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Le quotidien La Croix et le média numérique Brut s’associent pour organiser des échanges apaisés dans toute la France samedi 23 novembre

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00:00Vos invités médias, Céline Baye d'Harcourt, sont deux journalistes à l'origine d'une
00:03initiative inédite en France, faire dialoguer des citoyens aux opinions divergentes.
00:08L'opération est baptisée « Faut qu'on parle » et aura lieu samedi dans toute la France.
00:12Béatrice Bougnole, vous êtes chef du service Culture au quotidien Lacroix et Maxime Darquet,
00:16vous êtes le directeur éditorial du Média Brut.
00:18Bonjour à tous les deux.
00:19Bonjour.
00:20Vous déclinez ce qui a été fait d'abord en Allemagne par le journal dite « Zeit »
00:24et repris ensuite entre très nombreux pays, par exemple aux Etats-Unis, au Royaume-Uni
00:29Ces rencontres ont montré qu'on pouvait penser différemment sans s'écharper.
00:32Oui, c'est exactement l'initiative qui a été lancée en Allemagne, qui était née
00:38de l'élection de Donald Trump et du Brexit en Allemagne, avec ce sentiment que les gens
00:43peut-être ne se parlaient plus ou plus assez et qu'il fallait le faire, le faire davantage.
00:48Et nous, nous avons l'ambition aussi de faire discuter des gens aujourd'hui en France
00:53qui ne sont pas forcément idéologiquement sur la même ligne, mais qui acceptent de
00:58jouer le jeu et de se rencontrer pour échanger et débattre.
01:00Brut et la Croix, ça peut paraître une association étrange, antinomique, vos lignes éditoriales
01:06sont différentes, votre public aussi.
01:08Comment vous êtes-vous rejoint sur cette idée de rassembler des Français de tous
01:11bords, Béatrice Bougnole ?
01:12En fait, c'est la méthodologie de My Country Talks, qui est l'ONG qui a lancé cette
01:17initiative partout dans le monde, parce que vous le disiez, c'est dans plein de pays,
01:20donc une centaine de pays ont déjà décliné cette initiative.
01:24Ils arrivaient très tard finalement.
01:25Donc la France n'arrive pas dans les premiers, on va dire, et on est très heureux de lancer
01:29l'initiative, qui d'ailleurs provoque à vraiment retrouver un vrai élan en France,
01:34puisqu'on est à plus de 6300 inscrits pour les rencontres qui auront lieu le 23 novembre
01:40prochain.
01:41Donc c'est un très bon démarrage.
01:42Et donc dans cette méthodologie, il y a toujours deux médias qui s'associent, des médias
01:47complémentaires, pour lancer l'initiative.
01:49Et donc La Croix a lancé ce projet avec le fonds Bayard Agir pour une société du lien,
01:56et a contacté Brut, qui a répondu présent, immédiatement, et on est très heureux de
02:00cette collaboration.
02:01Parce que vous sentez, pardon Maxime, chez vos lecteurs, vos spectateurs, ce besoin d'échanger.
02:06C'est le point commun entre vos deux médias ?
02:08Oui, complètement.
02:09Sur Brut, on a 75 millions d'abonnés dans le monde, mais on a surtout beaucoup de commentaires
02:14tous les jours sur les vidéos.
02:15Et on voit que les gens échangent, discutent, parfois même commentent, même d'avoir vu
02:19la vidéo, parce qu'ils veulent répondre aux gens qui ont commenté.
02:21Donc on voit qu'il y a ce désir-là d'échanger, et nous, on voulait aussi leur offrir un cadre
02:28sécurisé, unique, pour le faire un jour précis, rencontrer en réel des gens qui parfois communiquent
02:35uniquement sur les réseaux sociaux.
02:36Et pour La Croix, qui s'est toujours engagée du côté du débat apaisé, respectueux, c'est
02:43vraiment de travailler aussi à son rôle de média.
02:47C'est quelque chose qui a été débattu dans les récents états généraux de l'information,
02:51par exemple, le rôle social que peuvent avoir les médias, comme acteurs du débat, au-delà
02:56du débat qu'ils font vivre dans leur page, comme on le fait depuis très longtemps.
03:01Donc c'est important pour nous aussi d'être plus dans le concret de l'organisation de
03:06rencontres entre les Français.
03:07Quel profil ont les personnes inscrites ?
03:10Pour ce qui est de Brut, parce que la particularité de cette initiative, c'est de nous permettre
03:16aussi de voir qui a été inscrit via quelles plateformes, donc je vais parler concernant
03:21Brut.
03:22Brut, ce qui nous a assez surpris, c'est que la grosse moitié des inscrits a moins
03:26de 30 ans.
03:27Donc on parle souvent du désengagement des jeunes.
03:29Les jeunes ont envie de parler, en tout cas, c'est ce qu'on a vu là.
03:33Donc nous, on a tous les âges, mais une grosse moitié a moins de 30 ans.
03:37Et ce qui est intéressant aussi, c'est de voir qu'il y a une espèce de brouillage
03:40idéologique.
03:41Je veux dire, on peut projeter des idées que peuvent avoir les jeunes sur tel et tel
03:44sujet de société.
03:45Quand on regarde dans le détail les réponses qu'ils ont données, ce n'est pas aussi clair
03:48que ça.
