LÉGISLATIVES - Michel Picon, président de l'Union des entreprises de proximité, est l'invité de Amandine Bégot

  • il y a 3 mois
Les différents partis candidats aux législatives sont auditionné aujourd'hui par le monde patronal. Quels sont les programmes économiques ? Seront-ils réalistes et applicables ? Michel Picon, président de l'U2P, l'Union des entreprises de proximité, est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 20 juin 2024

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00:00RTL 7h42, excellente journée à vous tous qui nous écoutez, Amandine Bégaud, vous recevez ce matin le président de l'UDEP, l'Union des entreprises de proximité, Michel Picon.
00:11L'UDEP qui regroupe, on le rappelle, près de 4 millions d'entreprises, 2 entreprises sur 3 en France, je le disais, des artisans, des commerçants mais aussi des professions libérales avec le MEDEF Michel Picon et d'autres organisations patronales.
00:24Vous organisez aujourd'hui un grand oral, grand oral des différents représentants des partis politiques, c'est assez rare que les organisations patronales fassent front commun comme ça ensemble, ça veut dire quoi ? Que l'heure est grave, vous êtes inquiet ?
00:37Oui, sur le plan économique et social, l'heure est grave parce que c'est une campagne électorale qui est d'abord très courte, qui amène chacun des candidats à faire des propositions un peu fortes, un peu attrape-tout.
00:49Et bien évidemment, si ces propositions, pour certaines, sont mises en œuvre, elles vont avoir des conséquences pour l'ensemble des entreprises, qu'elles soient grandes ou petites. En ce qui me concerne, c'est les petites entreprises qui me préoccupent.
01:02On va regarder point par point chacune de ces propositions, mais d'un mot, quel est l'objectif ? De donner une consigne de vote à l'arrivée de vous mouiller, comme vous a demandé Bruno Le Maire ?
01:11Oui, enfin, une organisation patronale, elle n'est pas là pour faire de la politique. Pareil, me semble-t-il, les organisations salariales.
01:18Donc la CGT aurait peut-être pas dû donner une consigne de vote, c'est ce que vous dites ?
01:21C'est son choix, je le respecte. En tout cas, ce n'est pas notre choix. Mais nous, notre responsabilité, c'est d'éclairer le débat, c'est de faire en sorte que chacun a voté.
01:31Vous savez, les chefs d'entreprise, ils ont, comme l'ensemble de la société française, sont perturbés par la situation, par les situations d'insécurité, tout fou le camp, enfin tout ce qu'on entend ici ou là.
01:42Mais ce que nous souhaitons, c'est éclairer le débat en posant des questions très précises aux candidats pour que chacun puisse voter en conscience des conséquences que cela peut avoir sur des mesures qui nous paraissent, nous, vraiment insupportables pour beaucoup de petites entreprises.
01:58Justement, quelles sont ces mesures qui vous paraissent les plus insupportables pour les petites entreprises ?
02:03La première qui est celle de passer brutalement le SMIC à 1600 euros net.
02:10Alors ça, c'est le Front Populaire de gauche ?
02:12Oui, par exemple, qui nous paraît être une mesure. Bien évidemment, je comprends la joie des gens qui n'ont pas cette rémunération et je mesure combien cela doit être difficile.
02:25Mais l'impact dans les entreprises sera catastrophique.
02:30Je voudrais vous donner un chiffre.
02:3284% des entreprises qui aujourd'hui déposent leur bilan sont des entreprises de moins de 10 salariés.
02:39Et dans ces entreprises-là, quand on dépose son bilan, quand on est en redressement judiciaire, c'est qu'on ne fait plus face.
02:46Évidemment, une augmentation aussi brutale de la masse salariale, même si nous n'avons pas des milliers de salariés, la moyenne dans nos entreprises est plutôt au-dessous de 10 salariés,
02:55ça a des conséquences pour des tas d'entreprises.
02:5817% des salariés sont au SMIC, ça va en passer 35%.
03:03L'impact financier ne sera pas supporté, l'entreprise va fermer et les gens n'auront pas un SMIC augmenté, ils auront perdu simplement leur emploi.
03:11L'impact financier, l'impact social, vous le dites, est-ce que vous avez chiffré ça, c'est combien d'emplois menacés ?
