• l’année dernière
Avec Franck Ferrand, historien et directeur général de Historia

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##LES_GRANDS_DEBATS_DU_MATIN-2024-12-26##

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00:00Vous êtes toujours sur Sud Radio, nous sommes le 26 décembre, et pour cette heure, normalement
00:09des déos de débat, j'ai le plaisir d'accueillir Franck Ferrand.
00:12Bonjour.
00:13Bonjour Maxime, bonjour à tous.
00:14On ne vous présente plus, vous êtes historien, vos livres sont des succès, on vous entend
00:17sur d'autres radios qu'on salue évidemment, mais qu'on ne citera pas forcément évidemment
00:21pour vous garder.
00:22Et pendant une heure, le but avec vous Franck Ferrand, c'est qu'on va s'intéresser à des
00:26événements qui ont marqué cette année 2024, où vous allez pouvoir nous éclairer.
00:30Elle n'est pas encore tout à fait finie cette année.
00:32Non, mais justement, comme on a un peu de perspective, on va essayer de prendre les
00:35quelques points qui nous ont beaucoup marqués, les auditeurs de Sud Radio, vous, moi, les
00:40Français, et on va commencer notamment par la reconstruction de Notre-Dame.
00:43Il y a trois semaines, le monde entier, les caméras du monde entier étaient rivées
00:47dessus, elle avait été largement détruite suite à l'incendie du 15 avril 2019, et le
00:52chantier exceptionnel a enfin touché à sa fin.
00:55C'est vrai, Franck Ferrand, que Notre-Dame est un symbole dont on ne soupçonne pas l'importance,
01:00même dans le monde.
01:02Je pense que ça a été au moment de l'incendie le 15 avril 2019, ça a été un choc mondial,
01:08et les cérémonies de réouverture de la cathédrale entièrement refaite, qui a retrouvé
01:14sa splendeur native, ces cérémonies ont été également un événement à l'échelle planétaire.
01:21Il suffit d'ailleurs de regarder comment les télés du monde entier, c'est facile
01:25maintenant, on a les bouquets qui nous permettent d'aller voir à peu près ce qui se passe
01:27un peu partout, à quel point toutes ces télés couvrent l'événement, avec la présence
01:34de tous ces chefs d'État et de gouvernement, ça a été un événement d'une importance
01:37considérable.
01:38A l'époque, il y a cinq ans, j'étais au Guatemala, au moment où j'ai appris l'incendie
01:43de Notre-Dame, je sortais d'un site archéologique maya, et dans le petit bus où j'étais avec
01:49une toute petite équipe, on était dix personnes, ça a été un choc et une émotion considérable,
01:54et quand nous sommes arrivés à notre hôtel, j'ai vu des gens qui s'étaient réunis,
01:58sachant qu'il y avait des Français là, et qui nous ont pris dans leurs bras, et qui
02:01pleuraient.
02:02À ce point, pour l'émotion, l'incendie de Notre-Dame ?
02:04C'est un souvenir que je n'oublierai jamais de ma vie, et de voir à quel point ces gens
02:09au Guatemala, vous imaginez, alors c'est vrai que ce sont des chrétiens fervents là-bas,
02:13mais quand même, à quel point ils étaient sensibles, ils nous ont pris dans leurs bras
02:17vraiment comme si des membres de notre famille étaient morts, c'était exactement la même
02:22chose.
02:23Comme si on était en deuil.
02:24Et en rentrant en France, j'ai raconté ça beaucoup à l'époque, et j'ai dit, mais
02:27vous n'imaginez pas, je pense qu'on ne s'est pas rendu compte en France de l'émotion planétaire
02:33de cet événement.
02:34Et il faut dire que, pour notre génération, pour nos générations, c'est quand même
02:39une sacrée honte d'avoir laissé brûler Notre-Dame, il faut dire les choses comme
02:42elles sont.
02:43Moi, je vis ça comme une tâche, j'ai eu un mal de chien à surmonter, si je puis dire,
02:48cette impression de culpabilité, et c'est vrai que, on dit parfois que le diable porte
02:54de pierre, c'est vrai que la cathédrale est encore bien plus belle qu'elle n'était.
02:58J'ai eu la chance de la voir en avant-première, c'était un moment inoubliable.
03:03Vous aviez été un des premiers à pénétrer dans la chanson.
03:06Oui, on peut dire ça privilégié, diraient certains.
03:09Ça a été un moment inoubliable, c'est vrai que la cathédrale est d'une splendeur
03:12inouïe, il y a cette aspiration, cette lumière, cette pureté qu'on n'avait plus du tout
03:18dans l'ancienne cathédrale, c'est vrai, donc c'est très très beau ce qui a été
03:21fait.
03:22On pourra peut-être y revenir, parce que c'est très intéressant de voir à quel
03:25degré de réussite on est capable d'aller quand on s'en donne les moyens.
03:28Mais, il n'empêche, ça ne fera pas tout à fait oublier qu'en 2019, on a laissé
03:37brûler ce joyau des joyaux.
03:39Et pour vous, vous pensez quand même qu'il y a ce sentiment de culpabilité partagée,
03:43de se dire quand même qu'on a, en 2019, potentiellement laissé brûler Notre-Dame.
03:46Parce qu'il y a cet argument un peu étrange de dire, certes elle a brûlé, mais finalement,
03:51c'est un mal pour un bien, dans le sens où elle est tellement plus belle.
03:53Dès 2019, il y a eu quand même le dévouement des pompiers, qui a été complètement incroyable.
03:58Vous vous rappelez, là vraiment, on peut parler d'un acte héroïque, ils ne se sont
04:05pas du tout laissés impressionner les pompiers de Paris.
04:07On leur doit beaucoup, il faut le dire, et puis ensuite, on doit beaucoup à tous ceux
04:10qui ont reconstruit, c'est vrai.
04:11Enfin, la cathédrale, elle a brûlé quand même.
04:14Mais vous parliez tout à l'heure, en effet, de ce chantier extraordinaire et vous avez
04:17eu cette phrase qui est qu'on sait donner les moyens.
04:20C'est vrai que quand on regarde un peu les chiffres et les délais, moins de 5 ans pour
04:23la reconstruire, plus de 700 millions d'euros récoltés, on a fait travailler…
04:28Même 850 en tout.
04:29Oui, c'est ça, 846 millions avec tous les donateurs, les 150 pays, on a eu plus de 2000
04:35personnes qui ont travaillé quand même sur ce chantier.
04:38150 entreprises, vous imaginez ?
04:39C'est ça.
04:40Et ce qui a été très bien, c'est un des secrets de cette réussite, à mon avis, il
04:43y a 4 secrets de la réussite.
04:45En fait, c'est l'exception, ça.
04:46Ah, c'est l'exception à tout niveau.
04:47C'est ça qui est extraordinaire.
04:48L'exception convient très bien à l'exception française, je trouve que c'est pas mal fait
04:52finalement.
04:53C'est-à-dire qu'il y a cette exception de base, cette exception première qui consiste
04:57déjà, et il faut le souligner, à n'avoir pas confié la reconstruction à quelques
05:04très grandes entreprises.
05:06On a fait 130 lots, c'est très intelligent ça, l'établissement public a fait 130 lots,
05:12ce qui a permis à de petites entreprises qui n'ont que quelques employés d'excellence
05:17de faire partie de ceux qui participaient et qui mettaient leur pied.
05:20Travail collectif.
05:21Travail collectif, ça.
05:22Émulation collective également, parce que pour être allé un certain nombre de fois
05:25sur le chantier, c'était extraordinaire de voir à quel point tout le monde voulait
05:27donner le meilleur de lui-même, on a des entreprises qui ont ajourné des chantiers
05:32ailleurs pour venir là, pour participer, pour mettre leur grain de sel, si je puis
05:37dire.
