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00:00Europe 1 Soir, 19h21, Stéphanie Demuru.
00:04François Bayrou a donc annoncé la présentation au Conseil des ministres
00:10dès ce vendredi d'un projet de loi d'urgence pour le département de Mayotte
00:14dévasté par le cyclone Chido. Il était évidemment très attendu sur place
00:19où il s'est rendu notamment aux côtés de Manuel Valls et Elisabeth Born.
00:23On reparlera d'ailleurs de ces premiers pas du gouvernement Bayrou plus en détail
00:28avec nos deux débatteurs de la soirée, Philippe Guibert et Vincent Roy.
00:31On va parler tout d'abord de cette reconstruction avec mon invité,
00:36Jean-Luc Schnöbelen, président du groupe Edis, gestionnaire de l'aéroport de Mayotte.
00:41Bonsoir Jean-Luc Schnöbelen.
00:43Bonsoir.
00:44Quelles ont été vos premières réactions quand vous avez écouté François Bayrou tout à l'heure ?
00:50D'abord je voudrais revenir dans le contexte de ce qui s'est passé.
00:54D'abord c'est affreux ce qui s'est passé.
01:00Vu la puissance de ce cyclone, c'était complètement inattendu.
01:06Peut-être pas prévisible contrairement à ce qu'on dit
01:09parce qu'il y a beaucoup d'évolution sur les intempéries.
01:13D'abord c'est très triste ce qui s'est passé
01:20et je crois qu'il faudrait avant tout se rendre compte que c'est une vraie catastrophe qui s'est passée.
01:29Vous avez le sentiment que le gouvernement n'était pas dans cette tonalité-là de tristesse, d'empathie peut-être ?
01:38Moi d'abord je tiens à préciser que j'ai trouvé une réactivité très forte dans la gestion de crise.
01:47Cela veut dire que dans la gestion de crise, il faut être froid.
01:54Cela veut dire qu'il faut prendre des décisions froides et il y a un temps pour tout.
01:58Il y a un temps pour la compassion, un temps pour regretter ce qui s'est passé et se poser les bonnes questions.
02:06Mais le premier temps qui est le plus important c'est la réaction à froid pour rétablir les choses,
02:14pour essayer de préserver les vies.
02:17Cela selon vous a été plutôt bien fait notamment par les autorités françaises ?
02:21Je trouve qu'on ne le dit pas suffisamment.
02:25On peut dire que l'administration française a été remarquable dans ses réactions, dans ses rapidités.
02:33On ne se rend pas compte de ce qu'est Mayotte.
02:39Alors qu'est-ce que c'est Mayotte justement ?
02:41Parce que c'est vrai, on est ici à Paris, bien au chaud.
02:45On voit ces images qui sont évidemment épouvantables.
02:48Qu'est-ce que c'est Mayotte justement ?
02:50Quand François Bayrou dit que l'Etat s'engage à ne pas reconstruire ces fameux bidonvilles,
02:56qu'on n'appelle pas comme ça là-bas évidemment,
02:59qu'est-ce que vous répondez ?
03:02Cela vous paraît réaliste cette promesse ?
03:05Quand on connaît le terrain justement ?
03:07À court terme, cela ne semble pas réaliste.
03:09Tout simplement parce que je regardais vos chiffres que vous aviez sous les yeux dans le JDD.
03:17On parle de 321 000 personnes sur l'île.
03:22Je ne sais pas d'où viennent ces chiffres.
03:26Et vous regarderez de plus près entre plusieurs publications.
03:30Précisément, c'est 22 000 personnes expulsées vers les Comores
03:33et 321 000 personnes à priori sur l'île dont 100 000 condestins.
03:39Je ne pense pas qu'il y ait eu de recensement depuis un certain nombre d'années.
03:44Les chiffres varient complètement.
03:46Cela veut dire que quand on entend localement,
03:49il y en a qui parlent jusqu'à 450 000,
03:52dont 180 000 à 200 000 mahorais réels.
03:55On voit bien que les chiffres fluctuent complètement.
03:58D'ailleurs, dans les victimes aussi malheureusement,
04:00c'est ce que disait François Bayrou,
04:02qu'ils allaient engager des efforts pour connaître le nombre exact de victimes.
04:05Il n'y a pas de recensement.