03:15On est en train de le chiffrer, mais je pense que c'est plusieurs centaines de milliers d'emplois qui sont menacés dans les territoires et des petits emplois de proximité qui ne sont pas délocalisables.
03:25Il y a une autre mesure, côté rassemblement national cette fois, qui concerne justement toujours les revenus.
03:31Cet allégement de cotisations patronales qui seraient versées pour des augmentations de salaires de 10%, ça c'est séduisant ou pas ?
03:41Oui, c'est séduisant, mais ça existe déjà. L'exonération de cotisations sociales à hauteur de 10%, ça existe déjà à travers ce qu'on a appelé la prime Macron.
03:53Ce n'est pas une nouveauté, c'est habillé différemment.
03:55Aujourd'hui, lorsque vous donnez une prime de 3000 euros à un salarié sans charge sociale et sans impôts pour lui, évidemment pour l'entreprise, ça revient à la même chose.
04:07C'est pour ça que cette réunion ce matin, cette invitation des candidats, on va essayer tout de même de faire un peu tomber les masques en disant
04:15bon ici vous êtes devant des chefs d'entreprise qui auront à vivre les conséquences des décisions que vous allez prendre.
04:21Il faut nous expliquer les choses et pas simplement avec des mesures ou des images un peu séduisantes. Allons au fond des choses.
04:28Du côté du rassemblement national, qu'est-ce qui vous interpelle, qui vous inquiète ? La baisse de la TVA sur l'énergie par exemple ?
04:35La baisse de la TVA sur l'énergie, d'abord ce sera un mécanisme extrêmement compliqué, ça aussi c'est séduisant, mais quelle est la garantie que l'on a ?
04:42On sait que ça pèse sur un certain nombre d'entreprises.
04:44Bien sûr, mais quelle est la garantie que l'on a en baissant la TVA d'avoir cette baisse de TVA répercutée sur la facture ?
04:50On a vu qu'avec les restaurateurs, ça n'était pas très net.
04:53Bien sûr, ils vont trouver beaucoup de raisons pour dire bah oui mais on nous a baissé la TVA, mais il y a une augmentation des charges, le coût de raffinerie, etc.
05:03Ce qui fait que la baisse de la TVA, elle va conforter probablement dans ces grands groupes les hauts du bilan.
05:09Paradoxalement, je vous écoute depuis tout à l'heure et effectivement on se dit qu'il y a un certain nombre de mesures qui risquent d'impacter directement nos entreprises et les plus petites entreprises.
05:20Et il y a un certain nombre de chefs d'entreprises, de petits patrons qui aujourd'hui n'hésitent plus à voter Rassemblement National.
05:26Je suis même tombée sur un sondage IFOP fiducial qui avait été réalisé en 2022.
05:3156% des dirigeants d'entreprises ont voté Marine Le Pen au premier tour en 2022.
05:3556% ! Plus d'un sur deux.
05:38Comment l'expliquez-vous Michel Picon ?
05:39Je pense que c'est un peu plus faible que ça.
05:42Au mois d'avril et au mois de mai, à deux reprises, le sondage IFOP fiducial donnait dans le monde des petites entreprises de moins de 10 salariés
05:51une intention de vote qui ne dépassait pas 20% pour le Rassemblement National et autour de 20% aussi pour le parti Ensemble pour Renaissance.
06:03C'était 5% pour le Rassemblement National il y a encore quelques années.
06:06Oui, bien sûr. Mais parce que les chefs d'entreprises n'échappent pas à la perception d'une société qui est anxiogène, qui leur fait peur.
06:16Il y a des artisans qui, tous les jours, se font voler leur camionnette avec leur matériel, qui ne peuvent pas travailler.
06:22Moi, j'ai rencontré une infirmière qui n'ose plus aller soigner ses patients parce qu'elle a peur de rentrer dans la cage d'escalier.
06:29Parfois, c'est aussi de la peur par procuration parce que c'est ce qu'on voit à la télévision.
06:34Et cette ambiance là où tout fout le camp, où je suis tout seul à travailler beaucoup, 15 heures par jour, et je porte la France à bout de bras.
