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Le capitalisme n’a-t-il plus de raison d’être dans un monde dominé par les géants de la Tech ? C’est la thèse avancée par l'économiste grec Yanis Varoufakis et d’autres penseurs contemporains qui voient dans l’émergence des plateformes numériques et l’ascension d’Elon Musk sous l’ère Trump un basculement vers un nouveau système qu’ils qualifient de techno-féodal.
Les géants du numérique ne se contentent plus d’être de simples entreprises capitalistes, ils structurent l’économie, influencent la politique et contrôlent les infrastructures du XXIe siècle. Leur pouvoir ne repose plus sur la concurrence, mais sur la rente et la dépendance numérique.
Assiste-t-on à un tournant historique, une transformation radicale du rapport entre capital et État ? Le retour de Trump et son alliance avec les seigneurs de la Tech annoncent-ils l’avènement d’un nouvel ordre mondial ?

Hicham Amadi, président Toogo
Ismail Bargach, Cofondateur WafR

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00:00Les Décodeurs d'Atlantique Matin. Débat, analyse, opinion. Le Réveil de l'Info, c'est Atlantique Radio.
00:09Une loi qui encadre enfin le droit de grève au Maroc. Sur le papier, cela ressemble à une victoire politique pour le gouvernement.
00:17Car après des décennies de tergiversations en tout genre, le Royaume adopte enfin une législation qui fixe des règles claires pour l'exercice de ce droit fondamental.
00:27Le gouvernement de Aziz Arnault a réussi là où tant d'autres ont échoué. C'est un fait. Il a imposé son texte malgré une opposition syndicale frontale et une grève générale qui, à première vue, n'a pas eu l'impact escompté.
00:39Les transports ont continué à fonctionner, les commerces sont restés ouverts et la population n'a pas été lourdement impactée par la mobilisation syndicale.
00:47Le temps où un mot d'ordre de grève paralysait le pays semble bel et bien révolu. La réalité, elle est là.
00:54C'est peut-être là la vraie leçon de cette séquence. Les syndicats sont en crise. Ils peinent à mobiliser au-delà de la fonction publique et semblent dépassés par des réalités du marché du travail.
01:05Les grandes grèves d'autrefois faisaient trembler le pouvoir, celles d'aujourd'hui peinent à capter l'attention des uns et des autres.
01:11Pire encore, dans certains secteurs comme l'éducation et la santé, les syndicats ont été éclipsés par des coordinations autonomes qui contestent leur légitimité à représenter les travailleurs.
01:22Mais une fois qu'on a dit tout cela, est-ce vraiment pour autant une victoire politique pour l'exécutif ?
01:27Le texte adopté est-il vraiment aussi restrictif que les syndicats le dénoncent ?
01:32Plusieurs amendements favorables aux travailleurs ont été introduits au cours de ce parcours, de ce processus législatif,
01:38comme la reconnaissance des grèves de solidarité, la réduction des délais de préavio ou encore l'interdiction du remplacement des grévistes.
01:45Quant au patronat, sans pour autant crier victoire, la CGEM évoque un texte équilibré.
01:51Reste à présent une question essentielle, et maintenant, une fois qu'on a dit tout cela, on fait quoi ?
01:56Le gouvernement va-t-il vraiment poursuivre sur sa lancée en imposant d'autres réformes sensibles, notamment sur le dossier des retraites ?
02:03Ou bien cette loi sur le droit de grève restera-t-elle un coup politique isolé des questions que nous allons aborder aujourd'hui dans les Décodeurs d'Atlantique matin
02:12avec Aziz Saïdi et Wissam El Boussaieini, ce sera juste après l'essentiel de l'info avec Zeynep Ciutti.
02:18Les Décodeurs d'Atlantique matin, ce vendredi 7 février 2025, nous sommes ensemble jusqu'à 9h30 avec Wissam El Boussaieini, mon confrère journaliste.
02:28Bonjour Wissam. Bonjour Adil, plaisir comme toujours.
02:31Mon autre confrère Aziz Saïdi qui va nous rejoindre, je l'espère en tout cas d'ici quelques peu, sans doute qu'il est bloqué dans le trafic de la ville de Casablanca.
