• il y a 22 heures
Le 20 janvier prochain, Donald Trump va être investi une seconde fois et devenir le 45ème Président des États-Unis. Une étape cruciale pour le pays et bien sûr pour les équilibres économiques et géopolitiques du monde. Mais l’Histoire qui est en train de s’écrire va bien au-delà de l’homme dont on a déjà largement commenté la méthode, le style et la personnalité… C’est ce qu’il incarne qui est intéressant, ce dont il est lui-même le produit, le résultat : une droite américaine qui s’est durcie au fil du temps, minoritaire il y a encore quelques années, et qui a fini par convaincre des millions d’électeurs. Comment cette droite américaine est-elle devenue si puissante ? Quelle est son histoire, quelle a été sa méthode ? S’inscrit-elle dans un mouvement mondial qui trouve aussi un écho en Europe et en France en particulier ? "Une nouvelle internationale réactionnaire", comme le dit Emmanuel Macron ? Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat. Année de Production :

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00:00Droite radicale, la conquête de Washington, un documentaire d'Alice Cohen éclairant, à plus d'un titre, à la fois pour mieux comprendre l'ascension de Donald Trump, qu'on regarde toujours ici avec nos lunettes de français,
00:12mais aussi pour essayer de sentir si cette droite radicale n'est pas un phénomène mondial et pas seulement américain.
00:18On va en parler avec nos invités. Olivier Kadic, bienvenue à vous. Vous êtes sénateur centriste représentant les Français établis hors de France, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
00:28Vous présidez la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi résilience des infrastructures critiques et renforcement de la cybersécurité.
00:36Ludivine Gilly, bienvenue à vous également. Vous êtes historienne, spécialiste des Etats-Unis, directrice de l'Observatoire Amérique du Nord de la Fondation Jean Jaurès.
00:43On va présenter votre livre, La révolution conservatrice aux Etats-Unis, de l'avortement au droit de vote, la démocratie pervertie aux éditions de l'Aube.
00:52Mathieu Bockcôté, bienvenue à vous également. Vous êtes sociologue, essayiste, éditorialiste et chroniqueur pour différents médias, Journal de Montréal, Le Figaro, le JDD, CNews, Europe 1.
01:01Auteur de ce livre, Le totalitarisme sans le goulag aux éditions presse de la Cité.
01:06Dominique Simonnet, bienvenue. Vous êtes écrivain, journaliste, éditeur et producteur. Vous analysez la politique et l'histoire de la démocratie américaine depuis de nombreuses années, auteur de nombreux ouvrages, vous aussi.
01:16Je vais en citer deux, Les secrets de la Maison-Blanche aux éditions Perrin et Les grands jours qui ont changé l'Amérique chez Perrin, puis Pocket, tous les deux co-écrits avec Nicole Bacharan.
01:26Merci à tous les quatre d'être ici. On reviendra sur le parti pris assez évident du film qui annonce le chaos et la guerre civile aux Etats-Unis à cause du retour de Trump au pouvoir.
01:35Mais je voudrais d'abord qu'on poursuive un peu l'analyse de l'ascension de cette droite radicale américaine.
01:41Ludivine Gilly, vous confirmez qu'elle a été savamment réfléchie, travaillée depuis les années Reagan puisque c'est une des thèses du film.
01:49Oui, tout à fait. C'est en particulier sous l'angle judiciaire, juridique, mais également du fait de la construction du système institutionnel aux Etats-Unis.
02:02C'est-à-dire que les Républicains, depuis les années 80, se sont appuyés sur les mécanismes de fonctionnement des institutions pour mettre à leur main, en fait, le système judiciaire et disposer aujourd'hui...
02:19On en a parlé énormément d'une très large majorité ultraconservatrice à la Cour suprême. Il y a neuf juges à la Cour suprême. Il y en a six qui sont conservateurs, voire ultraconservateurs.
02:31Mais également au sein de l'ensemble du système judiciaire fédéral, parce qu'on parle beaucoup de la Cour suprême, mais la Cour suprême traite une centaine d'affaires par an.
02:42Les juridictions inférieures, les cours de district et les cours d'appel fédéral, c'est à peu près un peu plus de 1000 juges au total, traitent énormément d'affaires.
02:52– Et pour ce qui est de cette droite radicale, Mathieu Bocoté, dans le film ressort l'idée d'une revanche, d'une ultra-droite qui aurait été minoritaire
03:01et qui, progressivement, aurait fini par convaincre des millions d'électeurs.
03:05C'est comme ça qu'il faut voir, comme une revanche de cette droite un peu minoritaire ?
03:08– Je pense surtout que c'est un récit, pour avoir vu le documentaire, qui passe à côté de l'essentiel.
03:11C'est-à-dire que la mouvance qui a pris le pouvoir avec Donald Trump, c'est une mouvance qui est laissée de côté,
03:16mais ce n'est pas la mouvance de Newt Gingrich, c'est une mouvance qui est laissée de côté au début des années 2000,
03:21en fait, mais dès le début des années 90, fin 80, c'est ce qu'on appelle globalement les paléo-conservateurs.
03:25On pourrait dire de 92 à 96, marque un tournant où la droite, dite très conservatrice,
03:30fait un tournant, donc elle se retourne sur la critique de l'immigration massive, la critique du mondialisme, comme ils disent,
03:35la critique du multiculturalisme, la critique de l'esprit avant, l'impérialisme wilsonnier américain,
03:43donc les politiques étrangères pour la promotion de la démocratie, comme on dit, au début des années 90.
03:47Et cette mouvance-là, qui a été laissée de côté pendant longtemps, forge le logiciel de ce qu'on va appeler plus tard le trumpisme.
03:53Et qu'est-ce que le trumpisme, là-dessus, c'est la rencontre entre un homme, par ailleurs, n'avait pas un programme très établi.
