• il y a 3 mois
Pour analyser le nouveau gouvernement, nos invités sont le constitutionnaliste Benjamin Morel, le journaliste politique Ludovic Vigogne (La Tribune Dimanche), et le politologue Jérôme Jaffré.

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Transcription
00:00Une équipe, point d'exclamation, maintenant au travail, nouveau point d'exclamation, c'est
00:05ce que tweetait hier le Premier ministre Michel Barnier en fin de journée, le gouvernement,
00:10son gouvernement se réunira pour un conseil des ministres demain lundi à 15h au palais
00:15de l'Elysée, analyse, décryptage, coulisses ce matin dans le Grand Entretien, vos questions
00:20chers auditeurs, vos réactions au 01.45.24.7000 et avec Marion Lourdes, nous accueillons plusieurs
00:27invités au micro d'Inter ce matin, Jérôme Jaffray, politologue, directeur du Centre
00:32d'études et de connaissances sur l'opinion publique, bonjour.
00:35Bonjour.
00:36Benjamin Morel, vous êtes docteur en sciences politiques, maître de conférences en droit
00:40public à l'université Paris Panthéon-Assas, vous êtes l'auteur du Parlement-Temple de
00:46la République de 1789 à nos jours, bonjour à vous.
00:50Bonjour.
00:51Et Ludovic Wigogne, on ne vous présente pas, journaliste à la Tribune dimanche et vous
00:55avez consacré de larges pages aux coulisses de la formation de ce gouvernement et tout
00:59à l'heure un édito à ce qui vous frappait particulièrement dans l'équilibre de cette
01:05composition, de cette alchimie toujours très fragile.
01:08Premier tour de table en quelques mots, qu'est-ce qui vous frappe le plus dans la composition
01:13de ce gouvernement barnier, Jérôme Jaffray ?
01:17Eh bien, il y a plusieurs choses qui sont marquantes et on ne peut pas toutes les citer
01:22à la fois d'abord, d'une certaine façon, c'est un gouvernement barnier-larcher, c'est-à-dire
01:29barnier évidemment le Premier ministre mais l'importance du Président du Sénat et du
01:33Sénat lui-même dans la constitution de ce gouvernement est frappante et sans précédent
01:40sous la Vème République.
01:41Le poids lourd du gouvernement c'est Bruno Retailleau qui était le Président du groupe
01:47parlementaire des Républicains au Sénat, le premier groupe au Sénat, il y a beaucoup
01:52de sénateurs qui rejoignent ce gouvernement, certes son curseur est déplacé vers les
01:59Républicains mais c'est beaucoup les Républicains du Sénat, c'est un peu curieux parce que
02:04le vrai chaudron et le vrai rendez-vous c'est l'Assemblée Nationale, c'est à l'Assemblée
02:09Nationale que la lutte va avoir lieu et deuxième point si vous me permettez, c'est aussi d'abord
02:15un gouvernement autour de Michel Barnier, il y a une structuration du gouvernement,
02:20une configuration qui se fait autour du Premier ministre, je suis frappé de constater par
02:25exemple que le ministère du Budget ou le ministère de l'Outre-mer aujourd'hui explosif
02:31on le sait bien sont directement rattachés au Premier ministre là à ma connaissance
02:36et sans précédent sous la Vème République, de même il y a-t-il une ministre Marie-Claire
02:41Hergé chargée de la coordination gouvernementale et directement évidemment rattachée au Premier
02:47ministre, habituellement c'est une fonction dévolue au ou à la secrétaire générale
02:51du gouvernement, là c'est au sein du gouvernement que ça se passe.
02:54On va rentrer dans le détail dans un instant, même question Benjamin Morel, qu'est-ce
02:58qui vous frappe le plus dans la composition de ce gouvernement tant attendu, je l'ai
03:03dit, en tout cas deux mois, deux mois et demi d'attente pour le connaître dans le détail.
