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00:00La question qu'on va évidemment se poser maintenant, c'est qui pour lui succéder ?
00:05Et puis est-ce que cette personne va être justement dans cette ligne, dans les pas du pape François ?
00:10Est-ce qu'il va poursuivre ces réformes importantes ?
00:14Alors tous les yeux vont se tourner dans quoi ? 15-20 jours, Arnaud Hélibert, sur le conclave.
00:20Les congrégations ont débuté dès ce matin et beaucoup de choses se jouent, des candidatures émergent.
00:27C'est un moment très important qui se trame en ce moment au Vatican.
00:30Alors le moment est très important, juste peut-être pour répondre à la curiosité de tous,
00:34la date du conclave n'est pas fixée, elle sera fixée après les obsèques, donc après samedi.
00:40Et probablement, donc ça sera entre le 6, le début du conclave, entre le 6 et le 11 mai.
00:46Probablement pas le 6.
00:48Alors pourquoi on peut dire que probablement, vous savez le Vatican c'est plein de secrets,
00:51mais on pense que les cardinaux qui ne se connaissent pas parce que le pape les a choisis,
00:57de partout dans le monde, vont faire durer le plaisir, si j'ose dire,
01:02de se rencontrer, de se discuter, de se découvrir.
01:04Donc c'est peu probable.
01:05C'est un moment agréable pour eux ?
01:07C'est un moment solennel, un moment très fraternel.
01:12Les cardinaux français qui y vont avec à la fois le sens de la gravité du moment,
01:18mais l'idée de faire église, de pouvoir, de toute cette pluralité, de cette diversité, faire une unité.
01:25Donc je pense que c'est quelque chose qui pour eux est une expérience humaine extrêmement forte.
01:29Donc probablement le conclave pourrait commencer le 7, le 8 mai, ça on ne sait pas.
01:35Et avant, il y a tout ce temps de discussion qui est absolument capital.
01:39Mais pour l'heure, avancer des noms, c'est d'abord à contre-temps,
01:43parce qu'aujourd'hui l'Église est en deuil, et ensuite ça serait très hasardeux.
01:48Alors évidemment, d'où viendra le prochain pape ?
01:50Je vous propose, avant de donner la parole à Paul Melin,
01:53d'écouter Grégory Turpin, que l'on retrouve dans les nouvelles émissions
01:56Cœurs et âmes sur Europe 1 le samedi de 14 à 15h.
01:59Peut-être le centre de la foi, la culture chrétienne, va un peu se déplacer.
02:05On a été un peu dérangé d'avoir un pape sud-américain qui venait d'une culture différente.
02:10Peut-être qu'il y avait plus de mal à concevoir que la foi était un héritage.
02:16Comme nous, en Europe, on a hérité d'une foi.
02:19Lui, il vient d'un monde où le pays a été évangélisé.
02:23Lui-même est jésuite, donc les jésuites ont évangélisé l'Asie.
02:26Et donc, c'est une foi qui doit s'inculturer dans une culture très différente.
02:31Et nous, il y a cette notion de cet héritage, peut-être qu'il concevait moins.
02:36Donc, ça va être très intéressant de savoir qui sera le prochain pape,
02:39parce que peut-être qu'il viendra d'Asie, peut-être qu'il viendra d'Afrique.
02:42Et ça va décentrer.
02:44Paul Melin, ce sont les éternelles questions.
02:46C'est passionnant, évidemment, ce qui se passe.
02:48C'est absolument fascinant.
02:49Et moi, ce qui me fascine le plus dans l'élection d'un nouveau pape,
02:53c'est la continuité historique.
02:55C'est-à-dire que le système de conclave, il est apparu à la fin du XIIIe siècle,
02:58je crois en 1274,
03:00et qu'il vient de cette volonté, justement, d'échapper aux influences politiques.
03:05Puisqu'auparavant, dans le haut Moyen-Âge,
03:07les papes étaient l'enjeu de, comment dirais-je,
03:10de puissance extérieure,
03:12de royaumes qui se mêlaient,
03:15de ce qui ne les regardait pas,
03:16pour avoir un objet d'influence sur l'Église.
03:19Pour autant, est-ce que la politique disparaît totalement ?
03:21La France a un vote veto, ainsi que l'Autriche, on l'a oublié.
03:24Absolument.
