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00:00Heureux Pinsoir, 19h21, Stéphanie Demureux.
00:05Et nos débatteurs de la première heure sont toujours dans ce studio, Jean-Claude Dassier,
00:10chroniqueur politique, Philippe Guibert, chroniqueur politique également.
00:14Bonsoir à tous les deux.
00:15Bonsoir Stéphanie.
00:16C'est vrai qu'on écoute Gérald Darmanin, on se dit ça y est, le miracle de Noël est arrivé,
00:21tout va bien se passer, Jean-Claude Dassier, je vous sens dubitatif, voire beaucoup.
00:25Moi je m'emballe pas, je veux dire, je crois pas à la stricte vertu des paroles.
00:32Je pense que demain nous aurons tous nos confrères de la presse écrite qui vont comparer
00:36les deux premières sorties des Gardes des Sceaux, celle de M. Dupond-Moretti
00:40et celle de M. Darmanin, qui a parlé pour la première fois, à mon avis,
00:45je peux me tromper, mais me semble-t-il depuis fort longtemps,
00:48il a mis les victimes en tête, d'abord les victimes.
00:51Croyez-moi, ça va être bien reçu dans l'opinion française.
00:55Il a parlé, on vient d'en dire un mot également, de la nécessité de raccourcir les délais.
01:01La justice française est absolument impraticable,
01:05et le conseil qu'on peut donner, c'est surtout de ne pas jamais s'y retrouver.
01:10Mais honnêtement, là encore, on a un poste qui est quoi ?
01:17Il est dépensier.
01:19Ça veut dire que dans un environnement, et c'est ça qui est terrible,
01:21parce que c'est pas le seul, hélas,
01:23dans un environnement qui va nous contraindre à faire des économies,
01:27à faire attention à ce qu'on dépense,
01:29la justice ne peut pas être soumise à cette situation.
01:34Elle a besoin, en effet, M. Dupond-Moretti, c'est vrai,
01:38qui a dit beaucoup de bêtises, me semble-t-il,
01:40mais qui au moins a eu le mérite deux fois de faire augmenter de 8%
01:44la dotation à la justice, il faut continuer.
01:47Oui, quand vous écoutez Béatrice Brugère, elle dit
01:50non, ce n'est pas une question de moyens.
01:52Enfin, pas seulement de moyens.
01:54Il faut faire une réforme totalement en profondeur,
01:56changer complètement un mindset.
01:59Mais là, on sort à une autre difficulté.
02:01C'est-à-dire que Béatrice Brugère a sans doute raison en disant
02:04qu'il faut beaucoup simplifier la procédure.
02:07Mais il n'y a pas une majorité pour ça.
02:10Mais le problème est de savoir s'il y aura une majorité pour ça.
02:14Et le budget, je vous rappelle, parce qu'on ne fait rien sans budget,
02:17il l'a dit lui-même d'ailleurs, Gérald Darmanin.
02:19Il faut noter...
02:20Non, non, il a dit qu'il espérait avoir une augmentation.
02:22Jean-Claude l'a dit.
02:24Jean-Claude l'a dit, Éric Dupond-Moretti a augmenté
02:27pour la première fois depuis longtemps
02:29le budget de la justice, qui avait toujours été,
02:31sous tous les gouvernements précédents, gauche et droite confondus,
02:34un peu le ministère sacrifié sur lequel on faisait des économies.
02:38Merci, mais beaucoup faire des économies sur le ministère de la justice.
02:42Et donc effectivement, on a beaucoup de moyens à rattraper.
02:45Donc il faudra au minimum que le ministère de la justice
02:49ne soit pas la victime.
02:51Ce ne sera pas cette année qu'il y aura une forte augmentation des moyens.
02:55Mais à tout le moins, il faut que Gérald Darmanin
02:57obtienne que le budget de la justice
03:00ne soit pas cette année sacrifié.
03:02Parce que ça casserait tous les efforts
03:04et tous ces effets d'annonce,
03:06qui resteraient des effets d'annonce.
03:08On va écouter, pardonnez-moi Jean-Claude,
03:10on va écouter Gérald Darmanin, justement, sur ce point.
03:12Écoutons-le.
03:13Je compte bien, effectivement, que le ministre de la justice
03:16pouvoit obtenir ces crédits supplémentaires,
03:19tout en comprenant évidemment les contraintes budgétaires nationales.
03:22Ce que nous voulons, c'est plus de rapidité, plus de fermeté.