03:08Oui, j'abonde dans le sens de ce qui a été dit, je rajouterai peut-être deux
03:11éléments, évidemment c'est un gouvernement plus à droite, ce qui s'entend eu égard
03:15à l'équilibre de la majorité parlementaire, on est passé d'une majorité macroniste
03:19que laissait vivre LR, en ne votant pas les motions de censure, à une majorité LR plus
03:24macroniste que laisse vivre le Rassemblement National, auquel cas il fallait envoyer des
03:29signaux à l'Assemblée Nationale, est-ce que ce sera stable, on verra, mais l'équilibre
03:32en témoigne.
03:33L'autre élément, c'est qu'on a évité les poids lourds, des poids lourds, des présidentiables,
03:37des gens qui pourraient faire de l'ombre à Michel Barnier, le menacer et pourraient
03:40créer des jalousies parmi ceux qui vont être les vrais patrons de ce gouvernement.
03:43Donc ce qui vous frappe, ce sont des absents ?
03:44Ce sont des absents, c'est-à-dire aujourd'hui où sont les vraies forces dans la vie politique,
03:49Gabriel Attal, Laurent Wauquiez, etc., ils sont essentiellement à l'Assemblée Nationale,
03:54la vraie force arrive à l'Assemblée Nationale et du côté de ce gouvernement, on essaye
03:59de maintenir la stabilité en n'envoyant pas des poids lourds qui feraient de l'ombre
04:03à ces poids lourds de l'Assemblée Nationale.
04:05Ludovic Vigogne ?
04:06Je vais choisir aussi l'absence de poids lourds et surtout de visages connus des Français.
04:09A Paris, Rachida Dati, je ne vois pas beaucoup de ministres qui sont vraiment identifiés
04:14dans l'opinion.
04:15Alors certes, ça peut être des cibles en moins quand le Rassemblement National menace
04:20à tout moment de censurer ce gouvernement, on voit d'ailleurs que les potentiels ministrables
04:25sur lesquels le Rassemblement National avait mis un veto, Xavier Bertrand par exemple,
04:31n'y sont pas.
04:32Mais ça peut être aussi une faiblesse pour Michel Barnier parce que les vents vont souffler,
04:38ils vont souffler fort.
04:39Et avoir des ministres solides, expérimentés, qui ont un capital politique, ça peut aider.
04:42Mais gouvernement à droite, très à droite, vous partagez l'analyse dans votre édito
04:45tout à l'heure, vous disiez que les macronistes occupaient quand même une large place dans
04:50ce gouvernement.
04:51Ils sont 18 sur 39, donc presque la moitié.
04:54Mais malgré tout, c'est vrai, ce qu'on voit d'abord, c'est l'arrivée des airs,
04:58parce que c'est la concrétisation de l'alliance entre la Macronie et les Républicains, et
05:04c'est un vrai changement par rapport à ce qui se passait depuis 7 ans, et encore plus
05:08depuis 2022.
05:09Et puis parce qu'aussi, il n'y a pas de figure de gauche, à part Didier Migaud, et
05:15c'est vrai que sur ce plan-là, alors que Michel Barnier avait quand même comme mission
05:20fixée par Emmanuel Macron de faire un gouvernement un peu de coalition allant de la gauche modérée
05:26à la droite, et bien là c'est quelque chose qu'il n'a pas réussi à faire.
05:30Jérôme Jaffray, je rebondis sur ce que disait Ludovic Wigogne, est-ce que d'après vous,
05:35ce nouvel exécutif, il reflète le résultat des urnes en juin dernier ? Par exemple, on
05:40entend Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, qui dénonce un « bras d'honneur
05:43à la démocratie ».
05:44Oui, c'est son péché bien sûr.
05:47On est assez loin du résultat des urnes, mais ce qu'il faut bien comprendre, et c'est
05:51toute la complexité de cette législature, c'est qu'aucun gouvernement ne reflèterait
05:57la réalité des urnes, parce que la réalité des urnes est fragmentée, qu'elle oppose
06:01les blocs entre eux, et que par définition, aucun bloc ne peut, même donc ce bloc qui
06:07s'est constitué d'alliances, l'héritier du macronisme et des républicains, évidemment,
06:12est largement minorité.
06:14Alors ça frappe, parce que les macronistes détenaient le pouvoir depuis sept ans et
06:18ont été battus.