06:42Il y en a trop qui ne travaillent pas, il y en a trop qui profitent.
06:44Tout ça, bien évidemment, c'est de l'impression probablement sur un certain nombre de points, mais une réalité sur d'autres.
06:51Et donc, les chefs d'entreprises, les petits chefs d'entreprises, mais pas au sens péjoratif, enfin, qui vivent le quotidien des Français au même titre que les Français.
07:00Et donc, ils n'échappent pas à la tentation de voir autre chose par rapport à ce qu'ils ont connu et dont ils considèrent que les gouvernements successifs
07:11ont failli sur cette question d'ordre, d'autorité.
07:15J'étais dernièrement dans une assemblée d'artisans, et puis de bonne foi, les gens me disaient
07:20« Mais tu te rends compte où on a né ? On va égorger les profs dans des écoles. »
07:24Mais il faut que ça s'arrête, il faut qu'il y ait un coup d'arrêt de tout ça. Les gens sont excédés.
07:30Bon, quand on a dit ça, on a mis les problèmes sur la table, mais ça n'a pas forcément réglé.
07:35Est-ce que vous leur dites aujourd'hui à ces petits patrons, j'aime pas cette appellation parce que ça fait...
07:40Mais en tout cas, pas les patrons du CAC 40, vous leur dites...
07:43Les TPE.
07:43Les TPE, vous leur dites « Attention, il n'y a pas de baguette magique, ça n'existe pas, c'est pas comme ça qu'on fait. »
07:47Mais bien sûr, notre rôle, c'est de respecter le choix de chacun, et le choix qui sera fait,
07:53eh bien, ce sera un choix républicain et une organisation comme la nôtre travaillera avec tout le monde,
07:58mais c'est de leur dire, quand vous allez voter, votez non pas dans l'émotion, dans la réaction,
08:05votez en connaissance de coste de ce que votre entreprise pourrait subir,
08:09des programmes, des mises à nœuvres pour les uns ou pour les autres.
08:13Ça doit être un vote de raison.
08:15Absolument.
08:16Ce premier tour...
08:17Bah oui, c'est essentiel.
08:20Mais alors pourquoi ne pas plus s'engager si vraiment on va vers le chaos ?
08:24Mais par respect du choix de chacun.
08:27Nous, notre rôle, c'est de faire de la pédagogie, c'est pas de leur dire le bien et le mal,
08:31le mal est de ce côté, c'est pas notre rôle.
08:35Il y a des formations politiques, il y a des organisations associatives qui ont cette mission.
08:41Nous, vous savez, les statuts de notre organisation, c'est défendre les intérêts moraux et matériels
08:46de nos petites entreprises, et ma mission et le mandat qui est le mien est celui-là,
08:51et je ne serai pas autorisé par mes mandats à aller plus loin.
08:54J'ai une dernière question, M. de Picon.
08:56La Commission européenne a épinglé hier 7 pays dans la France pour déficit public excessif.
09:00En clair, s'ils ne font pas des efforts, il y aura des sanctions.
09:04Concrètement, ça, ça risque d'avoir aussi des conséquences pour les petites entreprises ?
09:08Évidemment.
09:08Lesquelles ?
09:09Évidemment, le creusement du déficit public aggravera les sanctions.
09:13Un certain nombre de mesures nous amèneront à avoir des amendes, notamment les modifications
09:17d'Etévian, et tout ça, ça va faire quoi ?
09:19Ça va faire que l'argent va être plus cher.
09:21On ne va pas pouvoir emprunter aussi facilement que cela, et c'est vrai pour les entreprises,
09:27mais c'est vrai aussi pour les ménages dans l'acquisition de leur logement.
09:31Et quand les ménages ne peuvent pas acheter leur logement, derrière, c'est du travail
09:35en moins pour les artisans du bâtiment qui sont en rénovation ou en construction neuve.
09:40Tout ça aura des conséquences, parce que si nous sommes pénalisés par l'Europe,
09:45bien évidemment, on aura du mal à financer notre dette.
09:49C'est sans doute l'élection la plus importante pour toute notre économie ?
09:52Ah certainement, certainement et depuis longtemps.
09:54Merci beaucoup Michel Piquet.
09:55Merci.

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