02:41Alors nous allons parler ce matin de cette séquence politique marquée par l'adoption enfin d'une loi organique encadrant et réglementant ce droit de grève.
02:51Je le disais en introduction, il faut rappeler quand même certains éléments ou certaines évidences.
02:57Ça fait plus d'un demi-siècle que l'on attend ce texte de loi organisant le droit de grève au Maroc.
03:04Et dans ce sens on peut parler d'une certaine forme de victoire politique pour le gouvernement.
03:08Le gouvernement de Aïz Arnouche est celui qui a adopté, permis l'adoption en tout cas d'un texte de loi réglementant le droit de grève.
03:17Mais d'un autre côté c'est une adoption qui s'est faite entre guillemets dans la douleur ou dans l'opposition frontale d'une composante essentielle de ce qu'on appelle communément le dialogue social, à savoir les syndicats.
03:32Alors avant de parler de l'importance ou pas ou l'influence ou pas des syndicats sur le monde du travail de manière globale, j'aimerais avoir Wissam une analyse globale sur cette séquence politique.
03:45Qu'est-ce que vous en retenez le plus ? La victoire politique de l'exécutif ou l'opposition entre le gouvernement et notamment les syndicats ?
03:56En fait je ne sais pas si c'est vraiment une victoire politique du gouvernement ou plutôt c'est une victoire du contexte, un contexte où les syndicats sont devenus beaucoup moins puissants, beaucoup moins influents,
04:12sans véritable capacité de négociation ou avec moins de capacité de négociation par rapport à leur pouvoir d'entente.
04:22Je pense que ce contexte justement où les syndicats ne sont plus en mesure de représenter vraiment les intérêts des travailleurs a beaucoup joué.
04:34Et ça c'est vu avec ces chiffres qu'on a vus après la grève où le pourcentage de participation des salariés et des fonctionnaires a été vraiment bas.
04:48Oui les syndicats parlent de 80% quand le gouvernement, alors c'est le ministre de l'emploi qui a donné les chiffres hier, il parle de 32% dans le secteur public et à peine 1,4% dans le secteur privé.
05:00D'ailleurs ça c'est vu hier. Franchement pas besoin de savoir qui a raison, qui a tort. Il suffisait de se balader dans les rues de Casablanca et dans les autres villes pour constater ou pas l'impact d'une grève que ce soit dans le secteur public ou privé.
05:14En fait ce qui est sûr c'est qu'un texte qui fait suite à des tractations poussées, élargies, etc. va forcément décevoir les parties prenantes.
05:29Parce que dans une négociation il y a toujours des concessions à faire et jamais une partie n'aura 100% de ses revendications.
05:38Donc c'était tout à fait attendu que les syndicats ne soient pas contents et que par ailleurs le patronat aussi ne soit pas à 100% content.
05:47Même si comme tu l'as très bien dit il y avait un vrai satisfaite je pense à moi à peine voilé de la part du patron de la CGEM qui a envoyé un message justement aux adhérents de la Confédération pour leur souligner l'avancée que constituait ce nouveau texte.
06:06Pour le constat général parce qu'on parlait initialement du contexte, je pense qu'on est dans une tendance générale qui n'est pas seulement marocaine mais mondiale.
06:20C'est-à-dire que le Maroc comme les autres pays du monde en tout cas qui suivent le même modèle socio-économique je dirais est de plus en plus proie à l'individualisme et de plus en plus en proie à l'atomisme.
06:35Et de ce fait l'organisation collective qui est la base de travail des syndicats n'est plus vraiment comment dire effective et c'est quelque chose dont je pense nos syndicats souffrent.
06:53D'autant plus que par rapport aux méthodes ça n'a pas vraiment changé par rapport à ce qui se faisait il y a 60 ou 50 ans au Maroc où on a eu de grandes mobilisations syndicales tout au long de l'histoire du pays.
07:07À des moments où les syndicats étaient vraiment constitués une force politique majeure et aujourd'hui on constate que ce n'est plus le cas parce que justement je pense que c'est la société qui est en train de changer.
07:22Et même pour les mobilisations ce sont très très souvent je pense des mobilisations réduites dans le temps avec des objectifs fixes et qui restent astreintes à un cadre très particulier.
