Dans Tout Public du mercredi 9 octobre 2024, Abou Sangare pour son rôle dans "L'Histoire de Souleymane", et Charlotte Chaffanjon présente son livre "Deux frères".
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00:00Et on commence Frédéric Carbone avec le film de la semaine où la fiction rejoint
00:06la réalité.
00:07A moins que ce ne soit l'inverse.
00:08Effectivement.
00:09Ce film c'est l'histoire de Suleyman de Boris Luchkin et c'est je dois dire assez troublant
00:13de se retrouver dans ce studio en face d'un acteur qui a reçu une récompense à Cannes
00:17pour son interprétation d'un jeune homme guinéen en situation irrégulière en France
00:22confronté à la dureté de l'ubérisation de l'économie et qui est lui-même sans
00:26papier qui a vu à plusieurs reprises ses demandes de régularisation rejetées et qui
00:30évidemment connaît la précarité extrême du travail dans ces circonstances.
00:35Bonjour à vous Abou Sanghari.
00:36Bonjour.
00:37Bienvenue sur France Info.
00:39C'est même vertigineux ces jours-ci parce que le film il sort aujourd'hui, on va évidemment
00:43en parler et demain je crois vous faites une nouvelle demande de régularisation.
00:48Exact.
00:49Tout à fait.
00:50Demain à 9h32 j'ai un rendez-vous à la préfecture de la Somme pour déposer ma quatrième
00:55demande de régularisation.
00:57Et pourquoi jusqu'à présent vous l'avez donc refusé ?
01:00Je ne sais pas, en tout cas, les arguments que je reçois dans les réfus, la plupart,
01:10la première fois c'était qu'il s'est rentré en France en étant en situation irrégulière
01:16et qu'il ne s'est pas rentré avec un visa étudiant.
01:19Après la troisième, enfin deuxième fois, c'était parce que je suis en contact avec
01:24ma mère en Guinée.
01:26Voilà, c'est les arguments que je reçois dans mes réfus.
01:31Et vous avez fait des études en France ? Vous êtes arrivé, je crois, sans avoir jamais
01:34été à l'école dans votre pays ?
01:36Non.
01:37En France vous avez fait des études ?
01:38Voilà.
01:39Vous êtes diplômé ?
01:40Je suis arrivé le 5 mai 2017 à Paris, je suis parti à Amiens directement, j'ai demandé
01:47à être reconnu comme mineur, ça a été rejeté.
01:50J'ai eu des associations comme l'ABSP, comme RSF qui m'ont ensuite hébergé dans des familles
01:58d'accueil, m'inscrit dans des écoles, j'ai commencé mes études en seconde bac pro,
02:03maintenance véhicule transport routier, j'ai passé mon CAP, j'ai passé mon bac.
02:07Alors, pour passer en BTS, il fallait le faire en apprentissage comme je n'avais plus l'autorisation
02:13de travailler.
02:14Du coup, je me suis inscrit en BTS MVP, ce qui veut dire voiture lésée.
02:21Et vous pourriez avoir un travail, un garagiste est prêt à vous employer, mais il ne peut
02:25pas en raison de votre situation ?
02:26Exactement.
02:27Vu ma situation, le garage s'est proposé à m'embaucher un contrat CDI, mais le problème
02:33c'est que nous sommes tous bloqués par l'autorisation de travail.
02:36Et on en vient au film, c'est presque pour ça que vous avez répondu à une annonce
02:41cherchant des acteurs pour ce rôle, parce que sinon, vous seriez resté au droit de
02:46garage, vous iriez travailler, vous n'auriez sans doute pas répondu à cette demande.
02:49Exactement.
02:50Alors, ce qu'il faut dire, moi, depuis 2017, j'ai fréquenté des associations comme
02:54ça.
02:55Chaque événement qui s'est déroulé dans des associations, on m'appelait, je venais
02:59assister.
03:00C'est comme ça qu'on m'a appelé pour me parler de l'arrivée de Boris Lojkin et
03:05sa directrice Aline Delbus.