05:38Leur pierre à l'édifice.
05:39Leur pierre à l'édifice.
05:40Et puis, il y a eu, c'est vrai, il y a eu cette mobilisation financière, c'est pas
05:46simple, quand on a des moyens, et en l'occurrence des fonds privés, réunis à hauteur de plusieurs
05:52centaines de millions d'euros, notamment grâce à de très généreux bienfaiteurs,
05:56mais pas seulement, puisque certains chèques étaient de tout petits chèques.
05:59Évidemment, ça permet d'aller plus vite et de passer outre à certains encombrements
06:05habituels.
06:06Mais, il y a deux autres aspects qu'il ne faut pas oublier.
06:08Le premier, qui me paraît essentiel, c'est qu'on ait passé par-dessus un certain nombre
06:12de pesanteurs administratives.
06:13C'est parce que l'État ne s'y est pas, c'est ce qu'on observait, beaucoup de gens
06:16avec un sourire un peu cynique en disant, mais regardez, ça a marché, parce que typiquement,
06:20l'État y a foutu le moins de doigts de pied possible.
06:23Alors, en fait, peut-être qu'on pourrait imaginer, je veux bien l'admettre, que l'État
06:29se doit d'avoir un certain nombre de, comment dirais-je, de règlements administratifs, notamment.
06:37On ne peut pas dire que les règles soient systématiquement mauvaises.
06:41Il faut des règles, notamment en matière de monuments historiques, ce n'est pas moi
06:44qui vais vous dire le contraire, je me suis battu toute ma vie pour.
06:47Simplement, la pesanteur administrative dans notre pays est arrivée à un degré tel qu'à
06:52chaque fois qu'on veut faire quelque chose très bien, que ce soit les Jeux Olympiques
06:56ou la cathédrale, puisqu'on a eu les deux dans la même année, c'est quand même intéressant
06:59comme exemple, comme par hasard, on est obligé d'aller outre.
07:03Je trouve que c'est...
07:04Et puis l'autre condition, la quatrième, la plus importante peut-être de toutes, c'est
07:10la volonté quand même.
07:11C'est...
07:12Alors, certains ont dit que le général, le général Georges Lain, que j'ai bien connu
07:19par ailleurs et que tout le monde a regretté, vous imaginez pour lui, n'avoir pas pu voir
07:24le fruit...
07:25Ce chantier du siècle.
07:26C'est incroyable.
07:27Il a tout fait, si je puis dire, il a tenu ça à bout de bras et puis il n'est plus
07:30là pour voir le résultat.
07:31Bon, en tout cas, c'est vrai qu'il avait un petit côté tyrannique sur certains côtés,
07:35mais en même temps, c'était ce qu'on appelle un chef, pardon.
07:37C'est ça.
07:38Et un chef, ça doit cheffer.
07:39Et un chef, ça cheffe et ça tranche.
07:41Et c'est ce qu'il faisait à longueur de journée et c'est ce qui a permis d'avancer
07:44souvent très vite.
07:45Certains ont contesté certaines options qu'il a prises ou certaines décisions qu'il a
07:50prises.
07:51Aujourd'hui, la cathédrale est reconstruite.
07:52Et bien voilà.
07:53Donc, ça prouve la force de conviction, la force de frappe.
07:56Et c'était aussi, mine de rien, une fierté véritablement nationale d'avoir restauré
07:59ce monument qui a quand même plusieurs caractéristiques.
08:02Il est historique, il est politique, il représente vraiment, on va dire, de multiples facettes
08:07de notre pays.
08:08Il est d'abord religieux.
08:10Il est d'abord religieux.
08:11Et je pense que la transcendance a été présente dans les cérémonies, même si on a vu cette
08:16chose un peu étrange que le chef de l'État parle à l'intérieur de la cathédrale.
08:20Je vous avoue que...
08:21C'est vrai que ça vous a marqué aussi.
08:22J'ai trouvé ça un peu curieux quand même, entre nous, quand vous pensez que personne
08:25jamais ne l'avait fait, ni Louis XIV, ni Napoléon, ni De Gaulle.
08:28Bon, eh bien, Emmanuel Macron l'aura fait, lui.
08:31Bon, on dit que c'est parce que le temps était vraiment trop mauvais dehors, ce que
08:35je peux comprendre.
08:36Mais quand même, soyons honnêtes, c'est quand même un tout petit peu particulier
08:39comme situation.
08:40Bon, enfin, c'est pas d'une importance folle, mais ça mérite d'être signalé tout de
08:44même.
08:45Ce qu'il y a eu dans ces cérémonies, c'est une dimension religieuse forte, une élévation,
08:53une transcendance qui sont présentes et qui ont permis de rappeler à tout le monde qu'il
08:58s'agit d'abord et avant tout d'un lieu cultuel.
09:00Mais ensuite, vous avez raison, c'est un lieu symbolique pour la nation et pas n'importe
09:03lequel.
09:04C'est au kilomètre zéro, c'est la paroisse-mer du pays, si je puis dire.
09:11C'est là qu'ont eu lieu un certain nombre de très grands événements.
09:14Et depuis l'accueil de la couronne d'épines par Saint Louis jusqu'au Tédéon de la Libération,
09:20il y a eu dans cette église un certain nombre d'événements qui ont été des événements
09:25collectifs majeurs, des événements clés de notre histoire.
09:29C'est vrai.
09:30Voir ce creuset-là, voir cette nef ressortir des flots, c'est une fierté, c'est une joie
09:41et j'espère que c'est un soulagement pour tout le monde.
09:43Et ce qui était très frappant aussi au moment de la réouverture, c'est de voir à quel
09:45point tous les historiens, les commentateurs, les journalistes se sont très rapidement
09:50plongés à nouveau dans les grands classiques de la littérature française parce que tout
09:53d'un coup, on se rendait compte à quel point Notre-Dame était omniprésente aussi bien
09:57chez Hugo que chez Peggy.
09:58Ça devenait à nouveau un patrimoine littéraire, véritablement.
10:02Chez Peggy, un peu, mais c'est surtout Notre-Dame de Chartres qui est présente chez Peggy.
10:07On pourrait citer d'autres grands auteurs pour lesquels Notre-Dame a été essentielle
10:11et d'abord peut-être Claude L qui a connu derrière un pilier de Notre-Dame cette révélation.
10:16Pour lui, ça a été quasiment une conversion.
10:22C'est un moment très important de sa vie.
10:23Alors, le grand homme, vous avez raison de le souligner, il y a deux figures qu'on ne
10:27pourrait pas ne pas citer quand on évoque Notre-Dame.
10:30C'est bien sûr Victor Hugo puisque c'est lui qui a fait de Notre-Dame un sujet de roman
10:37qui en a fait presque un personnage et non seulement pour la France mais pour le monde
10:41entier parce que Walt Disney est passé derrière avec les studios, sont passés derrière avec
10:45leurs dessins animés, bien sûr.
10:47Donc, c'est vrai que Victor Hugo a joué un rôle essentiel.
10:50Si Notre-Dame a bénéficié au XIXe siècle de cet éclat extraordinaire, c'est grâce
10:57à lui car elle était en très mauvais point en 1837 au moment de...
11:00Il a remis les projecteurs à cette époque sur cet édifice extraordinaire.
11:05Exactement.
11:06Et puis l'autre, bien sûr, c'est celui qui dans la foulée de Victor Hugo a non seulement
11:09restauré mais complètement remanié Notre-Dame, celui qui fait un peu polémique aujourd'hui
11:14parce qu'on se demande s'il faut, on s'est demandé en tout cas s'il fallait reconstruire
11:18sa flèche ou s'il fallait changer les vitraux en grisaille qu'il a laissés dans la cathédrale.
