Le président de la République a donné le sentiment de récuser le vote des Français au soir des élections européennes, le 9 juin 2024, en décidant, le même jour, la dissolution de l'Assemblée nationale.
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dominique-reynie-en-toute-subjectivite
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00:007h20 en toute subjectivité avec le directeur de la Fondation pour l'Innovation Politique,
00:09Dominique Reynier.
00:10Vous revenez donc sur la crise politique actuelle, une crise morale Dominique ?
00:14Il me semble Nicolas, au soir des élections européennes, je le rappelle, le 9 juin 24,
00:21le Président de la République a donné le sentiment de récuser le vote des Français
00:25en décidant la dissolution de l'Assemblée Nationale.
00:28Les élections législatives qui ont suivi se sont soldées, on s'en souvient, par la
00:32défaite de toutes les forces politiques, sans exception.
00:35Aucun parti, aucune coalition de partis n'a obtenu une majorité.
00:40Les députés doivent se soumettre à ce résultat, faire avec et dès lors organiser les compromis
00:46nécessaires à la formation d'un gouvernement.
00:48La raison d'être de l'Assemblée Nationale est de contrôler l'action du gouvernement
00:53et de voter les lois qui lui permettent d'agir.
00:55Ne pas s'employer à cela, c'est une autre manière de récuser le vote des Français,
01:00c'est commettre la même faute qu'Emmanuel Macron le 9 juin.
01:03Ainsi, le gouvernement formé par Michel Barnier le 5 septembre n'a même pas eu le temps
01:08de gouverner.
01:09Il a été renversé le 4 décembre par une majorité absurde réunissant les députés
01:14du NFP et du RN en une coalition incapable de constituer un gouvernement alternatif.
01:20Pour remplacer Michel Barnier, le gouvernement de François Bayrou a été nommé le 23 décembre.
01:26Mais dès le 13 décembre, Marine Le Pen faisait savoir qu'elle ne renonçait pas la motion
01:31de censure.
01:32De même, c'est dès le 20 décembre que Jean-Luc Mélenchon promettait la chute du gouvernement
01:37Bayrou pour la rentrée parlementaire le 16 janvier prochain.
01:41Mais alors Dominique, ce sont nos institutions qui ne fonctionnent plus ?
01:45Je ne crois pas parce que dissoudre l'Assemblée nationale le jour d'une défaite aux élections
01:51européennes n'est pas l'effet d'un défaut institutionnel, Nicolas, mais celui d'une
01:56mauvaise décision politique, ce que le Président a reconnu formellement lors de ses voeux.
02:01Ce n'est pas non plus un défaut institutionnel qui conduit des partis à créer des majorités
02:06de renversement dans le seul but d'empêcher tout gouvernement.
02:10Non, tout se passe comme si les difficultés qui menacent notre pays ne comptaient plus
02:15face à l'impatience d'engager la course à l'Elysée plus de deux ans et demi avant
02:19la date prévue par nos institutions.
02:21Il ne s'agit plus de gouverner, mais de provoquer une présidentielle.
02:25C'est ce que réclament principalement Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon.
02:29Ils savent pourtant que cela ne résoudrait pas l'absence de majorité parlementaire,
02:34pas avant six mois au moins, le temps que le droit de dissolution soit réactivé.
02:38La crise qui nous frappe n'est pas institutionnelle.
02:41Elle procède d'un cynisme débridé.
02:44Il va au-delà des calculs politiques inhérents à la vie démocratique.
02:48Une partie de la classe politique accepte de mettre en péril l'avenir du pays pour
02:53forcer le chemin vers la présidentielle.
02:55Il n'a jamais été aussi clair que l'objectif n'est pas de gouverner le pays, mais de
03:00parvenir au pouvoir et au plus vite.
03:02Le 16 janvier prochain, on saura si la crise dans laquelle nous nous débattons est une
03:07crise morale ou politique.