• il y a 7 minutes
Avec Laurent Couson, pianiste des BO des films de Claude Lelouch et comédien.

🗝 Découvrez plusieurs dates-clefs de la vie des plus grands artistes, auteurs et personnalités aux côtés de Jacques Pessis.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry

________________________________________

🎧 Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

________________________________________

🔴 Nous suivre sur les réseaux sociaux 🔴

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr

☀️ Et pour plus de vidéos des clefs d’une vie : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDQVk_MxJ_jFc3Az4Aqy_giC

##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2025-23-01##

Catégorie

Personnes
Transcription
00:00Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
00:03Sud Radio, les clés d'une vie, celle de mon invité.
00:05Le piano a été pour vous le point de départ d'une symphonie d'activité.
00:09Vous êtes compositeur, arrangeur, chef d'orchestre en France et en Asie, acteur et chanteur.
00:16C'est donc la partition d'une vie que nous allons dérouler aujourd'hui à partir de
00:20date clé.
00:21Bonjour Laurent Couson.
00:22Bonjour Jacques.
00:23Alors c'est vrai que vous faites plein de choses en même temps.
00:25Vous sortez un nouvel album, on va en parler tout à l'heure, de musique au piano.
00:29Mais vous avez un parcours tout à fait étonnant, à la fois dans la musique et dans le cinéma
00:33et ailleurs.
00:34Donc on l'évoque à travers les dates clés et la première que j'ai trouvée, c'est
00:38le 13 janvier 2008, c'est votre première télé, un ballet hip-hop Roméo et Juliette
00:44et vous êtes dans un studio à Budapest en train d'enregistrer la partition.
00:48Ah c'est vrai, bien sûr.
00:50Oui, ça c'était une commande d'un superbe festival qui s'appelle Suren Cité Danse
00:54et qui a la particularité de faire danser des artistes de hip-hop sur des musiques qui
01:02n'en sont pas.
01:03Donc là ils ont fait appel à un compositeur, disons classique, pour mettre en musique ce
01:07Roméo et Juliette de manière moderne et c'est vrai que c'était un grand souvenir pour
01:11moi.
01:12On avait enregistré ça effectivement avec l'orchestre de Budapest et c'est un spectacle
01:15qui a eu beaucoup de succès, qui a tourné pendant plusieurs années.
01:18Oui mais en même temps, quand on est un musicien de formation classique et qu'on est face
01:21à des jeunes qui ont appris à danser dans la rue, c'est pas simple.
01:24Non, non, c'est pas simple mais justement c'était absolument grisant de voir ce qu'ils
01:29faisaient sur ma musique qui était, elle, de facture classique et vous savez, moi je
01:33suis un homme qui aime les mélanges et les rencontres, alors évidemment, pouvoir avoir
01:38de la danse hip-hop sur ma musique, ça m'avait beaucoup plu.
01:41Alors d'après mes renseignements, le hip-hop, la première fois qu'on l'utilise dans la
01:45presse, c'est dans un article du Village Voice, un certain Steven Hager qui a écrit
01:51un ouvrage et qui dit que hip-hop, ce serait un mélange de hip, qui signifie être dans
01:55le vent, être branché et hop, sauter ou danser.
01:58En tout cas, c'est de la danse extraordinairement technique et c'est vrai qu'elle n'a rien
02:06à envier à la danse classique du point de vue de sa difficulté, de ses difficultés
02:09d'exécution, de mouvements et là, les artistes notamment qui font ce festival sur
02:13Anne Citédans sont vraiment des virtuoses.
02:14Alors ça se passe à Suresnes, au théâtre Jean Villard, qui est un théâtre très particulier
02:19aussi.
02:20Oui, bien sûr, j'ai eu une relation pendant plusieurs années avec Olivier Meyère qui
02:24est une des personnes qui m'a aussi lancé dans le monde du spectacle et notamment dans
02:29celui du ballet.
02:30Et le théâtre Jean Villard s'appelle ainsi parce que pendant quelques temps, quand les
02:34Nations Unies ont récupéré le Palais de Chaillot, Jean Villard est venu s'installer
02:38à Suresnes.
02:39C'est ça.
02:40Et Jean Villard qui est un metteur en scène qu'on oublie un petit peu trop, quelques fois
02:42alors qu'il a créé le Festival d'Avignon.
02:44Bien sûr.
02:45Alors finalement, être dans cet univers très différent de notre formation, ça vous plaît
02:49parce que vous allez très loin dans la recherche et la recherche, au départ, c'était le conservatoire
02:54de Tours parce que vous avez débuté très jeune dans la musique, Laurent Cousin.
02:58Oui, vers l'âge de 5 ans, j'ai commencé à faire un premier instrument.
03:03Comment c'est venu ?
03:04C'est venu, mes parents cherchaient un petit peu à canaliser un enfant un petit peu dissipé
03:11et ce qui a marché sur moi, c'est la musique.
03:14Et d'un seul coup, mon attention s'est focalisée et d'un loisir, c'est devenu ma passion et
03:22je n'ai plus juré que par ça, très très jeune, j'ai commencé à écrire des oeuvres
03:26très très jeunes et à vouloir être compositeur dès que possible.
03:30Vous avez commencé par le piano, enfant ?
03:31J'ai commencé d'abord par la trompette, je suis trompettiste de formation et après
03:35je me suis mis au piano parce que c'est évidemment l'instrument indispensable quand on est compositeur
03:38parce qu'on a toutes les notes sous les doigts.
03:41Et vos études ?
03:42Mon étude normale et puis conservatoire de Tours.
03:44Voilà, une école de musique, le conservatoire de Tours et après le conservatoire de Paris,
03:48ce qu'on appelle un cursus vraiment de musicien classique.
03:51Oui mais Tours justement, on dit que c'est l'annexe du conservatoire de Paris, c'était
03:55au départ l'annexe en 1925 avec 400 élèves et 17 professeurs mais c'est pas facile quand
04:03on est à Tours de venir à Paris.
04:04Oh c'est pas si difficile parce que c'est vrai qu'aujourd'hui, enfin déjà à mon époque
04:08c'était une heure de train, Tours c'est vrai que c'est un peu un petit Paris, c'est
04:13une ville aussi historique autant au niveau de la littérature que de la musique.
04:19On a Francis Poulenc, autant que Rabelais ou Balzac, de tous ces grands noms qui m'inspiraient
04:25beaucoup.
04:26J'aime beaucoup, j'ai évidemment beaucoup d'attachements pour Tours et pour la Touraine
04:29mais voilà une carrière musicale bien entendu passe par Paris donc j'ai fait comme les jeunes
04:34artistes, je suis monté à la capitale comme on dit.
04:36Oui, en même temps vous n'envisagiez pas Laurent Couson d'autres métiers que celui
04:40de la musique ?
04:41Non jamais, jamais.
04:42Ça a été vraiment une passion dévorante et qui ne m'a jamais quitté.
04:46Et vos parents étaient d'accord ?
04:47Ils étaient comme tous les parents peut-être disons inquiets au départ et se demandant
04:55comment on pouvait vivre de tout ça et puis j'espère qu'avec les années maintenant ils
05:00le sont moins.
05:01Alors il y a eu l'école normale aussi qui est une école réservée aux jeunes musiciens.
05:05Oui, à l'école normale j'ai appris notamment la direction d'orchestre qui est devenue aujourd'hui
05:09mon deuxième métier principal.
05:10Et il faut bien commencer et vous avez commencé à Radio France ce qui n'est pas évident.
05:15Non c'est vrai mais Radio France c'est une des seules structures en France qui passe
05:20des commandes à des jeunes compositeurs, qui a fait découvrir plein de grands compositeurs
05:25qui sont devenus de grands noms.
05:26C'est leur cahier des charges aussi de le faire.
05:28J'espère que ça l'est toujours aujourd'hui, j'ai l'impression que ça l'est un peu moins
05:31Mais moi j'ai un grand souvenir et c'est vrai que je suis très attaché à la radio
05:34pour cette raison-là.