03:49Par exemple, sur le mouvement MeToo, sur l'écologie.
03:52Il y a des jeunes qui trouvent que MeToo est allé trop loin, et des plus âgés.
03:57Certains le disent.
03:58Certains le disent.
03:59Alors là où on pourrait projeter un écart générationnel entre des plus âgés qui
04:03pourraient voir ça comme un mauvais mouvement pour la société et des plus jeunes un mouvement
04:07positif.
04:08C'est beaucoup plus partagé.
04:09Donc c'est ce qui montre bien que parfois on projette aussi des idées sur des catégories
04:13qui, en fait, quand on leur donne la parole, ce n'est pas exactement ce qu'ils pensent.
04:16Et le profil à la Croix, alors, Béatrice Bougnol ?
04:18Alors, le profil à la Croix, c'est une des spécificités de cette déclinaison française.
04:26C'est le nombre de femmes, en fait.
04:28Il y a plus de femmes en France, c'est-à-dire ?
04:30Il y a beaucoup, beaucoup plus de femmes en France.
04:33Ça étonne même, justement, les premiers organisateurs de ces rencontres.
04:38C'est-à-dire qu'on a 56 % de femmes qui ont répondu présentes pour ces rencontres
04:42en France contre 75 à 80 % d'hommes en Allemagne, par exemple, qui est le pays qui avait lancé
04:50l'opération.
04:51Donc, c'est vraiment une grosse différence.
04:53Qui s'explique comment ?
04:54Alors, nous, on pense qu'on a communiqué beaucoup autour du thème de la conversation
04:59et non pas du débat où on cherche à convaincre l'autre avec des arguments.
05:03Pardon ?
05:04La conversation, c'est moins viril ?
05:05Peut-être.
05:06Je ne sais pas.
05:07Il faudra qu'on donne tout ça à des sociologues qui pourront travailler de façon plus scientifique.
05:13Mais une des intuitions qu'on a, c'est que quand même, ce terme de conversation
05:16a ouvert à une forme d'échange qui est moins, encore une fois, de chercher à convaincre
05:21l'autre coûte que coûte, j'allais dire, mais plutôt à essayer d'ouvrir une vraie
05:26rencontre et une expérience de vie.
05:29Et ce qui est intéressant, c'est, pour rebondir sur ce que dit Béatrice, les exemples étrangers
05:33qu'on a déjà reçus et qui, nous, nous avaient convaincus de dire oui et de faire
05:39ça avec la croix.
05:40C'est par exemple un exemple allemand que j'ai en tête où un militant écologiste
05:43a rencontré il y a quelques années un militant de l'AFD, donc vraiment deux bords radicalement
05:49différents, et puis ils se sont retrouvés dans un bar.
05:51Et dans ce bar, le premier sujet de conversation qu'ils ont eu en commun, c'était la bière
05:55qu'ils buvaient tous les deux et le houblon et l'eau qu'il fallait pour produire cette
05:59bière.
06:00Et de là a découlé toute une conversation et on trouve ça assez génial que sur un
06:04petit rien du quotidien, deux personnes vraiment idéologiquement opposées puissent se rencontrer
06:08et finalement peut-être tisser aussi des liens.
06:10D'ailleurs, ces deux personnes continuent visiblement à échanger après même la rencontre.
06:14Oui, Béatrice ?
06:15Pardon, je voulais juste ajouter, il faut peut-être souligner l'impact, le calcul
06:20d'impact qu'a eu déjà cette opération ailleurs dans le monde, parce que comme vient
06:25le dire Maxime, c'est un petit rien, c'est assez minuscule comme opération, on peut
06:28dire.
06:29Mais il y a une étude très sérieuse de Stanford et Harvard qui a été menée sur
06:33les résultats allemands, puisqu'en Allemagne, ça fait depuis 2017, donc sept années d'études
06:39qui montrent que le degré de polarisation affective, c'est-à-dire la manière de voir
06:45ceux qui pensent différemment comme des ennemis, a reculé de près de 77%.
06:49Donc c'est vraiment, en fait, voilà, c'est à la fois minuscule, mais je voulais dire
06:54que ça marche.
06:55Mais concrètement, comment ça va marcher ? Parce qu'on a parlé d'un bar.
06:58J'ai un peu de temps pour l'expliquer.
06:59Je vais peut-être le faire moi-même, parce que c'est un peu plus vite.
07:01En fait, il fallait répondre à des questions fermées sur Lacroix et Brut.
07:06En fonction des réponses, c'est un algorithme qui a créé des binômes et ils vont se rencontrer
07:10samedi, ces binômes, dans l'endroit de leur choix.
07:13Ça peut durer une heure, ça peut durer deux heures et ils vont dialoguer.
07:16Alors, effectivement, c'est parfait.
07:18Ils peuvent être dans un café ou dans certains lieux dédiés, comme le théâtre de Lacrier
07:22à Marseille ou la Maison de la Conversation à Paris.
07:25Et vous pourrez retrouver ces échanges via Lacroix et sur Brut.
07:28Exactement, c'est ce que j'allais ajouter.
07:30Merci à tous les deux d'être venus nous en parler.
07:32L'opération Faut qu'on parle, organisée par Lacroix et Brut, se tiendra donc samedi
07:35dans toute la France.
07:36Merci à tous les deux.

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