"Conclave" sur les retraites : les partenaires sociaux sont attendus au ministère du Travail, mais le patronat est-il prêt à négocier ? Regardez Michel Picon, président de l'U2P, l'Union des Entreprises de Proximité, est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 16 janvier 2025.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 16 janvier 2025.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00RTL Matins, avec Amandine Bégaud et Thomas Soto.
00:04Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud, ça commence par un conclave, ça risque bien de se finir en bras de fer entre les syndicats et le patronat sur la réforme des retraites.
00:12Alors ce matin, Amandine, vous avez choisi de recevoir le représentant des entreprises de proximité, Michel Picon, président de l'U2P, bonjour et bienvenue à vous.
00:20Bonjour Michel Picon et merci d'être là. L'U2P, les entreprises de proximité, on le rappelle, sont deux entreprises sur trois aujourd'hui en France, des artisans, des commerçants.
00:29Mais aussi des professions libérales. Vous nous confirmez d'abord que la première réunion de ce conclave sur les retraites aura bien lieu demain ?
00:36Oui, à cette heure-là, oui.
00:38Bon, je vous pose la question. On est d'accord. Hier, Sophie Binet, qui était ici même à votre place, la secrétaire générale de la CGT,
00:45nous indiquait qu'elle venait de recevoir un appel lui indiquant que la première réunion était annulée, sans nouvelle date.
00:50Ça avait été confirmé par la ministre du Travail et puis trois heures plus tard, on avait appris que finalement la réunion aurait bien lieu autour de François Bayrou.
00:56Ça commence quand même très mal, non ?
00:57Oui, c'est vrai que dans la forme, c'est un peu cafouillage. J'espère que les choses vont se mettre d'aplomb.
01:03Nous avons enfin reçu hier en fin d'après-midi l'invitation du Premier ministre à cette première réunion où il va, je pense, donner un petit peu la méthode,
01:12comment les choses vont se passer parce qu'on a assez peu d'informations. Enfin, les informations sur le sujet de fond, on les connaît.
01:19Vous dites cafouillage, c'est un peu de l'improvisation quand même, non ?
01:23Oui, en fait, moi j'ai appris cette réunion lors du discours de politique générale. On n'a pas été prévenu avant.
01:30Bon, il se trouve que l'ensemble de mes collègues, si je puis dire, numéro un des organisations, répondent présents.
01:38C'est ce qu'on m'a dit hier soir. Tout le monde sera là. Ça a nécessité de bouger les agendas. On a tous des choses à faire.
01:46Mais l'instant est important tout de même et je crois que, bon, moi j'ai passé l'éponge sur la forme, qui n'est pas bonne, consciente des enjeux que tout cela a pour le pays.
01:59Revenons au fond, justement. Êtes-vous vraiment prêts, vous, représentant du patronat, à faire des concessions ?
02:06Oui, mais des concessions... La loi Borne, elle procédait d'un équilibre financier et cet équilibre financier était obtenu avec une partie des sujets mis en place par Madame Touraine.
02:19Et puis, ce recul des bornes d'âge, c'est un paramètre. En matière de retraite, il n'y a pas 50 000 paramètres. Il y a la durée de cotisation, le niveau des pensions et le niveau des cotisations.
02:28Mais alors, vous êtes prêts à agir sur quoi ?
02:29Peut-être sur tout.
02:31Ah, peut-être sur tout !
02:32Moi, j'aborde cette...
02:34C'est-à-dire que la mesure d'âge de 64 ans, vous n'y êtes pas arcobouté.
02:37Non, mais si on commence à être arcobouté, on va reproduire les mêmes défauts que le débat politique a produit au cours des derniers mois, voire même des dernières années, et on va s'enfermer dans des postures.
02:49Non, il faut être ouvert. Moi, je veux simplement dire à ceux qui réclament en disant, et je les comprends pour un certain nombre de nos concitoyens, 64 ans, c'est trop loin pour un certain nombre de compatriotes.
03:01Vous êtes prêts à revenir sur ce point ?
03:02Oui, mais bien sûr ! Alors, est-ce qu'on revient sur les 64 ans ? Est-ce qu'on identifie ceux pour qui c'est impossible et ça sera trop difficile, et auquel cas il faut qu'on ait des dispositifs leur permettant de partir avant ?
03:16Est-ce qu'il faut abroger ces 64 ans complètement, imaginer une autre date ?
03:21Moi, je suis ouvert vraiment à tout. C'est ce que le Premier ministre nous a demandé.
03:25J'ai deux prérequis. Le premier, c'est que l'état des finances de notre pays ne permet pas de continuer à creuser la dette.
03:35Ça, ça me paraît... Mais personne ne peut dire le contraire. On ne peut pas laisser à nos enfants une dette... Alors, il faut qu'on se mette d'accord sur les chiffres, mais le chiffre qui est donné aujourd'hui, c'est 55 milliards.
03:45Bon, on verra si la Cour des Comptes, je rencontre le président de la Cour des Comptes la semaine prochaine, on verra après ses travaux, mission fleur, ce qu'il nous dit.