05:35Le premier qui m'a donné la parole aussi à l'antenne c'était Frédéric Lodeon sur
05:40les antennes de France Inter, à l'époque où France Inter passait encore de la musique
05:43classique.
05:44Et ma première scène c'est sur la scène de Radio France donc c'est vrai que je suis
05:48très attaché à la maison de la radio pour ces raisons-là.
05:50Et vos premières compositions ont été acceptées, comment ça s'est passé ?
05:52Disons que je les ai proposées au service de la musique et oui pour la première fois
05:57j'ai eu la chance d'être joué par un grand orchestre.
05:59Et c'était des oeuvres classiques ?
06:01C'était oui, ma première commande à Radio France c'était des préludes pour piano et
06:07ensuite j'ai été, et je ne crois pas que ça se soit refait à ce jour, le premier
06:12compositeur à créer une comédie musicale à Radio France qui s'appelait Angers-les-Monts
06:17et qu'on avait créé avec les musiciens de l'Orchestre National dans le grand auditorium
06:20de la radio.
06:21On va en reparler tout à l'heure de Angers-les-Monts mais surtout ce qui est étonnant c'est que
06:25vous avez vraiment tout de suite écrit des musiques, ce qui n'est pas évident parce
06:28que vous prenez par exemple les chefs d'orchestre de variété ou les musiciens de variété,
06:32à une époque ils allaient dans les maisons d'édition l'après-midi et ils accompagnaient
06:36les jeunes chanteurs en mâle de couplets.
06:38Peut-être que c'est une personnalité, c'est comme celle d'avoir envie d'être un chef
06:43d'orchestre.
06:44J'ai toujours eu plutôt envie d'être celui qui fait les choses plutôt que celui qui
06:48les subit entre guillemets ou alors celui qui dirige les musiques plutôt que celui
06:52qui est dirigé.
06:53Voilà c'est des tempéraments peut-être aussi et j'avais vraiment envie d'écrire
06:58de la musique.
06:59Donc le chef d'orchestre ça a continué très vite ensuite ?
07:01Oui tout de suite et puis j'ai toujours dirigé mes oeuvres, depuis mon plus jeune
07:06âge j'ai dirigé tout ce que je faisais et ça continue encore aujourd'hui parce
07:10que c'est la chose la plus grisante qui soit, diriger sa propre musique c'est le cadeau
07:15ultime.
07:16Oui mais il faut trouver les formations pour ça et quand on débute c'est pas évident.
07:18Non c'est pas évident donc d'abord on commence avec ses copains, avec des jeunes
07:23musiciens comme vous et puis après j'ai eu cette chance d'être suivi par Radio
07:26France et puis ensuite par d'autres expériences dans le cinéma notamment.
07:29Et quand on passe notamment au passé, on s'aperçoit que les organs d'orchestre
07:34de variété sont nés dans un café qui était Place Pigalle où on arrivait en disant on
07:38a besoin de tant de musiciens, est-ce que vous êtes d'accord ? Et Bruno Coquatrix
07:42a débuté comme ça, comme chef d'orchestre avec une quinzaine de personnes qui étaient
07:45dans le café et il a créé son premier orchestre.
07:48Ça c'est merveilleux.
07:49Ça change d'époque.
07:50Alors ça veut dire aussi que vous avez commencé à Radio France, ensuite il y a eu la salle
07:53Playguel, il y a eu le Théâtre des Champs-Élysées et beaucoup d'autres, c'est pas évident
07:57non plus Laurent Couson ?
07:58Non mais voilà, ça a été grâce au soutien d'abord de Radio France et puis après d'une
08:05personnalité, on va peut-être en parler, qui m'a beaucoup aidé et mis sur le devant
08:08de la scène, c'est Didier Lockwood.
08:10C'est-à-dire ?
08:11Alors Didier, c'est-à-dire que quand je suis arrivé à Paris et que j'étais un
08:15jeune compositeur qui cherchait des soutiens, j'ai été frappé à beaucoup de portes
08:20de gens que j'admirais et la seule qui se soit ouverte, c'est celle de Didier Lockwood
08:23et assez plus qu'ouverte parce que c'est lui qui m'a permis d'enregistrer mon premier
08:26disque, qui l'a produit, il a joué avec moi et après il m'a appelé à être sur scène
08:30avec lui, notamment salle Playguel.
08:32Voilà, et il se trouve que le musicien classique que vous êtes a aussi une passion du jazz.
08:35Ah passion du jazz, ça j'ai toujours pratiqué le jazz dès que j'ai commencé la musique,
08:40je faisais parce que c'était aussi une manière de gagner ma vie parce que quand je suis arrivé
08:44à Paris, le fait de savoir jouer du piano jazz, ça permettait d'aller jouer dans les
08:48cabarets, même dans les hôtels, voilà, dans les pianobars et ça m'a bien aidé.
08:52Oui, et justement la comédie musicale aussi, vous défendez la comédie musicale, ce qui
08:56n'était pas évident voici quelques années.
08:58Ah oui, j'ai une grande passion pour la comédie musicale parce que c'est comme l'opéra,
09:02c'est un art total du théâtre, de la danse, du jeu et puis je me souviens de mon premier
09:07voyage à Londres où j'ai découvert les comédies musicales anglo-saxonnes et ça
09:11a changé ma vie parce que je me suis dit que c'est vraiment tout ce que j'aime au
09:13niveau musical, au niveau rythme, dans l'histoire, dans tout.
09:16Et justement, cet ange et démon dont vous parlez, eh bien, ça existe en archive.
09:20Votre première comédie musicale, c'est l'histoire d'un magicien qui décide de
09:34se séparer, de séparer le bien du mal.
09:37Le magicien, c'est le chef d'orchestre d'ailleurs, donc le chef de manière allégorique,
09:41donc il décide de séparer le bien du mal et de dire voilà, il y a des gens qui sont
09:45bien, d'autres qui sont mauvais et c'est comme ça.
09:47Et très vite, il s'aperçoit par l'arrivée d'une jeune fille qui arrive un peu dans
09:51cette espèce de monde, de ce démurge, lui dit mais non, mais moi, je crois que j'ai
09:56le bien et le mal en moi.
09:58Alors là, ça change tous ses plans et donc peu à peu, elle passe d'un camp à l'autre
10:02et elle fait se contaminer les anges et les démons.
10:05Voilà, donc c'était vraiment une comédie musicale.
10:07Oui, et c'est Laurent Couson et compagnie qui l'a produite et qui l'a fait jouer
10:11sur scène ?
10:12Absolument, mais voilà, notamment avec l'aide des gens qu'on a cités, c'est-à-dire
10:14avec l'aide de Radio France, d'Olivier Meyer, voilà, de tous ces gens qui m'ont
10:18soutenu à mes débuts.
10:19Et à une époque, encore une fois, où la comédie musicale n'existait pas, où le
10:23théâtre était roi en France, mais vous avez été un des premiers, bien avant Notre-Dame
10:27de Paris et la suite, à défendre ce genre.
10:29Oui, mais il y en a toujours très peu malheureusement.
10:31C'est vrai qu'aujourd'hui, depuis quelques années, on a vu grâce à Mogador, grâce
10:35au Châtelet, arriver enfin les grandes comédies anglo-saxonnes à Paris, mais ça a mis beaucoup
10:40de temps.
10:41Là, on vient d'assister au succès des Misérables, mais rendez-vous compte qu'ils ont fait leur
10:46carrière entièrement à l'étranger et qu'on a refusé leur oeuvre à Paris pendant de
10:50nombreuses années.
10:51Donc il y a ce genre-là, il n'arrive pas à être… En tout cas, je ne sais pas ce
10:57qui se passe avec les Français pour que la comédie musicale ne soit pas aussi populaire
11:00qu'elle l'est à deux heures d'ici à Londres.
11:03Exactement.
11:04Et vous n'avez pas seulement limité votre travail à la comédie musicale, on va évoquer
11:08une autre date importante dans votre vie, le 29 juin 2005.
11:11A tout de suite sur Sud Radio avec Laurent Couson.
