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La colère gronde dans les campagnes: les agriculteurs prêts à en découdre avec le gouvernement. Regardez le sentiment de Pierrick Horel, président des Jeunes agriculteurs, éleveur bovins.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 13 novembre 2024.

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Transcription
00:00RTL Matins, avec Amandine Bégaud et Thomas Soto.
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud qui sème les promesses en l'air en février, récolte la colère en automne.
00:10Nos agriculteurs sont fatigués, lassés, parfois désespérés, alors qu'il prévoit de nouvelles mobilisations.
00:15Amandine, vous avez choisi ce matin d'inviter Pierrick Aurel, c'est le nouveau président des jeunes agriculteurs. Bonjour et bienvenue.
00:21Bonjour, et bienvenue sur RTL. La FNSEA appelle à une reprise de la mobilisation à partir de lundi.
00:29Vous serez à leurs côtés. A quoi va ressembler cette mobilisation ?
00:33Eh bien écoutez, cette mobilisation, elle est là d'abord pour exprimer la colère des agriculteurs qui est toujours présente.
00:39Parce qu'on se rappelle tous du printemps dernier et des mobilisations agricoles.
00:44Et on est là en fait aujourd'hui, donc à partir de lundi matin, sur les ronds-points de l'Europe, sur les boulevards européens,
00:54pour dénoncer cette incohérence européenne qui a été déclenchée notamment par l'annonce du Mercosur par les pouvoirs publics.
01:01On va revenir sur les raisons bien sûr de cette grève, sur le Mercosur notamment.
01:05Mais est-ce qu'il faut s'attendre à des blocages d'autoroutes par exemple, comme on l'avait connu l'an dernier ?
01:10On se souvient, l'île de France avait été complètement paralysée. Est-ce que ça va être le cas ?
01:15Non, là l'idée vraiment, c'est pas d'embêter, d'enquitiner les Français, parce qu'on est tous aussi un petit peu dans le même bateau.
01:23On a besoin d'avoir un peu de clarté. Et là l'idée, c'est d'aller chercher des messages européens.
01:28Clairement, on ne veut pas prendre les citoyens français en otage, parce que personne ne le comprendrait.
01:34Et c'est clairement pas notre objectif aujourd'hui, donc pas de blocages d'autoroutes prévus.
01:38À la Bruxelles en revanche, ça ne s'est pas exclu ?
01:41En effet, on a un sujet autour de Bruxelles, qu'on partage avec les collègues européens, notamment sur le sujet du Mercosur,
01:47mais plus globalement sur les mesures de rétorsion chinoise, notamment sur le cognac, qui peuvent aussi s'appliquer à d'autres pays européens.
01:54Également aussi sur le sujet du mode de financement de la politique agricole commune, quelques sujets européens brûlants,
02:00parce qu'on voit aussi le discours de Madame Van der Leyen, qui a changé depuis les élections européennes.
02:04Mais sur ces ronds-points, on va avoir quoi ? Des tracteurs ? Ça va durer plusieurs jours, des semaines s'il le faut ?
02:10Écoutez, aujourd'hui, nous, on va partir lundi prochain en mobilisation, c'est une mobilisation qu'on compte inscrire sur plusieurs jours.
02:18Maintenant, certains agriculteurs n'ont pas fini les chantiers de récolte et de préparation aussi de semis pour l'année prochaine.
02:25Et donc, on a besoin d'être un peu souple sur les modalités de cette action.
02:29Mais on veut d'ores et déjà, avant la fin de l'année, s'inscrire dans une volonté de mobilisation, et on la fera durer le temps qu'il faut pour que nos messages soient entendus.
02:37Et l'idée, c'est quoi ? De monter en puissance ? C'est-à-dire de bloquer de plus en plus s'il le faut ?
02:42Écoutez, bloquer, ce n'est pas sur la table à l'heure actuelle, au moment où on se parle.
02:47Je le redis, ce n'est pas de prendre les Français en otage, et donc, c'est de faire passer les messages.
02:52Et donc, on est dans une forme de démonstration avec l'Europe et évidemment le gouvernement sur les mesures qui ont été annoncées
03:02et qui ne sont pas encore perçues directement dans les cours de ferme. Donc, pour l'instant, on s'en tient à ça.