03:07Ils nous ont reçu, on était au moins 25 jeunes Guénéens.
03:11Ils nous ont fait passer des entretiens de 5 à 10 minutes.
03:14Après, moi, c'était comme vous venez de le dire, c'était très, très, très pressé.
03:16Ce jour, je suis mécanicien poilou, j'ai dépanné un monsieur ce jour à Longo et
03:21il fallait que je me retourne vite.
03:24Après, sipé après, j'ai reçu un appel en me disant de revenir faire un deuxième
03:31essai, ce qui n'était pas possible pour moi en ce moment précis, puisqu'il fallait
03:35que je libère le monsieur.
03:37Après, bon, finalement, je suis arrivé à 17h à la gare d'Amiens, on est parti
03:42dans un parc juste auprès de la gare d'Amiens.
03:45Ils m'ont fait dire, on a fait deux ou trois essais.
03:47Après, il faisait tard, ils ont pris les trains quelques deux ou trois jours.
03:53On m'a rappelé pour me proposer de venir à Paris, mais cette fois ci, pour une vraie
03:56répétition avec un autre acteur qui joue dans le film qui s'appelle Calilou, qui
04:01court, qui fait la livraison.
04:03Après, on a eu cette journée de répétition, je suis rentré à Amiens, une semaine, deux
04:08semaines, on m'a rappelé pour me dire qu'ils veulent que je sois le héros du film.
04:14Alors ça, on s'est rencontré comme ça, mais pour moi, ce n'était pas facile.
04:19J'imaginais quand on voit le film à Thomas Estrachi, on comprend pourquoi Boris
04:22Luschkin a choisi à bout s'engarrer.
04:26Il n'est pas garagiste dans le film, c'est livreur à domicile, mais il y a tout ce
04:31qu'on vient d'entendre dans le film.
04:32Oui, sous les mains, on le découvre et la caméra ne le lâchera plus dans les rues
04:36de Paris, le plus souvent le soir, roulant à toute vitesse, à vélo, se faufilant tant
04:40bien que mal entre voitures et piétons.
04:41Il est Guinéen, sans papier, on apprend rapidement qu'il a un rendez-vous crucial 48 heures
04:46plus tard avec l'administration pour l'obtention d'un titre de séjour et il emprunte le
04:50créneau de livreur de nourriture d'un collègue qui lui paye une partie de ce qu'il gagne
04:54en liquide.
04:55On est littéralement, Frédéric, dans une double course contre la montre, celle pour
04:58livrer ses repas à temps à des clients souvent odieux ou indifférents et ces heures
05:02précieuses au cours desquelles Souleymane doit apprendre par cœur et dans le meilleur
05:06français possible, une histoire inventée, celle d'un réfugié politique pour faciliter
05:11sa régularisation.
05:12Effectivement, à bout sans garer, vous avez sans doute joué facilement ça.
05:17Enfin, évidemment pas, mais vous savez de quoi il retourne quand vous jouez ce rôle-là.
05:25Ce qui frappe quand on le voit, c'est à quel point vous êtes invisible auprès des
05:29gens que vous livrez et devoir toujours être poli, avoir le sourire, on ne sait jamais.
05:34Ça, c'est mon éducation, ça, c'est depuis mon enfance, c'est quelque chose, en tout
05:38cas, c'est quelque chose que j'ai trouvé bien parce qu'aujourd'hui, pour communiquer
05:43avec les gens, il faut d'abord être poli pour pouvoir s'adresser aux assignants, ce
05:48n'est pas faisable.
05:49Il faut aussi être poli quand les volissés vous interpellent parce qu'on ne sait jamais
05:52ce qui peut se passer après.
05:53Ça, c'est obligatoire.
05:54Il faut être poli sinon après, c'est autre chose.
05:57Mais il y a une urgence permanente pour tout, que ce soit pour livrer, est-ce que je vais
06:02arriver deux minutes en retard ou pas, pour trouver un abri le soir ou quand on va dans
06:05n'importe quel rendez-vous administratif.
06:07C'est tout.