11:14Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
11:17Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Laurent Couson.
11:21Vous êtes pianiste, chef d'orchestre, arrangeur, compositeur, acteur justement.
11:27Et on va l'évoquer à travers une autre date qui est celle de la deuxième séquence,
11:32le 29 juin 2005, vos débuts à l'écran dans ce film.
11:37La fleur d'amour est bien fanée, mon cœur va-t-il me pardonner ?
11:42Le Courage d'aimer, de Claude Lelouch.
11:44Vous faites vos débuts d'acteur dans votre propre rôle, Laurent Couson.
11:47Oui, je réponds toujours que non, je ne suis pas un acteur.
11:50Le truc, c'est que j'ai rencontré Claude Lelouch qui est une des personnes qui a changé
11:53ma vie.
11:54Pour le coup, là, c'est les clés d'une vie et qui m'a fait faire ma première musique
11:59de film.
12:00C'était notamment dans Le Courage d'aimer où j'étais aussi l'arrangeur de Francis
12:03Lay, à qui je pense beaucoup aujourd'hui.
12:06Et puis, Claude m'a toujours vu un peu comme un acteur, je devais avoir un peu la tête
12:11de l'emploi.
12:12Mais il faut dire que dans tous ces films, je joue quand même des musiciens, donc je
12:16joue un peu mon propre rôle.
12:17Il se trouve qu'au départ, comment vous l'avez rencontré, le Lelouch, c'est par Francis
12:21Lay ?
12:22Par Francis Lay, oui.
12:23Et Francis était une sorte d'ange de bienveillance à tel point que c'est très rare chez les
12:29compositeurs.
12:30Il s'est dit, écoute, je viens de rencontrer un jeune compositeur, j'aimerais bien que
12:33tu le rencontres parce que je crois qu'il sait faire des choses que je ne sais pas faire.
12:37Et c'était notamment toute cette partie un peu plus jazz que Lelouch aime beaucoup dans
12:41ses films.
12:42Et on s'est rencontrés, on ne s'est plus.
12:46Claude Lelouch est venu voir d'ailleurs Angers-Desmonds, il a adoré ça, il a dit il faut qu'on travaille
12:50ensemble et ça fait maintenant plus de 20 ans que ça dure.
12:54Il se trouve que Francis Lay, on l'a un peu oublié, bien sûr, il a fait toutes les musiques
12:57de Lelouch.
12:58Mais ses vrais débuts, c'est comme accompagnateur de Piaf, dans un spectacle qu'elle n'a pas
13:04fait d'ailleurs, puisqu'elle était à Mougins, elle répétait son prochain spectacle de
13:08l'Olympia et elle est morte avant de le jouer.
13:10Et il était à Mougins pour l'aider dans ses nouvelles chansons.
13:13Non mais Francis Lay, c'est un des plus grands mélodistes français et puis c'était un
13:18homme d'une gentillesse et d'une bonté, on ne pouvait que l'aimer.
13:22Le Courage d'aimer justement, c'était un film très particulier qui caricaturait les
13:27soirées mondaines, le monde un peu flou, que Lelouch n'apprécie pas forcément.
13:31Oui exactement, et puis moi j'étais très ému, c'est vrai que c'était mon premier
13:35tournage de cinéma et avec Lelouch, voir sa façon de travailler, me retrouver entouré
13:39de grands acteurs, de grands musiciens, j'étais très impressionné et tellement heureux.
13:44Il y avait aussi Pierre Barou qui était là ?
13:46Oui, bien sûr, j'ai eu la chance de connaître Pierre.
13:48Pierre Barou qui a été journaliste au départ, assistant metteur en scène, qui a travaillé
13:53avec Johnny.
13:54D'où viens-tu Johnny ? Avant de choisir sa voix.
13:56Il voulait attendre 30 ans pour choisir sa voix et lui aussi, c'était quelqu'un de
13:59très particulier.
14:00C'était un grand artiste et puis alors nous, on s'aimait beaucoup parce qu'on avait en
14:03commun cette passion pour la musique brésilienne, qu'il a beaucoup adapté lui, parce qu'il
14:07a fait peut-être les meilleures traductions des chansons, notamment de Jobim, qu'il a
14:11repris lui-même.
14:12Alors la musique de film au départ, ça faisait partie de vos projets ?
14:15Oui, tout de suite, parce que c'est vrai que quand on est compositeur, ce n'est pas forcément
14:20facile aussi de gagner sa vie.
14:22Donc la musique de film fait partie des exercices où on peut avoir en tant que compositeur
14:28du travail et être présent.
14:32Mais je n'aurais jamais pensé que je travaillerais avec Lelouch un jour.
14:36Mais la musique de film, évidemment, c'est un des plus grands exercices de composition.
14:42Oui, parce qu'en plus, on est devant sa partition pour un morceau classique.
14:45La musique de film, c'est différent.
14:47Oui et non.
14:49Disons qu'il n'y a pas vraiment de la musique de film.
14:51Il y a de la musique tout court.
14:52Sauf que là, on ne sert pas uniquement de la musique seule, mais aussi une image, une
14:57histoire.
14:58Mais je pense exactement, comme disait Morricone, que la bonne musique de film n'est pas celle
15:05qui souligne ce qu'on voit à l'écran, mais qui au contraire en prend le contre-pied.
15:09Alors, moi je me souviens de Michel Legrand qui m'avait raconté un jour qu'il voyait
15:14un film pendant des heures avant de choisir ses musiques.
15:16Est-ce que c'est le cas d'un musicien qui compose de la musique de film ?
15:19Oui, déjà il y a deux écoles.
15:22Il y a la musique de film qui est écrite avant les films et il y a celle qui est écrite
15:25après les films.
15:26Par exemple, avec Lelouch, l'ensemble de la musique non seulement est composée avant,
15:30mais elle est aussi enregistrée avant.
15:31Parce que Lelouch aime la passer sur le tournage, il aime la diffuser exactement comme faisait
15:36Sergio Leone ou comme faisait Fellini.
15:39Les gens croient toujours que la musique arrive après, alors que souvent, et d'ailleurs
15:42la musique que l'on retient et qui est restée dans l'histoire, sont souvent des musiques
15:46qui ont été faites avant les tournages des films.
15:48Mais comme Lelouch change ses scénarios, ça ne doit pas être facile.
15:51En tout cas, peut-être qu'il change ses scénarios, mais il ne change jamais une note
15:54de musique.
15:55Donc ça, c'est vrai qu'on a une position privilégiée avec lui, il a un tel respect
15:58pour la musique que jamais il ne nous demandera de couper une séquence ou de couper une note.
16:01On a encore reçu quelques semaines de Lelouch dans les Clés d'une Vie pour son nouveau
16:05film.
16:06Il a une énergie incroyable.
16:07Comment vous l'expliquez ?
16:08Je l'explique que c'est un éternel, j'allais dire enfant, mais en tout cas c'est un éternel
16:15débutant.
16:16Voilà le bon mot.
16:17C'est-à-dire que je suis impressionné à chaque fois que je vais sur ses films à quel
16:20point on dirait qu'il fait son premier film, qu'il fait son premier plan, qu'il tient
16:25pour la première fois une caméra, qu'il dirige pour la première fois un acteur.
16:28C'est un éternel émerveillé.
16:29Et je crois que le secret de sa jeunesse, c'est ça, je l'admire beaucoup pour ça.
16:32Il n'est pas blasé.
16:33En même temps, lorsque vous composez une musique, il l'accepte ou il demande des changements
16:37Laurent Couson ?
16:38Soit il accepte une musique dans son intégralité, soit il la refuse, mais je l'ai assez peu
16:44vu demander des changements.
16:47Je crois que c'est un homme qui est un peu comme avec les gens, soit il est séduit tout
16:52de suite, soit il ne l'est pas.
16:53Alors, Claude Lelouch vous a mis le pied à l'étrier, mais il n'a pas été le seul
16:57puisque vous avez composé une trentaine de musiques de films avec des compositeurs très
17:00différents dont Luc Besson.