07:38Je pense notamment au succès des négociations entamées par les coordinations des enseignants qui à mon avis ont eu cette réussite parce qu'ils se sont mobilisés sur un cahier de charge très précis, très particulier et sur un temps très défini.
07:58Donc ce genre de mobilisation peut dépasser le contexte dont je parlais, le contexte culturel. Mais pour de larges négociations j'ai des doutes sur la pertinence du recours aux syndicats comme porte-voix de la classe des travailleurs.
08:16Alors on va évoquer effectivement cette question de l'évolution des corps intermédiaires et du poids que représentent aujourd'hui les centrales syndicales dites classiques.
08:25Mais avant cela j'aimerais avoir peut-être l'avis de Aziz Saïdi qui nous rejoint en ligne, qui est en ligne avec nous. Bonjour Aziz.
08:31Bonjour Adil.
08:32Alors sur cette question, sur cette séquence politique en tout cas qui a permis l'adoption de ce projet de loi organisant le droit de grève, qu'est-ce que vous retenez le plus ?
08:41La victoire politique pour le gouvernement d'Aziz Ernouch qui sera pour l'histoire, un bien gros mot, mais celui qui a enfin pu adopter ou faire adopter un texte de loi organisant le droit de grève ?
08:52Ou est-ce que vous retenez surtout la manière avec laquelle cette adoption s'est faite, à savoir une opposition frontale avec l'une des composantes les plus importantes du dialogue social, à savoir les syndicats ?
09:03Oui bien sûr. Moi je pense que d'abord ce qu'il faut retenir c'est cette confrontation. Et puis surtout, comme disait Asim, c'est le fait que les syndicats ne sont plus représentatifs.
09:15Je pense qu'on l'a vu sur ce dossier, on l'avait mieux vu peut-être avec la mobilisation dans le secteur de l'éducation et une coordination qui ont pris le relais.
09:25Et donc c'est vraiment sur un cahier revendicatif bien précis. Là, bien évidemment, c'est quelque chose qui touche à tous les travailleurs.
09:34Personnellement, je trouve que c'est une loi qui est restrictive. Il y a moins d'acquis et il y a des acquis qui sont enlevés par rapport à la classe des travailleurs.
09:48Mais justement, les syndicats ne jouent plus ce rôle de relais. Et ça c'est quelque chose qu'on a vu venir, une décrédibilisation du mouvement syndical pendant ces dernières années.
10:02Bien évidemment, il y avait cette loi cadre qui était là depuis quelques années. Il faut le rappeler que même le projet lui-même, dans sa première rupture, ça remontait peut-être au gouvernement Benkiren.
10:16Donc c'est quelque chose qui traînait là. Il y avait des choses qui avaient été faites, mais la loi cadre, elle vient tout juste de passer.
10:24Et c'est vraiment dommageable que cette représentation syndicale ne puisse plus jouer son rôle de relais.
10:31C'est quelque chose qui est fondamental. C'est quelque chose qui démontre un peu un problème de représentativité générale.
10:41C'est quelque chose qu'on a l'impression quand on voit, même par rapport à la représentativité du gouvernement, quand on voit les résultats des urnes et quand on voit l'opinion générale,
10:51elles ne sont pas forcément, elles sont peut-être en décalage. Donc ça c'est quelque chose qui est important.
10:58Et c'est quelque chose aussi par rapport à ce qu'on avait il y a quelques années par rapport aux mobilisations syndicales.
11:08On se souvenait qu'il y avait un pouvoir de mobilisation qui était important, qui parfois se faisait justement avec des mouvements de mobilisation très durs et très larges,
11:21et notamment suivis. Là, ce qui est sûr, c'est qu'on le voit, la mobilisation n'a pas tenu.
11:27Et on a l'impression que même certains syndicats qui ont appelé à cette grève, c'était plutôt quelque chose de formel.
11:37C'était une manière de juste marquer le coup.
11:40Sans conviction profonde, vous voulez dire ?
11:42C'est le sentiment que j'ai, oui.
11:46Alors c'est vrai que ce qui est vrai effectivement, c'est que la puissance des syndicats a été diminuée au fil des années.
11:54Et le rapport de force n'est plus le même.
11:56C'est vrai qu'un syndicat, en l'occurrence, il y a quelques années, quelques décennies de cela, pouvait paralyser quasiment l'ensemble du pays.