03:06Alors justement, ces mesures annoncées, on se souvient de ces centaines de millions d'euros qui avaient été annoncées par le gouvernement de Gabriel Attal.
03:14Michel Barnier, quand il est arrivé à Matignon, a de nouveau annoncé une enveloppe.
03:18J'imagine qu'il y a beaucoup de nos auditeurs qui se disent que les agriculteurs ont eu de l'argent.
03:23Alors, c'est écrit, mais ce n'est pas perceptible en fait.
03:27C'est-à-dire que vous ne les avez pas touchés ?
03:28Tout à fait. Ce qu'on se dit là, c'est des choses qui sont écrites notamment dans le projet de loi de finances qui est discuté,
03:34qui sont inscrites dans une loi d'orientation d'avenir qui, je le rappelle, est là pour défendre l'installation et la transmission à la base,
03:39et on a voulu y mettre beaucoup de choses.
03:41Mais en fait, tout ça s'inscrit, c'est dit, la ministre l'a dit,
03:44mais l'agriculteur dans sa cour de ferme, lui, il ne perçoit pas ça.
03:47Et c'est ça en fait le problème, c'est ça qui crée cette frustration, cette exaspération.
03:51C'est qu'on entend beaucoup de paroles publiques dire qu'on avance, et c'est vrai,
03:55mais concrètement, l'agriculteur, lui, dans sa ferme, il ne touche pas ça, et donc il ne le perçoit pas.
04:00Il n'a pas touché, certains n'ont pas touché un euro de ce qui avait été promis.
04:03Certains n'ont pas touché un euro de ce qui avait été promis.
04:05Donc quand Gabriel Attal dit 80% a été versé, c'est faux ?
04:09Non, 80% a été annoncé, mais 80% n'a pas été touché.
04:12Et en fait, au-delà de demander de l'argent, ce qu'il faut bien que nos auditeurs comprennent,
04:17c'est qu'on a besoin de mesures de simplification qui sont à la main du gouvernement,
04:21qui sont, je veux dire, obtenables tout de suite, des décrets, tout simplement.
04:27Et bon, la ministre, ça fait 50 jours qu'elle est là, elle a une bonne pile de travail sur le bureau.
04:33Mais voilà, nous, ce qu'on demande, c'est que ça aille beaucoup plus vite sur ces mesures-là.
04:37Pas forcément de l'argent, même s'il y a des situations dans certains coins de France
04:40qui ont besoin de trésorerie tout de suite.
04:43L'autre gros point au cœur de la contestation, c'est ce Mercosur,
04:46ce traité de libre-échange entre l'Europe et les pays d'Amérique latine.
04:50C'est la goutte d'eau, ça, qui a fait déborder le vase ? C'est comme ça que vous le diriez ?
04:53Tout à fait, c'est ce qu'on dit.
04:54Ça fait depuis 2019 que le Mercosur a pris la forme qu'on connaît aujourd'hui.
04:59Nous, ce qu'on ne peut pas comprendre, ce que les agriculteurs ne comprennent pas,
05:03et on appelle les citoyens finalement à être témoins de ça,
05:07c'est qu'on nous demande d'avoir un standard de production en France et en Europe
05:11qui n'est pas du tout au niveau de ce qu'on va importer dans les assiettes des consommateurs
05:16demain de ces pays du Mercosur.
05:18Je pense notamment à la volaille qui est sous hormone de croissance.
05:21C'est interdit depuis une vingtaine d'années sur l'Europe.
05:25Et en fait, c'est ça. Nous, on nous demande d'avoir un standard de production
05:28et quand on n'y arrive pas, on fait venir des produits d'ailleurs
05:31et ça met en danger la population.
05:34Mais B.A.Orel, vous êtes vous-même éleveur bovin,
05:36qu'est-ce que ça risque, ce traité, s'il est signé, de changer pour vous ?
05:39Moi, ça sera de la viande en moins que j'ai à vendre
05:42puisque tout simplement, on fera venir 200 000 tonnes de viande de fidelote,
05:47issues de fidelote, et qui ne sont pas du tout de la viande de vache
05:51qui a pâturé dans les prairies françaises, dans le bocage du centre de la France, tout simplement.
05:56Ce Mercosur, Emmanuel Macron l'a dit à plusieurs reprises,
05:58il n'en veut pas, en tout cas, pas en l'étant.