06:08C'est tout ça qui compte.
06:09En fait, dans ces films, c'est comme vous venez de le dire, c'est tout ça qui compte
06:13le temps.
06:14Le Suleyman, il n'a plus que deux jours pour déposer sa demande d'Asie, ce qui lui permettra
06:20en gros d'être en liberté, c'est-à-dire d'être libéré en prison.
06:26Parce qu'aujourd'hui, vous savez, quand on n'a pas de papiers et surtout quand on est
06:30sous le quitter ici en France, la meilleure des choses, c'est de rester à la maison.
06:34C'est vrai que c'est pour ça que j'ai choisi Amiens.
06:37En Amiens, honnêtement, il n'y a pas ces ordres de contrôle comme les frics qui sortent
06:42dans les rues pour contrôler les sans-papiers.
06:44En Amiens, il n'y a pas ça.
06:45Tu peux sortir du moment où tu ne fais pas de, désolé le terme, du moment où tu ne
06:49fais pas de conneries, du moment où tu restes positif.
06:52En Amiens, tout se passe très bien.
06:54A Paris, c'est plus compliqué ?
06:56C'est plus compliqué.
06:57Et à Cannes, on se demande, même quand on est à Cannes, qu'est-ce qui peut m'arriver ?
07:00Alors, c'est la surprise que j'ai eue à Cannes, en gros, moi qui me cachais pour pas
07:07que les policiers me voient et quand je suis arrivé à Cannes, j'avais des policiers
07:10qui m'ont entouré, je me suis dit, là, ici, c'est un autre monde parce que ce n'est
07:17pas du tout pareil auquel j'ai vis.
07:20On va avoir en ligne quelqu'un qui vous connaît bien et que vous connaissez bien à Boussangaré
07:25que je remercie d'ailleurs d'être en ligne avec nous.
07:28Vous avez parlé d'ailleurs de Réseau Éducation Sans Frontières qui vous a accompagné dans
07:32ce département de la Somme.
07:34Bonjour, Sybille Luperce.
07:35Oui, bonjour.
07:36Vous l'avez suivi, le parcours, il a immédiatement un grand sourire à Boussangaré quand il
07:42vous entend.
07:43Ce parcours, vous l'avez suivi, vous pouvez témoigner à quel point ce qu'il nous a raconté
07:47demande de la détermination, de l'effort, de la volonté quand on arrive en France sans
07:52avoir aucune éducation, s'intégrer, avoir ses diplômes comme ça.
07:56Oui, et moi, je voudrais vraiment féliciter Abou sur sa ténacité, le sérieux qu'il
08:05a mis dans ses études, qui est un point commun à tous ces jeunes qui viennent en France,
08:10mineurs ou jeunes majeurs, qui ont une volonté à toute épreuve pour suivre leur scolarité
08:17et c'est le parcours d'Abou qui a quand même réussi à avoir un CAP et un bac professionnel
08:23et qui a réussi à décrocher un apprentissage qu'il n'a pas pu mener Abou parce qu'il
08:29n'a pas eu un titre étudiant et après, il y a quand même une entreprise qui lui
08:33a proposé une promesse d'embauche, un contrat de travail et cette entreprise l'accompagne
08:40encore pour la troisième fois pour une demande de titre de séjour salarié.
08:45Donc, si vous voulez, il a coché toutes les cases de l'intégration au niveau scolaire.
08:49L'avenir Abou Sangaré, justement, c'est, je ne sais pas si c'est le rêve, mais un
08:55autre film ou c'est avoir ce boulot dans ce garage à Amiens avec des papiers où il
09:00a écrit « Vous êtes français ». Alors moi, là, maintenant, j'aime le cinéma,
09:05mais ce n'est pas mon rêve de faire le cinéma.
09:07Moi, mon rêve a toujours été d'être mécanicien, poids lourd, ce qui me plaît, c'est de rendre
09:12service aux gens.
09:13C'est vrai que le cinéma, on rend service aux gens parce qu'on montre aux gens les
09:16choses qui sont cachées, qu'on ne les voit pas.
