
17:17Est-ce que vous ne regrettez pas ça ?
17:19Si, je crois vraiment que la Banque Centrale
17:21a contribué à la baisse
17:23de l'inflation.
17:25Je crois qu'il faut se souvenir, il y a 2 ans,
17:27l'inflation augmentait
17:29de partout, on était à 7 %
17:31d'inflation en France
17:33et il y avait la critique inverse
17:35à la Banque Centrale qui est, mais pourquoi
17:37vous n'agissez pas, comment vous laissez
17:39l'inflation déraper, etc. Donc je crois
17:41qu'on a réagi, mais je crois qu'on a réagi
17:43de façon proportionnée.
17:45On a peut-être oublié, mais la précédente
17:47vague d'inflation dans les années 70,
17:49on a attendu trop longtemps et du coup
17:51il a fallu monter les taux d'intérêt
17:53à 2 chiffres, au-delà de 10 %.
17:55Là, on a monté à 4.
17:57Et l'autre signe que je donne, c'est qu'alors qu'en Europe
17:59ils sont montés à 4, aux Etats-Unis, ils sont montés
18:01à 5,5. On va voir
18:03la fédérale réserve américaine, la Banque Centrale
18:05américaine se réunit ce soir,
18:07va peut-être commencer la baisse des taux
18:09ce soir. Nous, en Europe, nous
18:11l'avons commencé début juin. Donc voyez qu'on
18:13essaye d'avoir une réaction proportionnée
18:15et je crois que le fait
18:17que cette politique monétaire ait été efficace
18:19contre l'inflation, ça correspondait
18:21à l'attente concrète de résultats
18:23des Français. Je voudrais qu'on dise aussi un mot
18:25de l'emploi et des salaires.
18:27Sur la hausse des salaires, ça,
18:29Michel Barnier dit que ça va être
18:31un de ses chantiers.
18:33Est-ce qu'il y a de la marge ? Est-ce que
18:35là aussi, vous vous dites, c'est important
18:37pour entraîner la croissance ? Est-ce que ça doit
18:39être une priorité ? Sur la hausse des salaires,
18:41je crois qu'il faut distinguer en France
18:43le SMIC qui, lui, est indexé sur l'inflation.
18:45Pour l'instant, ils disent que ce serait sans augmenter le SMIC
18:47contrairement au programme du NFA. Et c'est une bonne
18:49chose. Le gouvernement peut éventuellement
18:51décider d'un coup de pouce. Je crois qu'il doit être là aussi
18:53raisonnable pour éviter de peser sur les PME.
18:55Donc vous n'êtes pas du tout pour le SMIC à 1600.
18:57Je ne me prononce pas. Vous savez, la Banque de France
18:59est indépendante. Je le redis.
19:01Vous estimez que ce serait peut-être un risque, en tout cas,
19:03du point de vue de la...
19:05La plupart des autres salaires, c'est très important de le redire,
19:07sont négociés de façon décentralisée.
19:09C'est-à-dire dans chaque entreprise ou dans chaque branche.
19:11Et je crois que c'est une très bonne chose
19:13parce qu'on est au plus près de la réalité économique
19:15et du dialogue social. Ça doit se faire
19:17dans le dialogue social. Aujourd'hui, globalement,
19:19il y a modération des salaires
19:21en France. C'est une bonne nouvelle
19:23par rapport à l'inflation. Je ne sais pas si vous vous souvenez,
19:25il y a quelque temps, on craignait ce qu'on appelait la spirale
19:27prix-salaire. Les prix augmentent, les salaires
19:29augmentent, les prix réaugmentent, etc.
19:31Si l'inflation ne monte plus,
19:33il y aura moins de pression. Nous ne le voyons pas.
19:35Aujourd'hui, les salaires progressent en moyenne
19:37plus vite que les prix. Je crois que c'est
19:39une évolution favorable. Maintenant,
19:41il faut voir dans la négociation
19:43sociale ce qui est possible
19:45comme augmentation salariale au niveau de chaque entreprise.
19:47C'est la bonne nouvelle essentielle que vous nous annoncez
19:49ce matin, François Villeroy-Adgallo.
19:51Est-ce qu'un jour, je vous recevrai comme ministre
19:53de l'économie ? Écoutez,
19:55je suis très heureux à la Banque de France
19:57et je crois y être
19:59utile à l'intérêt général.
20:01Chacun a sa place.
20:03Merci François Villeroy-Adgallo d'être
20:05venu nous annoncer ce matin
20:07ce début de bonne nouvelle, même s'il reste de la prudence.
20:09On l'a bien compris. François Villeroy-Adgallo,
20:11gouverneur de la Banque de France
20:13sur RMC BFM TV. Il est 8h52.