06:19Emmanuel Macron a parlé de défaite, et que les républicains n'ont jamais fait un score
06:24aussi faible de toute l'histoire de la Ve République pour la droite modérée, aucun
06:29précédent, 6,5% des voix pour les républicains, et se retrouvent figure de proue du gouvernement.
06:35Du coup, évidemment, ça accuse la situation à un point extrême.
06:39Maintenant, d'un mot quand même, dans ce qu'a dit Ludovic Vigogne, deux choses peut-être
06:43très brièvement.
06:44D'abord, l'alliance macroniste LR, la différence par rapport à tout ce qui s'est passé, c'est
06:49qu'elle passe sous domination au gouvernement des républicains.
06:53Les macronistes, il y a des macronistes bien sûr, mais même la notion de macroniste commence
07:00à s'estomper.
07:01Gabriel Attal a joué un assez grand rôle dans le choix des personnes qui sont au gouvernement
07:07pour représenter ce courant, et on sait bien que maintenant, sa route diverge un peu de
07:11celle du président de la République.
07:12Justement, Ludovic Vigogne, avant de vous laisser réagir Benjamin Morel sur le centre
07:18de gravité politique, vous signez un papier dans la tribune dimanche intéressant parce
07:22qu'il raconte l'alliance improbable ou la rencontre improbable de deux figures qui sont
07:28absentes de ce gouvernement, Gabriel Attal et Laurent Wauquiez.
07:32Qu'est-ce que ces deux-là font ensemble et qu'est-ce que ça raconte de la composition
07:37très difficile de ce gouvernement ?
07:38Il y a clairement un axe entre Laurent Wauquiez et Gabriel Attal qui sont tous les deux présidents
07:44de leurs groupes respectifs à l'Assemblée Nationale.
07:47Ils s'étaient déjà entendus au mois de juillet pour se répartir les postes au moment
07:52des élections internes à l'Assemblée Nationale et ça avait fonctionné.
07:56Et là, on a bien vu qu'ils avaient marché de concert lors de la constitution de ce gouvernement
08:01en s'échangeant des informations, en se mettant d'accord pour demander cette semaine
08:07une réunion de la dernière chance à Matignon avec Michel Barnier où celui-ci réunirait
08:12toutes les parties prenantes susceptibles de participer au gouvernement.
08:15Et donc, c'est quelque chose qui va compter, c'est quelque chose avec lequel va devoir
08:19composer Michel Barnier et c'est vrai que c'est assez frappant, ça a frappé un peu
08:24beaucoup d'interlocuteurs dans l'écosystème politique cette semaine.
08:28Et les lecteurs de la tribune dimanche soir en l'occurrence ce matin.
08:31Ils visent tous les deux la prochaine présidentielle mais ils ont pour l'instant décidé de
08:35plutôt s'entendre plutôt que de s'affronter.
08:38Benjamin Morel, on parle de la composition apparemment difficile, délicate de ce gouvernement.
08:43Il y a un ministre issu des rangs de la gauche, puisqu'on parle aussi du reflet que ça
08:48peut avoir du résultat des urnes de juin dernier.
08:51Il y a un ministre qui s'appelle Didier Migaud qui va être garde des Sceaux.
08:55Est-ce que c'est une bonne prise ? Est-ce que c'est une caution ? Comment vous analysez
08:59les choses ?
09:00C'est une sorte de caution parce qu'il fallait « envoyer des signaux » notamment
09:03à la gauche de la majorité et au modem et c'est une caution qu'on ne met pas n'importe
09:06où.
09:07On le met à la deuxième place dans l'ordre protocolaire et dans un ministère de la justice
09:11qui est une forme de vis-à-vis avec Bruno Retailleau.
09:13Souvenez-vous, l'ancien couple Gérald Darmanin-Éric Dupond-Moretti, c'est assez classique.
09:17Ensuite, en effet c'est une caution de gauche mais l'ouverture à gauche a toujours été
09:23relativement fantomatique.
09:25C'est-à-dire qu'on ne peut pas demander l'impossible à Michel Barnier en la matière.
09:28Pour aujourd'hui, la gauche.
09:30Si jamais vous rentrez en tant que député de gauche dans ce gouvernement, il y a deux
09:34problèmes.