03:52Mais personne ne peut se satisfaire d'une situation où on emprunte chaque année pour équilibrer le régime et on laisse le remboursement aux générations qui viendront après.
04:02Vous disiez, Michel Picon, et à juste titre, il n'y a pas 12 000 solutions. Donc, soit on agit sur l'âge, vous dites, oui, nous on est prêts à agir sur l'âge, donc à revenir, pourquoi pas, à 62 ans.
04:11Mais il va bien falloir financer tout ça. Ça veut dire quoi ? Augmenter les cotisations ?
04:16Oui, mais ce que je veux dire... Non, ça, certainement pas.
04:19Là, c'est une ligne rouge pour vous, on est d'accord.
04:21J'imagine que ceux qui réclament à corps et à cri, classes politiques et les partenaires sociaux, l'abandon de la réforme à 64 ans, ont des idées d'équilibre financier.
04:35Je ne peux pas imaginer... En tout cas, ça se dit peut-être au Parlement, quand on est entre nous, les partenaires sociaux, quand on gère l'Agir Carco, quand on gère l'Unédic, l'Assurance Chômage, on gère des rentrées, on gère des sorties, on essaie d'équilibrer les choses.
04:50Alors, quand il y a une crise au Covid, tout se déséquilibre. Pourquoi ne trouverions-nous pas, dans ce conclave, l'état d'esprit d'équilibre des choses que nous avons ailleurs ?
05:03Michel Picon, vous parliez de ceux qui veulent revenir sur l'âge. Parmi eux, la CGT. Sophie Binet, je le disais, était à votre place hier. Elle dénonçait un débat biaisé. Écoutez-la.
05:14Le problème, c'est qu'on a un patronat qui a pris l'habitude d'avoir les pleins pouvoirs dans ce pays et qui fait des caprices d'enfants gâtés.
05:20Le Premier ministre met le patronat en position de force alors que le patronat tient aux 64 ans. Donc, il sait déjà que, sans discussion, de toute manière, la réforme va s'appliquer.
05:30Un patronat qui fait les caprices d'enfants gâtés. Que lui répondez-vous maintenant ?
05:34Je connais bien Sophie Binet. Elle est taquinne. Elle aime bien.
05:38C'est de la posture.
05:39Oui, c'est de la posture. Les choses ne sont pas aussi fortes que ce qu'elle le dit. Le patronat a un souci d'équilibre.
05:49D'abord parce que c'est notre vie d'équilibrer les choses. Quand vous êtes chef d'entreprise, vous équilibrez vos recettes et vos dépenses.
05:55Et on sait tous très bien, sans être ministre des Finances, que la situation, si vous dépensez plus que... Même les ménages le savent.
06:04Les ménages le voient tous les mois.
06:06Ils le subissent chaque jour. Voilà. Et donc, le patronat tient les clés. Le patronat ne veut rien savoir. C'est faux. Je lui ai dit déjà et je le redis ici à votre antenne.
06:19Mais si la clé de la solution, c'est de dire que toutes les entreprises vont payer parce que les patrons se gavent, etc., c'est de notre temps.
06:30Donc ça, ce sera non ?
06:31Ça, ça sera non. Mais il y a des choses, tout de même. Il y a des voies de passage.
06:36Parce que pourquoi il y a cette telle mobilisation des Français ? Parce qu'il y a des Français pour qui la vie est difficile, le travail est dur.
06:43Quand vous êtes carreleur et qu'on vous dit, jusqu'à 64 ans, tu vas devoir te mettre un genou pour carrer, c'est un truc qui vous épouvante.
06:50Mais ça, on doit pouvoir identifier ces professions à travers nos branches et faire des aménagements.
06:55La première réunion, donc, ce sera demain autour de François Bayrou. Pour l'heure, c'est une motion de censure qui doit être soumise au vote.
07:01On ne sait toujours pas si le PS la votera ou pas aujourd'hui.
07:04Vous, Michel Picon, vous souhaitez que le gouvernement reste le plus longtemps possible ? C'est ce que vous nous dites ?
07:09Absolument. Moi, je pense qu'il faut que tout le monde reprenne ses esprits.
07:12Mais il en va de la survie des entreprises, de l'emploi ?
07:14Mais bien sûr. J'ai déjà dit à votre antenne, 1500 salariés dans les petites boîtes perdent leur travail toutes les semaines.
07:211500, c'est toujours la même tendance ?
07:23Mais c'est toujours la même tendance, ça ne s'arrête pas et je crains que ça s'aggrave.
07:27Ce n'est pas possible que la classe politique ne prenne pas conscience de ça.
07:31La priorité des priorités, c'est sauver les entreprises et sauver les emplois.
07:37Et ça passe par le gouvernement ?
07:38Ça passe par une stabilité politique. Les élections viendront, les gens présenteront leur programme, chacun choisira.
07:44Mais respectons nos institutions, respectons les échéances.
07:48Sinon, le pays va devenir ingouvernable.
07:51On ne va pas se censurer tous les trois mois un gouvernement.
07:55Donc, oui, j'appelle à la stabilité.
07:58C'est presque une incantation des politiques à nous donner cette stabilité.
08:02Merci beaucoup, Michel Picon.
08:04Merci.