17:02On ne travaille pas de la même façon avec Besson ou avec quelqu'un d'autre comme avec
17:05Lelouch ?
17:06Non, parce que là, notamment avec Besson, j'ai fait des musiques de Thriller qu'il a
17:09produit.
17:10Donc là, effectivement, c'est plutôt de la musique qu'on fait après parce que là, on
17:13n'est plus sur l'illustration de l'image, notamment dans un genre qui est un Polar ou
17:18un Thriller.
17:19La musique, évidemment, très, très différente.
17:21Et c'est compliqué de travailler avec d'autres ?
17:23Non, au contraire, c'est ça qui est intéressant.
17:25Je crois qu'un bon compositeur, là encore, je me réfère à mon maître Morricone, disait
17:29qu'il doit savoir tout faire, justement.
17:31Alors, vous avez tourné dans plusieurs films de Lelouch et il y en a un où vous avez même
17:35chanté.
17:36C'est un grand cadeau parce que je jouais le rôle principal masculin du film.
18:04Alors, encore une fois, j'écris la musique pour Lelouch et il me dit, écoute, je n'arrive
18:10pas à trouver l'acteur qui va jouer Simon, qui est ce rôle qui était le rôle d'un pianiste
18:15juif qui va sauver sa peau grâce au piano dans les camps d'extermination.
18:21Et il me dit, écoute, tu ne veux pas essayer de passer l'audition, toi, parce que tu as
18:25quand même l'âge, tu as la tête du rôle, tu pourrais le faire et voilà comment ça
18:30s'est fait.
18:31Et je crois que ce qui lui a plu aussi, c'était que l'ensemble des séquences musicales, je
18:35les jouais vraiment au piano.
18:36Là, cette petite chanson que vous avez chantée, que vous avez passée, on l'a chanté en
18:40direct sur le plateau, donc tout était réel et ça, c'est vraiment très, très proche
18:45de ce qu'aime Lelouch.
18:46Oui, et la chanson, c'était aussi un univers très différent pour vous.
18:50Oui, alors il voulait que je chante.
18:52Alors, c'était la première fois que je chantais et mais Lelouch a la réputation de faire chanter
18:59tous ses acteurs.
19:00C'est le premier de son dernier film.
19:01C'est marrant parce que je regardais l'autre jour une interview de Kad Merad, qui jouait
19:05le premier rôle de son dernier film, finalement, et Kad Merad a demandé à Dujardin, toi qui
19:11as tourné avec Lelouch, comment ça s'est passé ? Il dit tu vas passer un moment extraordinaire
19:16mais surtout, s'ils te demandent de chanter, ne le fais pas ! Et en fait, il s'est retrouvé
19:20à chanter toutes les chansons du film.
19:21Il se trouve qu'Audrey Dana aime la musique, elle dit d'ailleurs qu'elle a acheté une
19:25voiture uniquement pour écouter de la musique à plein tube et que c'est la meilleure façon
19:29d'écouter ce qu'on aime.
19:30Oui, non, mais Audrey, c'était sympa parce que je l'ai un peu coachée dans cet exercice.
19:36Elle aussi, je crois que c'était la première fois qu'elle a enregistré une chanson.
19:38Alors, il se trouve aussi que la chanson, ça a continué avec un spectacle dont on
19:43pourrait mal imaginer l'affiche aujourd'hui sur les murs de Paris qui s'appelle Monsieur Luxure.
19:48Oui, ça, c'était une fable d'une sorte de Casanova moderne qui voit exactement comme
19:56dans l'histoire de plus Don Juan d'ailleurs, à la fin, son amour des femmes se retournait
20:03contre lui.
20:04Oui, mais ce spectacle n'a pas fait scandale à l'époque, mais le personnage explique
20:09qu'il recherche des sensations fortes et aime faire l'amour à une conne.
20:12Vous imaginez les réseaux sociaux aujourd'hui, Laurent Cousand ?
20:14Oui, je sais.
20:15Il y a la même chose dans la pièce de Molière, c'est exactement ce que dit Don Juan avec
20:19des mots bien mieux écrits, mais c'est exactement la même histoire.
20:23Et ce spectacle, vous l'avez monté à deux reprises.
20:25Oui, on l'avait fait à la Gaîté Montparnasse avec Jean-Luc Moreau et c'était une comédie
20:29musicale.
20:30Voilà, c'était l'histoire, l'idée de faire ce Don Juan moderne en musique.
20:36Et finalement, ça ajoutait encore à votre panoplie de diversité.
20:41Oui, j'avais pris un peu le goût de chanter après le film de Lelouch et il y avait ce
20:49projet dans les tuyaux et voilà, ça a été une drôle d'expérience.
20:54Et justement, dans votre palmarès de compositeur de musique de film, il y a aussi des films
20:58étrangers.
20:59Il y a A City in Black and White et Zanmen Jiun.
21:02Oui, beaucoup de films en Chine.
21:04J'ai fait une vingtaine de films en Chine.
21:07C'est curieux.
21:08C'est-à-dire que je suis ensuite parti diriger l'orchestre de Thaïlande.
21:13Exactement, et c'est pour ça que je voulais vous lancer.
21:17On va en parler tout à l'heure à travers une date clé qui est le 14 février 2012.
21:21D'accord ?
21:22Oui, avec plaisir.
21:23Avec Laurent Couson sur Sud Radio.
21:25Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
21:28Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Laurent Couson, nous parlons tout à l'heure
21:32de votre nouvel album Au Piano avec la nuit comme thème.
21:37On a évoqué vos débuts de pianiste, de comédien et de chanteur chez Claude Lelouch,
21:42mais vous n'avez pas fait que ça.
21:44Et j'ai repéré la date du 14 février 2012 où vous donnez un concert à l'Alliance
21:50Française de Shanghai, une heure de piano et de chansons.
21:53Oui, j'ai tout de suite été attiré par l'Asie très tôt parce que vous savez,
22:02il y a des compositeurs qui ont le rêve américain et moi j'avais plutôt le rêve asiatique
22:06pour une raison assez simple.
22:07Je me dis, à Los Angeles, des gens qui écrivent de la musique comme moi, il y en a quand on
22:11donne un coup de pied dans un arbre qui tombe, alors qu'en Asie, il n'y en a pas.
22:16Alors si j'allais plutôt tenter ma chance là-bas, et c'est vrai que je me suis tourné
22:19vers la Chine, vers l'Asie du Sud-Est et j'ai travaillé pendant une dizaine d'années
22:24en Asie.
22:25Oui, ça a commencé je crois par un tourneur qui vous avait venu pour un spectacle en Chine.
22:28Oui, c'est ça.
22:29On a tourné dans toute la Chine avec à la fois les musiques que j'avais fait pour Lelouch,
22:33je chantais des chansons aussi, je jouais du piano et puis peu à peu, j'ai côtoyé
22:38le milieu du cinéma là-bas et commencé à faire des musiques de films pour des réalisateurs
22:41chinois.
22:42Et ce concert à Shanghai à l'Alliance Française, parce que c'était le soir de la Saint-Valentin
22:46qui est un soir très important en Chine.
22:47Ah oui, c'est vrai, exact.
22:50Pour les Chinois, c'est un petit peu caricatural, mais le français, le jeune français représente
22:55un peu l'amoureux si vous voulez.
22:57Donc je crois que l'Alliance Française avait eu ce concept et alors c'était fou en Chine.
23:02C'est vrai que quand on est arrivé là-bas, on avait l'impression d'être Michael Jackson
23:06si vous voulez.
23:07On sortait de scène, on était attendus par des centaines de personnes qui hurlaient et
23:11qui voulaient tous des autographes et prendre en photo.
23:13La première fois que je suis arrivé en Chine, j'étais épaté de ça.
23:17Mais la Saint-Valentin est une chose très importante.
23:19Je crois que la coutume, c'est de contempler le ciel pour admirer les étoiles.
23:23Et puis, selon la tradition, les jeunes chinoises offrent des fruits en offrant à une fée
23:28déesse de l'amour.