03:57Et pour l'essentiel, il s'approprie cette mouvance laissée de côté, associée à des journaux comme Chronicles,
04:01associée à un think-tank comme Claremont Review of Books aujourd'hui, il fait cette alliance,
04:06et là, l'alliance, c'est une forme de personnalité mégalomane, histrionique, si on veut, tout ce qu'on veut, un aventurier politique,
04:12et de l'autre côté, un courant qui n'est pas exactement celui de Gingrich et compagnie,
04:16mais vraiment la mouvance, on pourrait dire, une forme de national-populisme conservateur à l'américaine.
04:20Mais ce n'est pas l'histoire qui est racontée dans le film de manière étonnante,
04:22essentiellement parce que c'est un procès davantage qu'un documentaire.
04:25– D'accord, et on y reviendra peut-être, évidemment, sur le côté excessif du documentaire.
04:28Dominique Simonnet, puisque vous parliez de tournant,
04:30un autre tournant qui est décrit dans ce film, c'est celui de l'élection de Barack Obama,
04:33qui aurait mis tout le monde d'accord à droite, en gros, si on comprend bien.
04:36Vous validez cette thèse ?
04:38– Oui, je suis assez d'accord avec l'analyse qui vient d'être faite.
04:41Il y a une volonté idéologique, effectivement,
04:44de changer la nature de la société politique américaine, ça c'est bien clair,
04:50et qui remonte, le documentaire le montre bien, qui remonte à plusieurs décennies.
04:56Il y a aussi un contexte général, je pense qu'il y a un contexte général
04:59qui est, comment dire, une forme de fatigue démocratique
05:02qui s'exprime dans la société américaine, parce que c'est dans un contexte aussi,
05:09ça se trouve dans un contexte, et le documentaire ne parle pas des démocrates,
05:13mais les démocrates ont aussi une part de responsabilité dans cette histoire,
05:19et qui s'exprime, je crois qu'autour de Donald Trump, il y a à la fois,
05:24je suis assez d'accord sur le fait que c'est un personnage qui est arrivé
05:28d'une manière assez providentielle, qui a été récupéré sur son nom et sur sa personne,
05:37et que ce courant idéologique a investi un peu ses espoirs,
05:42mais il y a à la fois cette idéologie, je pense qu'il y a aussi des gens
05:48qui ont adhéré immédiatement, alors on peut en parler avec les réseaux sociaux,
05:52avec tout ce nouveau contexte de communication,
05:57mais il y a aussi, plus largement, autour de Trump, une Amérique qui est fatiguée
06:02de la démocratie, qui en avait assez, qui pense que ça ne marche pas bien,
06:05Washington c'est trop loin, les élites sont corrompues,
06:08il y a tout un discours comme ça qu'on constate aussi dans nos sociétés européennes,
06:15et qui a fait une espèce d'agrégat autour de Donald Trump,
06:21donc c'est vraiment une convergence qui fait que Donald Trump vient d'être élu,
06:25et bien élu, pour la seconde fois.
06:27Et c'est à se demander si Donald Trump y est pour quelque chose finalement,
06:30c'est presque une question que je me suis posée en regardant ce documentaire,
06:32Olivier Cadic, je ne sais pas ce que vous en pensez,
06:34mais on a l'impression qu'il est finalement le produit, le résultat de quelque chose,
06:37et que lui ou un autre, ça aurait été la même chose, non ?
06:40Je me trompe, Olivier Cadic, qu'est-ce que vous en pensez ?
06:43Tout d'abord, je voudrais dire que le documentaire, je l'ai trouvé très bon,
06:48et j'ai reconnu l'histoire que j'ai moi-même observée pendant ces 40 dernières années.
06:58Pour certains, certains ont voté américain en disant que c'est le nouveau Reagan,
07:03en réalité, puisqu'on commence à peu près à ce moment-là,
07:08c'est en fait l'inverse de Reagan.
07:11Reagan, c'était un libre-échangiste, c'était justement une nouvelle vague politique qui arrivait,
07:16et aujourd'hui, on est plutôt sur un mouvement isolationniste,
07:20et on est totalement inversé par rapport à cette période-là.
07:24Aujourd'hui, on est sur un système totalement inversé, le repli sur soi.
07:27Il y a une petite critique que je pourrais avoir sur le documentaire,
07:33c'est plutôt un côté anxiogène, ça génère un peu quelque chose comme ça,
07:38et ça, c'est justement là-dessus que fonctionnent les isolationnistes,
07:44c'est développer le sentiment de crainte, de peur.
07:47L'autre fait peur, donc moi d'abord, et le moi d'abord, ça fonctionne bien avec les gens.
07:55Donc on sent que Trump a profité de cette vague, l'a compris, il est pragmatique.
08:05Donc c'est pas un hasard que ce soit lui, quoi.
08:07Il fait lui-même partie de l'élite, et c'est là où elle adresse,
08:11c'est de donner l'impression, je dirais, aux masses,
08:15qu'on est de leur côté face aux élites.
08:19Ce qui est plus préoccupant aujourd'hui, c'est ce qui, à mon avis, pour moi, est le plus préoccupant,
08:25c'est le moment où ça va basculer,
08:27c'est-à-dire le moment où les masses vont se rendre compte que ce gars-là n'est pas le vrai représentant des masses,
08:32et c'est là.
08:33Donc toute la question aujourd'hui, on a cette évolution qui est là.
08:38Là, ce qui est intéressant, c'est aujourd'hui, nous, on est plutôt dans la question,
08:42est-ce qu'on va vers le libre-échange, on reste vers le libre-échange sur cette vision,
08:46ou est-ce qu'on se replie sur soi avec, faut pas oublier, c'est Romain Garry,
08:50donc le patriotisme, c'est l'amour de son pays,
08:54le nationalisme, c'est la haine de l'autre.
