• il y a 2 ans
"Contestez, soyez critiques. Sans foutre le feu partout."
Albert Dupontel a des messages à faire passer, et pas que dans ses films. On a parlé politique, éducation et engagement avec lui.

Le nouveau film d'Albert Dupontel, "Second tour", sort en salle ce mercredi 25 octobre.
Transcription
00:00– Les médias bruts, c'est un média qui est majoritairement regardé par des jeunes.
00:02– Par des gamins, ouais.
00:03– Vous, qu'est-ce que vous avez envie de dire aux gamins d'aujourd'hui ?
00:06– Euh… Eh ben, j'ai lu un philosophe indien qui s'appelle Krishnamurti il n'y a pas longtemps,
00:11il me posait cette même question, il n'était plus compétent que moi pour y répondre,
00:13mais en fait il disait des choses très vraies, il disait de contester intérieurement
00:17et pacifiquement toute forme d'autorité, qu'elle soit pédagogique ou institutionnelle,
00:20et que c'est le début de la créativité.
00:22Et je pense que les générations qui arrivent là, leur créativité pourra peut-être permettre
00:27la survie de l'espèce humaine, ou que les conditions s'améliorent.
00:29On n'est pas encore rendu à ce stade-là, on n'a pas encore assez touché le fond,
00:32mais je pense que oui, c'est contester ce qui est critique,
00:36sans foutre le feu partout, c'est pas ça dont il s'agit, il ne s'agit pas de ça du tout.
00:39Je parle d'étudier, étudier mais pas forcément la scolarité,
00:42pas forcément ce qu'on vous demande de faire,
00:44pas forcément ce que le monde extérieur vous demande de faire pour que vous puissiez y rentrer,
00:47mais la culture est vraiment un vaste recueil de réflexions,
00:53de Mozart aux Beatles, je trouve ça épatant d'écouter tout ça,
00:56de Chaplin à Oppenheimer, c'est intéressant de voir tous ces films.
01:00Voilà, ça c'est un terreau pour leur imagination, pour leur culture, pour leur connaissance.
01:06Le monde est fini, mais la connaissance est infinie.
01:08Vous pensez qu'on s'en sortira par la culture ?
01:11C'est une des solutions, mais pas la culture au sens scolaire, pédagogique et érudition,
01:15c'est la curiosité intellectuelle qu'il faut absolument cultiver.
01:17Ça me fait du bien de faire des films, ça m'a fait du bien de quitter mon cursus
01:21socio-culturel pour aller faire le guignol,
01:23parce que ça me faisait du bien, l'absurdité de l'existence,
01:25de ne trouver une réponse qu'en une autre forme d'absurdité,
01:27c'est une absurdité sociale, faire le guignol.
01:29Et puis voilà, entre deux absurdes, j'ai envie de parler tout simplement.
01:32Donc, m'écouteront ceux qui veulent, m'écouteront ceux qui peuvent,
01:36m'écouteront ceux qui comprennent, etc., ou personne ne m'écoutera.
01:39J'ai connu des illusions et des illusions dans ce métier.
01:43La plus grande honnêteté que je puisse avoir par rapport à moi,
01:45c'est une sorte de lâcher prise intérieure et de dire voilà maintenant,
01:48et le courage de raconter si c'est en ce que tu as envie de parler.
01:50Pourquoi, même pas encore élu, le candidat nous cache déjà quelque chose ?
01:57Je ne vais pas faire ce que les gens qui vivent dans ma campagne ont prévu.
02:00Et pourquoi ?
02:01Si je le fais, ça va tout casser encore plus.
02:04L'air, l'eau, le sol, ils sont trop forts, trop puissants.
02:08Ils ne me le feront plus même quand je serai élu.
02:10L'élu que vous aviez dit, je n'ai jamais conçu mes films comme des films à message.
02:14Non, non, même si a priori, il y en a forcément,
02:16puisque je commente le monde extérieur.
02:18Mais je considère qu'il y a un grand cinéaste politique que je vénère,
02:21c'est Ken Loach.
02:22Lui, c'est un film, il dit qu'il veut provoquer l'indignation du spectateur.
02:26Moi, je considère que l'indignation est déjà là.
02:27Je cherche juste à en distraire les gens.
02:29Mais distraire les gens, moi, je suis au summum de mon ambition
02:31quand je fais ça, quand j'y arrive.
02:33Et finalement, en distrayant les gens, il y a peut-être quand même des choses.
02:36Oui, mais c'est clair, les thèmes qu'on découvre avec ce film,
02:39on a découvert depuis quatre mois qu'on se promène avec ce film.
02:41Les thèmes abordés dans le film sont très présents
02:43dans l'inconscient collectif actuellement.
02:45Oui, on parle d'écologie, oui, on parle de liberté de parole,
02:47oui, on parle de liberté d'expression.
02:48Oui, voilà, oui, forcément, on en parle.
02:50Mais c'est tellement tarabiscoté, c'est tellement...
02:51J'ai fait exprès de mettre la métaphore en avant pour camoufler,
02:56pas pour camoufler, mais pour me mettre à distance de la réalité, justement.
02:59Mais malgré tout, les gens vont...
03:00Des fois, la fable est plus efficace que le discours au premier degré.
03:03Donc là, la fable, effectivement, elle percute sur plein de sujets.
03:05– Il y a un thème dont on parle régulièrement,
03:07c'est la notion d'engagement pour les artistes,
03:10de s'engager sur différents thèmes,
03:12que ce soit des thèmes politiques ou des thèmes écologiques, etc.
03:15Il y a des artistes qui s'engagent beaucoup,
03:16il y a d'autres artistes qui disent
03:18« Moi, ce n'est pas mon job, je n'y connais rien, je ne veux pas parler. »
03:22Vous, vous vous situez comment ?
03:24– Moi, je me donne le droit de parole à travers les films seulement.
03:27Je n'ai pas envie d'être un militant de plateau, etc.
03:30Ça ne m'intéresse pas et je n'ai pas de Twitter,
03:31je n'ai pas de Facebook, j'abandonne tout ça,
03:32je n'ai pas de réseaux sociaux, justement.
03:34Par contre, je trouve que faire des films,
03:35c'est une façon élégante de s'exprimer.
03:37Même faire des mauvais films, je m'allaise m'être acteur,
03:39même faire des mauvais films, c'est difficile.
03:41C'est du travail, c'est de l'argent, c'est du temps.
03:43Donc voilà, je trouve que c'est bien de parler que à travers cette parole-là
03:47et je dis ce que j'ai envie de dire, voilà, objectivement.
03:49Et ce film-là percute sur plein de sujets, justement,
03:52qui sont des pseudo-sujets d'engagement.
03:53– Et est-ce que malgré tout, vous êtes optimiste pour l'avenir ?
03:56Vous voyez le monde de demain ?
03:58– J'ai des enfants, ça prouve que je crois au genre humain,
04:00donc définitivement.
04:01Après, oui, je suis inquiet,
04:02mais maintenant mes parents étaient enfants pendant la guerre,
04:03donc ils m'ont souvent raconté des choses du côté de mon père,
04:05ça n'a pas été rigolo.
04:06Voilà, donc je pense que oui,
04:09c'est vrai que ce moment, c'est compliqué pour parler d'avenir, c'est clair.

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