03:25Et je trouve qu'il y a, effectivement, dans la solennité,
03:29et dans la fermeture au monde de ce conclave,
03:32puisque, effectivement, les membres de ce conclave
03:35n'auront pas accès au monde extérieur
03:37avant que nous voyions la fumée blanche sortir,
03:39je trouve qu'il y a une force sacrée, solennelle, extraordinaire,
03:44et puis une continuation propre, aussi, quasiment, aux monarchies.
03:49Vous voyez, lorsqu'on a fait les obsèques de la reine Élisabeth,
03:52on avait déjà les yeux rivés sur Charles III.
03:54C'est une forme de roue de l'histoire qui est en action permanente.
03:57Là, à peine nous avions parlé de la disparition de ce grand pape,
04:01qui était François, que nous pensons tout de suite,
04:03nous disons, mais est-ce qu'il va y avoir un mouvement de balancier ?
04:05Va-t-il y avoir un retour de la tradition ?
04:07Comme il y a eu un retour de tradition, par exemple, avec Benoît XVI, suite à Jean-Paul II,
04:10puis ce pape prétendument progressiste après Benoît XVI,
04:14est-ce que là, nous allons avoir un retour de la tradition ?
04:16Est-ce que le prochain pape, ce sera un pape qui viendra plutôt de ce camp-là, ou pas ?
04:19Donc, les spéculations qui sont propres des spectateurs que nous sommes sont une chose.
04:25Moi, j'ai envie de respecter aussi ce qui se passera dans le secret de la chapelle Sixtine,
04:29dans le secret du Vatican.
04:31Je pense que ça participe aussi de la grandeur de l'Église catholique, du catholicisme romain,
04:36et de son prolongement à travers les siècles,
04:38et qu'il faut respecter ce silence et attendre patiemment que sorte la fumée blanche.
04:43Ça va être dur de respecter ce silence ici, messieurs, avec vous.
04:46Je le sens.
04:47Victor Hérault qui fume.
04:48Malheureusement, notre métier, c'est de parler.
04:51On peut parler du silence.
04:53Non, mais ce qu'on peut dire, c'est que pour l'instant,
04:55en réalité, moi, alors le nom qui revient souvent parmi les traditionnalistes,
04:59c'est le cardinal Sarah, il revient souvent dans nos bouches à nous.
05:04Moi, je pense que l'Église n'a pas toutes ses chances.
05:13Je pense aussi que l'Église n'a peut-être pas intérêt,
05:16ce n'est pas ce que je veux moi,
05:19mais je veux dire, je pense que dans l'historicité de tout cela,
05:22l'Église n'a peut-être pas intérêt à revenir complètement,
05:25à faire un virage à 180 degrés avec ce qu'a entamé le pape François,
05:28et à faire une rupture dans les réformes,
05:29et plutôt une continuité dans les réformes,
05:31ce qui est paradoxal, mais bon, voilà, d'ici là, nous commenterons bien évidemment,
05:38mais il est très dur de savoir à l'avance ce qui se passera.
05:41Et ce qui est intéressant avec le cardinal Sarah tout de même,
05:43hormis son âge, c'est quand même le visage,
05:45il incarnerait quand même un pape africain,
05:47et il est vrai qu'il faut penser, nous, en tant qu'Européens,
05:49à tous les visages que recouvre aujourd'hui l'Église,
05:51notamment l'Afrique, qui est invité,
05:52qui est quand même la première dynamique chrétienne aujourd'hui dans le monde,
05:55c'est en Afrique, et on a du mal à s'en rendre compte ici en France,
05:58mais il faut le voir tel que c'est aujourd'hui,
06:00la religion chrétienne aujourd'hui dans le monde se développe le plus en Afrique.
06:04On parlait tout à l'heure de la quête d'identité,
06:06le cardinal Sarah, lui, là-dessus, je crois,
06:08a compris une certaine angoisse des peuples européens,
06:10la disparition et la quête d'identité.
06:12On va continuer à parler, justement, j'ai plein de questions à poser à Arnaud Allibert,
06:15sur le fonctionnement, quels critères, etc.,
06:17mais juste après la pause...
06:19Il est 13h43, bon début d'après-midi,
06:21avec Stéphanie Demury sur Europe 1.
06:2313h, 14h, Europe 1 13h.
06:2513h46 sur Europe 1, c'est la dernière partie d'Europe 1 13h,
06:28avec vous, Stéphanie Demury,
06:29vos deux chroniqueurs, Victor Hérault et Paul Melun,
06:31et votre invité Arnaud Allibert, rédacteur en chef du journal La Croix.