08:56Et donc, il faut voir, parce que le nationalisme,
08:59quand on voit ce mouvement qui vient, qui se développe,
09:03en fait, la haine de l'autre, à un moment, elle se retrouve,
09:05et donc on va le voir avec des tensions qui vont se multiplier,
09:09et donc c'est notre côté anxiogène, en disant, ouh là là, ça va être catastrophique,
09:13attention, ce qui fait la différence entre les Etats-Unis et nous,
09:17c'est ce commerce des armes, c'est le fait que les armes sont, je dirais, à la portée de chacun,
09:23et là, effectivement, on peut avoir une inquiétude,
09:26c'est qu'est-ce qui va se passer demain, quand vraiment, il va y avoir un affrontement.
09:29– Mathieu Boccoté ?
09:30– Pardon, moi je ne suis pas certain qu'on puisse parler de fatigue de la démocratie,
09:34je pense qu'on peut parler de fatigue des démocrates,
09:36c'est une chose, on peut parler de fatigue du progressisme, c'est une chose,
09:39j'aurais de grandes réserves à dire, quant à moi,
09:41qu'il y avait un camp dans cette élection, la démocratie,
09:43l'autre, le camp des autocrates,
09:44je pense qu'on était devant deux partis démocratiques au sens large,
09:47un parti qui a connu un vrai virage sous Joe Biden,
09:50en fait Joe Biden était, selon une forme de paradoxe,
09:52c'était la dernière trace de l'ancien parti démocrate,
09:55avec un parti démocrate qui s'était profondément wookisé,
09:57premier élément, et dans le cadre du parti républicain,
09:59sous Trump, je rappelle qu'il y a eu globalement trois grands tournants
10:02dans l'histoire du conservatisme américain depuis les années 60,
10:05il y a le tournant Goldwater, le tournant Reagan,
10:07et ensuite le tournant Trump,
10:09chaque fois, les trois, quoi qu'on en pense,
10:11ont été chaque fois présentés comme des ultra-conservateurs,
10:13quasi-fascisants, dangereux pour la démocratie,
10:15et dans le cas de Trump, on a la tentation, je crois,
10:17dans une certaine intelligentsia…
10:18– De tomber dans le même piège ?
10:19– Oui, et quoi qu'on pense du personnage,
10:21c'est-à-dire refuser de le fasciser,
10:23refuser de le présenter comme un personnage
10:26qui mettra en danger la démocratie en elle-même,
10:28ce n'est pas l'embrasser,
10:29ça consiste simplement à se dire que les Américains
10:31qui ont voté pour lui ne sont pas, comme je le dis,
10:33des fatigués de la démocratie,
10:35ne sont pas des gens moins compétents civiquement que d'autres,
10:37c'est simplement des gens qui voyaient la situation
10:39et considéraient globalement qu'il y avait un plus grand danger
10:42avec les démocrates qu'avec les républicains.
10:44– Ludivine Gilly ?
10:45– Oui, sur l'aspect démocratie, en fait,
10:50je pense que, lors de cette élection,
10:52il y a plusieurs récits qui se sont affrontés,
10:56les démocrates, en particulier Joe Biden,
11:00Kamala Harris a légèrement altéré le message
11:04lorsqu'elle est entrée en campagne,
11:05Joe Biden était vraiment sur l'aspect démocratie,
11:08Kamala Harris a fait campagne sur la question des libertés,
11:11donc en recadrant un peu le type de discours,
11:15et c'est un message qui a été porteur
11:17auprès d'une partie de la base démocrate,
11:20mais manifestement, pas suffisamment pour mobiliser
11:23puisque Kamala Harris a obtenu, in fine,
11:25moins de suffrages que l'on avait obtenu de Joe Biden,
11:28quatre ans auparavant.
11:30En revanche, l'alerte émise par les démocrates
11:36concernant la démocratie,
11:38ça n'est pas quelque chose qui a trouvé un écho plus large
11:42au sein du Parti républicain et surtout au sein des indépendants.
11:46Et là où je veux en venir, c'est que,
11:48lors de cette élection, il y a un facteur surtout qui a joué,
11:52c'est l'économie et la préoccupation de la population
11:54pour l'économie, et quelque part,
11:56les questions démocratiques ont mobilisé une partie
12:00des démocrates, mais c'est surtout sur la question économique
12:04et la perception du déclassement pour certains
12:07et de la dégradation de leurs conditions personnelles.
12:09Et la confiance en Donald Trump sur ces questions-là.
12:11Exactement.
12:12Trump pourrait-il être lui-même dépassé, dépassé par sa droite
12:15et par ce que la réalisatrice appelle des enfants politiques ?
12:19Avant d'entendre vos réponses et notamment vous, Dominique Simonnet,
12:22je voudrais que l'on revoie ensemble un extrait du clip de campagne
12:25d'une des figures de cette aile dure du trumpisme,
12:28elle s'appelle Marjorie Taylor Greene.
12:29Ça dure quelques secondes, c'est assez intéressant.
12:37We're going to blow away the democrat socialist agenda.
12:51Dominique Simonnet, on a affaire à qui là ?
12:53Est-ce que les bébés Trump, les enfants politiques de Trump
12:55pourraient être beaucoup plus durs, dans l'aile dure de la droite américaine ?
12:59Est-ce que Trump pourrait être dépassé lui-même par ce mouvement
13:02qu'il a fait lui-même naître, qu'il est en train d'engendrer ?
13:05Est-ce qu'il pourrait appliquer,
13:06notamment sous la pression de ses enfants politiques,
13:09ce projet 2025 qui a fait beaucoup parler pendant la campagne
13:12parce qu'il a été considéré comme très radical ?
13:14C'est compliqué de savoir comment les choses vont évoluer
13:17parce que Donald Trump, de toute façon, il a cette vision-là,
13:21on voit bien, lui...
13:22La même que ces gens-là ?