09:35Le premier élément, c'est que le nouveau front populaire a montré qu'il était très
09:37cohésif pour des raisons électorales liées au mode de scrutin.
09:41Si des socialistes ou des écologistes devaient tendre la main à ce gouvernement, ils se
09:44retrouveraient face à un insoumis dans leur circonscription et la gauche n'est pas assez
09:48forte pour passer les premiers tours en étant divisée.
09:51Mais ils étaient premiers aux élections ? Ils n'ont pas une majorité absolue mais ils
09:54étaient premiers ?
09:55Ils étaient premiers mais il faut que vous ayez une majorité.
09:57C'est-à-dire que, pour reprendre un peu la question que vous posiez à Jérôme Jaffray,
10:00quel est le signal de cette élection ?
10:02Je cite souvent un sondage YouGov qui est paru avant le premier tour des élections
10:05législatives.
10:0647% des Français voulaient faire barrage au NFP, 44% à Emmanuel Macron, 41% au RN.
10:12Cette élection a été un concours d'épouvantail.
10:14Et on dit souvent qu'il y a deux façons de concevoir le résultat, la volonté dans
10:18une élection.
10:19Soit on considère que les Français ont voulu donner un signal et adhérer à un programme
10:22politique lors d'une élection.
10:24En fait, pour une législative, c'est jamais tout à fait vrai.
10:27Prenez 2017.
10:28On dit que les Français ont voulu donner une majorité à Emmanuel Macron.
10:30Emmanuel Macron a en effet 60% des députés.
10:32Mais au premier tour, c'est 34% des votants, 17% des inscrits.
10:37Il y a un effet distordant du mode de scrutin.
10:39Qu'est-ce qu'on fait dans un régime parlementaire classique ?
10:41On fait des coalitions et ces coalitions font valoir pour chaque parti qui y rentre
10:46ses priorités et la volonté est liée à ce type de priorité.
10:50Donc on n'est ni dans une élection législative classique à la française où il y aura un
10:54signal, fût-il même artificiel, ni dans un modèle parlementaire classique à l'allemande
10:59ou à l'italienne où chaque membre de la coalition aurait fait valoir sa priorité.
11:04On est dans une forme de gouvernement par défaut.
11:06Tour de table rapide, justement, avant de donner la parole aux auditeurs.
11:10Ce gouvernement, il est fragile ou est-ce qu'il est parti pour durer ?
11:14Benjamin Morel.
11:15Ce gouvernement, il tient sur cinq personnes.
11:18Gabriel Attal, Edouard Philippe, Laurent Wauquiez, Marine Le Pen et François Bayrou.
11:25Ils veulent tous devenir président de la République.
11:27Pour l'instant, ils ont intérêt à ce que ça tienne, pour des raisons différentes,
11:30ils sont tous gagnants de ce système, mais nécessairement, naturellement, leur intérêt
11:35finira par diverger.
11:37Le jour où leurs intérêts divergeront, la vie de Michel Barnier sera compliquée.
11:40Jérôme Jaffray, fragile, solide, ce gouvernement ?
11:42Le gouvernement est faible et peut durer.
11:45C'est-à-dire qu'en d'autres termes…
11:47Il est faible, mais il peut durer.
11:48Voilà, en d'autres termes, c'est la conjugaison des difficultés qui crée une possibilité
11:54de survie un peu plus longue que ce qu'on pense.
11:57Pourquoi ? D'abord, il est faible politiquement pour toutes les raisons qu'on a analysées,
12:02mais je dirais quand même, par rapport aux questions qui ont été posées, que le clair
12:05accord entre les macronistes, l'héritage macroniste et les républicains, avec en plus
12:11une pincée de liotte au sein du gouvernement, fait que le total finit par représenter environ
12:16230 députés, et est vraiment supérieur du coup au nombre de députés du nouveau
12:21Front Populaire.
12:22En d'autres termes, c'est réellement maintenant la première coalition au Parlement, et je
12:26suis surpris que ce ne soit pas davantage mis en avant par les partisans macronistes
12:32et républicains dans le débat public.