23:29Ah oui, absolument.
23:30C'est d'ailleurs peut-être pour ça qu'elle m'a offré à la fin des fruits, des fleurs.
23:35C'était même des petits cadeaux avec accroché leur numéro de téléphone dessus.
23:41Voilà, c'était drôle.
23:42Mais Jean-Paul Évin, qui est un chocolatier célèbre en France et en Chine, le jour de
23:46la Saint-Valentin, il y a six heures d'attente en moyenne devant sa boutique pour acheter
23:49du chocolat.
23:50Incroyable.
23:51Comme quoi les Chinois vraiment se sont accaparés bon nombre de traditions occidentales aussi.
23:56Alors, ce spectacle à Shanghai, vous chantiez et vous chantiez l'amour, mais d'une façon
24:00totalement différente, des histoires d'amour ratées.
24:02C'est l'histoire de ma vie, peut-être.
24:06Vous savez, je n'ai pas encore eu la chance d'avoir des histoires d'amour réussies, mais
24:09je ne désespère pas.
24:10Alors, dans ces chansons que vous interprétiez, il y en avait une qui est un succès et est
24:15devenue un classique.
24:16Cette chanson, tout le monde la connaît.
24:29On a d'ailleurs le sentiment, on croit que c'est une chanson de rupture avec Jane Birkin.
24:33Ce n'est pas du tout le cas.
24:34Je ne sais pas si vous le savez.
24:35En fait, Serge Gainsbourg se retrouve à l'hôpital pendant une semaine avec une crise cardiaque
24:40et c'est là qu'il compose « Je suis venu te dire que je m'en vais » personnellement
24:43et qu'il va mourir.
24:45Je ne savais pas l'anecdote.
24:46C'est vrai que j'ai beaucoup chanté cette chanson, comme toutes les chansons de Gainsbourg.
24:49D'abord parce que j'ai une admiration sans borne pour le talent de Gainsbourg, le talent
24:53de parolier, le talent de musicien, ce génie de la mélodie.
24:56Et puis aussi parce que c'est des chansons qui sont complètement dans ma voix.
25:00Je ne suis pas un grand chanteur, il ne l'était pas non plus, mais son charme vient du fait
25:05qu'on a l'impression qu'il vous sussure les mots à l'oreille et c'est ce que je sais
25:09à peu près faire aussi quand je chante une chanson.
25:11Vous n'avez jamais pris le cours de chant ?
25:13Non, non, non.
25:14Je ne me prétends pas chanteur du tout.
25:16Il se trouve aussi qu'il y a eu la Chine et ensuite il y a eu la Thaïlande.
25:20Oui.
25:21Alors la Thaïlande, ça c'est une histoire incroyable parce que je vais pour la première
25:24fois pour diriger l'orchestre là-bas, ça se passe bien.
25:27Et puis cet orchestre cherchait un directeur musical pour arriver à développer leurs
25:34activités.
25:35Il se trouve que j'avais envie de tenter une expérience asiatique.
25:40Ça a coïncidé aussi à un moment où j'ai rencontré des Chinois qui montaient le plus
25:45grand studio d'enregistrement d'Asie justement à Bangkok et qui cherchaient aussi un directeur
25:50musical.
25:51J'ai dit, allez, je tente l'expérience, je vais m'expatrier là-bas.
25:53Il fait beau, il va faire 30 degrés toute l'année et puis ça va me permettre d'être
25:57aussi plus près de la Chine où je commençais à beaucoup travailler.
25:59Et j'ai vécu cette expérience asiatique pendant presque cinq ans entre Bangkok et
26:03Shanghai.
26:04Oui, avec deux orchestres.
26:05Je crois qu'il y avait le South Asia Symphony Orchestra et le Bangkok Chamber Orchestra.
26:09C'est ça.
26:11Avec le Bangkok Chamber Orchestra, on faisait un répertoire vraiment classique, vraiment
26:14de musique classique.
26:15Et avec l'autre orchestre, on travaillait dans ce studio où chaque semaine, ça a été
26:19un grand succès, on faisait des séances d'enregistrement à la fois de musique de
26:23film.
26:24Alors ça a été fou parce que ça m'a permis à la fois de travailler aussi bien avec Bollywood,
26:27avec les films indiens, avec les films chinois, les films hongkongais et aussi même de faire
26:31venir des artistes français.
26:34On a réalisé par exemple là-bas des albums pour Dave, pour Aznavour, pour Mansé, voilà
26:40pour des grands artistes français qui aussi ont utilisé cet orchestre.
26:44Et le Studio 28, je ne sais pas si vous le savez, il y a à Montmartre un cinéma qui
26:49est le Studio 28, qui était un des premiers cinémas d'art et d'essai où Cocteau a débuté,
26:54où Abel Gance a tourné et où a été tourné Amélie Poulain.
26:57Oui, c'est ça.
26:58Alors en Thaïlande, ça s'appelait Studio 28 parce qu'il était dans un seuil, un seuil
27:02c'est ce qu'on appelle une petite rue qui était la rue 28, seuil 28, alors ça n'a
27:07pas le même charme.
27:08Alors la Chine et la Thaïlande c'était bien, mais encore faut-il pouvoir correspondre
27:12avec ceux qui y vivent ? Il faut parler leur langue ?
27:15Non, parce que les musiciens que j'avais en Thaïlande sont tous ce qu'on appelait
27:20des Aïssos, c'est-à-dire des gens vraiment qui ont tous fait des études à l'étranger
27:24donc qui parlaient un anglais absolument parfait, donc on ne parlait pratiquement qu'anglais
27:28entre nous.
27:29Et en Chine c'est à peu près la même chose, et puis c'est vrai que se mettre à apprendre
27:35le chinois à passer un certain âge ou le thaïlandais, il faut quand même y aller.
27:41Et la musique thaïlandaise, parce que la musique thaïlandaise elle fait partie de
27:44la culture orale au départ ?
27:45Magnifique, je me suis beaucoup intéressé à la musique d'Asie du Sud-Est, aussi à
27:50la musique indonésienne, je ne sais pas si on va en parler mais je fais depuis plusieurs
27:55années ce projet Piano Gamelan, le Gamelan c'est un orchestre traditionnel indonésien
28:00et j'adore ces musiques traditionnelles asiatiques parce qu'elles sont le total opposé
28:05de la pensée occidentale, c'est vrai que c'est une tradition orale, ce n'est que de
28:09l'instinct et quand je travaille avec eux je suis impressionné à quel point, ben voilà
28:14ils n'ont évidemment pas de partition, ils n'écrivent rien et tout est dans leur mémoire
28:19et dans leurs yeux.
28:20Et ce projet alors ?
28:21Ah ça c'est une rencontre merveilleuse parce qu'on ne joue pas du tout la même musique,
28:25on n'est pas accordé de la même manière, on ne sait pas où on va aller et à chaque
28:28fois c'est une expérience incroyable, on se retrouve, il fait 35 degrés, on est gérantement
28:32dans une cour en plein air, je branche un piano électrique, je dégouline tellement il fait
28:37chaud et là on cherche pendant plusieurs jours une musique qui va nous convenir à
28:42tous les deux et on finit par un concert, ça je le fais tous les ans à Bali, c'est
28:46un moment extraordinaire.
28:47C'était la tradition de la musique électronique ou de la musique de Pierre Boulez ou de la
28:51recherche du club d'essai à Paris ?
28:52Oui absolument et c'est vrai que la musique indonésienne quand elle est arrivée c'était
28:57au cours de l'exposition universelle à Paris en 1900 et notamment ça a changé la vie
29:02de grands compositeurs, Debussy, Stravinsky, Satie ont assisté pour la première fois
29:06à la performance d'un orchestre de gamelan à l'exposition universelle, ils ont dit
29:10qu'est-ce que c'est que cette musique et ils l'ont beaucoup intégré dans leur composition
29:13après.
29:14Le problème c'est qu'un français qui arrive en Thaïlande ou en Chine, quelquefois il
29:17n'est pas facilement admis ?