12:02Aujourd'hui, on constate, et on l'a vu ces deux derniers jours, que la mobilisation n'est plus la même.
12:07Et vous soulignez à juste titre, et vous Aziz et vous Wissam, ces nouveaux corps intermédiaires qui émergent à travers ces coordinations, que ce soit dans le secteur de la santé ou de l'éducation.
12:19Mais une fois qu'on a dit ça, qu'est-ce qu'on fait ?
12:21Parce que d'un côté, vous avez des institutions à respecter ou une réglementation à respecter.
12:28Le gouvernement ne peut avoir un dialogue social qu'à travers l'institution syndicale, les syndicats.
12:35Vous avez des coordinations qui évoluent dans un flou juridique ou réglementaire qui ne leur permet pas d'avoir ce statut qu'ont les syndicats aujourd'hui.
12:46Mais d'un autre côté, ce sont eux, ces coordinations indépendantes, qui ont une influence quelconque sur le monde du travail.
12:54Donc une fois qu'on a dit ça, quelle pourrait être justement la solution à cette équation à trois problèmes ?
13:00Il faudrait peut-être faire des adaptations marocaines, c'est-à-dire que les règles de fonctionnement du dialogue social ne sont pas inscrites dans le marbre.
13:07Nous, on a pris un modèle plutôt français parce qu'on était un protectorat français.
13:12On a eu les premiers syndicats au Maroc qui étaient justement d'inspiration française ou dépendaient directement des autres syndicats en France.
13:22Ça s'est constitué, ça s'est institutionnalisé par la suite avec l'indépendance et ça a plutôt bien fonctionné pendant une série de décennies.
13:31Mais du moment qu'il y a justement, par exemple, ce pouvoir naissant des coordinations qui semblent aux yeux des principaux concernés, c'est-à-dire des travailleurs beaucoup plus pertinents,
13:41peut-être qu'il faudrait justement leur trouver un statut légal qui puisse leur permettre de jouer un rôle direct dans des négociations aussi bien avec le gouvernement, bien sûr, qu'avec les patronats.
13:53Et je pense qu'il faut y réfléchir, il ne faut pas rester cantonné à ce qu'on sait déjà.
14:04Et de toute façon, les pratiques sociales ont toujours évolué au cours de l'histoire.
14:08Donc on ne peut pas refaire le récit du monde, mais je trouverais naturel que l'on puisse adapter les choses à la réalité du Maroc.
14:16Ali Saïd, même question, il nous reste une minute avant le journal de 9h.
14:20Oui, je pense que c'est quelque chose qui est évident, qu'il faut que ça évolue.
14:26Sur le dossier de l'éducation, je trouve que c'est un dossier qui est très symptomatique de cette relation et de ce rapport de force entre les deux.
14:36On a vu un gouvernement qui s'entend à la loi et à ce qu'il y a, c'est-à-dire qu'il appartient aux représentations syndicales les plus représentatives.
14:48Moi, j'ai l'impression que les plus représentatives, ce n'est pas forcément ce qu'il y a dans les élections syndicales,
14:54mais ce qu'il y a sur le terrain. Et sur le terrain, il y a une nouvelle génération, que ce soit en termes de génération âge,
15:02mais aussi une nouvelle génération en termes de format de représentation à travers ces coordinations.
15:08Idéalement, ce qu'il faudrait, c'est que les gens qui portent ces coordinations soient, au fil de l'eau, intégrés à ces représentations syndicales
15:19pour qu'elles puissent porter les dossiers de la base vers la représentation, que ce soit à la deuxième chambre ou dans les négociations pour le dialogue social.
15:30Ça, c'est dans un monde idéal, parce que je n'ai pas l'impression que ceux qui tiennent les syndicats doivent forcément lâcher le morceau le plus facilement.
15:38Et puis aussi, par rapport au gouvernement, on n'a pas l'impression que le gouvernement non plus va faire des pieds et des mains pour leur faciliter la tâche aux coordinations.
15:48Bien au contraire, on l'a vu, il a fallu vraiment une mobilisation très dure pour que les gens entendent ce qu'il y a de significatif.
15:56On va marquer une petite pause, il est 9h passé d'une minute, Zineb Joudi nous a rejoint, on va lui céder la place pour le journal.