03:25On ne peut pas le faire avec des moyens constants.
03:27Et donc, pour qu'il y ait plus de rapidité, plus de fermeté,
03:30il faut un peu plus de moyens.
03:31Bon, effectivement, il espère avoir des...
03:34Espérons-le.
03:35Il a l'expérience d'avoir été ministre des comptes publics.
03:38Quelques millions supplémentaires, je vais vous dire.
03:41L'avantage d'avoir des ministres expérimentés,
03:44c'est qu'ils connaissent toutes les ficelles de l'État,
03:47et notamment le rôle très important de Bercy dans la période.
03:51D'être passé à Bercy pour un ministre de la justice
03:54est un avantage d'expérience.
03:56Philippe Gilbert, justement, Bercy c'est Éric Lombard,
03:59un rocardien, un macroniste,
04:01plutôt plus à gauche que le duo Retailleau-Darmanin.
04:05On n'est pas sûr que Éric Lombard soit très emballé.
04:07À l'idée de satisfaire Gérald Darmanin, Jean-Claude Dacier.
04:10Je sais pas, je connais pas du tout M. Lombard.
04:13C'est une personne qui est compétente, quand même.
04:15C'est une personne à coup sûr qui sait compter.
04:17Qui sait compter, c'est sûr.
04:18Ce qui est pas mal.
04:19Maintenant, le premier ministre est quand même au-dessus de tout ce petit monde
04:23et devra fixer lui-même son cap, rendez-vous, le 14 janvier.
04:27Je voulais juste ajouter, vous savez que...
04:29En réalité, les politiques, depuis quoi, 30-40 ans,
04:33ont laissé la justice dans un dénuement coupable.
04:36Ils sont foutés, mais complètement, pourquoi ?
04:39Pour être tranquilles.
04:40La justice venait pas les enquiquiner.
04:42On a eu des scandales, le financement des partis par tel ou tel biais,
04:47tel ou tel intermédiaire.
04:49Ça a changé quelque peu depuis quelques années.
04:54Et c'est même plutôt l'inverse.
04:55C'est la justice qui se venge, maintenant.
04:57Enfin, je dis pas qu'elle se venge, je veux pas...
04:59C'est-à-dire ?
05:00C'est-à-dire qu'on rigole plus maintenant avec le droit.
05:04On rigole plus avec...
05:05Parfois, elle va trop loin.
05:07Parfois, elle va trop loin.
05:09Mais néanmoins, le rapport de force a changé.
05:12Vous pensez à quoi, précisément ?
05:14Regardez l'affaire Fillon.
05:16Regardez même l'affaire Sarkozy.
05:18Ça n'a pas de sens.
05:19Ça tombe toujours du même côté.
05:21C'est discutable, Jean-Claude, ça.
05:22Oui, c'est discutable, évidemment.
05:24Parce qu'il y a quand même eu trois juridictions.
05:26Première instance, appel et cour de cassation.
05:28Là-dessus, j'ai pas de doute sur la cohérence et la cohésion.
05:31C'est loin d'être le cas.
05:33C'est toujours le cas entre les différentes instances.
05:35Je vous dis simplement que le rapport de force a changé.
05:37Il y a eu une époque où les politiques faisaient ce qu'ils voulaient.
05:40C'est fini.
05:41C'est fini, Philippe Guibert ?
05:43Oui, mais...
05:44Que les politiques ne fassent pas absolument tout ce qu'ils veulent...
05:47C'est normal.
05:48C'est assez normal.
05:49Moi, je demande pas aux politiques d'être des saints.
05:52J'ai pas dit le contraire.
05:53Il ne s'agit pas de dire qu'ils doivent être des hommes d'une sainteté,
05:57ou des femmes d'ailleurs, d'une sainteté exceptionnelle.
05:59Personne n'est d'une sainteté... Enfin, peu de gens sont d'une sainteté exceptionnelle.
06:04Simplement, un politique doit tout simplement respecter la loi.
06:06Enfin, s'il n'y a pas une esquisse d'esquisse de règlement de compte avec Nicolas Sarkozy,
06:10je ne sais plus où j'habite alors. Vraiment.
06:12Non, mais tu peux discuter sur la...
06:13On ne va pas entamer ce débat parce que...
06:15Juste d'un mot, quand même.
06:17Pour d'autres jours.
06:18On peut discuter la sévérité de la peine.
06:20Par exemple, oui.