11:23C'est bien sûr Eugène Viollet-le-Duc, personnage qui, quand j'étais enfant, était totalement
11:28décrié.
11:29Quand on disait, oh c'est du Viollet-le-Duc, c'était pour se moquer d'un monument à l'époque.
11:33Et aujourd'hui, on découvre la grandeur du personnage.
11:35Il lui a fallu plus de 100 ans pour être enfin admis et reconnu à sa juste valeur.
11:41On voyage dans le temps en refaisant évidemment les grands événements qui ont marqué cette
11:45année 2024 et nous restons encore 45 minutes avec l'historien Franck Ferrand qui signe.
11:51C'est encore le moment de le mettre sous le sapin pour ceux qui font un Noël prolongé.
11:55Nos Reines de France, c'est aux éditions Perrin, vous êtes sur Sud Radio et vous y
11:58restez bien sûr.
11:59Le Grand Matin Sud Radio, 7h-10h, Maxime Liédo.
12:04Vous êtes toujours sur Sud Radio et nous sommes en compagnie encore pendant un bon
12:08bout de temps avec l'historien Franck Ferrand, Nos Reines de France chez Perrin.
12:11C'est le dernier livre qu'il signe et on avait envie de se replonger dans l'histoire
12:15de France à travers l'effet marquant de l'actualité et je ne pouvais pas recevoir Franck Ferrand
12:20sans aborder ce sujet qui a en fait clairement traversé chaque mois, chaque jour, chaque
12:25semaine de cette année 2024 qui est clairement en réalité l'influence de la France dans
12:30le monde et notamment sur ses anciennes colonies, sur le terrain diplomatique, sur le terrain
12:36même européen, Franck Ferrand c'est vrai et l'actualité ces dernières semaines en
12:40tout cas a été marquée, commençons par cela si vous voulez bien, par l'arrestation
12:45incompréhensible de l'écrivain Boalem Sansal dans les geôles algériennes où on voit bien
12:49à quel point la semaine dernière encore il y a eu des rappels d'ambassadeurs, des
12:53jeux comme ça de diplomates entre l'Algérie et la France avec on le sait des relations
12:57qui sont exécrables.
12:59Quelle est selon vous la part d'histoire qui peut expliquer d'abord en effet nos relations
13:05exécrables avec l'Algérie et à quel point le pouvoir algérien a cette détestation
13:11de la liberté de l'art, de l'artiste ?
13:14Alors là ça nous ramènerait très loin en arrière vous savez, l'histoire des relations
13:20entre la France et l'Algérie ça remonte vraiment à l'époque des barbaresques déjà
13:26vous imaginez, les pirates d'Alger qui envoyaient, qui infestaient littéralement la Méditerranée
13:34et qui faisaient beaucoup de captifs et donc d'esclaves, ça a été toute une affaire
13:39ça et puis alors il faudrait vraiment reprendre siècle après siècle, je l'ai fait d'ailleurs
13:44à la radio, vous pouvez trouver des podcasts sans faire de publicité sur tous ces sujets.
13:48Il y a eu la grande conquête évidemment des années 1830, la prise de l'as-Malad Abdelkader,
13:55les relations d'ailleurs de la France avec l'émir Abdelkader lui-même qui sont un cas
14:00très intéressant et puis bien sûr cette colonisation, colonisation très forte, colonisation
14:04de peuplement, c'est pas une colonisation à l'anglaise là, c'est même pas ce qu'on
14:08avait connu dans l'Indochine française des années 1920, là on est vraiment dans
14:13une colonisation pure et simple, l'Algérie était devenue une série de départements
14:17français et il a fallu en partir avec un million d'européens dont beaucoup de français
14:24d'origine qui s'étaient installés parfois depuis de nombreuses générations donc c'est
14:29toute la question des pieds noirs, on va pas refaire ça, j'imagine que ce matin on n'a
14:32pas le temps de revenir sur toutes ces questions qui sont immenses.
14:35Ce sera une prochaine émission.
14:36Qu'est-ce qui s'est passé en tout cas, c'est qu'au moment de l'indépendance algérienne
14:41en 1962, vous savez que le FLN, un certain nombre des leaders du FLN qui étaient d'ailleurs
14:45pour beaucoup partis en Tunisie etc. sont rentrés, il faudrait parler de la présidence
14:50de Boumediene, Boumediene n'est mort qu'en 78, faut pas l'oublier, le rôle qu'avait
14:54eu d'abord Ben Bella et le rôle absolument essentiel, mais alors ça c'est une affaire
15:01qu'on a aujourd'hui oubliée, mais le rôle essentiel du FLN dans la mise en place d'une
15:08politique qui à l'époque s'inscrivait plutôt dans la sphère du bloc soviétique, ce qui
15:13posait un nombre de problèmes majeurs pour le bloc occidental de l'époque, pour le
15:19camp occidental.
15:20Et puis n'oublions pas la question des essais nucléaires, car parmi les clauses des accords
15:27des viants, il y avait cette possibilité pour la France de mener un certain nombre
15:32d'expériences dans le désert algérien, c'était d'ailleurs absolument essentiel
15:37ça aux yeux du général de Gaulle qui voulait doter la France de son indépendance stratégique,
15:42donc atomique à l'époque.
15:44Les accords qui ont été passés n'étaient peut-être pas entièrement clairs, et le
15:49pouvoir du FLN qui a été profondément mis à mal à partir du contre-choc pétrolier
15:55à partir de 1986, vous savez qu'en 1991 le FIS, vous vous rappelez, enfin non vous
16:00ne vous rappelez pas, un certain nombre de nos auditeurs s'en souviennent, ça a été
16:08une lutte pour ce pouvoir qui se maintient interminablement depuis plus de 60 ans, ça
16:15a été une lutte pour essayer de conserver le pouvoir avec l'interminable présidence
16:21de Bouteflika.
16:22Et les présidents français successifs se sont en quelque sorte, comment dirais-je...
16:27Poliment.
16:28Oui, je ne veux pas dire de choses qui soient désobligeantes, mais il y a eu un certain
16:33nombre de gages qui ont constamment été donnés à l'Algérie, notamment pour des
16:37raisons énergétiques et commerciales, disons-le, il y a des échanges qui sont considérables,
16:41ce sont des milliards d'euros chaque année dans les deux sens, nous sommes le deuxième
16:45exportateur et le deuxième importateur de l'Algérie, il ne faut pas négliger cet aspect-là.
16:49C'est vrai que les choses se sont beaucoup envenimées récemment, notamment avec la
16:53reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, c'est la raison
16:58principale mais ce n'est pas la seule, il y a des relations qui sont mauvaises, disons-le,
17:03et le pouvoir alger a décidé, je crois, de montrer sa force.
17:06C'est ça qui est intéressant, il se trouve que je suis allé en Algérie au mois d'avril
17:10dernier, j'ai fait un petit voyage touristique pour découvrir l'Algérie que je ne connaissais
17:15pas, c'est d'ailleurs un très très beau pays, j'ai été très surpris par tout ce
17:18que j'ai vu, par le dynamisme, par l'extraordinaire...
17:21A loin de l'image que le pouvoir en donne et que nous en avons parfois en France.
17:25Mais totalement, j'avais une image...
17:26Pour vous le décalage est sidérant.
17:27J'avais une image d'Algérie qui datait de plus de 20 ans, pour tout vous dire, et là
17:30je vois un pays en plein épanouissement économique et en pleine glaciation politique si on peut
17:38dire.