16:02Et nous, on se retrouve juste après pour la suite du débat, à tout de suite.
16:05La suite des décodeurs, on va ouvrir le micro, c'est mieux.
16:08La suite des décodeurs d'Atlantique Matin, à 9h07, avec Wissam El-Bousdeini, dans Studio Khadija Sifi et Aziz Saidi, qui est en ligne avec nous.
16:16On parle bien évidemment de cette séquence politique marquée par l'adoption, enfin, de ce projet de loi organique relatif aux droits de grève.
16:24On était en train d'analyser un petit peu cette séquence politique et c'est vrai que ce qu'il en ressort le plus,
16:29déjà au-delà du fait que nous disposons enfin d'une loi qui réglemente ce droit de grève,
16:34c'est surtout la faible représentativité aujourd'hui du mouvement syndical et des centrales syndicales.
16:40Que ce soit tant sur la question des négociations, c'est vrai qu'ils ont réussi quand même à introduire certains amendements
16:49ou à modifier certaines dispositions du code et du texte initial.
16:54Mais lorsqu'on a vu un petit peu l'impact de la mobilisation générale de la grève générale, à laquelle ils ont appelé hier et avant-hier,
17:01c'est là où on s'est rendu compte effectivement de la faible représentativité, de l'impact limité du mouvement syndical sur le monde du travail.
17:13Maintenant, ce que j'aimerais voir avec vous, c'est la suite des choses et des événements,
17:18parce que le dialogue social ne s'arrête pas à ce texte de loi sur le droit de grève.
17:22Il y a d'autres sujets tout aussi sensibles et importants qui devront être négociés à l'avenir,
17:27entre le gouvernement et les syndicats, notamment sur la question des retraites.
17:33Alors, quel impact aura justement cette séquence politique-là sur le droit de grève sur la suite du dialogue social ?
17:40C'est ça la question que j'aimerais vous poser. Je commence par toi, Wissam Bouzen.
17:44Les négociations seront forcément difficiles, mais pas seulement à la lumière de ce texte sur la grève,
17:51mais aussi parce qu'il y a un rendez-vous législatif qui est prévu en 2026.
17:56Et je pense qu'à cet horizon, ce gouvernement, du moins le RNI, parce que c'est le parti qui mène ce gouvernement,
18:05voudra éviter d'arriver avec une image de gouvernement antisocial.
18:10Parce que c'est l'image d'ailleurs qui, je le ressens, est en train d'émerger.
18:15Même si elle n'est pas forcément exacte, parce que j'en parlais avec un spécialiste il y a quelques jours,
18:22il me rappelait que, au final, le dialogue social a été réinstitutionnalisé,
18:28alors qu'il était plutôt absent avec les gouvernements précédents, sans citer le parti qui était aux commandes.
18:35Le PJD ?
18:36Le PJD, on ne peut pas en parler.
18:39Il y a eu deux séquences en 2022 et 2024, deux dialogues, deux rounds.
18:46Ça a donné une augmentation de 20% du SMIC sur quatre ans.
18:51Ça a donné une baisse de la charge fiscale.
18:55Par ailleurs, il y a le chantier, certes royal, de la généralisation de la couverture sociale qui se poursuit.
19:04Donc en fait, justement, je pense que le gouvernement Arnaud voudra certainement,
19:14à l'heure où les électeurs voudront décider du parti vainqueur des prochaines élections,
19:20qu'ils aient en tête davantage ces points positifs en sa faveur que, par exemple, des points de contestation.
19:29Et c'est pour cela que je pense qu'il y aura certainement une marge de manœuvre plutôt très réduite sur cette question de retraite.
19:39Et j'imagine aussi qu'il y aura peut-être aussi des tirs amis au sein même du gouvernement, parce qu'on l'a vu...
19:46Ça a déjà commencé, les hostilités ont commencé, oui.
19:49Voilà, avec le PAM, les circlels et aussi, par ailleurs, les partis de l'opposition qui essaient de se placer.
19:55Et moi, je pense que c'est ce contexte électoral précis qui va le plus...
20:00Impacter le dialogue social à l'avenir.
20:02Voilà, et que la grève, le droit de grève sera certainement instrumentalisé.