06:22En revanche, sur le principe de la condamnation, ça a quand même été constant.
06:26Alors en tout cas, on est là effectivement pour parler de Gérald Darmanin.
06:30Bruno Retailleau, il a dû peut-être être dans son fauteuil aujourd'hui,
06:34entre deux dindes de Noël et deux bûches,
06:36à regarder son nouveau comparse dégainer assez vite.
06:41C'est vrai, on parle beaucoup de cet alignement idéologique entre les deux hommes.
06:45Est-ce que c'est aussi simple que ça ?
06:47Parce qu'il y a quand même deux égaux là.
06:49Mais bien sûr que non.
06:50Alors, qui veut parler ? Jean-Claude Dessy, allez-y.
06:52Philippe, Philippe, Philippe.
06:54Bien sûr qu'il y a une certaine cohérence ou des correspondances idéologiques
06:58entre Retailleau et Darmanin, ça ne fait pas de doute.
07:01Mais Bruno Retailleau va découvrir qu'il n'est plus le seul à communiquer dans ce gouvernement.
07:06La preuve, c'est que nous sommes le jour de Noël,
07:09où en général, on parle de trêve de Noël.
07:12Et là, Gérald Darmanin, lui, est allé sur le terrain et a communiqué aujourd'hui.
07:16Donc, inévitablement, il va y avoir une rivalité de communication entre les deux hommes.
07:22Ensuite, il y a un autre élément.
07:24Une certaine paralysie peut-être ?
07:26Non, pas de paralysie, mais une rivalité de communication, c'est probable.
07:30La politique est faite comme ça.
07:33Il y a un autre élément qu'il faut toujours prendre en compte,
07:35c'est qu'au-delà des personnes, des ministres qui sont évidemment importantes,
07:38il y a le poids des institutions, des administrations, des inerties, des doctrines.
07:43Il faut secouer les ministres.
07:46Un de leur rôle est de secouer leur administration, de secouer raisonnablement.
07:50Peut-être se challenger les deux hommes, Jean-Claude Lassier ?
07:53Les faits positifs, ça a une conscience.
07:55Je ne sais pas, nous verrons.
07:57Je ne sais pas si j'ai toujours raison,
07:59mais je pense que ce sont des gens qui pensent à peu près la même chose
08:03et qui prennent en compte l'état de l'opinion.
08:06C'est bien que des ministres se préoccupent de l'état de l'opinion.
08:10Mais d'ailleurs, François Bayrou, c'est ce qu'il a dit quand il les a nommés tous les deux.
08:13Il a dit, moi, je n'étais pas trop d'accord, mais je réponds à l'opinion.
08:16Donc, c'est plutôt bon signe, les premières déclarations des uns et des autres.
08:21Avec Retailleau, c'était clair depuis un certain temps.
08:24Et je pense que tous les deux vont s'entendre.
08:27Ils vont d'ailleurs, faites leur confiance,
08:29ils vont être lourdement, ça a déjà commencé,
08:32critiqués, condamnés, traités de tous les noms par les syndicats
08:38qui en réalité ont un rôle politique beaucoup plus important qu'on ne le croit.
08:43Mais à partir du moment où ils ont l'opinion publique avec eux,
08:45ils l'auront largement, à 70%.
08:47Moi, je ne suis pas sûre que les syndicats...
08:49Lui, il est communiqué des rigolos du syndicat de la magistrature.
08:53T'as tout compris quand même.
08:54Oui, d'accord, mais quand tu as à 70% l'opinion publique derrière toi,
08:58cher Jean-Claude, tu peux surmonter mal d'opposition.
09:02C'est pas la même chose que quand tu sais...
09:03Le syndicat de la magistrature, je répète ce qu'il a dit,
09:06il craint clairement un nouveau recul du respect de l'état de droit.
09:10C'est quand même pas rien de dire ça ?
09:11L'état de droit, ils savent ce que c'est.
09:13L'état de la politique.
09:15Là, c'est vraiment du pur procès d'intention.
09:18C'est vrai que ça interroge quand même sur l'indépendance des magistrats,
09:20quand même, contre ce genre de déclarations.
09:22Là vraiment, je veux dire, c'est du pur procès d'intention idéologique.
09:25Parce que l'état de droit, ça consiste en quoi ?
09:27On a l'impression que c'est...