12:33Alors, j'ai dit faible, mais peut durer, faible politiquement, car pas de poids lourd
12:38dans ce gouvernement.
12:39On l'a souligné, Benjamin Morel et Ludovic Wigon l'ont dit l'un et l'autre, mais
12:46du coup, sa faiblesse, d'abord Michel Barnier a intérêt à essayer d'en faire une force,
12:50c'est autour de lui que ça se capitalise, et deuxièmement Marine Le Pen, c'est elle
12:55et elle seule qui détient en réalité le bouton nucléaire pour faire sauter le gouvernement,
13:01et elle n'a pas intérêt à se mêler trop vite et trop tôt au nouveau Front Populaire,
13:06on le lui reprocherait en vue de 2027.
13:08D'autant plus qu'elle doit comparaître devant la justice dans une dizaine de jours,
13:11le 30 septembre.
13:13Marine Le Pen.
13:14Et puis, accessoirement, elle doit attendre que l'impopularité gagne Michel Barnier
13:19et ce gouvernement pour l'exécuter, laisser passer sans doute la période du budget en
13:24s'abstenant ou en ne votant pas une censure, en disant ce budget n'est pas bon, mais on
13:30ne veut pas le chaos institutionnel, et ensuite exécuter le gouvernement au début 2025,
13:36bref, le gouvernement pourrait voir 2025, ce serait la surprise.
13:40Pourrait voir 2025, solide, fragile en un mot, Ludovic Ligonnier ?
13:44Fragile, et le degré de faiblesse dépendra beaucoup de Michel Barnier, au niveau interne,
13:49s'il a une ambition réformatrice démesurée, il peut se mettre en danger, parce qu'on
13:53a vu par exemple que les questions migratoires sur lesquelles Michel Barnier veut avancer
13:57divisent déjà très fortement sa majorité relative, et puis au niveau externe, parce
14:02qu'on l'a dit, Marine Le Pen peut décider à tout moment du devenir de ce gouvernement,
14:08or moi ce qui me surprend beaucoup, c'est que Michel Barnier ne cache pas sa grande
14:13réserve sur la mise en place de la proportionnelle aux législatives, visiblement il est juste
14:18décidé à mettre en place un groupe de travail, mais il explique beaucoup, pour l'instant
14:21il n'y a pas de consensus, parce qu'il y a un vrai veto des Républicains, or c'est
14:25un point clé demandé par Marine Le Pen, qui a fait de la mise en place de la proportionnelle
14:31aux prochaines législatives, une de ses exigences premières, et si Michel Barnier ne va pas
14:35dans ce sens-là, il se met peut-être en grand danger.
14:38On file au Standard Inter avec de nombreux auditeurs qui s'interrogent sur ce que ça
14:41dit de l'état de notre démocratie, ce nouveau gouvernement Barnier.
14:45Bonjour Angelo.
14:46Oui, bonjour.
14:47Bienvenue sur Inter.
14:49Merci Inter, moi franchement, la situation me rend un peu schizophrène, je ne sais même
14:55plus comment agir, parce que l'issue de ce vote, ça fait résonner en moi tous les
15:00votes où on a dit non au traité européen, moi personnellement j'ai voté pour le NFP,
15:07et je veux garder quand même un regard critique sur ma propre famille politique, même si
15:12le responsable de tout ça est M. Macron, quand Lucie Castex aurait dû être choisie,
15:17mais cette espèce d'annonce en disant « mon programme, rien que mon programme » était
15:22une impessivité absolue et d'une évidence incroyable.
15:26J'en veux énormément aux politiques de manquer d'honnêteté.
15:30Ce Front National qui oublie sa campagne lamentable à travers un bordelat qui était
15:37incapable de défendre correctement son programme, et la droite maintenant qui n'a même pas
15:42de complexe à se réjouir alors qu'elle est le parti qui est arrivé en dernière
15:47élection.
15:48Je trouve que c'est encore Macron qui gagne sur ce coup-là.
15:51Merci Angelo pour votre témoignage, Benjamin Morel, cette méfiance irréparable envers
15:56les politiques, et on l'a entendu dans la question et dans l'intervention désespérée
16:00d'Angelo, c'est qu'elle concerne toutes les familles politiques.