06:00Ça veut dire qu'a priori, vous êtes sur la même longueur d'onde.
06:03C'est quoi, un double discours ou il vous ment en fait ?
06:07Non, non, je crois pas. Je pense qu'on est alignés.
06:08Seulement, on a besoin que le président de la République le fasse de manière plus forte.
06:12Je pense qu'une prise de parole d'Emmanuel Macron à Bruxelles,
06:15c'est quand même un symbole fort, un symbole fort aussi pour les autres pays.
06:19Aujourd'hui, on a besoin de ramener certains pays pour avoir une majorité de blocage à Bruxelles.
06:26Est-ce que vous demandez ce matin à Emmanuel Macron de se mouiller un peu plus ?
06:30Exactement. On demande à ce qu'il prenne la parole publiquement à Bruxelles pour le symbole,
06:34à la veille de l'ouverture du G20 qui, je le rappelle, est en discussion le 18, le 19 et le 20 au Brésil.
06:40Pierrick Aurel, au cœur de cette colère, et vous l'évoquiez, il y a toujours la question du revenu agricole.
06:46Thierry Cotillard, le patron d'Intermarché, a annoncé hier qu'il refusait d'entamer les négociations commerciales
06:50avec les industriels laitiers, notamment Lactalis pour 2025,
06:54tant qu'ils n'auront pas conclu d'accord avec les producteurs de lait.
06:57Est-ce que c'est une bonne chose ou c'est un coup de com ?
06:59Ça va dans le bon sens. J'espère que ça ne sera pas qu'un coup de com.
07:02Et croyez-moi, on va y veiller, parce que quand on est en mobilisation aussi,
07:06on a besoin de regarder cette question du revenu, ça fait trop longtemps qu'elle perdure.
07:10Moi, je représente les jeunes agriculteurs, on est porteurs d'espoir, on y croit à ce métier, on a envie de le faire.
07:15On veut juste avoir les moyens et avoir un revenu et des qualités de vie décentes.
07:19Et vous demandez aujourd'hui à toute la grande distribution de faire bloc contre ça ?
07:22Oui, on appelle toute la grande distribution à ne pas entamer les discussions commerciales,
07:26les négociations commerciales dans ces conditions.
07:28Et on va même plus loin, on va demander une commission d'enquête parlementaire sur le sujet de Lactalis,
07:33parce qu'on a besoin de faire toute la lumière sur ce sujet-là à la veille des négociations commerciales.
07:37Et toute dernière question, Pierre Ricorel.
07:39On sent à la fois votre colère, votre inquiétude et aussi votre prudence,
07:42c'est-à-dire que vous nous dites, oui, on va se mobiliser à partir de la semaine prochaine,
07:46mais on va faire ça sur les ronds-points, etc.
07:48Ça tranche, alors c'est peut-être un ressenti très personnel,
07:51mais avec la colère qu'on entend parfois sur le terrain.
07:54Est-ce que vous n'avez pas peur d'être un peu dépassé par votre base ?
07:57Alors, merci de me poser la question, parce qu'en fait, tout simplement,
08:01nous, on n'appelle pas à la révolution.
08:03Le grand soir, le spectacle, tout ça, c'est pas un projet pour l'agriculture,
08:06c'est pas un projet pour les jeunes agriculteurs.
08:08Nous, on a besoin d'écrire notre avenir sereinement.
08:10On a besoin aujourd'hui d'exprimer notre colère,
08:12mais si on le fait dans n'importe quoi, n'importe comment,
08:15ça ne produira rien de bon pour demain, et donc c'est pour ça qu'on veut le faire,
08:18au risque de passer pour quelqu'un de décalé, peut-être,
08:21mais on assume cette responsabilité de le faire comme ça,
08:23parce que si on ne le fait pas comme ça, en tout cas à notre sens,
08:26c'est pas dans le chaos qu'on va trouver des solutions.
08:28On est toujours là pour discuter, et ça demeurera comme ça.
08:31Certains veulent instrumentaliser cette colère ?
08:33Évidemment, évidemment, c'est politique.
08:36Il y a des aspects politiques, il y a, excusez-moi le terme,
08:39la bordélisation du pays, qui est là aussi.
08:41Nous, ce n'est pas là-dedans qu'on s'inscrit,
08:43et on va tâcher de tenir cette ligne de conduite jusqu'au bout.

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