20:05Très bien. La même question à Aziz Saidi. Comment voyez-vous l'avenir de ce dialogue social ?
20:12Le dialogue social, moi, je pense qu'il reste indépendant de la représentation syndicale, qu'il l'est de plus en plus, d'ailleurs.
20:20Et puis, moi, je voudrais revenir sur un dernier élément de cette séquence, c'est le fait même que ça a été voté par 100 députés, je pense, sur 344...
20:30Oui, c'est vrai. Merci à Aziz, parce que j'ai oublié de rappeler cet élément quand j'ai vu le chiffre hier des députés qui étaient présents
20:38pour le vote d'un texte aussi important qu'on attend depuis plus d'un demi-siècle.
20:42J'y croyais à peine, franchement. Bon.
20:45Mais merci d'avoir rappelé, effectivement, la faible représentativité des députés qui ont voté, qui ont pris part, en tout cas, au vote de ce texte important.
20:53Une centaine, effectivement, sur 400.
20:56Paradoxalement, on a l'impression que, justement, il y a eu une grève de votes sur la question de la grève.
21:05Si la grève, on ne l'avait pas sentie dans notre quotidien hier avant-hier, on l'a vue, en tout cas, au niveau de l'hémicycle, c'est vrai.
21:11Voilà, voilà. Et donc, oui, je rejoins ce que disait Wissam par rapport à la prochaine séquence, qui est éminemment électorale,
21:22et que, justement, chacun voudra se présenter sous son meilleur jour et vouloir tacoler une étiquette de quelqu'un qui a des soucis sociaux.
21:31Donc, forcément, au-delà même des représentations, je pense que, désormais, pour essayer de polir cette image,
21:39il y aura une pression sur le gouvernement pour ne pas prendre des mesures qui ne soient pas populaires.
21:47Je n'ai pas envie de dire qu'ils soient antisocials, mais, en tout cas, qu'ils ne soient pas populaires.
21:51Donc, forcément, il y a cette pression.
21:53Mais, moi, je pense, là, c'est pour le court terme, c'est pour 2026, mais, moi, je pense qu'au-delà, il faut régler ce problème de représentation,
22:03parce que c'est dommageable, que ce soit pour le gouvernement, pour l'État, mais aussi pour les travailleurs.
22:11Et il faut trouver les moyens de rétablir cette communication et ce rapport de force qui, de toute façon, a plaît à exister,
22:20quelles que soient les coquilles qui l'encadrent.
22:22Donc, c'est ça, à mon sens, qui est le plus important.
22:25Le plus important, c'est de chercher à trouver un modèle de représentation qui soit le plus proche,
22:30qui ramène le plus proche le dossier revendicatif de la base des travailleurs sur le devant de la scène, dans les négociations.
22:38On a l'impression que, des fois, les syndicats, les points sur lesquels ils sont le plus virulents,
22:43ce ne sont pas forcément ceux qui intéressent le plus.
22:47Mais, par contre, sur la question des retraites, là, il y aura une grande perspective.
22:54Il y a quelque chose qui est important à retenir, qui sera important à surveiller.
23:04C'est, justement, comment va se passer cette négociation, comment va se passer cette communication.
23:09Et, jusqu'à quelle mesure, on pourra avoir un impact sur les décisions que prendra le gouvernement.
23:18Très bien. Bon, on va marquer une petite pause. Il est 9h15.
23:21Karim Droneh est parmi nous. Il nous délivre les dernières informations, le point info d'une minute.
23:25Et on se retrouve juste après pour la suite du débat.
23:27On va d'ailleurs aborder la question du plan de Donald Trump pour la banque de Reza,
23:33parce que ça a fait la une de l'actualité ces dernières 48 heures.
23:36Pas mal de choses qui ont été dites et redites sur les déclarations au choc du président américain.
23:43On en parle juste après le point info de Karim Droneh. A tout de suite.
23:46C'est le fin des Décodeurs d'Atlantique.
23:47Maintenant, toujours avec Aziz Saïdi et Wissam Bouzdehni.
23:50Avant de passer au deuxième sujet programmé aujourd'hui, j'ai une dernière question à vous poser
23:53par rapport à cette question, non pas du texte de loi relatif aux droits de grève,
23:57mais sur cette représentation du monde des travailleurs et du travail.