17:39Mais alors comment justement vous expliquez parfois cette attitude des présidents français
17:43outre les préoccupations économiques, et quand je parle des présidents français,
17:47alors peut-être faut-il mieux parler de l'attitude récente d'Emmanuel Macron vis-à-vis de l'Algérie,
17:51on ne peut pas dire qu'on ne l'avait pas prévenu, que le fait de poser un genou à
17:54terre face au pouvoir algérien n'était pas la meilleure méthode, comment pouvez-vous
17:58expliquer peut-être avec un point de vue historique ou alors un prisme qu'on n'a pas
18:01forcément, que ce soit toujours cette voie-là qui ait été actée en permanence, c'est-à-dire
18:05la complaisance envers le pouvoir algérien ?
18:07Je pense qu'il y a trois grands facteurs là, d'abord il y a cette population, il ne faut
18:11pas oublier que nous avons été cette colonie de peuplement et donc il y a un lien très
18:15fort...
18:16Le Roland colonial de la colonisation...
18:17Voilà, ça c'est incontestable...
18:18L'historien que vous êtes avait regretté potentiellement le fait qu'Emmanuel Macron
18:23le qualifie de crime contre l'humanité en 2017 ?
18:25Ça m'avait paru un peu incroyable comme déclaration, non ? Je ne suis personne pour commenter
18:32ça, mais tout de même j'avais trouvé un peu fort qu'on donne un tel bâton pour se
18:40faire battre, si je puis dire.
18:42Enfin, vous savez à quel point cette question franco-algérienne a été au cœur du premier
18:49quinquennat d'Emmanuel Macron, qui en a fait un sujet absolument essentiel, jusqu'à convoquer
18:54d'ailleurs un certain nombre d'historiens pour essayer d'aplanir les difficultés.
18:58De faire un rapport pour avoir des préconisations ?
19:00Voilà, en fait d'aplanir les difficultés, je pense qu'on les a plutôt développées,
19:04aiguisées incontestablement.
19:06En tout cas, il y a eu, et ça je pense que c'est très très important de le souligner,
19:12il y a eu une bonne volonté de notre part, ça c'est incontestable, parce que d'abord
19:18il y a ce passé, ensuite il y a la présence en France d'une population d'origine algérienne
19:23très importante, c'est pas négligeable, vous ne pouvez pas, quand vous êtes président
19:27de la République française, vous ne pouvez pas faire comme si ça n'existait pas, surtout
19:30que cette population est très fière de ses origines et qu'elle reste extrêmement attachée
19:34à l'Atlantique.
19:36Et puis il y a les questions de présence en Afrique en général et en Afrique du Nord
19:41en particulier, sans revenir à Michel Jaubert, vous vous rappelez peut-être, enfin non,
19:44vous ne vous rappelez pas, mais vous devez lire un livre qui s'appelle « Le Maghreb
19:48à l'ombre de nos mains » de Michel Jaubert, où il expliquait justement quelle était
19:53la relation très particulière que la France entretenait avec ces pays, avec les protectorats
19:58qu'étaient le Maroc et la Tunisie, et surtout avec la colonie algérienne.
20:03Vous parlez de cette relation complexe qu'on peut entretenir avec les pays, on a vu cette
20:07année, beaucoup, et ça a choqué beaucoup de nos auditeurs, on en a parlé ici sur cet
20:10entême, mais aussi les spécialistes et même les diplomates qui sont désolés, c'est
20:14le départ de nos troupes françaises de certains pays africains, on pense au Mali, le Tchad,
20:19le Niger, encore récemment le Sénégal, notamment après une visite du ministre des Affaires
20:24étrangères Jean-Noël Barraud, c'est-à-dire comment vous expliquez encore le fait qu'avec
20:27notamment un prisme historique, qu'on n'ait pas voulu voir visiblement cette volonté
20:32d'indépendance, on va dire, de certains pays africains, de peut-être faire un petit
20:36pas de côté par rapport à sa relation avec la France, on a beaucoup critiqué, je me
20:40souviens, une des tournées africaines d'Emmanuel Macron, on avait dit, c'est très compliqué
20:43quand même pour ce président moderne, parce qu'il parle comme en 1617, est-ce qu'il y
20:46a, dans nos élites françaises, nos diplomates, encore ce prisme-là ?
20:48En tout cas, il y a probablement un décalage, quand vous parlez avec des diplomates ou des
20:55responsables politiques africains, vous êtes souvent surpris de la très grande maturité
21:02dont ils font preuve, et qui est plus grande que celle dont nos propres hommes politiques
21:07sont capables, généralement, c'est quand même un peu étonnant, ça.
21:09Mais comment vous l'expliquez ? Alors, est-ce que c'est des vieux Roland, on va dire, mais
21:12pas forcément négatif ?
21:13C'est-à-dire qu'en fait, nous avons un double complexe, là. Il est intéressant de noter
21:21que le recul, il est celui de deux générations, en l'occurrence, c'est très intéressant.
21:25C'est-à-dire que l'indépendance de tous ces Etats, elle date de 1960, et nous avons
21:34depuis passé, nous, 65 ans. C'est-à-dire qu'il y a deux générations qui ont passé,
21:40une génération qui a géré la décolonisation, et une autre qui a, d'une certaine manière,
21:45essayé de la digérer. Et nous arrivons maintenant à une nouvelle génération qui doit reprendre
21:51tout à zéro. Et je pense que c'est fini maintenant. C'est très difficile. On s'est
21:57beaucoup moqué de la France-Afrique. Moi, quand j'étais à Sciences Po, le grand sujet
22:00à l'époque, on faisait des exposés sur la France-Afrique, sur les relations si particulières
22:05qu'entretenait la France, pour des raisons énergétiques, pour des raisons minières,
22:10pour des raisons géopolitiques, évidemment, avec un certain nombre d'Etats qu'on considérait
22:13comme des Etats sous tutelle. C'est des Etats sous tutelle. Ils sont passés maintenant
22:18sous d'autres tutelles, un peu soviétiques à l'époque, et surtout américaines, et
22:23puis maintenant chinoises, quand même, disons-le juste. Il y a des logiques de puissance dans
22:27le monde. Quand vous avez une certaine richesse disponible, ça vous donne une certaine puissance
22:34disponible. Et il n'est pas étonnant. Et donc ça attire les combattises. Évidemment.
22:38La Chine est en train, gentiment, de prendre la place de l'ancienne Europe sur le continent
22:42africain. Ce n'est pas d'aujourd'hui, ça fait déjà 20 ans que ça dure. On arrive
22:46maintenant au seuil critique. Et là, nous nous rendons compte que nous ne sommes, entre
22:49guillemets, plus rien. Il y a encore, évidemment, une influence française très forte, notamment
22:55culturelle, industrielle, dans certains secteurs très précis. Mais globalement, cette influence,
22:59elle est en train de devenir anecdotique par rapport à l'influence essentielle de la Chine,
23:03par exemple. Et on avait, en plus de ces quelques pays, on va dire, avec lesquels on avait des
23:08relations très particulières, la France était censée, je cite, avoir une certaine
23:12influence au Proche-Orient. Et on a bien vu, avec ce qui se passe à Gaza, en Israël, très
23:17récemment aussi en Syrie, qu'il y a une perte aussi d'influence de la France dans ces pays-là,
23:22avec qui on avait normalement une relation hystérique ou en tout cas une force diplomatique
23:25impressionnante. La relation essentielle, elle était avec le Liban au départ. Et puis n'oubliez
23:29pas l'ancien protectorat avec la Syrie. Bon, tout ça, évidemment, est en train de changer une fois
23:33de plus. La France reste, encore une fois, très présente culturellement. Il ne faut pas négliger
23:38cet aspect culturel. Mais elle perd son influence politique pour deux raisons. D'abord parce
23:45qu'elle est englobée dans cette Union européenne qui ne lui laisse plus sa voie spécifique,
23:51autonome, indépendante. Et puis d'autre part parce qu'elle n'est plus de moins en moins
23:55la puissance qu'elle était. Quand vous êtes un pays hyper endetté, qui est en train de
23:59devenir un problème pour le système financier international, vous êtes quand même un peu
24:04moins armé et audible pour faire entendre votre voix, y compris aux proches et au Moyen-Orient.