09:29L'état de droit, c'est juste le fait qu'on puisse avoir des recours
09:33par rapport à des décisions de justice,
09:35que les décisions de l'État sont soumises au contrôle des juges,
09:39et c'est donc qu'il y a des recours possibles
09:41contre les décisions de l'État, administratifs, législatifs, etc.
09:45Donc, je ne vois pas en quoi Gérald Darmanin et Bruno Rotaillot
09:48vont abîmer ces recours et cette possibilité de contester.
09:52En tout cas, il a répondu Gérald Darmanin, justement,
09:54à son accueil un peu froid. Écoutez le garde des Sceaux.
09:57Moi, je suis là pour travailler pour les agents du ministère de la justice.
10:00On ne fait pas de la justice sans les magistrats,
10:03sans les greffiers, sans les agents pénitentiaires,
10:05sans les agents de la protection de la jeunesse,
10:08sans ceux qui sont auxiliaires de justice.
10:10Après, j'ai une feuille de route. Elle m'a été donnée,
10:13si j'ose dire, par les Français.
10:15Ils veulent des décisions rapides, des décisions justes,
10:19et des décisions fermes.
10:20Mon travail n'est pas de prendre des décisions à la place des magistrats.
10:23Mon travail est de donner une direction.
10:25Nous définissons la politique pénale, notamment,
10:27mais aussi des moyens.
10:28Et j'ai bien compris que c'est sur ce dernier point
10:30qu'on m'attendait, notamment les représentants du personnel,
10:32ce qui est bien normal.
10:33Bon, il enrobe plutôt bien les choses, Jean-Claude Delphi.
10:37Et je pense que ce n'est pas non plus son intérêt
10:39de se fâcher d'entrée de jeu
10:41avec le personnel de son administration.
10:43Il y a un petit a priori, quand même, de départ.
10:45Je souris, je souris pour ne pas dire davantage.
10:48Quand vous me parlez du respect de l'état de droit,
10:50quand on est le syndicat de la magistrature,
10:52le mur déconne, c'est moi qui l'ai composé.
10:54Ah non, ne me demandez pas, j'y peux rien.
10:56Et le syndicat de la magistrature a fait voter pour qui ?
10:59Oui, oui.
11:00Bon, alors, je vous en prie.
11:02Le syndicat de la magistrature, c'est une bande de politiques,
11:05magistrats, de gauche, voire d'extrême-gauche.
11:08Ils sont libres.
11:10L'optimisation de créer un syndicat au sein de la justice,
11:13moi, je trouve ça un peu étrange.
11:15Oui, mais s'il y a cette résistance,
11:17non mais Jean-Claude, s'il y a cette résistance idéologique
11:19de la part, quand même, d'une grande partie des magistrats,
11:23ça va être compliqué, peut-être.
11:25Eh bien, il faut la combattre.
11:26Et vous la combattez comment, alors ?
11:28Le ministre a des moyens, quand même.
11:30Il ne représente que 30% des magistrats.
11:33C'est beaucoup.
11:34Enfin, 30%, ce n'est pas 100%.
11:36C'est même une minorité.
11:38Et donc, le syndicat majoritaire des magistrats,
11:42dont on entend beaucoup moins parler,
11:44dont on parle beaucoup moins,
11:45n'a pas fait ce type de commentaire à propos de Gérald Darmanin.
11:48Non, non, c'est un syndicat qui est assez modéré.
11:51Les gens qui sont un peu moins sérieux,
11:53qui savent dans quel état le pays se trouve.
11:55Donc, la justice française n'est pas aux mains du syndicat de la magistrature.
11:59Il faut quand même le rappeler.
12:02Et puis, d'autre part,
12:04Gérald Darmanin me semble un politique plus habile
12:08qu'un Éric Dupond-Méretti,
12:10qui était déjà un personnage qui, en tant qu'avocat,
12:12avait déjà une sorte de conflit.
12:14Et qui, en plus, dans certaines de ses décisions,
12:16a braqué les magistrats.
12:18Donc, Gérald Darmanin est un politique habile
12:22qui va savoir recevoir les gens,
12:25parler avec eux,
12:26et va pouvoir amoindrir ou arrondir certains angles.
12:30C'est pour ça que le mariage,
12:32l'alliance entre les deux,
12:34ministre de l'Intérieur et garde des Sceaux,
12:36peut, espérons-le, produire des effets positifs.
12:39Encore faut-il que ce gouvernement tienne.
12:41On va en parler dans quelques instants,
12:43juste après la pub, messieurs.
12:45A tout de suite.