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Les chroniqueurs du Cercle débattent autour d'un film sortant en salles ou en diffusion sur CANAL+
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Transcription
00:00Dans Miséricorde d'Alain Giraudy, un jeune homme interprété par Félix Kizil revient dans le village où il a été boulanger
00:07pour l'enterrement de son ancien patron et s'installe quelques jours chez sa veuve, jouée par Catherine Fraud.
00:13Quelques jours, mais déjà trop de jours pour le fils du boulanger.
00:18Vincent cherche à faire déguerpir Jérémy de chez sa mère, où il loge depuis l'enterrement de son père, le boulanger justement.
00:27Il va se montrer de plus en plus insistant. Par exemple, il va se faufiler la nuit dans la chambre où dort Jérémy,
00:32et le réveiller de façon brutale à coup de question. Il va essayer de le traquer comme un animal dans les bois lorsqu'il y fait sa balade.
00:38Donc il y a comme ça un genre de contentieux latent entre les deux personnages.
00:43Les retrouvailles sont assez tendues et on tient là le point de départ de ce thriller pastoral qui a des faux airs de théorème,
00:51qui puise à la fois du côté de la sitcom, mais aussi de la tragédie grecque, et dans lequel les points de tension érotiques poussent comme des champignons à l'automne.
01:01Et c'est une saison vraiment que Ghirodi avait envie de filmer. C'est un film absolument déconcertant, il désarçonne.
01:10Il est mis en lumière par Claire Maton. Juste avant de vous montrer l'extrait, je le contextualise très rapidement,
01:15parce que les décors reviennent souvent dans le film de Ghirodi. On retourne toujours au même point, aux mêmes endroits.
01:20Donc là on est chez Walter, un ami de Vincent, et Jérémy rend visite à Walter un peu en cachette. On y va.
01:28Alors on est à un moment du film en fait où les motivations des personnages sont encore assez troubles,
01:34aussi troubles en tout cas que le pastis qu'étaient en train de boire Walter et Jérémy.
01:39Et c'est Vincent donc qui va interrompre leur tête à tête.
01:45Voilà Vincent. Et Vincent depuis que Jérémy est revenu, il ne tient pas en place, mais physiquement.
01:52On est quasiment dans un plan fixe, vous allez voir, mais Vincent est comme un lion en cage.
02:04Jérémy est derrière le mur, caché. C'est une partie de cache-cache, tout commence comme ça.
02:10Et évidemment, on nous montre les réactions, la réaction physique que provoque la présence de Jérémy.
02:34Il l'aime tous ce connard, c'est une phrase très importante dans ce film.
02:41Parce que c'est un conte philosophique qui parle d'amour, et l'amour dans ce film, c'est à la fois un ravissement et un châtiment.
02:48On a reconnu à l'écran Jean-Baptiste Durand, les chiens de la casse, quel est le lien entre les deux réalisateurs ?
02:54Peut-être une attention au personnage, une attention à les regarder en face sans avoir à les juger.
03:01Un film de Guy Rody, parce que ça n'a l'air de rien quand on voit un extrait comme celui-ci,
03:06tu l'as très bien présenté, tu as montré vraiment l'atmosphère du film, c'est quand même une langue particulière.
03:10Il faut le dire aux spectateurs, c'est une langue particulière.
03:13C'est un ton particulier, c'est une façon de dire les mots, il y a l'accent, il y a une façon un peu molle de dire les choses.
03:20Il y a du désir qui monte mais qui n'est jamais véritablement assouvi, et donc ça ne fait que monter.
03:27On est dans un climat pastoral, on est sous un soleil, sous la nuit, c'est une langue très particulière.
03:33Mais ce que j'adore, c'est que c'est extrêmement accueillant.
03:36J'ai l'impression que ça ronronne, c'est mou, c'est un peu doux.
03:40Il y a quelque chose comme ça que j'adore.
03:43Guy Rody, c'est un ton très particulier.
03:47Vous êtes d'accord avec ça ?
03:49Dire que c'est un ton particulier, oui absolument.
03:51Un peu thriller, porno rural ?
03:55Un neurotype justement.
03:58Il y a un grossement chabrolien mais qui est quand même tellement pasolinien.
04:01Et puis surtout, à la sauce, Guy Rody, c'est vrai qu'il y a cette langue et puis il y a ce que disait aussi Abba,
04:07c'est-à-dire qu'il fait pousser le désir.