09:19Mais moi, mon rêve, ça reste toujours dans le cadre de la mécanique.
09:23Je suis mécanicien poids lourd, c'est ce que je connais.
09:26S'il faut s'exprimer, c'est sur la mécanique que je peux m'exprimer.
09:29Et des personnes comme Abou Sangaré, vous en connaissez, j'imagine, des dizaines,
09:36Sibyle Luperce ? Oui, il y a beaucoup d'Abou.
09:40Je dis beaucoup de jeunes qui sont en France et qui veulent s'intégrer.
09:44Donc, ils suivent des études, ils suivent des formations.
09:48Les professeurs les soutiennent parce qu'ils sont très souvent très sérieux et très
09:53motivés.
09:54Et tous ces jeunes, malheureusement, ils n'obtiennent pas de titre de séjour parce que, par exemple,
10:01pour une demande salariée, il ne suffit pas d'avoir la formation.
10:04Très souvent, la préfecture demande de l'ancienneté professionnelle.
10:08Et comment avoir une ancienneté professionnelle quand on vient tout juste d'avoir son diplôme,
10:14son CAP ou son bac pro ? En fait, c'est impossible.
10:17Et leur élan est brisé en plein vol et c'est extrêmement dommage parce que des entreprises
10:22qui font confiance à ces jeunes, il y en a beaucoup et elles sont motivées pour les
10:26embaucher.
10:27Il n'y a toujours pas la chance d'avoir un premier rôle dans un film comme alternative
10:30à ces travaux-là.
10:31Oui, Mathéo ?
10:32Non, juste parce qu'il y a l'histoire évidemment du personnage, l'histoire de notre invité
10:36et le film, parce que vous avez dit quelque chose à l'instant, vous avez dit que le cinéma,
10:40c'est pour montrer des choses qui sont cachées.
10:42Et l'une des forces du film, c'est qu'en fait, ça donne corps à des choses qui parfois
10:47nous sont abstraites.
10:48Même nous qui sommes journalistes dans une chaîne d'information continue, on entend
10:52parler de l'ubérisation de la société, mais on ne sait pas vraiment ce que ça veut
10:55dire.
10:56On entend parler des sans-papiers, de leurs courses pour avoir des papiers.
10:59Le film donne corps à ça, donne chair à ça, montrant un monde où il y a un peu de
11:05solidarité encore, mais où tout se déshumanise un petit peu, que ce soit le travail, l'administration,
11:11et ça, ça le restitue extrêmement bien.
11:13Tout à fait.
11:14Et le deuxième personnage principal du film, après vous, c'est sans doute Paris.
11:17On est un apnée avec vous dans Paris.
11:20Il vous tardait de rentrer à Amiens après ?
11:22Oui, ce soir.
11:23Mais pendant le tournage ?
11:24Oui, pendant le tournage, il y avait deux semaines que j'ai rentré, mais c'était pas
11:32comme ça.
11:33J'ai rentré quelques fois le samedi, le dimanche, mais à la fin du tournage, on tournait
11:39tous les jours.
11:40Ça veut dire que même les week-ends, nuit, des fois comme jour.
11:42Vous savez, j'imagine que le ministre de l'Intérieur a dit récemment que l'immigration
11:50n'est pas une chance pour la France.
11:53Vous avez l'impression que la France peut être une chance pour vous à Boussangaré
11:57encore ?
11:58Pour moi, personnellement, oui.
11:59Ça a déjà eu un sens parce que la France m'a permis de passer sur les plateaux télévisés
12:05comme aujourd'hui.
12:06C'est que la radio, mais c'est bien aussi !
12:08Mais c'est très bien aussi !
12:11Mais quand même, là, vous dites, avec ce que j'ai fait, avec ce film, avec mon parcours,
12:19ils ne peuvent pas me refuser une nouvelle fois ?
12:20Honnêtement, je ne me dis pas ça.
12:24Toute l'appréciation dépend de la préfecture.
12:26C'est elle qui décide.