24:11Et Dieu sait pourtant que notre rôle, là, a été un rôle stabilisateur très important,
24:15essentiel, aussi bien dans l'histoire d'Israël que dans celle de l'Iran. Il faudrait entrer
24:19d'ailleurs dans l'histoire de l'Iran, là, qui est en train en ce moment de basculer
24:23complètement du fait de la perte d'influence du régime des Mollahs sur tout ce qui était
24:27le relais chiite, le Hezbollah au Liban, évidemment le régime syrien et même à Gaza, le Hamas.
24:36La perte d'influence de la France dans le monde, mais aussi la perte d'influence ou
24:39la perte de la France dans son régime politique. On va en parler dans quelques instants avec
24:43Franck Ferrand. Rappelez quand même ce qu'était le bel esprit de la 5e, avant qu'on accuse
24:48le président actuel, en tout cas, de l'avoir tordu un peu dans tous les sens pour répondre
24:52à sa volonté. Et puis vous allez voir que ça amènera un second sujet qui est quand
24:56même la passion des Français pour une certaine monarchie. On en parle dans quelques instants
25:01sur Sud Radio avec Franck Ferrand, nos reines de France, c'est toujours aux éditions Périn.
25:10Toujours sur Sud Radio en compagnie de Franck Ferrand, nos reines de France, c'est aux éditions
25:14Périn. Et c'est vrai que nous avons un rapport, cher Franck Ferrand, contrasté à la monarchie.
25:19On a toujours comparé cette fameuse 5e République dont beaucoup disent aujourd'hui qu'elle
25:23est en crise, notamment après cette dissolution surprise d'Emmanuel Macron au début de l'été
25:28dernier. Avant de rentrer dans ce débat, et c'est vrai, une certaine fascination du
25:31peuple français pour les monarchies, où qu'elles soient, est-ce qu'on peut revenir,
25:36alors qu'aujourd'hui on voit bien qu'elle a perdu de sa superbe, sur la force et l'incroyable,
25:42on va dire, tour de passe-passe qu'était cette 5e République, travail acharné de
25:48Bray-de-Gaulle.
25:49Oui, cette 5e République, elle venait après la 4e, et la 4e venait, si l'on fait l'impasse
25:56sur la grosse parenthèse de l'occupation, elle venait après une longue 3e République,
26:0370 ans, qui avait beaucoup condamné le général de Gaulle. Et le régime des partis, c'est
26:10la cible du discours de Bayeux. Après la guerre, après le départ du général de Gaulle
26:15en 1946, il se bat contre ce retour de ce qu'il appelait le régime des partis, c'est-à-dire
26:20un régime parlementaire dominant, où ce sont les partis qui font leurs alliances et
26:26leurs accords pour gouverner. Ça nous rappelle quelque chose, évidemment. C'est stupéfiant
26:30ce qu'il y a en train de se passer.
26:31Parce que pour vous, c'est un retour total à la 4e, à ce point ?
26:34Objectivement. Vous savez, j'ai raconté, 3e et 4e, j'ai raconté l'autre jour la crise
26:42qui a précédé le départ du président Alexandre Miron, 1924. Mais quand vous regardez
26:48les déclarations des différents chefs de partis, les consultations telles qu'elles
26:52ont lieu, les déclarations des parlementaires, c'est stupéfiant. Le calme...
26:58C'est d'une similitude à l'horizonte.
27:00Non, vraiment, c'est incroyable. Et donc, c'est passionnant quand même de voir que
27:03tout ça n'est pas nouveau. Nous sommes en train de redécouvrir ce qu'est, ce que sont
27:10les alliances partisanes en vue de trouver une majorité à l'Assemblée.
27:15Bon, alors, le général de Gaulle, avec tout le comité consultatif, avec bien sûr Michel
27:20Debré, j'ai eu la chance, moi, d'avoir des entretiens avec Michel Debré où il nous
27:25racontait comment il avait conçu la Constitution, etc.
27:29Qu'est-ce qui vous avait frappé ?
27:30C'était un peu rigoureux.
27:31Les entretiens ?
27:32L'efficacité. Ce qui obsédait Michel Debré et le général de Gaulle derrière lui, bien
27:37sûr, qui était dans l'ombre de toutes ces discussions, ce qui les obsédait, c'était
27:43l'efficacité politique. Il voulait un exécutif fort, efficace, qui puisse mener une politique
27:48à l'époque de réindustrialisation. On est en pleine reconstruction. Enfin, on est dans
27:52les Trente Glorieuses, pour être plus juste, puisqu'on est quand même 13 ans après la
27:57fin de la guerre. On est dans cette période des Trente Glorieuses, dans cette période
28:01de l'industrie française dominante, de l'installation de la doctrine stratégique française, nucléaire,
28:10le programme nucléaire, le programme de transport très rapide, le futur TGV, l'installation
28:17du téléphone dans tous les foyers français.
28:19On met en place vraiment la France de demain.
28:20Pour ça, il fallait avoir un exécutif puissant.
28:23Ça fait penser à ce qu'on disait sur la cathédrale Notre-Dame tout à l'heure, sur
28:27la nécessité d'avoir un chef qui chef, comme vous disiez, pour citer l'autre.
28:32Cette volonté-là, elle était servie par un régime qui s'inspirait beaucoup de ce
28:36qu'avait été le Second Empire, pour tout vous dire. Vous parlez de monarchie, c'était
28:40une certaine forme de monarchie qui était celle de l'Empire libéral, en vérité.
28:44C'était ça la Vème République, essentiellement. D'ailleurs, il y avait même un décorum
28:48qui faisait penser au Second Empire, sous la vraie Vème République.
28:52Alors, on accuse beaucoup le président Macron d'avoir tout fait voler en éclats avec sa
28:56dissolution au début de l'année, enfin au printemps. Mais la vérité, c'est que
29:02la Constitution, elle avait déjà du plomb dans l'aile, et depuis longtemps.
29:05C'est ce que j'allais vous dire. On a accusé Emmanuel Macron, peut-être d'y avoir ajouté
29:08le dernier coup. Mais c'est quoi les derniers grands événements, on va dire, sur les 20
29:11dernières années, où vous avez vu qu'on a vraiment mis des coups de canive dans le
29:14contrat qui s'appelle normalement Constitution ?
29:16Il y a eu beaucoup de révisions constitutionnelles, mais la pire, je pense, c'est cette histoire
29:20de quinquennat. Ça, c'était dramatique, avec l'inversion du calendrier présidentiel
29:25et parlementaire, avec des assemblées qui étaient donc systématiquement à la botte
29:32du président pour cinq ans. Un système qui ne fonctionne tout simplement plus, en fait.
29:37Il fallait maintenir le septennat. Ça, j'en ai toujours été absolument convaincu.
29:42Mais c'est la durée d'agir dans le temps.