06:34Et on continue nos débats passionnants
06:36sur ce qui est en train de se jouer à Rome,
06:39puisque les cardinaux du monde entier sont arrivés ce matin,
06:42première congrégation nationale, c'est ça ?
06:46Générale.
06:46Générale, pardon.
06:47Voilà, où beaucoup de choses se jouent.
06:49Alors, Paul Melun nous disait, avec beaucoup de naïveté,
06:52qu'à l'époque, le conclave,
06:54en tout cas, non, c'était pas naïf à l'époque,
06:56mais celle-là est devenue, était coupée du monde et de la politique.
06:59Mais enfin, Arnaud Allibert,
07:02est-ce que vraiment les cardinaux,
07:05pardon, le futur pape pour l'un d'entre eux,
07:07sont coupés de la politique,
07:09et notamment de la géopolitique ?
07:11Alors, non, il y a un processus qui est en train de se mettre en place.
07:15D'abord, tous les cardinaux ne sont pas arrivés aujourd'hui.
07:18Ce sont les Européens qui sont là,
07:19le cardinal de Mongolie mettra quelques jours à venir.
07:25Donc, ils sont en train de se réunir,
07:28donc tous les jours,
07:30et plus encore, après les obsèques,
07:31où là, ils seront tous là,
07:33y compris les cardinaux non électeurs.
07:35Donc, tout cela, ça fait à peu près 200, 240...
07:39Non, non électeurs, c'est plus de 80 ans.
07:41Plus de 80 ans.
07:43Qui vont donc participer au débat
07:45pour essayer de voir qu'est-ce qui est important pour l'Église.
07:49Et évidemment, au cœur de ces sujets,
07:52il y a des sujets que nous, on pourrait qualifier de politiques,
07:55qui sont relatifs aux questions de l'Église dans le monde,
08:01de l'Église dans les sociétés.
08:02Avec cette question qui, à mon avis, sera majeure,
08:06c'est la question géopolitique.
08:07C'est-à-dire, quel est le point géopolitique majeur
08:11qui va être un appel pour la mission de l'Église ?
08:14Est-ce que ce sera la Méditerranée,
08:16qui était un des axes du pape François ?
08:19Un des cailloux dans sa chaussure aussi,
08:21parce que la Méditerranée, aujourd'hui, reste
08:25ce qu'il a appelé un grand cimetière.
08:28Est-ce que ce sera autour de l'Europe de l'Est ?
08:31La question chrétienne de l'Europe,
08:33avec deuxième caillou dans sa chaussure,
08:35la question ukrainienne et la question de l'unité.
08:37On lui a reproché d'être un peu trop tendre avec Vladimir Poutine au début.
08:40Parce qu'il a été l'homme, quand même,
08:44de la réconciliation, de la rencontre avec le patriarche orthodoxe de Moscou,
08:49une rencontre qui n'avait pas eu lieu depuis des siècles et des siècles.
08:52Troisième possibilité,
08:54que le conclave,
08:58en tout cas la conscience de l'Église universelle,
09:00tourne autour de la question de la Chine,
09:03de l'Asie, au fond,
09:04avec tout ce que ça comporte comme défi majeur pour l'évangélisation.
09:12Donc, moi, mon intuition, c'est que ce sont ces questions-là,
09:15ou alors au cœur de l'Afrique,
09:19les luttes d'influence qu'il y a entre le christianisme et l'islam,
09:24à l'intérieur des zones,
09:26les questions de rivalité.
09:29Prenez le Soudan, par exemple.
09:32Il y a aussi des rivalités intra-chrétiennes.
09:35Donc, quel est l'élément qui va cristalliser la conscience ?
09:40Vous parlez d'unité,
09:41parce qu'on se dit, en vous écoutant, mon père,
09:44que ça va être compliqué,
09:45parce que le monde est tellement polarisé
09:47que pour aller trouver un pape qui unifie tout ça,
09:50n'est-ce pas, Victor Hérault ?
09:52D'où la critique que je mettais tout à l'heure
09:54à l'égard de cette phrase,
09:55l'Église pour tous.
09:56Le problème, c'est qu'effectivement,
09:58là où il y a du pouvoir,
09:59il y a de la politique,
10:00nécessairement.
10:00Les intérêts des uns ne sont pas ceux des autres.
10:01Voilà, on dit,
10:02il faut rendre à César ce qui est à César,
10:03et à Dieu ce qui est à Dieu.
10:04Il ne faut pas oublier la duplicité de cette phrase-là.