12:28C'est elle qui saura si je mérite un titre de séjour cette fois-ci ou pas.
12:34Mais honnêtement, sur ce point-là, je n'ai aucun commentaire à faire.
12:37Mais vous acceptez la réponse, quelle qu'elle soit ?
12:39Oui, j'accepte la réponse.
12:41Mais bon, je n'ai pas de commentaire là-dessus.
12:43Le cinéma, qu'est-ce qui vous a le plus surpris dans ce tournage ?
12:48Alors moi, ce qui m'a le plus surpris dans le cinéma, c'est le travail d'équipe dans
12:52un premier temps.
12:54L'équipe à qui j'ai travaillé, en fait, c'est une équipe qui a, ça dit, non seulement
13:00organisé les choses à l'avance, ce qui nous a beaucoup aidé sur le tournage, et
13:04aussi c'était une équipe très réduite, très professionnelle.
13:08Ce qui me plaisait dedans, c'est que nous tous, ça dit, tout le monde s'est engagé
13:14pour un seul but, ça dit, avoir une bonne scène à la fin.
13:17Chacun s'occupe de son matériel, les ingénieurs s'occupent de leur son, la caméramanne
13:22s'occupe de la caméra, Boris Luskin, lui, il est là pour que le show se passe bien,
13:29les assistants sont là pour le travail, personne n'est tout au poste de l'autre, et le soir,
13:36nous n'avons qu'une seule réponse, une bonne scène pour toutes, et ça, ça m'a beaucoup
13:40marqué.
13:41C'est le cas !
13:42Allez-y, on parlait d'aller vite, d'aller vite le voir, profitez-en !
13:47L'Histoire de Suleymane qui sort aujourd'hui, film de Boris Luskin, merci infiniment à
13:54Boussangaré d'être passé par le studio de France Info, on vous souhaite d'autres
13:58films et d'autres boulots en France.
14:00Merci à vous également, merci à tous.
14:02Et tout public continue, dans un instant sur France Info, on va parler d'un ouvrage, celui
14:06signé par la journaliste Charlotte Chafonjon, qui est également avec nous dans ce studio.
14:1113h47, un passage par votre fil info, Claire Chekaglini.
14:1560 milliards de dollars montant estimés des dégâts que devrait engendrer le passage
14:20de 1000 tonnes en Floride, une somme qui devrait déclencher une hausse des tarifs de la réassurance.
14:25L'ouragan de catégorie 5, c'est-à-dire la plus élevée qui soit, devrait atteindre
14:29ce soir ou demain matin la baie de Tampa aux Etats-Unis.
14:3234 départements en vigilance orange, essentiellement des pays de la Loire aux Ardennes, la tempête
14:37Kirk va déverser en un jour des pluies équivalentes à un mois d'intempéries.
14:41À la veille de la présentation du budget, des critiques continuent d'émaner du bloc
14:45central.
14:46Après les flèches décochées par Gabriel Attal et Gérald Darmanin, Christophe Béchut
14:50d'Horizon s'inquiète.
14:51Pour l'ancien ministre de la Transition écologique, la baisse d'un milliard et demi
14:54d'euros du fonds vert dans le budget 2025 est un mauvais signal.
14:57Quatre voitures de police incendiaient ce matin à Cavaillon dans le Vaucluse.
15:01La façade du commissariat a également été dégradée par les flammes.
15:04Dominique Pellicot est resté en prison aujourd'hui au repos en raison d'un problème de santé.
15:09Le procès de Mazan se poursuit malgré l'absence du principal accusé.
15:12Il comparaît à la cour criminelle du Vaucluse pour avoir drogué sa femme pour qu'elle soit
15:16violée par des dizaines d'hommes.
15:18Les Turcs, bientôt évacués du Liban, en Cara, s'apprêtent à rapatrier demain 2000
15:23de ces ressortissants.
15:24Deux navires de la marine turque ont été spécialement affrétés.
15:27En Ukraine, l'armée russe revendique avoir repris le contrôle de deux villages.
15:31Ces localités se trouvent dans la région de Kursk.