29:45Évidemment. L'esprit et la lettre de la Constitution ont beaucoup évolué. Cette Vème République,
29:51elle n'est plus aujourd'hui, objectivement, que l'ombre d'elle-même. On s'en rend bien
29:54compte. Et c'est vrai qu'il y a chez les Français une forme de nostalgie d'un pouvoir
29:58exécutif fort. Alors attention, il y a deux choses là. Il ne faut pas confondre le principe
30:04monarchique. Et si vous voulez, on va y revenir. Parce que ça m'intéresse. C'est un sujet
30:08passionnant. Et puis la question de l'exécutif. On doit pouvoir reprendre la main et redonner
30:15au président, un jour, espérons-le, une majorité.
30:21Pour ça, il faut accepter l'alternance. Il faut accepter cette alternance droite-gauche.
30:27A l'époque où j'étais à Sciences Po, il y avait un grand professeur, Maurice Duverger,
30:30qui d'ailleurs, autrefois, avait interrogé le général de Gaulle sur ses intentions
30:34en 1958. Et Maurice Duverger parlait de la dislocation du quadri bipolaire. C'est-à-dire
30:40les quatre parties bipolarisées. Et c'était un risque. Mais il parlait de ça dans les
30:44années 80, vous vous rendez compte. C'est-à-dire que là, ce n'est plus un risque maintenant.
30:48Ce qui s'est passé, c'est qu'en disant nous ne sommes ni de droite ni de gauche, d'abord
30:54François Bayrou d'ailleurs, entre parenthèses, puis Emmanuel Macron, ont aidé à la constitution
31:00d'une troisième force qui est venue s'intercaler, si je puis dire, entre une gauche de plus
31:04en plus à gauche et une droite de plus en plus à droite. Et au milieu, il y a eu ce
31:08troisième pôle que certains ont appelé l'extrême centre, n'est-ce pas ? Ce qui veut dire que
31:11maintenant, nous avons un système politique tripartite. Comment voulez-vous que ça marche
31:16par définition ? Le système majoritaire était fait pour un système bipartite qui
31:21permettait d'avoir des majorités, un peu comme aux Etats-Unis si vous voulez, ou en
31:25Grande-Bretagne, tantôt conservatrice, tantôt travailliste. À partir du moment où vous
31:31avez trois pôles, ça devient plus compliqué évidemment. Pour ce qui est de la monarchie,
31:36ça c'est un autre sujet. Nous constatons, et là, les dernières semaines ont été
31:41de ce point de vue-là littéralement caricaturales. Nous voyons bien que l'ambition d'un certain
31:47nombre de grandes figures politiques, et à la limite, on ne peut même pas leur en vouloir,
31:50c'est naturel et c'est humain. Leur ambition, c'est de s'installer dans le fauteuil de
31:55Saint-Louis, dans le trône de Louis XIV, dans la suite de Napoléon. Ils veulent être
32:01le souverain, n'est-ce pas ? Alors en France, le souverain, c'est le peuple, mais néanmoins,
32:06quand on est président de la République, on est Prémusse ou Terparesse, mais bien sûr.
32:10Dans ce que vous dites, et qui est quand même très frappant, c'est pour ça que je souhaite
32:13qu'on continue sur ce sujet, c'est que quand vous nous expliquez comme ça plus ou moins
32:18la mise en abîme progressive de la Vème République, on a quand même aussi l'impression que c'est
32:23une question d'hommes. Vous racontiez à l'instant vos grands entretiens avec Michel
32:26Debré, on évoque le général de Gaulle, il y a encore quelques autres présidents
32:30qui ont quand même marqué l'histoire de la Vème sans doute par la stature qu'ils
32:34avaient à cette place de président. Est-ce qu'on peut dire que le spectacle auquel on
32:37s'assise depuis très longtemps, et peut-être depuis une dizaine, quinzaine d'années,
32:42est aussi peut-être le manque de personnes politiques avec une dimension historique,
32:47où ça n'a rien à voir ? Non, je ne crois pas. Alors là, je sais que je vais aller
32:50complètement à l'encontre de ce qu'on dit. Ce qui prouve que c'est une bonne question.
32:54Non, je ne crois pas. Je pense que nous avons des hommes politiques, et il se trouve que
32:57j'en connais un certain nombre, et j'ai eu l'occasion de longuement parler avec certains
33:00d'entre eux. Ce sont des gens dont je ne crois pas qu'ils soient d'un niveau inférieur
33:04à ce qu'était le niveau de 1958. Non, non. Ils ont sans doute un peu moins de culture,
33:10ils maîtrisent le français avec un peu moins d'aisance, ça c'est vrai. Ils ont des références
33:19qui, bien souvent, sont importées. Mais leur qualité de caractère et d'intelligence
33:28ne sont pas en cause, je ne le crois sincèrement pas. Non, c'est le système qui est en cause.
33:33C'est ce piège dans lequel nous nous sommes installés. On a voulu diminuer peu à peu
33:40les pouvoirs du président. On a voulu diluer l'influence politique.
33:46On a voulu le peuple français, vous voulez dire.
33:48On a voulu progressivement donner l'impression de vouloir.
33:51C'est l'époque qui a voulu ça. Je ne sais pas qui...
33:54Alors là, nombreux seraient les responsables à incriminer, notamment ce transfert progressif
34:00de la souveraineté vers une instance supranationale, vers la Commission européenne.
34:05Ça, c'est très grave. Et ça, ça explique une grande partie des impuissances actuelles.
34:11Mais ça n'est pas lié à un défaut de qualité personnelle des êtres.
34:16C'est lié à un défaut systémique. C'est beaucoup plus grave, d'ailleurs.
34:20Ça veut dire que quelle que soit la qualité, je ne citerai pas de nom à cette antenne,
34:24mais on a des gens qui sont des hommes d'État en puissance. Je vous promets, en France,
34:28qui pourraient être de remarquables leaders, mais qui ne peuvent plus l'être,
34:33parce que le système les...
34:35C'est terrifiant, ce que vous dites d'un côté.
34:37Mais oui, c'est ça qui est terrible. Il faudrait que les Français s'en rendent compte.
34:41Ils ne s'en rendent pas compte suffisamment, vous pensez ?
34:44Même face à ce spectacle qu'on qualifie souvent désolant ?
34:46Les Français, c'est plus facile. On a tendance à accuser les personnes in twitt ou personné.
34:51On accuse plutôt les gens eux-mêmes, les figures, plutôt que le système dans lequel on s'est empêtrés.
34:57Parce qu'on est complètement empêtrés maintenant, quand même.
35:00On est empêtrés à tous les niveaux.
35:02Regardez, prenons un petit exemple, mais il y en aurait tant à donner.
35:05Regardez ce qui s'est passé avec les maires.
35:08Vous aviez, moi j'ai connu cette époque, je ne suis quand même pas encore tout à fait un ancêtre,
35:12mais vous aviez des maires qui dirigeaient leur municipalité,
35:16qui dirigeaient leur commune, qui étaient des vrais acteurs, extraordinaires d'ailleurs.
35:20Et là, avec ces histoires de syndicats de communes, d'intercommunalité, etc.,
35:26qu'on a créées là depuis 15 ans, on les a complètement bloqués.
35:31Certains diraient castrés, mais c'est un peu le cas quand même.
35:34Et donc, ce n'est quand même pas les maires qui sont moins bons qu'ils étaient,
35:37c'est simplement qu'on les a mis dans un système engluant qui les empêche d'agir.
35:42Et bien c'est la même chose au sommet de l'État.
35:44En vous écoutant, on a bien la sensation que, en tout cas, la Ve République arrive à bout.
35:48Est-ce que pour vous, ça veut dire que dans les prochains longs mois, dans les prochaines années,
35:53une 6e République doit venir et à quoi elle ressemblerait dans votre idéal ?
35:57Alors moi, dans mon idéal, on rétablirait la 5e République.