13:24Oui, enfin, il y a des nuances, c'est compliqué,
13:26mais je veux dire, il a effectivement un projet d'affaiblissement.
13:32Alors, je reviens sur ce que disait Mathieu tout à l'heure,
13:34il y a malgré tout, quand même,
13:36c'est vrai que les démocrates ont été, pour moi, catastrophiques dans la campagne,
13:42ils ont découpé la société américaine en identité
13:45avec ce hockyisme omniprésent
13:48qui fait que la majorité des Américains ne sont pas du tout retrouvés.
13:52Pour eux, c'était effectivement le pouvoir d'achat,
13:54c'était comment je vais vivre mieux,
13:57parce que les prix sont extrêmement élevés aux États-Unis,
14:00c'est très compliqué pour un certain nombre de gens,
14:02beaucoup de gens, notamment dans les États du Nord,
14:03qui se trouvent toujours déclassés et oubliés par ce système politique.
14:10Mais il y a une volonté, malgré tout, de Donald Trump et des gens autour
14:19d'avoir un autre modèle de la démocratie,
14:22c'est pas forcément une autocratie,
14:25mais avec un pouvoir exécutif qui est renforcé,
14:29avec un système judiciaire qui est, on le voit,
14:33qui est asservi.
14:35Je précise pour nos téléspectateurs ce fameux projet 2025,
14:37c'est un plan de 900 pages rédigé par un puissant think tank
14:41et qui prévoit d'élargir les pouvoirs du président,
14:43de nommer les fonctionnaires selon leur idéologie.
14:45C'est ça le plan, c'est ça le projet.
14:47Donald Trump l'a rejeté, son programme s'est réduit à 18 pages,
14:51il l'a rejeté, mais malgré tout, il s'est inspiré par cela.
14:55Cela dit, lui, il veut plus de pouvoir,
14:58plus de pouvoir et il veut que les choses,
15:01que les gens autour de lui soient lui face à l'égence.
15:04On l'a vu avec le Congrès, on le voit avec les juges.
15:07Donc ça va donner un affaiblissement des contre-pouvoirs aux Etats-Unis.
15:11Ça, c'est un projet qui est répété,
15:14qui est sans arrêt réitéré,
15:18qui correspond à une forme de...
15:22On va citer Steve Bannon, qui va dans les excès,
15:28mais malgré tout, une forme de démocratie un peu illibérale
15:31sur un modèle à la Orban,
15:33sur un modèle qui aussi fait son chemin en Europe.
15:37Ça, c'est le projet.
15:40Simplement, après, il y a la réalité, il y a le choc du réel.
15:42Est-ce que ça va être applicable ?
15:44Est-ce que, par exemple, les mesures protectionnistes
15:48ne vont pas se retourner contre les consommateurs américains ?
15:50Il y a plein de choses qui vont...
15:52Et cette idée d'annexion du Canada, du Groenland, du Panama,
15:55est-ce que Donald Trump a un début de comportement d'autocrate ?
16:00Alors, il y a deux choses là-dedans.
16:01C'est le retour de la doctrine Monroe à l'américaine.
16:03Je précise qu'au Canada, personne ne prend au sérieux l'idée d'annexion.
16:07Tout le monde comprend très bien qu'il s'agit, dans les faits,
16:09d'une déstabilisation pour forcer une renégociation
16:12de l'accord de libre-échange nord-américain,
16:14des accords commerciaux au Canada, Etats-Unis, Mexique, pour 2026.
16:17C'est une méthode dont on est capable de distinguer.
16:20C'est la part d'excès propre au personnage qui n'est pas tout à fait appréciable,
16:23mais la doctrine Monroe revampée par Trump,
16:26qu'est-ce que ça veut dire ?
16:27C'est cette idée que les Américains considèrent
16:28que l'Amérique du Nord est leur zone d'influence,
16:30et ils exercent une forme de souveraineté surplombante sur tout ça.
16:33Mais c'est le contraire, d'ailleurs, de l'isolationnisme.
16:34Donc c'est de la négociation, ce n'est pas le comportement d'un autocrate ?
16:37Je veux dire que pour Trump, c'est sa méthode,
16:40on la connaît depuis longtemps, c'est un élément.
16:43Ensuite, sur la question de l'autocratie,
16:44je me permets de revenir sur un point.
16:46Au cœur de la proposition de Trump sur la redéfinition de l'État,
16:49il y a surtout la critique de ce qu'il appelle l'État administratif.
16:51Quand vous parlez du projet 2025, du Heritage Foundation,
16:55c'est ça, qu'est-ce qu'on appelle l'État administratif ?
16:57C'est la multiplication des autorités « indépendantes »,
17:00plus ou moins indépendantes, qui relèvent au niveau fédéral
17:04et qui, du point de vue des conservateurs américains,
17:05depuis longtemps, pervertissent l'esprit de la démocratie américaine.
17:08Pourquoi ?
17:08Parce qu'il crée une forme de couche bureaucratique significative
17:12qui confisque les pouvoirs qui, traditionnellement, devaient revenir
17:15soit aux élus, soit à la présidence, soit aux États,
17:18soit aux villes, soit aux municipalités, soit aux comtés.
17:21Donc, on est dans une logique, dans leur esprit,
17:23je ne dis pas qu'ils ont raison, de retour à une démocratie
17:25qui n'aurait pas encore été confisquée par la couche bureaucratique,
17:29qui est une question très importante dans la droite paléoconservatrice
17:32dont je parlais plus tôt, depuis les années 80.
17:34Donc, ayons à l'esprit que, pour eux, il ne s'agit pas de se trouver un tyran,
17:38il s'agit de se détacher d'une couche non-redevable,
17:41non-responsable démocratiquement et qui a pris beaucoup de pouvoirs.
17:44Oui, exactement, qui a pris beaucoup de pouvoirs depuis environ 40 années.
17:47Olivier Kaddi.