15:39Et c'est encore une histoire de jeunesse française dont il est question à présent
15:46dans tout public.
15:47Frédéric Carbone, celle de deux frères aux talents artistiques immenses et au même
15:51destin tragique.
15:52Absolument.
15:53Et ceux de parents aussi confrontés pour toujours au mystère de ces disparus.
15:57C'est aussi celle d'une journaliste qui a voulu redonner vie à lumière à ses parcours
16:01au-delà d'un fait divers qui a tant fait parler parce que l'un de ces deux jeunes
16:04hommes était une vedette de plus belle la vie.
16:07Bonjour Charlotte Chaffanjon.
16:08Bonjour.
16:09Vous publiez donc deux frères aux éditions des arènes.
16:12Récits, enquêtes, démarches très personnelles aussi.
16:15Donnons donc d'abord leur nom.
16:16Marouane et Bilal Bereni, l'aîné acteur de la série française la plus populaire
16:21et le cadien virtuose du street art, un graffeur mondialement réputé.
16:26A dix ans d'intervalle, ces deux frères sont donc retrouvés morts, circonstances différentes
16:31mais après des semaines de disparition l'un comme l'autre.
16:34Oui c'est ça.
16:35Bilal, le plus jeune, le cadet disparaît à Détroit en 2013, fin juillet 2013 et effectivement
16:44on met huit mois à identifier son corps, à lui appeler, voilà exactement il a été
16:49assassiné dans des circonstances assez obscures, il y a eu un procès, quatre jeunes ont été
16:55identifiés et arrêtés mais les circonstances exactes sont encore assez méconnues et Marouane
16:59Bereni pour le coup sa disparition a été assez médiatisée au mois d'août 2023 parce
17:03qu'effectivement c'était un des comédiens vedettes de la série plus belle la vie et
17:08lui disparaît aussi dans des circonstances obscures après un accident qui l'a causé,
17:15un délit de fuite exactement et il est retrouvé lui dix semaines plus tard, effectivement
17:18il s'est suicidé.
17:19C'est ça qui vous fait vous plonger dans cette histoire familiale, deux frères presque
17:24jumeaux mais qui sont les deux versants presque d'une même pièce.
17:28Oui effectivement, le point de départ, je commence à travailler pour mon journal Libération
17:31sur la disparition de Marouane Bereni et à l'époque c'est un peu l'histoire d'un délit
17:35de fuite après une soirée alcoolisée en boîte de nuit, un comédien qui disparaît
17:39un peu lâche et en fait en commençant à travailler sur cette disparition je commence
17:44à dialoguer avec ses parents, je découvre l'existence de ce frère qui en réalité
17:48est en fait assez connu notamment évidemment par les amateurs de street art mais un peu
17:52plus largement.
17:53Il y avait eu de la presse sur son travail en 2011, il est parti en Tunisie pour documenter
17:59la révolution, il est parti en Laponie, il est parti dans un camp de réfugiés, il
18:03est parti aux Etats-Unis.
18:04Une forme de radicalité ? Jamais je ne me laisserais attaper par le système ?
18:07Tout à fait, il était lui dans une forme de radicalité, il était pour la révolution,
18:12c'est-à-dire que tout un tas de choses qu'on va tous penser en étant jeune, voilà il faut
18:16renverser le système, etc.
18:17Lui il allait vraiment au bout de la démarche, d'ailleurs il ne voulait pas gagner d'argent
18:19sur son travail.
18:20C'est pour ça qu'il va à Détroit, la ville du capitalisme qui tombe.
18:24C'est tout à fait pour ça qu'il va à Détroit et donc moi je découvre effectivement l'existence
18:27de Bilal en travaillant sur la disparition de Marouane et en fait je me rends compte
18:30en parlant avec Mourad et Martine qui sont leurs parents, qui sont des personnes assez
18:35extraordinaires avec leurs amis, leurs collègues, que la disparition de Marouane est en fait
18:40intimement liée à la disparition de son frère qui l'adorait, dix ans plus tôt, et
18:46en fait à cette quête de ce frère dont il n'arrivait pas à faire le deuil parce
18:52que c'était une personnalité quand même assez écrasante, Bilal Bereni, qui est devenu
18:57une légende dans ce milieu du street art, notamment d'ailleurs parce qu'il refusait
19:01les offres.