16:04Elle concerne toutes les familles politiques et le côté très illisible, encore une fois,
16:07un, du résultat de l'élection et deux, de la politique qui va être menée risque
16:11de l'accroître.
16:12In fine, malgré tout, ça a été dit par Jérôme Jaffray tout à l'heure, celle qui
16:16peut le mieux tirer les marrons du feu, c'est probablement Marine Le Pen qui va envoyer
16:20des signaux très contradictoires mais en disant « si il y a un budget, si jamais
16:24il y a un gouvernement, eh bien mesdames, messieurs, les électeurs sont tristes, c'est
16:27grâce à qui ? C'est grâce à moi.
16:28Et à l'électeur de gauche, si jamais il y a un gouvernement centriste, c'est également
16:32grâce à moi.
16:33La prochaine fois, le front républicain, réfléchissez-y à deux fois, le budget va
16:36être intéressant.
16:37Lors du budget, il est assez probable que la gauche dépose une motion de censure, mette
16:40ses points qui vont être les points rouges, justifiant la motion de censure et celle
16:43qui fera ses courses, c'est Marine Le Pen, en disant « je censure si tel ou tel point
16:47figure dans le budget ». Et in fine, là-dessus, elle a une vraie bonne partition à jouer.
16:51Ludovic Wigand, à propos du budget et des grandes personnalités dont on a commencé
16:55à faire le tour, il y a Didier Migaud, il y a Bruno Retailleau et puis il y a ce nouveau
16:58casting à Bercy, les deux jeunes trentenaires, Antoine Armand à l'économie et aux finances,
17:04Laurence Saint-Martin au budget, 33 et 39 ans, ça veut dire que personne d'autre ne
17:08voulait y aller, c'est ça le signal ?
17:09Il y a eu des refus, c'est vrai, mais c'est aussi le choix, on l'a dit, de Michel Barnier
17:14de mettre à des postes clés des ministres qui n'ont pas forcément énormément de surface
17:20politique.
17:21Par exemple, Valérie Pécresse était plutôt partante pour avoir un grand merci quand elle
17:25a vu Michel Barnier il y a dix jours.
17:27D'autant qu'elle a déjà été à Bercy.
17:28Elle lui a dit, lui il a proposé le ministère des affaires étrangères, elle a dit que
17:32ça ne l'intéressait pas.
17:33En revanche, elle était partante éventuellement pour un grand merci et essayer de restaurer
17:38la crédibilité budgétaire de la France.
17:39Mais Michel Barnier ne l'a pas entendu de cette oreille, il ne voulait pas non plus
17:43de ministre trop puissant, on l'a dit, et d'ailleurs ça se voit à travers les périmètres
17:47ministériels.
17:48Ce sont à chaque fois des petits ministères plutôt découpés et qui lui permettent d'avoir
17:53la main en dernière ligne.
17:55D'ailleurs, certains regrettent qu'il n'y ait pas de ministère, ni de ministère délégué,
17:59ni de secrétariat d'Etat particulièrement en charge des questions du handicap.
18:05D'autres ont remarqué qu'il y avait une cinquième ministre de l'éducation nationale
18:10en à peu près deux ans.
18:12C'est vrai qu'il y a des curiosités dans ce gouvernement, mais le président de la
18:16République, c'est lui qui nomme.
18:18Quand Alexis Colère prend la parole sur le perron de l'Elysée, il annonce la composition
18:23du gouvernement.
18:24En prononçant ces mots, c'est le président de la République qui a nommé.
18:29Benjamin Morel, c'est un gouvernement barnier ou c'est un gouvernement Macron ?
18:34C'est un gouvernement essentiellement barnier, sauf dans quelques domaines où Emmanuel
18:37Macron a voulu maintenir ses billes.
18:39Mais il faut bien comprendre que la France est un vrai régime parlementaire en droit,
18:42et le président est tout puissant.
18:44En fait, il est un régime présidentialiste dès lors que le président est le chef de
18:50la majorité parlementaire.
18:51Ce n'est plus le cas.