17:52Je pense qu'aujourd'hui, Trump a été dans un jeu
18:00pour lui permettre de gagner le pouvoir.
18:03Je ne suis pas sûr qu'il sache bien, lui-même,
18:05ce qu'il va faire la semaine prochaine.
18:08En tout cas, c'est souvent l'impression qu'il donne.
18:11Et donc, on peut s'attendre à tout et son contraire.
18:14Je pense qu'il faut avoir le même pragmatisme que celui qu'il a
18:20et prendre avantage de toutes ces décisions pour nous.
18:24Les États-Unis restent une démocratie.
18:28On peut la critiquer, elle est très critiquable.
18:32Quand je parlais du système autocratique, c'est la Chine.
18:38Là, on ne vote pas pour le président, on ne vote pas pour ses représentants.
18:42La démocratie, c'est justement représenté par les États-Unis.
18:46La France en est une, on parle d'illibéralisme.
18:49On voit bien qu'elle peut avoir ses faiblesses, elle a ses faiblesses.
18:53Mais la question, encore une fois, c'est comment est-ce qu'on voit les choses.
18:57L'engagement politique, c'est est-ce qu'on a envie de créer une bipolarisation
19:02et dire que le mal, c'est l'autre ?
19:04C'est facile, d'ailleurs, on n'a pas à développer d'argumentaire
19:08puisque le problème, c'est l'autre.
19:09Donc, il suffit d'attaquer l'autre.
19:11Et les gens aiment bien ça, c'est assez confortable.
19:14Où est-ce que la volonté, c'est de faire en sorte qu'on crée un vivre-ensemble ?
19:20Le fait qu'on soit bien tous ensemble, en acceptant que tous les autres
19:26peuvent être différents les uns des autres, mais qu'on puisse vivre ensemble.
19:29C'est ça, l'approche.
19:30Pour moi, c'est ça, la différence.
19:32Et votre crainte, c'est que Trump ne nous pousse pas vers cela.
19:34Et donc, on voit bien qu'il y a une tendance aujourd'hui
19:37qui est de pousser, mais pas seulement aux États-Unis,
19:40ailleurs, dans les démocraties, qui est de créer une bipolarisation.
19:44Donc, on voit bien que ça ne marche pas.
19:46Donc, on a tous besoin les uns des autres.
19:48Et la question, c'est un peu comme la fontaine.
19:51Est-ce que vous êtes plus le loup et l'agneau ou le lion et le rat ?
19:54Est-ce que vous êtes plus...
19:55Rappelez-nous les morales.
19:56Eh bien, le loup et l'agneau, c'est le droit du plus fort.
20:04Et le lion et le rat, on a tous besoin les uns des autres.
20:07Un plus grand peut avoir besoin du plus petit.
20:10Et donc, c'est ces deux mondes-là qui s'affrontent, en réalité.
20:13Quel monde, quelle histoire vous plaît le plus ?
20:15Donc, moi, d'abord, ou alors on s'en sortira pas
20:19si on n'est pas les uns avec les autres.
20:20Et tous les débats, vous pouvez reprendre tous les sujets,
20:23on en revient toujours à cette question-là.
20:25Maintenant, moi, je suis avant tout un démocrate.
20:28Donc, c'est vrai qu'entre Trump et Xi Jinping,
20:31je préfère quand même la société américaine.
20:33Parce qu'au moins, il y a un moment,
20:36on peut échanger des arguments, on peut ne pas être d'accord,
20:40et c'est pas un problème qu'on soit pas d'accord.
20:42C'est jamais un problème.
20:44Ce qu'il faut, c'est qu'on se défende,
20:45on défend un système, effectivement,
20:47où il peut y avoir aussi une alternance.
20:50Parce que sinon, c'est là où ça devient invivable.
20:52Dans ce film, la réalisatrice nous délivre
20:54presque le mode d'emploi de l'ascension
20:56de cette droite radicale américaine.
20:58La recette, en gros, fut celle-ci, jouer sur les peurs,
21:01les peurs de l'étranger, les peurs de l'insécurité,
21:03être financée par des milliardaires ultra-conservateurs,
21:06diffuser des fausses informations,
21:07et se servir d'un média, Fox News, en l'occurrence.
21:10Pour les proches d'Obama, ce fut les clés de la première élection.
21:14Je suis convaincu que sans Fox News, on n'aurait pas eu Trump.
21:20On n'aurait pas pu élire un homme qui ment autant.
21:25La chaîne a été à l'avant-garde des fake news,
21:27en prétendant qu'elle traitait l'information
21:29de façon juste et équilibrée,
21:31et que c'étaient les autres qui répandaient des fausses informations.
21:36Et à force, tous ceux qui voulaient y croire y ont cru.
21:42Le Divine Jilly, cette recette, et notamment ce média, Fox News,
21:46a été une caisse de résonance des idées de cette droite radicale ?
21:49Oui, en tout cas pour l'ascension au pouvoir de Donald Trump en 2016.
21:54On a vu que les logiques ont un peu évolué
21:58lors de la dernière campagne,
21:59qui s'est beaucoup plus appuyée sur les réseaux sociaux,
22:03et notamment auprès de certains segments de l'électorat,
22:08les Hispaniques par exemple, les jeunes,
22:11qui vont chercher en grande partie leur information
22:15sur TikTok, Snapchat, Instagram.
22:19Et donc ça, c'est une dynamique qui est différente
22:23de celle des réseaux sociaux.
22:26Est-ce que ce qui s'est passé est propre aux Etats-Unis ?
22:28L'une des grandes questions qu'on se pose en regardant ce documentaire,
22:30ce sont les parallèles à faire avec la montée des droites réactionnaires
22:33un peu partout dans le monde, et y compris en France.
22:36Est-ce que c'est une des questions que vous vous êtes posées, Dominique Sibé ?
22:38Bien sûr, puisqu'on voit qu'il y a un mouvement quand même assez général, mondial.