04:06Ce serait beaucoup plus facile s'il arrivait une catastrophe
04:09dans une des villes de la métropole.
04:12Puisqu'on a un recensement, on sait qui y habite.
04:14Là, on a beaucoup de gens dont on ne sait pas comment ils vivent.
04:18Vous disiez que pour la reconstruction de ces bidonvilles,
04:23ça vous paraît être un peu illusoire cette promesse de ne pas les reconstruire.
04:28Dans le court terme, tout est un problème de temporalité.
04:33La temporalité, c'est la rapidité.
04:36Vous me parliez tout à l'heure de l'aéroport,
04:39de l'agrandissement de l'aéroport,
04:41c'est un problème de temporalité.
04:43Donc à court terme, je pense qu'on ne peut pas reconstruire en dur pour tout le monde
04:49et que ça tienne compte des cyclones.
04:52Et en même temps, je pense que c'est l'opportunité rare de se dire pour quel projet.
04:58Quel est le projet de société qu'on veut avoir à Mayotte ?
05:02Parce qu'aujourd'hui, c'est une île qui peut être magnifique,
05:05qui pourrait faire vivre du tourisme.
05:07Il n'y a pas de tourisme.
05:12Il faut vraiment qu'il y ait un projet autour de cette reconstruction,
05:16autour de la société qu'on veut à Mayotte.
05:19Philippe Guibert.
05:20Justement, si on veut un projet pour Mayotte,
05:23les grandes catastrophes sont toujours l'occasion de réfléchir à ce qu'on veut.
05:27Mais ça suppose de rétablir des conditions de sécurité,
05:30si on veut du tourisme et même de manière générale,
05:33si on veut du développement d'une activité économique.
05:35Cette sécurité, est-ce qu'elle existe ?
05:37Est-ce qu'il est possible de la rétablir ?
05:40Je pense que tout est possible si on veut le faire.
05:44Je suis désolé de ma réponse.
05:47Si vous voulez, dans la vie, tout est possible si on a décidé de le faire.
05:54Qu'on a une idée, qu'on se fise des objectifs et qu'on les tienne.
05:58Le problème de fond est le changement de cap.
06:02Je reviens, pour moi, c'est très important, c'est le temps.
06:07Le temps est important, parce qu'il y a une telle évolution.
06:11Tout à l'heure, j'expliquais, les vitesses de vent ont évolué à une grande V,
06:16y compris en métropole.
06:18Avant 2000, des grues étaient construites pour résister à 100 km heure.
06:23Lors de 2000, à la fin de l'année, on a eu des vents jusqu'à 200 km heure.
06:28Du jour au lendemain, vous aviez, par exemple, les grues Pota,
06:32qui ont abandonné le marché français.
06:34Parce qu'elles n'avaient pas conçu leurs grues pour ça.
06:37Le lendemain, elles ont arrêté et ont dit, on passe à autre chose.
06:41Il y a une réponse rapide au phénomène.
06:44Là, on a eu un phénomène qu'on aurait pu voir dans d'autres endroits.
06:49Par exemple, aux Antilles, Saint-Martin a vécu il n'y a pas très longtemps.
06:54Ça a été reconstruit en 3 ans, Saint-Martin,
06:58mais avec le matériel fourni par les Américains.
07:01Est-ce que les Mahorais, aujourd'hui, ont les moyens de reconstruire en dur,
07:05avec des outils assez chers là-bas, un foncier rare ?
07:09Vous connaissez mieux la question.
07:11Il n'y a pas vraiment de matériaux.
07:14Il faut tout exporter.
07:18Ce n'est pas aussi simple que ça.
07:21Et encore une fois, faut-il ne pas changer de cap.
07:24Jean-Luc Schnobel, une question avant de donner la parole à Vincent Roy,
07:26qui voulait vous interpeller.
07:28Vous êtes gestionnaire de l'aéroport de Mayotte.
07:30Il me semble qu'en 2018, on vous avait promis l'agrandissement de cet aéroport.
07:35On en est où, justement, de ces promesses ?
07:38Là aussi, il faut revenir dans le contexte.
07:41Quand vous partez de Mayotte, et que votre avion est plein en fuel,
07:46et, je dirais, en personne,
07:49vous avez un problème de longueur de piste.
07:53Oui, bien sûr.
07:54Puisqu'il y a une colline qui est en bout de piste.
