Isabelle Rome, ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances, était l'invitée du 18.20 de franceinfo, le 15 février 2023.
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00:00 - Bonsoir à vous Isabelle Romme. - Bonsoir.
00:02 - Alors je rappelle que vous êtes ministre déléguée auprès de la première ministre.
00:05 Vous êtes en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances.
00:10 Isabelle Romme, 9 personnes noires sur 10 en France.
00:14 Alors on parle essentiellement de la France dite métropolitaine.
00:17 91% pour être précis disent être victimes de discrimination raciale dans leur vie de tous les jours.
00:24 C'est le résultat d'un sondage Ipsos commandé par le CRAN,
00:28 le conseil représentatif des associations noires qui a été dévoilé par France Info et Le Parisien Aujourd'hui en France.
00:34 Est-ce que Isabelle Romme, ce résultat, 9 sur 10, est-ce qu'il vous surprend ?
00:39 - Alors moi j'aimerais dire deux choses justement.
00:42 C'est que les discriminations, nous en avons largement conscience.
00:47 Et j'ai personnellement tenu justement à ce que le plan national de lutte contre le racisme et l'antisémitisme
00:54 que la première ministre a dévoilé il y a quelques jours, comporte justement une lutte contre les discriminations
01:00 parce que les discriminations existent.
01:03 Donc ça, c'est la première chose que je souhaitais dire.
01:06 Et la deuxième chose, c'est qu'il est important de mesurer justement les discriminations
01:12 et de mesurer aussi combien nos concitoyens, nos concitoyennes peuvent se sentir victimes.
01:18 Et ce travail, je tiens à le saluer parce qu'il est fait aussi avec Ipsos, qui est un institut tout à fait sérieux.
01:25 - Oui, avec un panel de 800 personnes concernées par ces discriminations.
01:29 - Et c'est vraiment dans cet axe-là que nous souhaitons aussi travailler
01:33 puisqu'il faut oser regarder la réalité en face, il faut aussi bien mesurer.
01:39 C'est pourquoi, dans le cadre du plan que nous venons de lancer,
01:42 ce plan national de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine,
01:48 sont lancées des enquêtes de victimation.
01:51 - Qu'est-ce que vous appelez des enquêtes de victimation ?
01:54 - Ce sont des enquêtes qui peuvent être lancées par exemple à l'école,
01:57 sur différentes sources qui peuvent justement provoquer un malaise.
02:04 Et donc nous avons souhaité qu'une entrée discrimination soit intégrée justement dans ces enquêtes
02:13 qui sont par exemple adressées aux enfants dans le cadre de l'éducation nationale.
02:18 Nous avons lancé le plan le 30, dès le 31 aussi l'Union Nationale du Sport à l'école
02:27 lançait aussi cette enquête de victimation avec un critère discrimination pour tous les collégiens.
02:33 C'est aussi enquête de victimation sur la vie étudiante et puis aussi,
02:38 un autre élément important, l'enquête de victimation lancée par le ministère de l'Intérieur.
02:42 C'est pour mesurer justement bien la perception que peuvent avoir nos concitoyens, nos concitoyennes
02:48 pour aussi agir ensuite le mieux possible.
02:51 J'aime bien dire qu'il faut bien mesurer pour bien agir.
02:53 - Vous diriez que nous manquons toutefois de données très précises.
02:57 Vous savez de quoi est-ce que nous parlons.
03:00 Constat préoccupant, Isabelle Rohm dans une France qui porte la notion d'égalité dans sa devise.
03:06 Qu'est-ce que vous dites aux personnes qui se disent victimes de discrimination ?
03:10 Elles doivent l'exprimer ? De quelle façon doivent-elles le manifester ?
03:14 - Oui, ça a été d'ailleurs un des constats que nous avons fait puisque ce plan était élaboré
03:18 avec plus de 30 associations.
03:20 Et nous pouvons dire qu'il y a à peu près 1,2 millions de personnes
03:24 qui sont victimes de discrimination, voire d'actes racistes ou antisémites sur notre territoire.
03:31 Et moi, ce que je veux dire, c'est qu'elles ne sont pas seules et qu'il faut justement les inciter à parler.
03:37 C'est toute l'action que nous menons dans le cadre de ce plan,
03:40 notamment pour faciliter par exemple le dépôt de plaintes.
03:45 Nous permettons par exemple maintenant de déposer plainte ailleurs que dans un commissariat ou une gendarmerie.
03:50 Par exemple dans une association, nous outillons aussi mieux les policiers et les gendarmes
03:55 pour qu'ils puissent plus facilement retenir ce phénomène de discrimination
04:01 ou de racisme, d'antisémitisme,
04:03 pour aussi que ces faits soient davantage poursuivis et donc sanctionnés.
04:07 L'enquête Ipso s'évoque, alors un racisme sociétal lié à la couleur de la peau, bon d'accord,
04:12 qui va de petites réflexions jusqu'aux vraies difficultés d'embauche.
04:17 C'est ce que témoignent les deux tiers des 800 personnes qui ont été sondées à ce sujet-là.