36:01Car moi, je suis convaincu que rien n'est meilleur que ce système qui a été mis en place à l'époque.
36:06Certains nous disent que la 5e République n'est plus de mise,
36:10elle ne correspond plus aux aspirations actuelles de la société, etc.
36:13Je dis que ce sont des foutaises.
36:15La 5e République est un régime extrêmement efficace, extrêmement réussi sur le papier.
36:20Encore faudrait-il renouer avec lui.
36:22Il faut revenir à une 5e République principielle.
36:25Je pense que ce serait ça la bonne réforme.
36:27Toute 6e République qui sera un parlementarisme matiné de transfert de compétences
36:33sera, à mon avis, un vecteur d'impuissance.
36:36Voilà, ça c'est le parler vrai de Sud Radio, la radio sur laquelle vous avez raison de rester.
36:41Et avec cette crise de régime, on va en venir à l'ADN du dernier livre de Franck Ferrand,
36:46« Nos reines de France » est aux éditions Perrin.
36:48Et on va discuter de ces grandes femmes qui ont clairement une influence hallucinante en France
36:53et de cette fascination pour les Français, pour les monarchies en général.
36:57À tout de suite sur Sud Radio.
37:03Vous êtes sur Sud Radio, on est toujours en compagnie de Franck Ferrand
37:06qui signe « Nos reines de France » aux éditions Perrin.
37:09On y croise la route d'Isabeau de Bavière, de Anne de Bretagne, de Blanche de Castigne,
37:13de Marguerite de Valois, de Marie de Médicis.
37:16Toutes ces femmes qui ont quand même fait rayonner la France pendant des années et des années
37:21et qui sont aujourd'hui encore au programme de certains cours au collège, au lycée sans doute.
37:27En tout cas, ces noms nous sont tous familiers.
37:29Franck Ferrand, avant qu'on se plonge au cœur de ce livre que vous signez,
37:32j'aimerais quand même qu'on évoque ce qui m'apparaît en tout cas moi
37:37comme une fascination quand même pour les Français, des Français en tout cas pour la monarchie.
37:42Oui, il y a une très vieille tradition monarchique en France tout simplement.
37:46Vous vous rendez compte, quand vous restez une monarchie pendant plus d'un millénaire,
37:53monarchie centralisée, une monarchie qui a constitué le pays,
37:58qui lui a donné tous ses caractères,
38:02comment voulez-vous que cette monarchie ne reste pas présente
38:05au moins de manière inconsciente dans l'esprit du public et dans l'esprit des Français ?
38:11Les Français se sont habitués pendant des dizaines et des dizaines de générations
38:15à se tourner vers le roi.
38:17Le roi va nous sauver, le roi va nous entendre, etc.
38:21Donc, ils continuent de faire un petit peu la même chose
38:23avec le gouvernement et le président aujourd'hui.
38:25C'est assez légitime.
38:27Alors, quand on parle de monarchie,
38:29la monarchie dont nous parlons, la monarchie capétienne française,
38:33c'est une monarchie qui était une monarchie de droit divin,
38:36une monarchie appliquant la loi Salique, c'est-à-dire masculine,
38:42et une monarchie absolue à partir du règne de François 1er et de celui d'Henri II.
38:48Donc, ça fait quand même trois grandes caractéristiques
38:51qui ne sont pas très bien portées aujourd'hui, disons les choses.
38:54S'il y a chez certains une nostalgie de la monarchie,
38:59ce n'est pas de cette monarchie-là, en fait.
39:02C'est une vraie monarchie constitutionnelle.
39:03C'est ça, mais c'est très important de le dire.
39:05Vous savez, il y a un énorme conflit en France.
39:08Il y a un malentendu, en fait.
39:10La France considère que la monarchie va contre la démocratie.
39:15Pour beaucoup de Français, démocratie égale république, monarchie égale tyrannie.
39:22On oublie que la plupart des grandes démocraties du monde aujourd'hui,
39:26quand je parle de la Norvège, de la Suède, du Danemark,
39:29ce sont des monarchies.
39:31Et un certain nombre des pires dictatures de la planète,
39:34la Corée du Nord ou autres, ce sont des républiques.
39:37Donc, il faut bien comprendre qu'il n'y a aucun rapport
39:40entre ces notions de démocratie et de tyrannie, d'une part,
39:45et de monarchie et de république de l'autre.
39:48Simplement, c'est vrai qu'en France, nous avions une monarchie
39:51qui n'était pas une monarchie constitutionnelle, en tout cas jusqu'en 1830.
39:55On a juste une parenthèse qui dure 18 ans, entre 1830 et 1848,
39:59où la monarchie est constitutionnelle.
40:01S'il m'arrive de temps en temps de dire que la monarchie
40:04pourrait être une solution pour justement que tout le monde
40:06ne se batte pas pour le fauteuil présidentiel,
40:08et qu'on se batte pour les politiques à mener à Matignon,
40:11sachant qu'à l'Élysée, il y aurait un monarque,
40:13ce serait un monarque constitutionnel, sans aucun pouvoir,
40:16et qui serait au contraire un garant de démocratie.
40:18Il faut bien le dire, ça.
40:20– Je le disais dans votre livre que vous signez chez Perrin,
40:23on retrouve Marie-Antoinette, Anne d'Autriche, Marie de Médicis,
40:27Isabaud de Bavière, Catherine de Médicis,
40:30dans tous les parcours de ces femmes que vous retracez,
40:34qui sont aujourd'hui connues par tous,
40:36quelle est celle dont le parcours a votre préférence,
40:40ou dont la singularité vous amuse ?
40:43– Je suis à Poitiers, on a le culte d'Aliénor d'Aquitaine,
40:48qui a été un personnage complètement extraordinaire,
40:50en plus c'est une figure de roman, Aliénor,
40:52on dirait vraiment l'héroïne d'une série,
40:54d'ailleurs on ferait une série de fous avec elle,
40:56parce que je ne sais pas si vous imaginez que…
40:58– C'est des créateurs de contenu, nous écoutez, prenez cette note.
41:01– Elle hérite de l'Aquitaine, c'est-à-dire de la région la plus brillante,
41:05la plus puissante à l'époque, quand on dit l'Aquitaine,
41:07ce n'est pas l'Aquitaine actuelle,
41:09c'est tout le quart sud-ouest de l'actuelle France.
41:13Ce sont des villes comme Bordeaux ou Toulouse
41:16qui sont très brillantes, très raffinées.
41:18Elle épouse un prince héritier qui devient,
41:21alors qu'elle vient juste de l'épouser,
41:23un mois plus tard, il est roi de France,
41:25il devient le roi Louis VII.
41:27Elle va l'amener à faire toutes les bêtises possibles,
41:29elle l'envoie dans une croisade,
41:31elle tombe amoureuse là-bas,
41:33arrivée en Terre Sainte de son propre oncle Raymond de Poitiers,
41:36ça fait un scandale, on la recolle sur un bateau,
41:39elle est faite prisonnière par les pirates byzantins
41:43qui la rendent au pape, qui va la rendre à son mari, vous imaginez ?
41:46Et là elle ne pense plus qu'à une chose, c'est la séparation,
41:49et donc il va y avoir l'annulation de leur mariage,
41:51et ce qui est inouï, c'est qu'à peine divorcée,
41:55si l'on peut dire, à peine de nouveau libre,
41:57Aliénor va épouser le comte d'Anjou,
42:01il se trouve que le comte d'Anjou meurt dans un accident,
42:03il se baigne dans le Loir, il attrape froid,
42:06et donc tant pis, elle épouse son fils,
42:08qui a 12 ans de moins qu'elle, c'est pas grave,
42:10ça c'est réglé, et elle en fait,
42:12au bout d'un an et demi, le roi d'Angleterre,
42:14elle le pousse à conquérir le trône d'Angleterre,
42:16et elle devient reine d'Angleterre,
42:18après avoir été reine de France,
42:19et on pourrait continuer comme ça longtemps,
42:21puisque jusqu'à 80 ans passés,
42:23cette femme va faire la politique, l'Europe et l'Histoire,
42:25c'est un personnage inouï,
42:27donc si vous me demandez quelle est ma reine,
42:29en tout cas celle dont j'aime le mieux parler,
42:31ce serait sans doute Aliénor, oui.