29:19Non, de toute façon il faut bien comprendre qu'on ne sera jamais intégré dans ces pays-là.
29:28On est toujours un étranger, il y a ce qu'on appelle une politesse de façade qui est extrêmement
29:33agréable donc ça veut dire que le rapport il est très cordial, il est très agréable
29:37mais vous n'avez pas et vous n'aurez jamais un rapport de cœur comme si vous étiez un
29:41natif de là-bas.
29:42Ça vraiment je l'ai appris après toutes ces années.
29:44D'ailleurs les Thaïlandais appellent les Français les étrangers bleus ?
29:47Les farangues, les farangues c'est ça, l'étranger blanc.
29:50Et ils disent qu'ils sont un civique, qu'ils ne respectent rien ?
29:53Effectivement, voilà, mais ils ont la politesse de quand même ne pas nous le faire sentir
30:00et continuer à nous sourire et à nous accueillir avec bienveillance.
30:05Ce qui est étonnant aussi dans votre parcours c'est que vous avez aussi été un chef invité
30:10de l'Orchestre National de Moldavie, c'est pas la même région ?
30:13Ah ça c'est incroyable, oui oui bien sûr, oui oui, mais comment j'ai atterri en Moldavie
30:19la première fois, ça devait être aussi par l'intermédiaire de l'Alliance Française.
30:23J'en profite d'ailleurs pour dire que ces histoires d'Alliance Française c'est extraordinaire.
30:27Ça existe dans le monde entier et les gens ne savent pas assez que l'Alliance Française
30:32sont d'abord des écoles où on apprend à parler français dans le monde entier mais
30:36ce sont aussi des instituts culturels et ces instituts culturels ont permis à plein d'artistes
30:42dont je fais partie de permettre de voyager et de rencontrer des cultures là-bas.
30:48Et c'est vrai que je pense que, j'en suis même sûr, c'est comme ça que ça s'est fait
30:52pour la première fois en Moldavie qui est un pays où je n'aurais jamais pensé aller
30:56et j'y vais maintenant tous les ans.
30:58J'adore la Moldavie, d'abord c'est des grands musiciens, vraiment ces musiciens de l'Est,
31:04dès que vous avez une note jouée sur un violon vous avez tout de suite l'émotion,
31:08le son, c'est dans leur gêne, c'est dans leur ADN.
31:12Mais il y a aussi des choses étonnantes parce que vous avez la Moldavie, la Chine et vous
31:16avez aussi travaillé, Laurent Couson, à Séville et à Rabat.
31:19Oui, merveilleux, avec l'Orchestre des Trois Cultures, c'est une magnifique expérience.
31:25C'est une initiative qui a été lancée notamment par Daniel Barenboim et par un grand
31:32intellectuel marocain, Mohamed Enaji, qui voulait que dans les concerts on puisse chanter
31:39en latin, en hébreu et en arabe.
31:41Donc il y a eu plusieurs fondations qui s'appellent les Fondations des Trois Cultures, il y en
31:44avait une en Espagne, une en Maroc, il y en avait une en Israël, en Palestine, un peu
31:48partout dans le Maghreb, qui permettaient symboliquement pour la paix de chanter dans
31:55les trois langues.
31:56Et vous êtes arrivé là-dedans et vous avez travaillé tellement que vous avez composé
32:00ensuite un requiem, Laurent Couson.
32:01Ah oui, c'est de là qu'est venue l'idée, plusieurs années après, d'écrire Requiem
32:05XIX, qui fut le premier requiem écrit en latin, en hébreu et en arabe.
32:10Qui a été créé, je crois, dans une synagogue et ensuite joué dans des églises à Paris.
32:14C'est ça, dans une synagogue, une église et ensuite aussi dans des lieux laïcs, comme
32:19des maisons d'opéra.
32:20Et ça fait maintenant trois ans que l'on tourne ce projet.
32:25J'essaie de faire en sorte aussi qu'être un artiste, ce ne soit pas seulement faire
32:33du divertissement, mais que ce soit aussi d'être un messager et de pouvoir un peu
32:39rassembler ce qui est devenu épargne et notamment ces divisions extrêmes qu'il peut y avoir
32:44entre les religions et les cultures.
32:45Et puis, ce qui est étonnant aussi, car vous touchez vraiment à tout, Laurent Couson,
32:49c'est votre passion pour la musique électronique et un projet électro-symphonique.
32:54Oui, encore une fois, c'est la volonté d'aller chercher.
32:59Je pense que la nouvelle musique, aujourd'hui, c'est celle du mélange, c'est celle des
33:03rencontres.
33:04Et là, ça m'amusait d'aller chercher justement des DJ et de les faire collaborer pour la
33:09première fois avec un orchestre symphonique.
33:11Ça crée une nouvelle musique et je suis absolument certain que si Ravel, Debussy ou
33:18Stravinsky avaient connu l'électronique, ils l'auraient utilisé dans leur composition.
33:22Les DJ vous ont pris au sérieux au départ ?
33:24Oui, les DJ ont énormément de respect pour les musiciens classiques parce qu'ils sont
33:29très modestes.
33:30Ils disent qu'ils passent des disques, qu'ils les remixtent, qu'ils les transforment.
33:33Mais on ne sait pas écrire de la musique, on ne sait pas en diriger, donc ils ont énormément
33:36de respect pour les musiciens classiques.
33:38Et travailler avec eux, ça se passe comment ?
33:39C'était super parce qu'ils me faisaient écouter des rythmes, parce que c'est surtout
33:44des créateurs de rythmes, des DJ, et moi, là-dessus, ça m'inspirait pour écrire
33:51des mélodies d'orchestre.
33:52Et je voulais vraiment que ce projet ne soit pas, je ne voulais pas que l'orchestre soit
33:56un prétexte simplement pour aller sur la musique électronique, mais qu'il soit écrit
33:59vraiment comme une symphonie.
34:01Donc l'écriture symphonique est assez élaborée.
34:03Les auditeurs peuvent écouter cet album sur toutes les plateformes, ça s'appelle
34:06Electro Symphonic Project, et vous verrez à quel point, en fait, c'est une véritable
34:10symphonie, simplement ensuite mise en rythme par des DJ.
34:15C'est assez particulier.
34:17Ça, c'est le côté contemporain, mais aussi le côté plus classique, et on va l'évoquer
34:21à travers la date du 1er décembre 2024.
34:24A tout de suite sur Sud Radio avec Laurent Couson.
34:27Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
34:30Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Laurent Couson, on a évoqué vos débuts
34:34à Tours, vos différentes carrières en Asie, en Thaïlande, dans tous les pays possibles
34:40et imaginables, le cinéma avec Claude Lelouch.
34:43Ça ne vous empêche pas de composer des albums, et le 1er décembre 2024 est sorti un album
34:49sur toutes les plateformes, Night Piano, un album sur le thème de la nuit, et voici
34:54un extrait.
34:55Enter in the Night, mon anglais étant très mauvais, pardon de la prononciation, et c'est
35:11un album uniquement au piano, ce qui change de tout ce que vous avez fait.
35:15Oui, absolument.
35:16C'est vrai qu'aujourd'hui, en 2024 et en 2025, ça devient de plus en plus difficile
35:20de faire des grands albums symphoniques comme j'ai pu le faire il y a quelques années.
35:24Vous parlez d'Electro Symphonique Project, on était quand même 95 musiciens sur un
35:28projet comme ça.
35:29Donc, plutôt que d'attendre que ce temps revienne, je me suis dit je vais m'asseoir
35:34derrière mon piano, je vais me mettre la nuit et je vais m'enregistrer et on va voir
35:38ce qu'il en sort.
35:39Alors il y a des nouvelles musiques et puis il y a aussi des reprises de musiques de film
35:44que j'ai pu faire dans des nouvelles versions très intimistes.
35:47Night Music, c'est fait pour écouter le soir calmement.
35:50Oui, parce que la musique d'ambiance finalement, c'est quelque chose de très important, mais
35:54elle est un peu délaissée.
35:55Oui, disons que c'est une musique intime.