22:43Emmanuel Macron a nommé cela la nouvelle internationale réactionnaire.
22:46Est-ce qu'on est dans ce contexte ?
22:48Il y a l'explication très concrète,
22:52où on voit par exemple, je le recite, Steve Bannon,
22:55qui a effectivement pris son bâton de pèlerin,
22:59qui recommence d'ailleurs, il a fait un peu de prison à cause du Capitol.
23:03Il est ressorti, il a été immédiatement adoubé par Donald Trump,
23:07et il recommence à faire son tour du monde populiste,
23:13le modèle urbain, il voit les parties les plus extrêmes d'Europe,
23:20et on voit parallèlement Elon Musk...
23:23C'est ce que j'allais vous dire, vous parlez de Steve Bannon,
23:25mais il y a Elon Musk qui soutient la FGD,
23:27et qui intervient dans ces élections législatives en Allemagne.
23:29Les résultats conservateurs en Grande-Bretagne, etc.
23:31Donc effectivement, il y a une offensive idéologique,
23:36mais je pense qu'il y a une conjonction aussi avec un État,
23:42vous venez de l'esquisser, nouveau pour toutes les sociétés modernes,
23:47à savoir ces réseaux sociaux,
23:48la manière dont on peut communiquer à des millions de personnes à toute allure,
23:52et avec cette vraie question, qui pour moi est prioritaire,
23:56c'est celle de la vérité,
23:57c'est-à-dire comment une démocratie s'est fondée sur un socle commun,
24:02on se met d'accord sur le fait que cette table est blanche,
24:05que telle personne a été élue d'une manière acceptable,
24:12il y a un certain nombre de socles communs.
24:13– Des vérités objectives, disons.
24:14– Voilà, une réalité objective, c'est d'ailleurs le terme de George Orwell,
24:18il parlait de réalité objective,
24:19il disait, s'il n'y a pas la réalité objective, la démocratie est en danger.
24:22Et donc c'est une vraie question, parce qu'on maîtrise très très mal ça,
24:26on voit de tous les débats au niveau européen,
24:28on maîtrise mal ces flux d'informations qui charrient effectivement
24:33des fausses informations, des fake news, de la propagande,
24:39et qui est extrêmement bien manipulée par les leaders les plus cyniques,
24:43qui eux n'ont rien à faire de l'exercice civil et civique de la démocratie.
24:50– Nouvelle internationale réactionnaire, Mathieu Boccoté,
24:53cette expression employée par le Président, est-ce qu'elle vous semble juste ?
24:56– Je pense qu'il est normal que les politiques utilisent des termes
24:59pour disqualifier leurs adversaires,
25:00je ne pense pas que les médias devraient utiliser ces termes-là
25:02en reprenant les termes droite réactionnaire ou extrême droite ou droite radicale,
25:06qui servent surtout à dire attention, chien et méchant,
25:08ça je pense que c'est un problème.
25:09Ensuite, utiliser de tels termes, c'est une manière de s'épargner la réflexion
25:14de savoir pourquoi tant et tant de peuples aujourd'hui,
25:16ou à tout le moins des parties si considérables de la population,
25:19ne sont pas manipulés par je ne sais quels médias,
25:22sous la forme de théories conspirationnistes de gauche,
25:24qui dit que la presse de droite manipulerait
25:26sous la forme de saroumanes politiques des populations civiques.
25:29– Pardon, quand Musk intervient dans l'élection allemande,
25:32il sait ce qu'il fait, il sait que son exemple va convaincre des gens.
25:35– L'intervention de milliardaires qui cherchent à manipuler les politiques européennes,
25:39vous pensez probablement à Georges Soros, dont on parle très peu,
25:41mais qui a joué un rôle immense ces dernières années, sans que ça indigne personne.
25:44On a parlé très peu, par exemple, du fait que Twitter pré-Musk,
25:48la fameuse question dont on a parlé beaucoup,
25:49de l'ordinateur de Joe Biden, du fils de Biden, pardonnez-moi,
25:52qui était, quand même, il ne faut pas l'oublier, factuellement, c'est documenté,
25:55c'était les Twitter Files qui l'ont confirmé,
25:58on a eu d'un côté un ordinateur, il y a le FBI, plus le Parti démocrate,
26:04qui travaillent ensemble, qui créent objectivement,
26:06qui disent c'est une fake news, ce n'est pas vrai,
26:08et qui font croire que c'est une fake news russe,
26:10pour dissimuler le fait que c'est une information qui pouvait troubler le Parti démocrate.
26:14Quand on parle de manipulation par les réseaux sociaux,
26:15des élections en fonction de certains plutôt que d'autres,
26:18on pense aussi probablement au fait que le camp Biden, en 2020, a fait cette manipulation.
26:22– Sans parler de manipulation, est-ce que juste, simplement et factuellement,
26:25vous pensez que Trump a fait des petits en Europe et en France ?
26:28– Je pense que les Européens n'avaient pas besoin de Donald Trump
26:31pour trouver que le système européiste global, avec les premiers objectifs,
26:35l'immigration massive, la confiscation du pouvoir par les autorités administratives,
26:39par les juges, des médias globalement orientés sur le grand récit progressiste
26:44plutôt qu'autre chose, une insécurité montante qu'on a tout fait
26:47pour dissimuler pendant longtemps en la présentant sous le signe du fait divers.
26:50Le commun est mortel et parfaitement capable d'arriver par lui-même
26:53au choix dans ce système.
26:54– Il n'y a pas de convergence organisée selon vous ?
26:56– Alors, je laisse de côté les théories du complot.
26:59– Non, Eric Zemmour et Sarah Knafo ont invité à l'investiture de Trump,
27:03ce sont des rapprochements qu'on constate.