04:10Et le désir est à la fois trivial et subversif.
04:15Et c'est ça qui...
04:17L'érotisme des corps.
04:19Tout est érect dans le film.
04:21Le champignon est érectile si vous voulez.
04:23Et puis c'est quand même marrant.
04:25Il faut le dire.
04:26Il faut le dire parce que c'est très drôle.
04:27Mais oui, c'est très drôle.
04:28Je voudrais le dire aux gens peut-être qui n'auraient vu que la bande-annonce
04:30qui, à mon sens, appuie un peu trop le champignon sur le mystère
04:33parce que le film est aussi authentiquement étrange et marrant.
04:37Mais pourquoi ? Il est très drôle.
04:39On rit parce qu'il faut voir aussi le rapport avec ce titre, Miséricorde.
04:43Tout d'un coup, il y a le désir et donc la trivialité
04:46qui naissent dans un lieu qui est un peu moche,
04:48où les habitations sont un peu en train de se décrépire,
04:51où les liens sociaux se délitent.
04:52Et tout d'un coup, ça crée de la tension, du bordel, de l'amour, de l'excitation.
04:57Et tout ça est un mélange tellement humain, tellement étrange
05:00et que tout d'un coup, la photo de Clermont-Thon peut passer
05:03de ses descriptions un peu tristounes à des trucs incroyablement excitants.
05:07Je crois qu'on rit aussi parce que moi, j'ai eu l'impression de voir
05:09une comédie de boulevard en fait, où tout le monde est amoureux de tout le monde.
05:13Voilà, c'est ça.
05:14On n'oublie pas un amoureux, mais c'est ça.
05:16Mais tout en voyant Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat en 87
05:20puisqu'on a un abbé.
05:22On ne va pas dire que Satan s'attend là.
05:25Un abbé va croiser comme ça sur son chemin un jeune homme.
05:30Pourquoi pas la personnalisation du diable ?
05:32Ce qui est très beau aussi, je trouve qu'il filme avec une certaine naïveté
05:36et donc une certaine frontalité.
05:38Il y a un motif, tu disais qu'il revient souvent, la forêt, etc.
05:41Mais il y a la chambre à coucher.
05:43Mais il passe son temps dans la chambre à coucher.
05:46Soit le lit conjugal, soit la chambre d'adolescent.
05:49Et le presbytère.
05:51C'est quand même l'un des personnages les plus intéressants.
05:55Meilleur curé de 2024.
05:56Parce qu'on n'a pas parlé du prêtre.
05:58Il y a un prêtre.
05:59En soutane.
06:00En soutane.
06:01Et l'abbé est libertaire.
06:02L'abbé évidemment aime son prochain, mais il aime aussi de très près Rémi
06:06pour lequel il développe une obsession un peu comme Vincent.
06:09Et c'est pour ça qu'on parlait de théorie.
06:11L'amour s'en retour.
06:12Il apparaît toujours dans le contre-champ quand on ne s'y attend pas.
06:14Alors parlez-moi de la forêt un petit peu.
06:16Parce qu'il se passe beaucoup de choses dans cette forêt.
06:18Comment il la traite cette forêt, ces sous-bois ?
06:20C'est un lieu magique.
06:21C'est à la fois un lieu de règlement de compte.
06:23Un lieu où on va assouvir par exemple les rivalités, les combats.
06:27C'est un lieu où on va cultiver.
06:29Et puis c'est un lieu de révélation.
06:31On révèle où sont les champignons.
06:32Et derrière les champignons, il y a d'autres choses.
06:35Et le curé est très fort pour aller aux champignons.
06:37On le voit là.
06:38Il a le nez.
06:39Il veut voir à travers le prêtre.
06:41Frère Simon, qu'est-ce que vous voulez dire ?
06:43La forêt, c'est un lieu amoral.
06:45Ça n'est pas le lieu de l'église.
06:47Ça n'est pas les chambres à coucher.
06:49Ça n'est pas les salons où on se retrouve.
06:51Il faut quand même dire aux spectateurs que la moralité,
06:53il la pousse très loin à la fin.
06:55Très, très, très loin.
06:56C'est-à-dire qu'à un moment donné,
06:57il y a quand même le défi presque qui est fait de ce lieu accueillant
07:00jusqu'où il va nous emmener
07:02et comment on va réagir vraiment à la toute fin du film.
07:05C'est la question de la miséricorde.
07:07C'est la question de la miséricorde.

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