10:07Il y a le royaume des cieux,
10:08mais il y a le royaume bien terrestre,
10:09donc de la politique.
10:11Là où il peut y avoir, comment dire,
10:12un défaut politique,
10:13c'est si la personne qui détient ce pouvoir politique-là
10:15décide de l'abandonner.
10:17Et lorsqu'on dit,
10:17je suis ouvert à tous,
10:18et l'Église est ouverte à tous,
10:20c'est très beau sur le papier,
10:21mais en réalité,
10:21qu'est-ce que ça veut dire ?
10:22Qui est-ce que je défends face à qui ?
10:24C'est quand même ça aussi la question.
10:25La tolérance est belle,
10:26la tolérance pour tous est belle,
10:28sauf qu'elle ne défend en réalité personne.
10:30Donc c'est là peut-être la question.
10:31Ce pape-là était très attaché,
10:33effectivement,
10:33à la question des pauvres,
10:34à la question des migrants,
10:35mais il y a effectivement des axes géopolitiques,
10:37géostratégiques,
10:39et malheureusement,
10:39on est dans un siècle où c'est ainsi,
10:41mais où même le religieux doit pouvoir
10:43prendre position et tenir ses positions,
10:45sinon il abandonne tout.
10:46C'est un chef d'État, Paul Melon aussi, le pape.
10:48On sous-traite souvent, d'ailleurs,
10:50quand on évoque la diplomatie,
10:52la diplomatie du Vatican.
10:54On évoque tout le temps les États souverains
10:56qui ont une armée,
10:58qui siègent aux Nations Unies, etc.
11:01Surtout dans un monde multipolaire
11:02comme aujourd'hui extrêmement complexe,
11:04avec un conflit au Proche-Orient,
11:05un conflit aux portes de l'Europe,
11:07des prétentions territoriales en mer de Chine.
11:09Il faut quand même bien mesurer
11:10comment ce début de XXIe siècle commence,
11:14c'est-à-dire dans les larmes et le sang
11:15pour beaucoup de pays du monde,
11:17on se dit, mais que vient faire
11:18la diplomatie du Saint-Père là-dedans ?
11:21C'est très compliqué.
11:22Et pour autant, il y a beaucoup de choses à faire
11:24et le pape François,
11:26pour revenir un peu sur son bilan,
11:27a entrepris un certain nombre de choses.
11:29Il y a des choses qu'il n'a pas terminées
11:30ou qu'il n'a pas pu concrétiser.
11:32Pour autant, il avait pris des positions
11:33sur le conflit au Proche-Orient
11:34entre Israël et la Palestine,
11:35mais de fait, on voit bien aujourd'hui
11:37dans quel bourbier est la zone.
11:39Il n'y a pas de solution pour le moment.
11:40de même sur le conflit russo-ukrainien.
11:43Il y a d'autres chantiers
11:43sur lesquels il a eu un rôle positif
11:45à Cuba ou en Centrafrique,
11:47mais là...
11:47Avec plus de réussite.
11:48Avec plus de réussite.
11:49Donc vous voyez, il faut toujours
11:50mettre les choses dans la balance
11:51et peser le pour et le contre.
11:52Mais il est vrai qu'il y a une diplomatie,
11:54je pense,
11:55de la sacralité,
11:57de l'influence,
11:58de l'éthique,
11:59de la morale,
12:00d'une morale peut-être universelle
12:01de la part du souverain pontife,
12:03qui n'est pas à négliger,
12:04qui est importante,
12:06une capacité, une voix à parler
12:07avec tout le monde,
12:07à dialoguer.
12:08Et ça, c'est aussi un trait commun
12:10au souverain pontife
12:12depuis fort longtemps,
12:14par-delà les conflits du monde.
12:17Et on attend aussi,
12:18au tournant, si je puis dire,
12:20le prochain pape là-dessus.
12:22Parce qu'il y a tous ces enjeux,
12:23et vous en parliez très justement,
12:26avec différentes zones du monde
12:27sur lesquelles les enjeux
12:28ne sont pas les mêmes.
12:29Donc, ne serait-ce que
12:30dans la nomination,
12:31dans l'élection du pape à venir,
12:33ce sera déjà un symbole envoyé
12:35de diplomatie.
12:36Et on verra déjà
12:37si les yeux du Vatican
12:38sont tournés vers l'Asie,
12:39vers l'Afrique,
12:40vers l'Amérique
12:41ou vers l'Europe.
12:42Et ça, c'est fondamental.