27:05– Si je peux me permettre, Zemmour n'a pas eu besoin de Trump pour monter
27:07et avant ça, le RN n'a pas eu besoin de Trump pour monter,
27:09Orbán s'inscrit dans une histoire hongroise,
27:11Mélanie c'est une histoire qui est liée au système électoral italien,
27:14donc je pense qu'il faut éviter de sous-Trumpiser notre analyse de la vie politique européenne.
27:18– Mais on n'est pas dans le reproche, on est vraiment dans l'analyse de cette droite.
27:21– Vous conviendrez que le terme droite réactionnaire est un peu sur le point de dire reproche.
27:24– Oui, celle d'Emmanuel Macron, mais moi je dis droite radicale,
27:26comme je pourrais dire gauche radicale, vous voyez,
27:28à un moment donné, il y a un échiquier politique,
27:30on va de gauche à droite et on va d'un extrême à l'autre
27:32sans que ce soit forcément péjoratif, Olivier Kédic.
27:34– Vous savez, moi je ne l'appellerais pas la droite réactionnaire,
27:41je l'appellerais la droite hystérique,
27:43on revient à l'hystérisation de la société,
27:47encore une fois pour dire, donc on hystérise le débat
27:51et forcément l'autre c'est le mal absolu,
27:53alors là c'est assez intéressant de voir l'analyse,
27:57je ne connaissais pas trop,
27:59mais c'est amusant la façon dont on présente les choses,
28:01en fait, quelque part, on expose, on commente quelqu'un
28:07qui effectivement a mal agi, on explique ça très bien,
28:11et donc vous avez quelqu'un qui n'y connait rien,
28:13qui va écouter ça et qui va dire,
28:15ben oui, pourquoi pas, il a certainement raison,
28:17il est tellement convaincant et tellement convaincu,
28:20et c'est assez intéressant,
28:22quand j'étais allé au Pentagone suite au Brexit,
28:26justement, puisque le Pentagone avait fait
28:28une doctrine sur la guerre hybride,
28:30comment par la désinformation,
28:32en fait, l'objectif, c'était de faire passer
28:34un camp plutôt qu'un autre,
28:36en se disant, celui-là, il sera plus amical pour moi,
28:38donc c'est une façon de manipuler,
28:40et au lieu d'avoir un ennemi,
28:42finalement, quelqu'un qui sera plus neutre vis-à-vis de vous.
28:44C'est intéressant, cette évolution.
28:46J'ai fait rentrer dans la loi de programmation militaire,
28:50justement, en 2018,
28:52le fait qu'on ait une force pour lutter
28:54contre la désinformation,
28:56parce que le pire,
28:58c'est de faire perdre confiance
29:00au peuple, justement,
29:02dans ses représentants.
29:04Là, vous n'allez plus au combat,
29:06les gens ne suivront plus,
29:08et vos adversaires, c'est ce qu'ils cherchent à faire.
29:10Et c'est pas simple
29:12de lutter contre la désinformation,
29:14parce que la table est blanche,
29:16tout dépend comment on la regarde,
29:18tout dépend aussi si vous avez quelqu'un
29:20qui vous dit, mais non, elle est pas blanche,
29:22parce que je la trouve pas blanche.
29:24Et vous rentrez dans un débat qui n'a plus de sens,
29:26en réalité.
29:28Or, se battre contre la désinformation,
29:30ça n'a pas de sens,
29:32parce que ceux qui font de la désinformation
29:34veulent créer la confusion.
29:36Peu importe l'histoire de Biden et tout ça,
29:38pour la personne qui l'écoute,
29:40est-ce que j'ai envie d'y croire ou pas ?
29:42Est-ce que ça m'arrange ou pas ?
29:44Et donc, comment ?
29:46Et bien, justement,
29:48c'est toute la difficulté.
29:50Si vous allez sur la vérité,
29:52sur la question de la vérité,
29:54tout de suite, en face de vous,
29:56celui qui vous est votre opposant
29:58va dire, mais ta vérité n'est pas la même que la mienne.
30:00On a créé la confusion.
30:02C'est ce qu'ont voulu faire les Russes
30:04en Afrique. Ils créent la confusion.
30:06Tout le monde s'en fout de ce qui est vrai ou pas.
30:08Les gens vont croire ce qu'ils ont envie de croire.
30:10C'est ça, la réalité.
30:12Donc il faut créer une confusion plus forte ?
30:14Et c'est pour ça qu'il faut hystériser le débat.
30:16C'est ça, leur vision.
30:18Et donc, d'un fait,
30:20on va en faire un sujet de discorde,
30:22en réalité,
30:24et c'est là où ceux qui sont modérés,
30:26c'est là où la problématique du présent de la République,
30:28c'est comme ça qu'ils le voient.
30:30La problématique pour nous,
30:32qui sommes modérés, qu'on va dire centristes,
30:34c'est face à une hystérisation du débat.
30:36C'est nous qui risquons de disparaître en réalité.
30:38Qu'elles vont être les victimes ?
30:40C'est justement cette recherche
30:42de qu'est-ce qui est vrai,
30:44sur quoi pouvons-nous
30:46être tous ensemble d'accord ?
30:48Alors qu'on a des positions différentes.
30:50On le voit. C'est là où est le vrai problème.
30:52Et donc, c'est pas la condamnation d'une droite réactionnaire
30:54ou d'une gauche réactionnaire.
30:56Le problème, c'est une hystérisation
30:58de la société.
31:00Et ensuite, un mot de conclusion chacun.
31:02Sur l'hystérisation de la société,
31:04vous pensez probablement au discours des adversaires du Brexit
31:06qui disaient que ce serait pire si le Brexit passait que la Deuxième Guerre.
31:08Ce serait le retour à la Deuxième Guerre mondiale.
31:10Ça, je suis d'accord.
31:12Je me souviens très bien du moment du Brexit.