35:59L'idée c'était de se dire, c'est comme si je jouais du piano dans le salon de mon
36:04auditeur.
36:05C'est un peu un retour aux sources pour vous ?
36:07Oui, c'était agréable à faire parce que c'est une petite introspection aussi, mais
36:13je dois dire qu'en fait, faire un disque de piano seul, il n'y a pas plus difficile.
36:17Moi, je préfère me cacher derrière 90 musiciens, ça m'est beaucoup plus facile
36:21que de jouer ces quelques notes beaucoup plus simples derrière mon piano.
36:26Ça, c'est un exercice très difficile.
36:28Pourquoi ?
36:29Parce que je trouve cela très intime.
36:33On est nu d'abord totalement avec son instrument, alors que dans mes compositions précédentes,
36:39j'ai toujours plusieurs dizaines de musiciens.
36:43On est comme un chef cuisinier, quand on compose, il y a beaucoup d'artifices, il y a beaucoup
36:48de recettes, donc on peut se cacher derrière tout ça.
36:50Devant son piano, on ne peut pas tricher.
36:52Il y a aussi une musique d'ambiance qui pourrait être une musique de piano-bar ?
36:56Oui, par exemple, et c'est vrai que mes premiers boulots, ça a été de faire du piano-bar.
37:03C'était à Tours ?
37:04Non, à Paris.
37:05Même à Tours, oui, c'est vrai, mon premier piano-bar, mon premier boulot, c'était dans
37:09un piano-bar à Tours.
37:10Et à Paris ?
37:11Et à Paris, bien sûr.
37:13Mais les gens ne vous écoutent pas dans ces cas-là ?
37:14Non, à un moment des fois, ils vous applaudissent, il y a un petit silence à la fin du bar,
37:21mais c'est la meilleure des écoles, c'est très formateur.
37:23Mais regardez, Beko a débuté dans un piano-bar, où il a rencontré Vidalin, et surtout Louis
37:29de Funès, pendant des années, a gagné sa vie dans un piano-bar.
37:32Bien sûr, mais voilà, moi aussi.
37:35Mais vous savez, c'est un peu là aussi que j'ai découvert la comédie.
37:38Mon premier boulot à Paris, c'était dans un cabaret, où à l'époque, il y avait pas
37:43mal d'ailleurs de transformistes, de drag queens, etc., qui s'appelaient le piano zinc,
37:47et c'est là pour la première fois que j'ai joué du piano dans les piano-bars, et c'est
37:51là que j'ai découvert le monde merveilleux de la comédie musicale, notamment.
37:54Mais Louis de Funès, je ne sais pas si vous le savez, il s'est fait engager dans un piano-bar
37:59en faisant croire qu'il avait fait le conservatoire, ce qui était absolument faux.
38:02Et ça a marché, et il a gagné sa vie comme ça.
38:05Alors, dans cet album, il y a cet album, et à côté, vous avez fait un clip avec
38:09une jeune femme qui inspire le musicien, ça aussi, ce n'est pas fréquent, Laurent Couson.
38:14Oui, c'était une idée de clip, on me dit souvent, c'est la question qu'on pose souvent
38:18des compositeurs, mais à quoi tu penses quand tu écris de la musique ? Alors là, quand
38:22j'écris de la musique très romantique, la réponse est dans ce clip nocturne, on pense
38:26sans doute à une jolie danseuse que l'on va rencontrer par hasard au coin d'une rue.
38:32Et faire un clip, ça permet de faire connaître sa musique ?
38:35Aujourd'hui, c'est vrai que c'est indispensable d'avoir de l'image, parce que c'est dur que
38:40les gens écoutent de la musique seuls, ils ont besoin d'un support visuel, et notamment
38:44à l'heure où tout le succès de votre musique n'est fait que sur les réseaux sociaux, si
38:48vous n'êtes pas accompagné d'un minimum d'image, malheureusement, vous ne serez pas
38:52écouté.
38:53Et les titres sont en anglais ?
38:54Et les titres sont en anglais, oui.
38:55C'est une obligation ?
38:56Oui, parce que là, le public auquel je m'adresse, il est aussi international, donc c'est
39:01pour ça que j'ai mis les titres en anglais.
39:03Et c'est un album téléchargeable sur les plateformes, qui est une chose qu'on n'imaginait
39:07pas il y a quelques décennies ?
39:08Aujourd'hui, on ne sort plus du tout de disques en physique, c'est absolument terminé.
39:12Donc nous sommes effectivement présents sur les plateformes, et uniquement sur les plateformes.
39:17Et entre autres avec ce morceau, Nocturne.
39:20Le Nocturne, c'est un thème favori des musiciens, Chopin, Eric Satie, Gabriel Fauré, tout
39:36le monde a un jour sacrifié au Nocturne.
39:38C'est ça, c'est un peu un hommage à tous ces grands noms.
39:40Les Nocturnes sont souvent parmi les plus belles pièces pour piano écrites par les
39:47grands compositeurs.
39:48Comment ça se fait ?
39:49La nuit permet de connaître les musiciens ?
39:53Bien sûr, la plupart des compositeurs sont quand même des noctambules et des insomniacs.
39:58On écrit beaucoup la nuit, parce que d'abord il y a le silence, et puis l'absence de lumière
40:04permet sans doute aussi de se reconcentrer sur son esprit.
40:08Ça vous arrive d'écrire la nuit ?
40:10Tout le temps, que la nuit.
40:11Mais en même temps c'est fatigant, il faut tenir le choc.
40:14Oui, mais c'est le jour, on est tout le temps dérangé, il y a le téléphone qui sonne,
40:19il y a tout ça.
40:20La nuit, on est dans sa bulle.
40:22C'est le cas des écrivains aussi, Balzac écrivait entre 1h et 8h du matin, Flaubert
40:28entre 22h et 3h du matin, et Dov Stoyevski écrivait entre 10h du soir et 5h du matin.
40:33Et à chaque fois, il y a des moments où la musique vient, elle ne vient pas, comment
40:38ça se passe ?
40:39Oui, alors, moi j'ai chacun sa technique, quand elle ne vient pas, j'insiste absolument
40:45pas.
40:46Mais très souvent, quand on parle d'inspiration, puisque c'est une question qui revient souvent,
40:50qu'est-ce qui vous inspire, qu'est-ce qui vous inspire ? Moi je vais vous dire, ce qui
40:53inspire le plus un musicien, c'est de bien connaître la musique des autres.
40:57En fait, c'est en écoutant de la musique que soi-même on va avoir l'idée d'en faire.
41:03D'ailleurs, c'était la grande leçon que disait Ravel à ses élèves, il disait d'abord
41:08imiter les autres, et c'est en imitant que vous saurez si vous avez quelque chose à
41:13dire.
41:14Vous avez imité beaucoup d'autres ?
41:15Beaucoup, beaucoup.
41:16J'ai d'abord décortiqué des partitions, je les ai reprises, j'ai essayé d'abord de
41:21m'approprier leur langage, et ensuite, en faisant ça, on crée le sien.
41:26Et dans ce langage, il y a différents morceaux, dont Under the Moon.
41:38Sous la lune aussi, la lune vous inspire ?
41:49La lune, oui, c'est magnifique.
41:51On ne la regarde plus assez.
41:55Et vous avez travaillé pour d'autres étoiles, justement, il y a eu, je crois, beaucoup
42:02de disques qui ont été faits comme arrangeurs, car c'est aussi un autre métier.
42:05Vous avez travaillé avec Aznavour, Carla Bruni, Didier Briche-Vauteur, ça n'a rien
42:09à voir avec l'univers du classique ?
42:11Non, non, c'est vrai, ça aussi, c'est quand j'étais un jeune compositeur arrivant à
42:16Paris, ça permettait de trouver du boulot, et puis aussi d'apprendre le métier, d'apprendre
42:23l'écriture.
42:24C'est-à-dire, quand on travaille avec Aznavour ou avec Carla Bruni, ce n'est pas la même
42:27chose ?