19:02Il a refusé l'offre du centre Pompidou, il a refusé les offres des galeries.
19:06L'antigière, il allait taguer Giard, il avait même envie de taguer Giard.
19:10Mais il y a infiniment de culpabilité en fait chez le grand frère.
19:13Il y a une culpabilité je pense qui est inhérente au fait d'être l'aîné et de ce sentiment
19:19de devoir protéger.
19:20C'est pour ça que j'ai trouvé ça aussi intéressant à creuser, parce qu'en fait
19:23ce sont des thématiques qui sont très universelles.
19:25C'est la question de la fraternité, c'est la question du rapport au deuil, c'est aussi
19:29la question de la parentalité, jusqu'où on laisse la liberté à ses enfants, ce qui
19:33est à la fois indispensable et à la fois un questionnement permanent pour n'importe
19:38quel parent de dire il faut les éduquer, il faut les aimer, il faut tout leur apporter,
19:44c'est la culture, la vie de famille joyeuse et en même temps les laisser partir.
19:49Et donc Marouane qui a aussi ce rapport-là à son frère effectivement est dans une forte
19:53culpabilité.
19:54Il y a peut-être un point, comment on voit à quel point ils sont différents ? Je vais
19:57peut-être dire une banalité, mais c'est aussi une évidence.
20:00Les deux, à leur façon, ils cherchent quand même leur place.
20:03C'est-à-dire que Marouane, il est dans Plus belle la vie, il est une vedette, il adore
20:07ça, mais est-ce qu'il n'aimerait pas être un peu plus comme Bilal ? Bilal, quelle est
20:11ma place là-dedans ? Est-ce qu'ils n'ont pas ça ?
20:13Ces deux frères-là.
20:14Moi j'ai trouvé ça très intéressant de travailler sur ces deux portraits qui se construisent
20:18quasiment en miroir et en admiration et jugement.
20:22Plus belle la vie, il faut voir ce que c'est Plus belle la vie.
20:24C'est assez intéressant comme objet d'ailleurs culturel à étudier parce qu'il y a une forme
20:28de mépris d'ailleurs, d'une hélice intellectuelle, culturelle.
20:31Au début normalement, un peu moins après.
20:32Voilà, un peu moins à la fin.
20:34Mais en tout cas, quand même les acteurs de Plus belle la vie, beaucoup me disent avoir
20:36ressenti ça d'ailleurs.
20:37Mais en même temps, au pic de la diffusion sur France 3, il y a 12 millions de personnes
20:43par semaine, cumulées, jusqu'à 7 millions par soir qui regardent Plus belle la vie.
20:47Donc ce sont des vrais vedettes populaires.
20:50Et Marouane, il est presque le pilier.
20:52Et Marouane, c'est un des piliers.
20:53Oui, pilier et un charisme fou.
20:55C'est le personnage d'Abdel Fédala, c'est un des piliers de la série.
20:58Il est tout le temps à l'antenne, quasiment tout le temps à l'antenne.
21:00Et donc son frère, forcément ça le fascine un peu parce que son frère justement, lui,
21:04les paillettes, cette espèce de monde de plastique, c'est tout ce qu'il rejette tout en adorant
21:11son frère.
21:12Et Marouane voit son petit frère passer sa vie dans les rues de Paris, la nuit, sur les
21:17toits, dans les cuves, à dessiner sur des murs, à voyager les mains dans les poches,
21:22à refuser de gagner le moindre centime, parce que gagner de l'argent, c'est perdre sa liberté.
21:26C'est un personnage assez fascinant.
21:29Oui, il est assez fascinant.