24:02Bon, le constat, je crois qu'il est fait, il est commun.
24:05On est d'accord là-dessus, à savoir que les syndicats ont perdu de leur domination,
24:11de leur puissance, de leur impact sur le monde du travail.
24:14Maintenant, la question, c'est de savoir quelle métamorphose,
24:17quel changement pourrait être bénéfique pour ce mouvement syndical
24:22et pour les travailleurs qu'il est censé représenter.
24:24Et dans ce sens, moi, je me pose une question toute simple.
24:28Quand j'entends parfois des leaders syndicaux parler ou non des travailleurs,
24:33passez-moi l'expression, c'est toujours la même cassette que celle des années 70, 80, 90
24:39qu'on entend encore aujourd'hui en 2025.
24:41Et c'est peut-être l'une des causes qui fait que cette voix du mouvement syndical
24:45n'est plus aussi audible qu'elle ne l'était auparavant.
24:48Le discours des années 70, 80 était valable dans cette époque-là, effectivement,
24:52était audible surtout, peut-être qu'il l'est un peu moins aujourd'hui.
24:56Est-ce que vous partagez ce sentiment ou est-ce qu'il y a d'autres facteurs
24:59qui expliquent le déclin du mouvement syndical, Wissam Bouzeni ?
25:04Je pense que...
25:07Généralement, je redoute les prises de parole qui sont précédées par des silences
25:11comme vous venez de le faire.
25:13C'est un silence qui est en fait... J'ai une crainte.
25:19C'est qu'à l'avenir, on se retrouve avec des revendications qui ne soient pas encadrées,
25:28qui, pour le dire directement, aillent de façon directe à la rue
25:35et qui puissent être radicales parce que...
25:39C'est ce qui se passe malheureusement, effectivement,
25:41quand les corps intermédiaires deviennent défaillants,
25:43c'est ce qui se passe automatiquement.
25:44Vous avez raison de soulever cette inquiétude.
25:46Donc c'est quelque chose qu'il faut vraiment prendre au sérieux.
25:49Est-ce que, comme je le disais avant,
25:51est-ce qu'il faut donner un statut légal aux coordinations ?
25:56Est-ce qu'il faut changer la structure même des syndicats ?
26:03Franchement, moi, à titre personnel, je n'ai pas de vision en particulier
26:07parce qu'on est en même temps face à un phénomène plutôt récent et émergent.
26:13Mais pour l'avenir du pays, il faut vraiment que les choses soient traitées de façon sérieuse.
26:21On a beaucoup de perspectives qui arrivent avec, par exemple, cette Coupe du Monde.
26:26Et je ne parle pas de la Coupe du Monde en tant qu'événement,
26:28mais en tant que chantier, avec tout ce qu'il faut faire avec,
26:32tout ce qu'il faut construire et les dépenses à avoir
26:35et ce que ça va nécessiter de moyens et ce que ça va...
26:39Oui, mais c'est surtout un événement qui devrait, en principe, nous rendre meilleurs.
26:42Ce n'est pas l'événement en soi qui est important,
26:44mais c'est ce qu'il implique et ce qu'il va engendrer et devrait engendrer par la suite.
26:48Non, absolument, absolument.
26:50Et on l'a vu, en fait, très rapidement, Adil, dans d'autres pays où il n'y a pas de syndicats,
26:54les choses ne se sont pas toujours très, très bien passées.
26:57Donc, il faudrait faire très attention avec ce phénomène qu'on est en train de voir au Maroc.
27:03Vas-y, Saidi ?
27:05Oui, bien évidemment, pour moi, il y a une crise de représentativité,
27:09notamment chez les syndicats, comme on l'a constaté.
27:11Et ça, c'est inquiétant, bien évidemment.
27:14Je rejoins ce qu'a dit Louis Saint, par rapport à ça,
27:16c'est que quand il n'y a plus les relais, on a le risque de voir des mobilisations
27:22ou des choses qui soient dures et qui aillent directement à la rue,
27:25sans relais, sans être encadrées politiquement.
27:28C'est un danger, donc c'est quelque chose dont il faut tenir compte.
27:32Idéalement, comme je le disais tout à l'heure,
27:34normalement, il devrait y avoir...

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