07:56Et donc, les normes de sécurité font
08:00que vous êtes obligé de partir avec moins de fuel,
08:04et de refueler à La Réunion,
08:06ou au Mozambique.
08:12Donc, vous êtes obligé de faire une escale.
08:14Ce qui n'est pas le cas pour Arrivée.
08:16Donc, en fait, il y a eu des études qui ont été lancées
08:21pour savoir si on pouvait prolonger la piste.
08:24Il faut savoir que, quelque part,
08:26vous avez immédiatement tombé sur des champs de coraux.
08:29Ah oui.
08:31C'est vrai que personne n'y pense rien sur la sécurité.
08:34Il y a des champs de coraux.
08:36Il y a des gros travaux.
08:38Il y a la protection de la nature.
08:40Il y a des études d'impact.
08:42Et, il ne faut pas négliger
08:44qu'il y a de la technique qui évolue très vite.
08:47L'aviation évolue très vite.
08:49Donc, est-ce que, dans le temps qui nous est imparti,
08:51et on le voit bien sur les infrastructures,
08:53y compris à construire en métropole,
08:55la durée que ça prend ?
08:57La durée, ça veut dire qu'entre le moment où vous décidez
08:59que c'est construit, il y a 20 ans qu'il s'écoule.
09:01Donc, est-ce que dans 20 ans, on n'aura pas des avions
09:03qui n'ont pas besoin de cette longueur de piste ?
09:05Vincent Roy, vous vouliez interpeller Jean-Luc Schnabel rapidement.
09:07Oui, parce que vous disiez, je m'en félicite,
09:10vous disiez, j'ai trouvé la réponse
09:12à la suite du cyclone,
09:14j'ai trouvé la réponse
09:16de l'État français
09:18vraiment intéressante.
09:21Vous disiez, la réaction,
09:23la mobilisation,
09:25vous félicitiez, d'une certaine manière,
09:27si je vous ai bien entendu.
09:29Mais enfin, écoutez,
09:31voilà que le cyclone
09:33balaie
09:35le plus grand bidonville d'Europe.
09:37Il est là depuis longtemps.
09:40Oui, mais enfin, on peut le considérer
09:42comme le plus grand bidonville d'Europe.
09:44Rapidement, Vincent, parce qu'il reste une minute.
09:46Le plus grand bidonville d'Europe, il existait,
09:48il est antérieur au cyclone.
09:50L'État français, avant,
09:52qu'a-t-il fait ?
09:54Vous n'êtes pas à Mayotte depuis deux mois.
09:56Jean-Luc Schnabel.
09:58C'est très complexe.
10:00Parce que, si vous voulez,
10:02vous avez effectivement
10:04des gens qui viennent sur cette île,
10:06qui sont plutôt des Comoriens,
10:08qui viennent pour avoir le droit du sol,
10:10qu'il est compliqué
10:12de renvoyer chez eux.
10:14Vous avez des Mahorais
10:16qui n'ont qu'une envie, c'est de vivre
10:18correctement, qui ne supportent d'ailleurs
10:20pas trop les Comoriens.
10:22Et donc,
10:24dans tout ça, l'État doit se débattre,
10:26avec des contradictions.
10:28Donc, oui, vous avez raison.
10:30On a essayé de faire des choses.
10:32Il y a eu, je dirais, des reconductions
10:34en Comore. Il y a eu plusieurs choses.
10:36Et puis, on s'y oppose.
10:38Si vous voulez, quand on veut
10:40être une terre d'accueil,
10:42j'ai une notion de l'accueil qui est particulière.
10:44C'est-à-dire, si je veux accueillir quelqu'un,
10:46je lui dois le gîte, le couvert.
10:48Donc,
10:50voilà.
10:52Je pense qu'aujourd'hui,
10:54on ne sait pas faire ça.
10:56Merci, Jean-Luc Schnabel, d'avoir été avec nous.
10:58Je rappelle que vous êtes président du groupe Edeis,
11:00et gestionnaire de l'aéroport de Mayotte.
11:02On va poursuivre sur cette visite à Mayotte,
11:04mais aussi les premiers pas
11:06de ce gouvernement Bayrou, qu'ont observés
11:08Philippe Libère et Vincent Roy, avec attention.
11:10Je n'en doute pas.