21:31Vous avez évoqué les parents, parlons-en, parce que forcément, quand on lit ça, les
21:36parents, on ne les pas, ils trouvent que je le suis, on se dit forcément, même si on
21:40ne cherche pas d'explication, le mystère, il est là, forcément, il y a quelque chose
21:43qui dysfonctionne, quelque part, et bien non, c'est absolument l'inverse.
21:47Les parents sont, comme vous le disiez, accompagnés, tout en veillant, c'est exactement ça.
21:53C'est ça, moi je pense que c'est même en réalité l'inverse d'un dysfonctionnement,
21:57c'est-à-dire que sur le papier, c'est exactement ce dont on aspire à être, je pense que beaucoup
22:01de parents aspirent justement à réussir à faire que ces enfants soient heureux, joyeux,
22:07c'est aller au bout de leurs envies, au bout de leur art aussi, au bout de leur créativité,
22:12ce qui est le cas des deux, c'est-à-dire que Marlon, il a envie d'être acteur, il
22:15devient comédien, il est accompagné dans cette démarche-là.
22:17Le père a créé un théâtre, met en scène, chante, est un artiste, et donc accompagne
22:26son fils, ce n'est pas évident d'arriver en disant je vais être comédien, franchement
22:29je pense qu'il y en a beaucoup qui ont envie, pas beaucoup qui réussissent, mais ils accompagnent
22:32ça.
22:33Et Bilal, moi je vais dessiner sur les murs et partir avec mon sac à dos en Tunisie pendant
22:39la révolution.
22:40Mais tout est accompagné de manière extrêmement intelligente, mais effectivement que ça comporte
22:44aussi une forme de risque, en tout cas en ce qui concerne principalement Bilal, et donc
22:48moi je trouve que c'est quasiment un modèle de perfection, mais évidemment qui est confronté
22:52au drame de Détroit, qui est un moment où l'aventure, enfin une trébuche, c'est un
22:57euphémisme, mais qui, j'ai presque envie de dire qu'est-ce que ça, on peut parler
23:02de destin.
23:03C'est peut-être un petit peu...
23:04On peut, mais...
23:05Oui, en tout cas pour les parents, il y a toujours cette interrogation, forcément, vivre avec,
23:09vous l'écrivez un peu pour les parents ce livre ?
23:10En tout cas, moi, ce sont des gens qui m'ont, enfin, comment dire, je ne sais pas si je
23:19l'écris pour eux, mais en tout cas j'ai trouvé que c'était des personnes assez extraordinaires
23:22et oui, quelque part, probablement que je l'écris pour eux, c'est une discussion qu'on
23:25a beaucoup eue ensemble, parce que même moi je me disais pourquoi on se voit, pourquoi
23:28on se parle, et en fait je pense qu'eux, il y avait quelque chose à réparer dans l'image
23:31qu'il y avait eue, des deux faits divers, une espèce de truc un peu trash comme ça
23:37et en fait c'est beaucoup plus compliqué que ça et beaucoup plus beau que ça en réalité.
23:40Et avec l'idée que le mystère reste, mais la lumière, elle revient peut-être entre
23:43eux ?
23:44La lumière, je pense qu'elle n'est jamais partie, la lumière, en réalité, par justement
23:48cette forme d'intelligence assez innée.
23:50Merci beaucoup, Charlotte Charpent-Jean, votre livre Deux Frères, publié aux éditions
23:54des Arènes.
23:55Je cite un autre livre, parce que vous en parlez aussi dans Deux Frères, le livre de
23:59Judith Pérignon, là où nous dansions chez Rivage, parce que c'est là toute l'histoire
24:03de Détroit.
24:04Oui, c'est passionnant.
24:05Et de Binelle-Bérine.
24:06Et la fin de Binelle-Bérine.
24:07Merci beaucoup.
24:08Merci à vous.
24:09Et on vous lit tout l'ourge dans les colonnes de Libération pour l'actualité politique.
24:12Et pas que, pas que politique.
24:14Merci beaucoup.
24:15Merci beaucoup, Charlotte Charpent-Jean, merci à vous Frédéric Carbone, pour tout
24:20public qui revient évidemment demain entre 13h30 et 14h.