42:33Dans les destins aussi extraordinaires,
42:35et vous venez de le dire pour Aliénor d'Aquitaine,
42:37il y a aussi la puissance de Catherine de Médicis,
42:39dont le livre vous la qualifiez de femme-siècle.
42:42Oui, c'est vrai qu'elle incarne,
42:44elle incarne d'ailleurs tous les paradoxes de son siècle,
42:47Catherine de Médicis,
42:49elle est la femme de la paix, de la conciliation,
42:52elle veut absolument à tout prix
42:54réconcilier catholiques et protestants,
42:56moyennant quoi elle va donner naissance
42:58au pire massacre de l'histoire de la France quand même.
43:00Pas un bon timing.
43:03Elle veut asseoir ses enfants,
43:05elle veut donner notamment à son fils Charles IX,
43:07puisque c'est lui dont elle assume la régence,
43:10après le règne de François II et en attendant Henri III,
43:13elle veut lui donner plus de pouvoir,
43:16plus d'assises, moyennant quoi elle en fait des rois,
43:19tous les trois d'ailleurs,
43:21qui sont des rois extrêmement secondaires
43:24et extrêmement empêchés.
43:27Bref, c'est un personnage qui incarne
43:29tout ce qu'il y a d'étonnant dans le XVIe siècle
43:32et qui en plus, après avoir été cette dauphine
43:35plus exactement stérile,
43:37qui n'arrivait pas à donner d'enfants à son mari,
43:39va en donner beaucoup, neuf enfants,
43:42qui va prendre un ascendant politique non négligeable.
43:46Dès l'époque d'Henri II d'ailleurs.
43:48Car au moment de la bataille de Saint-Quentin,
43:51la bataille de Saint-Laurent,
43:53c'est Catherine de Médicis qui va voir
43:55le corps municipal de Paris
43:57qui se dresse contre les échevins,
43:59qui leur demande des subsides
44:01et qui va sauver l'armée française.
44:03Il y a chez elle l'étoffe de 4 ou 5 femmes politiques.
44:06Quand on parcourt votre livre,
44:09moi j'ai été assez épaté,
44:11c'est le nom du titre, Franck Ferrand,
44:13c'est assez épatant.
44:14Pourquoi pour Marie-Thérèse d'Autriche,
44:16vous avez ce titre extraordinaire,
44:18un seul jour de bonheur ?
44:19Parce qu'elle dit, la pauvre Marie-Thérèse,
44:21c'est l'épouse de Louis XIV,
44:22alors elle, elle est complètement écrasée,
44:23effacée par son mari.
44:24Vous imaginez quand on est l'épouse de Louis XIV
44:26qui en plus la trompe très allègrement.
44:28Aisément.
44:29Très aisément.
44:30C'est dur pour elle, bien sûr.
44:32Et cette Marie-Thérèse géniale,
44:34je dis géniale parce qu'elle a été
44:37une très bonne et gentille mère,
44:39elle a été la meilleure reine possible,
44:41elle a essayé de s'imposer,
44:42elle n'a jamais très bien parlé le français
44:44parce qu'elle était espagnole.
44:45Bien sous tout rapport, c'est une Habsbourg,
44:47il ne faut pas l'oublier,
44:48ce qui est un paradoxe dans la cour
44:49qui s'oppose aux Habsbourg.
44:50Bon bref, sur son lit de mort,
44:52elle dit, je n'aurais eu somme toute
44:54qu'un seul jour de bonheur.
44:55Et je me suis amusé à chercher
44:57quel avait été ce jour de bonheur,
44:58lequel finalement ?
44:59Pourquoi ?
45:00Est-ce que c'est le jour de son mariage ?
45:01Ça paraît peu probable
45:02puisqu'on dit qu'elle a passé
45:03le jour de son mariage
45:04à pleurer toutes les larmes de son corps
45:07son père et sa famille.
45:09Il ne faut pas oublier que toutes ces reines
45:10étaient d'origine étrangère évidemment
45:12et que pour devenir reine de France,
45:13il fallait qu'elles s'arrachent
45:15à leur culture, à leur famille,
45:16à leur pays d'origine
45:18et qu'elles épousent une nouvelle nation.
45:20Ce n'était pas évident à faire
45:21et elles l'ont toutes fait.
45:22Elles l'ont toutes fait.
45:23Il y en a une peut-être qui est l'exception.
45:26Il faut toujours un méchant.
45:27C'est Isabeau de Bavière,
45:29la reine traîtresse, la méchante, l'infidèle.
45:32Mais même Isabeau de Bavière,
45:34on peut, je crois, lui trouver
45:35quelques circonstances atténuantes.
45:37Il nous reste deux minutes, Franck Ferrand.
45:40Pour vous, après avoir retracé
45:42le parcours de ces femmes
45:44qui ont régné, qui ont imposé leur style,
45:46qui ont imposé toujours dans l'histoire...
45:49Plus ou moins imposé leur style,
45:50mais elles ont essayé en tout cas.
45:51En tout cas, à chaque fois,
45:52elles ont essayé.
45:54On va dire, quels enseignements
45:55on pourrait retirer de ces grands pans d'histoire
45:58et de ces grandes reines ?
45:59Quelle est la chose
46:00dont on pourrait aujourd'hui se dire
46:01il faut s'en insérer absolument ?
46:03La leçon à retenir ?
46:04La fable de ces reines ?
46:05Oh, la seule leçon,
46:06ce n'est pas une leçon politique.
46:08C'est une leçon de vie.
46:09C'est une leçon philosophique.
46:10La plus importante, alors.
46:11Je dis toujours que l'histoire
46:12est un grand réservoir d'expériences humaines.
46:14Pourquoi est-ce qu'on fait de l'histoire ?
46:15Pour voir comment nos ancêtres
46:17se sont débrouillés dans des circonstances
46:19qui souvent nous font penser
46:20à ce qu'on vit nous, chacun à son niveau,
46:22dans sa vie.
46:24Et la grande leçon de ces parcours de reines,
46:27c'est que tout est permis
46:31pourvu qu'on vive.
46:33C'est ça la leçon de l'histoire.
46:36La vie, toujours.
46:37Essayer de s'en sortir,
46:39essayer de surmonter les difficultés,
46:43essayer tout simplement
46:45d'être le plus heureux possible,
46:47de faire rayonner autour de soi
46:50le plus de lumière qui soit.
46:52C'est ça la leçon de l'histoire.
46:54Quand vous faites de l'histoire,
46:55vous n'êtes pas au passé, en fait.
46:57Vous êtes au présent.
46:58Et ce présent, il vous donne envie
47:00de mordre la vie à bels dents.
47:02Nos reines de France, ces deux éditions.
47:04Perrin, merci beaucoup, Franck Ferrand,
47:05de nous avoir accompagnés
47:06durant cette heure d'histoire.
47:08Et c'est encore un cadeau
47:09pour ceux qui font des Noëls prolongés,
47:11à glisser sous le sabat.
47:13Exactement.
47:14Voilà, ça c'est un mot.
47:15Et n'oubliez pas, Sud Radio,
47:16la radio de la vie.

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