42:28Non, mais c'est-à-dire qu'on n'a pas grand-chose au départ, on a souvent par exemple un guitare-voix
42:32ou un piano-voix, et le travail d'un arrangeur, c'est de trouver quelle orchestration va aller
42:37avec cette chanson.
42:38Oui, il faut encore que l'artiste l'accepte.
42:40Exactement.
42:41Alors, on s'adapte à chaque artiste ?
42:42Oui, on s'adapte à chaque artiste, on ne va pas faire la même orchestration pour un
42:46chanteur qui a une grande voix, ou un chanteur qui a une voix un peu plus intime, évidemment,
42:51on va adapter aussi en fonction de ça.
42:52Et avec Aznavour, comment ça s'est passé ?
42:54Oui, j'ai rencontré Aznavour à la fin de sa vie, et d'ailleurs, à ma connaissance,
43:03les chansons sur lesquelles j'ai travaillé ne sont toujours pas sorties, j'espère qu'elles
43:08le seront un jour, parce que je crois que c'est les toutes dernières chansons qu'il
43:12a écrites, et je ne crois même pas que le grand public les connaisse.
43:15Non, je les connais car il m'a montré les textes, il a travaillé dans sa maison de
43:17Mouriesse, il avait 40 chansons en prévision, il a écrit des musiques, il devait les enregistrer,
43:23et il nous a quitté avant de les enregistrer.
43:25Mais c'est exactement ça, vous savez tout Jacques !
43:27Il y a eu Renaud aussi, c'est très différent.
43:30Ah, avec Renaud ? Non, Renaud, je n'ai pas travaillé directement avec Renaud, mais il
43:35avait fait les musiques d'un album que j'ai fait pour Régine, et que j'ai orchestré.
43:40Et il y a Ariel Domballe aussi, c'est quand même très différent.
43:43Oui, Alain, c'est très différent aussi ! Écoutez, chaque artiste que j'ai pu rencontrer
43:51m'a nourri, et voilà.
43:53Il faut les suivre, il faut s'adapter à eux ?
43:56Absolument, absolument.
43:57On est au service d'un artiste quand on est arrangeur, c'est sûr.
44:00Alors, on en revient à cet album où il y a effectivement des morceaux qui évoquent
44:05des souvenirs très précis, comme celui-ci.
44:23Ces amours-là.
44:28Alors là, c'est un duo avec Cécilia Cara.
44:31C'était une reprise ?
44:32Non, mais c'est le thème de ces amours-là dont on a parlé tout à l'heure, le film
44:35de Lelouch.
44:36Et c'est vrai que c'est un thème que les gens aiment bien, voilà, depuis une dizaine
44:41d'années.
44:42Je vois qu'il est écouté régulièrement sur les plateformes, donc j'avais envie de
44:46livrer aux gens ce petit cadeau, de leur faire une version piano-solo.
44:49Mais il y a eu d'autres versions, il y a eu une version avec Cécilia Cara.
44:52Ah oui, oui, c'est la version originale du film qu'on avait enregistrée avec Cécilia
44:56Cara.
44:57Et puis dans le film, il y a une version avec Audrey Dana, il y a même une version avec
45:01Angoun, il y a une version symphonique, voilà.
45:05Alors, vous avez un nouveau combat et vous le menez, je crois, vous n'êtes pas le seul,
45:09Laurent Cousan, c'est l'intelligence artificielle.
45:12Oui, ça, ça m'inquiète beaucoup parce que c'est la mise en danger de beaucoup de métiers,
45:19mais peut-être particulièrement des métiers de créateurs.
45:22Et je crois qu'à partir du moment où une intelligence peut créer de l'art, elle va
45:29créer l'humanité tout entière.
45:31Donc, ce n'est pas seulement un problème professionnel, c'est un problème éthique
45:36et philosophique extrêmement grave.
45:38Et comment vous pensez le mener ? Parce que moi, je vois notamment les comédiens de doublage
45:44sont très inquiets parce qu'on peut remplacer leur voix par l'intelligence artificielle.
45:48Je crois que la seule manière de le mener, malheureusement, c'est par des actions juridiques
45:52extrêmement fortes.
45:53Donc, il faut qu'il y ait des jurisprudences.
45:54Il ne faut pas oublier qu'une intelligence artificielle, ça ne travaille pas par l'opération
45:58du Saint-Esprit, ça travaille en mélangeant de manière illégale, j'insiste bien sur
46:03le mot illégale, des œuvres du patrimoine mondial.
46:08Toutes ces œuvres sont des œuvres protégées par le copyright et par le droit d'auteur.
46:12Donc, la création d'une intelligence artificielle, que ce soit une création picturale ou musicale,
46:17est une création illégale.
46:19Donc, il faut qu'il y ait des procès et des condamnations et des jurisprudences extrêmement
46:24fortes pour que ces logiciels de fabrication d'IA savent qu'elles font de la contrefaçon
46:31et qu'elles sont condamnées pour ça.
46:32Et ça fait partie de vos combats ? D'autres vont vous suivre ?
46:34C'est exactement mon combat.
46:36Et si on n'arrive pas à ça, alors tout est permis dans ce cas et plus rien n'existe.
46:42Ce qui est rassurant, parce qu'il y a un côté artificiel dedans, il y a eu un match
46:45Raphaël Enthoven contre l'IA avec une épreuve du Bac, ça a été jugé par des philosophes.
46:52Raphaël Enthoven a eu 20 sur 20 et l'IA 11 sur 20.
46:56C'est quand même rassurant pour l'avenir.
46:58Non mais, le débat qui se pose est le suivant.
47:03Je suis certain qu'une intelligence artificielle n'écrira jamais comme Mozart ou comme Chopin.
47:08J'en suis certain.
47:09Mais le problème, c'est pas celui-là.
47:11C'est que l'intelligence artificielle est en train, par exemple, si je parle de musique,
47:14de remplacer peu à peu tous les travaux plus simples que l'on faisait, par exemple
47:19de la musique pour une émission de télévision, pour un jingle, pour une pub, pour tout ça.
47:24Mais tous ces travaux, ils avaient un avantage, c'est de nous faire gagner notre vie en tant
47:27que compositeurs et nous permettre, à côté, d'écrire des musiques plus intéressantes.
47:30Donc si on remplace tous ces travaux, c'est la mort pour nous.
47:34Et ce combat, vous le menez avec d'autres, je suppose ?
47:37J'essaie de le mener, oui, avec les sociétés d'auteurs et avec tous ceux qui veulent bien
47:43nous suivre.
47:44J'aimerais, je le dis ici, que mes confrères prennent un peu plus la parole là-dessus
47:48parce que parfois, on a l'impression que si on ne le dit pas, le grand public ne va pas
47:53s'en rendre compte.
47:54C'est exactement la crainte de beaucoup de vos confrères aujourd'hui.
47:58Il faut qu'ils prennent comme vous la parole.
48:00Exactement.
48:01J'incite vraiment tous mes confrères à prendre la parole et pas seulement mes confrères
48:04musiciens, tous ceux dont les métiers sont menacés par l'intelligence artificielle.
48:08Night Piano, donc c'est votre album actuel qui est sur les plateformes, et l'avenir,
48:11Laurent Couson ?
48:12Alors, l'avenir, là, je vais attaquer une nouvelle musique de film bientôt, et puis
48:20c'est ma vie de chef d'orchestre, voilà, entre le répertoire classique que j'ai toujours
48:24énormément de plaisir à diriger, et puis mes albums plus personnels.
48:28Cette émission était assez troublante parce que je réalise un petit peu à quel point
48:35je suis passé d'un univers à un autre, mais je compte bien continuer à le faire
48:40parce que finalement, je suis pluriel, et sans doute tant mieux.
48:45Oui, ne changez surtout rien, et comme vous aurez encore plein de choses à dire, vous
48:48reviendrez dans les Clés de Villevie.
48:49Avec plaisir, Jacques.
48:50Merci Laurent Couson, les Clés de Villevie c'est terminé pour aujourd'hui, on se retrouve
48:54bientôt, restez fidèles à l'écoute de Sud Radio.

Recommandations