04:23 Vous savez, l'embauche, quelles sont les mesures prises, énergiques, efficaces,
04:27 que nous pourrions imaginer pour inverser la tendance ?
04:30 Alors là, nous allons en prendre un certain nombre.
04:32 Déjà, ce qu'il faut dire, c'est qu'il y a bien sûr un impératif de formation.
04:35 Ça, c'est vraiment, j'allais dire, le B.A.B.A.
04:38 C'est-à-dire qu'il faut vraiment former au sein des entreprises.
04:40 Il faut former aussi les agents de l'État.
04:43 100% des agents de l'État vont être formés.
04:46 Les éducateurs sportifs, les bénévoles des JO,
04:49 enfin c'est pour vous dire, bien sûr, les personnels éducatifs,
04:52 puisqu'il y a une obligation de formation tous les cinq ans pour les personnels.
04:56 Donc, formation, mais aussi, nous allons renforcer tout ce qui est testing.
05:01 Et quand je dis testing, ça veut dire que nous allons vraiment travailler avec les entreprises,
05:06 à la fois sur un domaine de formation...
05:08 - On a du mal avec le testing en France.
05:09 - Mais justement, nous voulons aller plus loin.
05:11 Donc, à la fois, bien sûr, il faut former,
05:13 mais aussi, il faut une clause de publication,
05:16 et puis ensuite, de la sanction.
05:17 Et tout cela, nous allons travailler avec les entreprises.
05:21 Il y a déjà des choses intéressantes qui se font,
05:23 par exemple, dans le domaine du logement.
05:25 Avec mon collègue Olivier Klein, le ministre du Logement,
05:28 nous avons signé une convention avec la FNAIM,
05:32 la Grande Fédération des Agents Immobiliers et SOS Racisme,
05:36 justement, pour accompagner cette mise en place de testing,
05:41 formation, comment ça se passe, et ensuite, comment il faut sanctionner.
05:45 Forcément, en fait, je pense qu'on ne peut bien agir
05:48 que si on a vraiment les deux axes, c'est éducation, formation et sanctions.
05:52 - Et sanctions, il faut les deux jambes.
05:55 - Il faut les deux jambes, sinon on est boiteux.
05:57 - L'enquête nous apprend aussi, Isabelle Rohm,
05:59 que les personnes noires sont toujours deux fois plus contrôlées par la police
06:04 que la population française dans son ensemble.
06:06 Alors, ça concerne, je rappelle, la France dite métropolitaine.
06:10 Ce contrôle au faciès existe toujours.
06:13 Il est régulièrement dénoncé, battu en brèche par les syndicats de police.
06:19 La police, qui est une institution républicaine,
06:21 est-ce qu'elle est suffisamment à l'image de la société ?
06:24 Est-ce qu'elle est suffisamment diverse ?
06:26 - Alors, déjà, ce que je vous disais tout à l'heure,
06:30 c'est que nous avons cette enquête de victimation
06:33 qui est lancée par le ministère de l'Intérieur,
06:35 donc qui va nous permettre aussi de mesurer davantage ce ressenti
06:40 auprès des populations.
06:41 Et puis aussi, nous avons aussi fait en sorte que les que tous les propos
06:48 caractères racistes, antisémites ou bien sûr les actes,
06:51 mais aussi tous les propos...
06:52 - Qui passent par les réseaux sociaux, faut-il le rappeler.
06:55 - Et soient aussi punis lorsqu'ils sont commis par des personnes,
07:02 des agents publics, donc a fortiori aussi des policiers ou des gendarmes,
07:06 même lorsqu'ils ne sont pas publics,
07:08 c'est-à-dire même lorsqu'ils sont tenus, je vais dire,
07:11 hors de la vue, hors des réseaux sociaux.
07:14 Donc en fait, je pense qu'il faut que tous les citoyens soient exemplaires.
07:20 Il faut bien sûr que nos agents publics,
07:23 mais j'allais dire pas seulement les policiers et les gendarmes,
07:25 tous les agents de l'État soient exemplaires.
07:27 Il nous faut être exemplaires.
07:28 - C'est tout de suite et maintenant, Isabelle Romme.
07:30 - Oui, tout à fait. Et c'est pourquoi d'ailleurs ce plan,
07:34 moi je tiens, puisque c'est moi qui en ai été pilote,
07:38 c'est-à-dire dans le cadre de l'élaboration, dès le 21 mars,
07:41 je ferai le premier suivi, donc avec toutes les associations
07:45 qui ont participé, en concertation aussi avec la Défenseur des droits,
07:49 la CNCDH, l'ARCOM, et puis aussi, bien sûr,
07:52 je ferai ça, il ne faut jamais l'oublier,
07:54 c'est aussi toute l'articulation sur tous les territoires.
07:57 Un plan national, c'est bien, mais il faut qu'il s'applique partout.
08:00 - Partout. National par définition.
08:01 Merci à vous, Isabelle Romme,
08:02 ministre déléguée en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes,
08:06 la diversité et de l'égalité des chances d'être venue ici dans le 18-20 France Info.
08:11 - Merci.