18:52Et là, on a un gouvernement barnier, beaucoup teinté de Gabriel Attal et un peu teinté
18:58d'Emmanuel Macron.
18:59Ce sont vraiment les trois forces qui se sont prononcées.
19:01Et en effet, ça a été évoqué, il est probable que Gabriel Attal sur beaucoup de ministères
19:05est plus pesé que l'Elysée.
19:07Jérôme Jaffray, le nouveau ministre de l'économie et des finances Antoine Armand
19:11parle déjà aujourd'hui dans le journal du dimanche, il dit que dans le contexte budgétaire,
19:15exclure d'office certains prélèvements exceptionnels et ciblés ne serait pas responsable.
19:19Le budget, ça va être le dossier chaud sur lequel le gouvernement va tout jouer en fait ?
19:25Alors en tout cas, jouer une très très grosse partie bien entendu.
19:28Sa réussite sera de faire adopter le budget, ce serait une exceptionnelle réussite.
19:33Mais il y a toute une bataille à la fois politique, de communication et de préparation
19:39d'artillerie sur le budget qui est extrêmement importante.
19:42Probablement, le premier débat à engager, d'abord j'ai noté qu'Antoine Armand,
19:47dans son interview aujourd'hui, explique que les hausses d'impôts, ce n'est pas la bonne formule.
19:53Et en même temps, il dit ne pas les exclure.
19:56Les hausses d'impôts générales ne sont pas la bonne méthode, tout simplement parce que
20:00la préparation d'artillerie et de communication va probablement être d'abord de mettre l'accent
20:05sur quelles économies faire, quelles dépenses diminuer ou réduire les dépenses de l'État,
20:11les dépenses, les aides aux entreprises, les taxes qu'il faut revoir.
20:16– Vous conviendrez que ce n'est pas réjouissant pour un nouveau gouvernement ?
20:19– Il va y avoir d'abord ça et ensuite, un deuxième élément, vous avez raison,
20:23se posera la question de l'ajustement de l'effort demandé aux Français.
20:27Mais en bonne préparation d'artillerie, le gouvernement, logiquement,
20:30commencera d'abord par les économies à réaliser pour ensuite dire quels efforts demandons-nous.
20:36Et là, la logique, c'est effectivement de dire les efforts doivent être mieux répartis
20:42entre les Français, c'est la fameuse expression de Michel Barnier,
20:45plus de justice fiscale, il a déclaré, il employait la formule
20:49« je ne me l'interdis pas », une formule assez extraordinaire.
20:53Mais forcément, et par rapport au fait que les Républicains occupent une telle place
20:57au sein du gouvernement, il ne faut pas s'attendre à un grand soir fiscal
21:01vers les entreprises les plus profitables ou les contribuables les plus riches en France.
21:08– Merci Jérôme Jaffray, d'un mot Benjamin Morel, le Président de la République
21:11avait dit lors de ses voeux qu'il souhaitait un réarmement de l'État,
21:15est-ce que ce gouvernement répond à cette exigence ou à ce projet présidentiel ?
21:20– Alors ce gouvernement, il a d'abord pour objectif de survivre et de faire passer un budget,
21:24donc je crois qu'il ne va pas trop falloir lui en demander,
21:26s'il fait passer un PLF et un PLFSS, il aura déjà rempli son rôle.
21:30– Ludovic Wittgenstein sera le mot de la fin.
21:32– Oui, c'est vraiment la première mission de ce gouvernement,
21:35et d'ailleurs lors de la réunion qu'a tenue jeudi Michel Barnier
21:38avec les différents présidents de partis, c'est Édouard Philippe qui a le mieux sans doute
21:42résumé la feuille de route de Michel Barnier,
21:45c'est-à-dire qu'il lui a dit que c'était un gouvernement qui n'allait pas pouvoir faire grand-chose,
21:48qui n'allait pas devoir faire grand-chose,
21:50et que sa seule priorité ça devait être de faire passer le budget, effectivement.
21:53– Ce n'est pas très ambitieux, pas très excitant, mais on fait ce qu'on peut,
21:56mais c'est nécessaire qu'il fasse un rôle.
21:58Merci infiniment à tous les trois.

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