31:14J'étais tout à fait partisan du Brexit
31:16et je n'avais pas besoin de quelqu'un d'autre pour me dire
31:18que je préférais la souveraineté nationale à la souveraineté européenne.
31:20Ceux qui étaient partisans du Brexit
31:22se faisaient dire
31:24« En fait, vous êtes pire que la Deuxième Guerre mondiale.
31:26Vous nous ramenez à la Deuxième Guerre mondiale. »
31:28Je me souviens, par exemple,
31:30à l'époque de Maestric,
31:32les partisans, les opposants de Maestric se faisaient dire
31:34« Quittez la politique parce que vous nous condamnez
31:36au retour des guerres en Europe. »
31:38Ça aussi, c'est de l'hystérisation, si je peux me permettre,
31:40devenant du cas des modérés centristes autour proclamés.
31:42Donc, je pense qu'il faut éviter de croire
31:44qu'on a le monopole de la rationalité
31:46et devant soi, on a des hystériques.
31:48On a des gens qui sont en désaccord.
31:50Et on peut être en désaccord, par exemple,
31:52avec la construction européenne,
31:54on peut être en désaccord avec l'immigration massive,
31:56on peut être en désaccord avec les transitions de genre généralisées
31:58sans être hystérique et sans être hystérisé.
32:00On peut être en désaccord
32:02à partir de philosophies contradictoires.
32:04Vous prenez l'immigration massive comme si ça avait changé,
32:06mais au début du XXe siècle,
32:08on avait aussi l'immigration.
32:11C'était des Italiens, des Portugais, des Espagnols.
32:13Et aussi, ils étaient ostracisés.
32:15Il y a eu des crimes contre eux
32:17simplement parce que c'était des immigrés.
32:19Ce problème-là a toujours existé.
32:21C'est pas un problème, d'ailleurs, c'est la vie.
32:23Le monde est monde.
32:25Donc, on a un globe
32:27et on le voit avec les problèmes de réchauffement climatique.
32:29Tous les problèmes sont interconnectés.
32:31C'est ça, la réalité.
32:33Vous croyez qu'on peut créer un monde
32:35où on est tout seul,
32:37où on est isolationniste
32:39et où on va régler comme ça tous les problèmes ?
32:41On voit que ça marche pas.
32:43Le Brexit, on voit le résultat aujourd'hui.
32:45J'y vis. Je vois le problème.
32:47On le vit au quotidien.
32:49Et on voit bien que le problème,
32:51maintenant qu'on a eu Johnson,
32:53qui a réussi à être élu, à gagner les élections,
32:55parce qu'en face de lui, il avait un Corbyn,
32:57il avait une vision extrémiste à gauche.
32:59Les gens ont voté contre Corbyn,
33:01donc Johnson.
33:03Aujourd'hui, on a un retour de balancier,
33:05mais on a une démocratie. Ça va, ça vient.
33:07La problématique, pour nous, quand on est en politique,
33:09c'est est-ce qu'on peut réussir à vivre ensemble ?
33:11C'est ça, l'objectif.
33:13C'est pour ça qu'on se bat.
33:15Ce ne sera pas en ostracisant,
33:17ce ne sera pas en créant un monde où on est les uns contre les autres
33:19qu'on va s'en sortir.
33:21Dominique Simonnet et Ludwine Gilly pour conclure.
33:23En quelques secondes.
33:25Je vais simplifier. Face à un monde qui est effectivement
33:27maintenant marqué quand même
33:29par une véritable violence,
33:31une violence en politique,
33:33on le voit dans la manière dont les débats se passent aux Etats-Unis,
33:35on le voit aussi, on vient de le dire,
33:37affaibli par cette question de la vérité
33:39où on n'arrive plus vraiment
33:41à démêler le vrai du faux,
33:43et face à cette constitution,
33:45j'y reviens,
33:47mais d'empires
33:49qu'on voit la Chine,
33:51la Russie,
33:53les ambitions de Poutine
33:55et maintenant les ambitions américaines,
33:57je pense que
33:59l'Europe
34:01est la première réponse
34:03et je suis assez affolé
34:05de voir la faiblesse des réponses
34:07par rapport à ce que vous venez de dire
34:09sur le Groenland, etc.
34:11L'Europe ne dit pas grand chose,
34:13mais on n'a pas d'autre choix
34:15face notamment sur les questions de défense
34:17mais aussi sur les questions économiques
34:19peut-être aussi pour revenir
34:21à reformuler
34:23nos valeurs parce que les démocraties
34:25sont fondées sur des intérêts certes
34:27mais aussi sur des valeurs
34:29et ça on a vraiment intérêt à les retrouver
34:31Je pense qu'on ne les partage plus forcément tous
34:33au sein de l'Europe. En un mot, pour conclure, Ludivine Giugiaro ?
34:35Je serais intéressée de voir
34:37la manière dont les
34:39premiers mois de l'administration de Trump
34:41vont se dérouler.
34:43Il va pouvoir faire beaucoup de choses
34:45avec son pouvoir exécutif,
34:47il va se heurter à une partie de contre-pouvoir
34:49tout de même parce qu'il ne dispose
34:51pas de majorités très fortes
34:53à la Chambre et au Sénat
34:55et il serait intéressant de voir
34:57aussi comment la société aux Etats-Unis
34:59réagit parce qu'on a beaucoup parlé
35:01de polarisation. Les démocrates,
35:03les républicains convaincus
35:05sont polarisés de part et d'autre
35:07mais ça représente
35:0930% un peu moins
35:1130% un peu moins de part et d'autre
35:13et on a 40% d'indépendants
35:15seront-ils déçus ?
35:17L'histoire va s'écrire sous nos yeux. Merci.
35:19Merci beaucoup à tous les quatre d'avoir participé à ce débat.
35:21Merci à vous de nous avoir suivis.
35:23Émission et documentaire à retrouver en replay sur notre plateforme
35:25publicsenat.fr. À très vite. Merci.

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